L’Encyclopédie/1re édition/JAIS ou JAYET

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 436).
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JAIS ou JAYET, s. m. gagates, lapis thracius, succinum nigrum. (Hist. nat. minéral.) On nomme ainsi une substance d’un noir luisant, opaque, seche, & qui a presque la dureté d’une pierre ; elle prend un poli aussi vif qu’une agate ; elle est legere au point de nager sur l’eau ; elle brûle dans le feu, répand une fumée fort épaisse, accompagnée d’une odeur semblable à celle du charbon de terre. Le jais est une substance résineuse ou bitumineuse, qui a pris de la solidité & de la consistence dans le sein de la terre ; elle est plus legere, plus pure & moins chargée des parties terrestres, que le charbon de terre ; & quand on la brûle, elle donne moins de cendres ou de terre que lui. Il y a en Angleterre une espece de charbon fossile très-pur, qu’on nomme kennel-coal, qu’il seroit aisé de confondre avec le jais. Cependant il y a des différences réelles, attendu que le jais se trouve par masses détachées, ou par morceaux de différentes grandeurs dans le sein de la terre, au lieu que le charbon de terre se trouve par couches ; joignez à cela que le jais s’allume beaucoup plus promptement que le charbon de terre.

Le jais se trouve dans beaucoup de parties de l’Europe, telles que l’Angleterre, l’Allemagne, & sur-tout dans le duché de Wirtemberg ; il y en a aussi en France dans le Dauphiné & dans les Pyrénées. Les morceaux de jais qu’on trouve sont toujours accompagnés d’une terre argilleuse, noirâtre ; ils ont une figure qui les fait ressembler à des morceaux de bois ; & on ne peut douter que, de même que le charbon de terre, le succin & tous les bitumes, le jais ne tire son origine de bois extrèmement résineux, qui ont été enfouis dans le sein de la terre par des révolutions arrivées au globe ; la partie ligneuse s’est décomposée & a été détruite dans la terre, de maniere qu’on ne trouve plus que la partie résineuse qui, en se durcissant, a conservé la forme du bois qui lui a servi comme de moule.

Tout le monde sait qu’on fait avec le jais un grand nombre de bijoux & d’ornemens, comme des boëtes, des bracelets, des colliers, des pendants d’oreilles, & des boutons pour le deuil ; on les taille pour ces usages comme on feroit des pierres. On contrefait le jais avec du verre noir, dont on forme de petits cylindres creux que l’on coupe & que l’on enfile les uns près des autres, pour faire des ajustemens de deuil pour les femmes, & on les nomme jais artificiel. Il y en a de noir & de blanc ; ce dernier n’est appellé jais que très-improprement. (—)