L’Encyclopédie/1re édition/EUSTATHIENS

◄  EUSTACHE
EUSTYLE  ►

EUSTATHIENS, s. m. plur. (Hist. ecclés.) est un nom que l’on donna aux catholiques d’Antioche, dans le quatrieme siecle, à l’occasion du refus qu’ils firent de ne recevoir aucun autre évêque que Saint Eustathe, que les Ariens avoient déposé.

Ce nom leur fut donné pendant l’épiscopat de Paulin, que les Ariens substituerent à S. Eustathe vers l’an 330, lorsqu’ils commencerent à tenir des assemblées particulieres. Vers l’an 350, Léontius de Phrygie appellé l’Eunuque, qui étoit Arien, & qui fut installé sur le siége d’Antioche, desira que les Eustathiens fissent leur service dans son église ; ce qui fut accepté : & ainsi l’église d’Antioche servit indifféremment aux Ariens & aux Catholiques.

Ce que nous venons de dire donna lieu à deux établissemens, qui ont toûjours subsisté depuis dans l’Eglise. Le premier fut la psalmodie à deux chœurs ; cependant M. Baillet croit que s’ils instituerent la psalmodie à deux chœurs, ce fut à deux chœurs de Catholiques, & non pas par maniere de réponse au chœur des Ariens. Le second fut la doxologie, Gloria Patri & Filio, & Spiritui sancto. Voyez Doxologie.

Cette conduite qui sembloit renfermer une espece de communion avec les Ariens, choqua beaucoup de Catholiques, qui commencerent à tenir des assemblées particulieres, & formerent ainsi le schisme d’Antioche.

S. Flavien évêque d’Antioche en 381, & Alexandre un de ses successeurs en 482, procurerent entre les Eustathiens & le corps de l’église d’Antioche, une réunion dont Théodoret a raconté les circonstances. Dict. de Trév. & Chambers. (G)

Eustathiens, est aussi le nom donné à des hérétiques qui s’éleverent dans le quatrieme siecle, & qui tirerent leur nom d’un moine appellé Eustathius, si follement entêté de son état, qu’il condamnoit tous les autres états de vie. Baronius croit que c’est le même qu’un moine d’Arménie que S. Epiphane appelle Eutactus.

Les erreurs & les pratiques de cet hérésiarque que Socrate, Sozomene, & M. Fleury sur leur autorité, ont confondu avec Eustathe, évêque de Sébaste, qui vivoit aussi dans le quatrieme siecle, sont rapportées à ces chefs par les peres du concile de Gangres en Paphlagonie, tenu l’an 376. Eustathe & ses sectateurs y sont accusés ; 1°. de condamner le mariage, & de séparer les femmes d’avec leurs maris ; 2°. de quitter les assemblées publiques de l’Eglise, pour en tenir de particulieres ; 3°. de se reserver les oblations à eux seuls ; 4°. de séparer les serviteurs de leurs maîtres & les enfans de leurs parens, sous prétexte de leur faire mener une vie plus austere ; 5°. de permettre aux femmes de s’habiller en hommes ; 6°. de mépriser les jeûnes de l’Eglise, & d’en pratiquer d’autres à leur fantaisie, même le jour du dimanche ; 7°. de croire qu’il étoit défendu en tout tems de manger de la viande ; 8°. de rejetter les oblations des prêtres mariés ; 9°. de mépriser les chapelles bâties en l’honneur des martyrs, leurs tombeaux, & les assemblées pieuses qu’y tenoient les fideles ; 10°. de soûtenir qu’on ne peut être sauvé sans renoncer effectivement à la possession de tous ses biens. Le concile fit contre ces erreurs & superstitions, vingt canons qui ont été insérés dans le code des canons de l’Eglise universelle. Dupin, Bibliot. des auteurs ecclésiast. du quatrieme siecle. Fleury, Hist. ecclésiast. tom. IV. liv. XVII. tit. xxxv. (G)