L’Encyclopédie/1re édition/JADE

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 432).
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JADE, s. m. (Hist. nat. Lithologie.) c’est une pierre, ou d’un verd pâle, ou olivâtre, ou grisâtre ; elle est d’une dureté extrème, au point qu’on ne peut la travailler qu’avec la poudre de diamant ; elle ne prend jamais un beau poli, mais sa surface paroît toûjours comme humide ou grasse ; elle donne des étincelles lorsqu’on la frappe avec de l’acier ; quand elle est brisée, son tissu intérieur est parfaitement semblable à celui du quartz ou du caillou ; elle n’a que très-peu de transparence, à-peu-près comme un morceau de cire blanche ; sa couleur, quoique toûjours verte, varie pour les nuances ; on en trouve d’un verd jaunâtre très-clair, & d’un verd foncé & terne comme celui de l’olive.

On a donné au jade les noms de pierre divine, à cause des propriétés merveilleuses que les Indiens lui ont attribuées ; ils croyoient que cette pierre appliquée sur les reins étoit très-propre à en soulager les douleurs, & faisoit passer le sable & la pierre par les urines ; ils la regardoient aussi comme un remede souverain contre l’épilepsie, & étoient persuadés que de la porter en amulette c’étoit un préservatif contre les morsures des bêtes venimeuses. On a un traité imprimé sous le nom de pierre divine, l’on y trouvera les détails des propriétés prétendues qu’on lui a attribuées. Il y a peu de tems que cette pierre étoit fort en vogue à Paris, ses grandes vertus la faisoient rechercher avec empressement par les dames, & elles en payoient très-cherement les plus petits morceaux ; mais il paroît que cet enthousiasme populaire est actuellement passé, & que le jade ou la pierre divine a perdu la réputation qu’on lui avoit si légerement accordée.

On a donné aussi au jade le nom de pierre néphrétique, mais il ne faut point le confondre avec d’autres pierres, à qui quelques auteurs ont aussi donné ce nom. Voyez Pierre Néphrétique.

Les Turcs & les Polonois font avec le jade des manches de sabres & de coutelas, ainsi que d’autres ornemens.

Quelques auteurs donnent au jade le nom de pierre des Amazones, parce qu’on assure qu’il se trouve sur les bords de la riviere des Amazones, dans l’Amérique méridionale ; quelques naturalistes ont prétendu que les pierres qu’on y trouve ne sont point la même chose que le vrai jade qui vient des Indes orientales, & qui se rencontre dans l’île de Sumatra ; mais M. de la Condamine assure que la pierre des Amazones ne differe en rien du jade oriental : elle se trouve chez les Topayos, nation indienne établie sur les bords de la riviere des Amazones, plus aisément que par-tout ailleurs.

Les morceaux de jade qu’on trouve en Amérique sont très-artistement travaillés, & paroissent l’avoir été par les anciens Américains ; on en rencontre des morceaux qui sont cylindriques, & percés depuis un bout jusqu’à l’autre ; cela paroît d’autant plus surprenant, que la pierre est extrèmement dure, & que ces peuples ignoroient l’usage du touret & du fer ; cela a donné lieu de croire que cette pierre n’étoit que le limon de la riviere des Amazones, à qui on avoit donné différentes formes en le paitrissant quand il étoit mou, & qu’il s’étoit ensuite durci à l’air, fable que l’expérience a suffisamment réfutée. Voyez le voyage de la riviere des Amazones, par M. de la Condamine, page 140. & suiv. édit. in-8°.

On trouve aussi des morceaux de jade creusés, & taillés en vases & en figures différentes ; d’autres sont en plaques, sur lesquelles on a gravé des figures d’animaux pour en faire des talismans, &c.

Quelques naturalistes regardent le jade comme une espece de jaspe ; mais il semble en différer par sa dureté, qui est beaucoup plus considérable que celle du jaspe ; outre cela, il a plus de transparence que le jaspe, il ne prend point le poli comme lui, puisque, comme nous l’avons déja remarqué, le jade a toujours un air gras à sa surface. (—)

Jade, (Mat. med.) Voyez Pierre Néphrétique.