L’Encyclopédie/1re édition/FRUITERIE

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FRUITERIE, s. f. (Econ. rustiq.) est le lieu où l’on serre les fruits, bien différent de la serre qui n’est employée qu’à recevoir pendant l’hyver des orangers, des myrthes, & autres arbres délicats.

Une fruiterie doit être bien fabriquée, bien percée, élevée d’environ 10 à 12 piés, éloignée du foin, de la paille, du fumier, du fourrage, des amas de linge sale, exposée au midi ou au levant, avec des murs de deux piés d’épaisseur, des doubles chassis, & des portes ; il y doit entrer peu de jour, & seulement dans la belle saison, pour purifier l’air du dedans ; il faut bien calfeutrer les fenêtres & les portes durant l’hyver, en sorte que l’air étranger ne détruise point l’air tempéré de la fruiterie ; s’il y geloit malgré toutes ces précautions, on couvriroit les fruits avec des couvertures de lits, de matelats, ou on les porteroit dans une cave si le froid étoit long ; pour éviter d’allumer du feu, qui seroit très-nuisible à la conservation des fruits.

Les fruiteries seront entourées de tablettes de 18 pouces de large, & d’un pié de distance, un peu en pente, avec des tringles dans leur bord, qui retiennent les fruits : on les rangera sur du sable fin, sur de la mousse seche, ou sur des feuilles d’arbre plûtôt que sur de la paille. Il est essentiel de mettre des sourricieres, ou de laisser des entrées pour les chats, & de faire de plus une visite journaliere pour ôter les fruits pourris & emporter ceux qui sont mûrs.

Il est bon qu’il y ait dans toute fruiterie une table qui occupe le milieu de la place ; cette commodité est nécessaire pour dresser les diverses corbeilles de fruits qu’on veut servir.

Les pêches, pavies, brugnons, abricots, seront rangés deux ou trois jours avant d’être mangés, sur des feuilles de verjus bien seches, ou sur de la mousse d’arbre, & assises sur l’endroit de leurs queues.

Les poires d’été se rangeront de même sur l’œil, la queue en-haut.

Les poires d’hyver ne veulent aucun air ; les pommes se mettent dans toute sorte de situation ; & pour qu’elles ne sentent point la paille ou le foin, on les rangera sur du bois.

Les abricots & les prunes resteront dans les mêmes corbeilles où ils ont été mis lors de la cueillée ; de peur de les défleurir, on les entourera de feuilles d’ortie, & on les laissera rafraîchir dans la fruiterie.

Les figues seront rangées sur le côté, & jamais sur l’œil, où il doit y avoir une larme de syrop ; on les étendra sur des feuilles, & on ne les cueillera jamais en plein soleil.

Les raisins & muscats qu’il faut cueillir un peu verds, seront suspendus au planche d’un lieu sec.

Les nefles & les cormes se mettent sur la paille pour mûrir.

L’expérience a appris que quand les pommes sont gelées, elles ne veulent point être approchées du feu ni maniées ; elles dégeleront d’elles-mêmes, & reprendront le goût que la gelée leur avoit fait perdre, quoique la Quintinie (page 221. tome II.) dise le contraire.

Au reste la cave ni le grenier ne sont point propres à faire une fruiterie bien entendue : la cave, à cause d’un goût moisi, & d’une chaleur humide qui pourrit tout ; & le grenier, à cause de la trop grande chaleur en été, & en hyver à cause du froid ou des pluies. (K)