L’Encyclopédie/1re édition/HYPOCISTE

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 409).

HYPOCISTE, s. m. (Botan.) la plante dont on tire depuis si long-tems le suc hypociste, est appellée par les Botanistes hypocistis. Elle naît sur les racines ou collets de différentes especes de cistes, & ressemble par sa forme à l’orobanche.

Sa tige est grosse de quatre ou cinq lignes dans sa partie inférieure, d’un ou deux pouces à son extrémité supérieure, & elle en a trois ou quatre de hauteur. Elle est charnue, pleine de suc, facile à rompre, blanchâtre, purpurine, ou de couleur jaunâtre, d’un goût amer & fort astringent, couverte de petites feuilles ou écailles épaisses, longues d’un demi-pouce, larges de deux ou trois lignes, terminées en pointe mousse, de différente couleur dans les différentes especes. Elle porte plusieurs fleurs à son sommet, garnies & enveloppées de beaucoup de petites feuilles épaisses, ou d’écailles semblables aux précédentes.

La fleur ressemble à un calice de la fleur du grenadier ; elle est d’une seule piece, en cloche, longue de sept ou huit lignes ; sa partie inférieure peut être regardée comme le calice ; la supérieure est divisée en cinq quartiers, longs de deux lignes, terminés en un globule cannelé, dont les cannelures en s’ouvrant dans le tems convenable, jettent une poussiere très-fine ; ainsi cette partie tient lieu de pistil, d’étamines, & de sommet.

La partie inférieure de la fleur grossit peu-à-peu, jusqu’à un demi-pouce d’épaisseur, & devient un fruit arrondi, de même couleur que la fleur. Il est mou, partagé intérieurement comme par des rayons en six ou huit parties, plein d’un suc visqueux, gluant, limpide, d’un goût fade, & de plusieurs graines très-menues & poudreuses. Ce globule cannelé qui termine le pistil, demeure toûjours attaché à ce fruit qui est sphérique. On enleve facilement cette tige des racines du ciste sur lequel elle naît ; alors il reste sur la racine une petite fosse lisse, sans aucun vestige de fibres.

M. de Tournefort a observé dans l’île de Crete des especes d’hypociste différentes par la couleur, comme on peut le voir dans le corollaire de ses élémens de Botanique ; il n’y avoit que l’hypociste à fleurs jaunes qui étoit odorant, & qui eût l’odeur du muguet ; les autres especes étoient sans odeur.

Il n’est pas facile d’expliquer de quelle maniere l’hypociste se multiplie : cette plante ne croît jamais que sur les racines des arbustes appellés des cistes, qui se plaisent dans les landes les plus seches des pays chauds. Environ deux pouces au-dessus du collet de ces arbustes, il sort en maniere d’œilleton, une plante bien différente du ciste ; elle est charnue comme une asperge, accompagnée de quelques écailles au lieu de feuilles, & garnie d’un bouquet de fleurs en cloche, qui laissent chacune un fruit gros comme une noisette, assez rond, charnu, rempli de semences menues, couvertes d’une humeur gluante, qui se desseche lorsqu’elles sont mûres, mais qui revient quand on les humecte. Comme cette plante pousse au-dessus du collet de la racine, qui est quelquefois couvert d’environ un demi pié de terre, il semble qu’il n’y a pas d’autre chemin pour y faire passer les graines, que les crevasses de la terre ; ces crevasses en été sont fort communes dans les landes des pays chauds, & se resserrent aux premieres pluies ; ainsi la glue dont elles sont enveloppées, s’humectant peu-à-peu, ne les colle pas seulement contre les racines du ciste, mais elle les fait éclorre, & leur sert de premiere nourriture. C’est là l’explication que donne M. de Tournefort de l’origine & de la multiplication de l’hypociste. (D. J.)