L’Encyclopédie/1re édition/ESCAVESSADE

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ESCAVESSADE, s. f. (Manege.) expression qui signifie proprement une secousse des longes d’un cavesson quelconque qu’un cavalier tient dans ses mains lorsqu’il est à cheval, & par le moyen desquelles il prétend relever l’animal, le placer, le retenir, &c. ou une secousse de la longe seule placée à l’anneau du milieu de ce même cavesson, & donnée par exemple, par le piqueur ou le palefrenier à pié, dans le tems qu’un cheval trotant à la longe sur les cercles, hâte trop son action & veut passer à celle du galop. Voyez Longe.

L’escavessade est un châtiment, puisqu’il en résulte un coup plus ou moins fort du cavesson sur le nez du cheval.

Nous avons banni cet appareil d’instrumens plus ou moins cruels, ces cavessons de chaînes, ces cavessons retords, ces sequettes, d’une, de deux, ou de trois pieces, & nous ne faisons usage dans de certains cas que du simple cavesson brisé, lequel est composé de trois pieces unies & de fer, repliées de maniere qu’assemblées par charniere, elles embrassent précisément le nez de l’animal. Ces trois pieces sont fixées sur cette partie par le moyen de deux montans de cuir ausquels elle sont suspendues, par une soûgorge, un frontail, & un petit bout de cuir, qui avec elles achevent de former postérieurement la muserolle. De chacune de ces pieces part un anneau de fer ; j’ai déjà parlé de l’utilité de celui du milieu : à l’égard des deux autres, ou de chacun de ceux qui sont dans les côtés, on y passe des rênes, lorsqu’on ne veut pas confier la bouche de son cheval au palefrenier que l’on charge de le promener, ou deux longes de cordes tenues par deux hommes différens pour se rendre maîtres de l’animal, sans s’exposer à lui offenser les barres ; & souvent encore on a la précaution de garnir ce cavesson & de le rembourrer dans la crainte de faire une impression trop vive, & de blesser ou d’entamer la partie sur laquelle il repose.

Le cavesson dont nous nous servons pour arrêter & pour maintenir un cheval dans les piliers est très fort, & uniquement fait avec du cuir. Quelques-uns l’appellent cavessine. Il est pareillement composé d’un dessus de tête, d’une soûgorge, d’un frontail, de deux montans & d’une muserolle, aux deux côtés de laquelle sont fermement arrêtés deux anneaux de fer destinés à recevoir les longes qui s’y bouclent, par celle de leurs extrémités qui se trouve garnie d’un cuir, tandis que l’autre est engagé dans le trou pratiqué dans les piliers. Voyez Piliers.

Tous les écuyers étrangers vantent unanimement les effets admirables du cavesson ; selon eux, il n’est que ce moyen de retenir, de relever, d’allégerir, d’assouplir le cheval, d’assurer sa tête & de le dresser en un mot, parfaitement & à toutes sortes d’airs sans offenser sa bouche ; en conséquence, ils ne cessent de nous reprocher l’obstination avec laquelle ils croyent que nous affectons de ne pas vouloir les imiter en ce point. Nous n’avons d’autre réponse à leur faire, si ce n’est, que si par le secours de la bride seule nous parvenons à conduire l’animal à un degré de perfection qui ne le cede point à celui où ils le mettent eux-mêmes, notre méthode doit incontestablement obtenir la préférence. Ainsi il seroit superflu de nous perdre les uns & les autres dans de vains raisonnemens, & une question que l’on peut décider par les faits cesse bientôt d’en être une.

Je sai qu’on pourroit nous opposer l’autorité du fameux duc de Newkastle ; mais quelque respectable qu’elle soit, elle ne sauroit l’emporter sur l’évidence d’une preuve aussi convaincante ; d’ailleurs, il n’est pas douteux qu’il est très-difficile que des mains habituées dans des maneges à n’agir qu’avec une force considérable, & à opérer sur des chevaux de maniere à les précipiter dans une contrainte, telle que celle dont les estampes qui ornent l’ouvrage de cet auteur célebre nous présentent une image fidelle, puissent revenir à ce sentiment fin, subtil & délicat, qui distinguera toujours le véritable homme de cheval de cette multitude innombrable de prétendus praticiens qui n’en ont que la forme & l’apparence. (e)