L’Encyclopédie/1re édition/DISTANCE

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DISTANCE, s. f. (Géom. & Physiq.) ce mot signifie proprement le plus court chemin qu’il y a entre deux points, deux objets, &c. Donc la distance d’un point à un point, est toûjours une ligne droite tirée entre ces deux points, puisque la ligne droite est la plus courte qu’on puisse mener d’un point à un autre. Par la même raison la distance d’un point à une ligne, est une perpendiculaire menée de ce point à cette ligne.

On mesure les distances en Géométrie par le moyen de la chaîne, de la toise, &c. V. Chaine, & c.

On découvre les distances inaccessibles en prenant d’abord une longueur que l’on appelle base, & observant ensuite la grandeur des angles, que font les rayons visuels tirés des extrémités de cette base aux extrémités de ces distances inaccessibles. Voyez Planchette, Graphometre, &c. (O)

Distance se dit aussi d’un intervalle de tems & de qualité. Ainsi l’on dit la distance de la création du monde à la naissance de J. C. est de 4000 ans. La distance entre le Créateur & la créature est infinie.

Distance apparente des objets. La maniere dont nous en jugeons, est le sujet d’une grande question parmi les Philosophes & les Opticiens. Il y a six choses qui concourent à nous mettre à portée de découvrir la distance des objets, ou six moyens dont notre ame se sert pour former ses jugemens à cet égard. Le premier moyen consiste dans cette configuration de l’œil, qui est nécessaire pour voir distinctement à diverses distances.

Il ne peut y avoit de vision distincte, à moins que les rayons de lumiere qui sont renvoyés de tous les points de l’objet apperçu, ne soient brisés par les humeurs de l’œil, & réunis en autant de points correspondans sur la rétine. Or la même conformation de l’œil n’est pas capable de produire cet effet pour toutes les distances ; cette conformation doit être changée, & ce changement nous étant sensible, parce qu’il dépend de la volonté de notre ame, qui en regle le degré, nous met à portée en quelque façon de juger des distances, même avec un œil seul. Ainsi lorsque je regarde un objet, par exemple à la distance de sept pouces, je conçois cette distance par la disposition de l’œil, qui m’est non-seulement sensible à ce degré d’éloignement, mais qui est même en quelque sorte incommode ; & lorsque je regarde le même objet à la distance de 27 pouces, ce degré d’éloignement m’est encore connu, parce que la disposition nécessaire de l’œil m’est pareillement sensible, quoiqu’elle cesse d’être incommode. L’on voit par-là comment avec un seul œil nous pouvons connoître les plus petites distances, par le moyen du changement de configuration qui lui arrive. Mais comme ce changement de conformation a ses bornes, au-delà desquelles il ne sauroit s’étendre, il ne peut nous être d’aucun secours pour juger de la distance des objets placés hors des limites de la vision distincte, qui dans nos yeux ne s’étendent pas au-delà de 7 à 27 pouces. Cependant comme l’objet paroît alors plus ou moins confus, selon qu’il est plus ou moins éloigné de ces limites, cette confusion supplée au défaut du changement sensible de configuration, en aidant l’ame à connoître la distance de l’objet qu’elle juge être placé plus près ou plus loin, selon que la confusion est plus ou moins grande. Cette confusion elle-même a encore ses bornes, au-delà desquelles elle ne sauroit être d’aucun secours pour nous aider à connoître l’éloignement où se trouve l’objet que nous voyons confus ; car lorsqu’un objet est placé à une certaine distance de l’œil, & que le diametre de la prunelle n’a plus aucune proportion sensible avec cet objet, les rayons de lumiere qui partent d’un des points de l’objet, & qui passent par la prunelle, sont si peu divergens qu’on peut les regarder en quelque façon, sinon mathématiquement, au moins dans un sens physique, comme paralleles. D’où il s’ensuit que la peinture qui se fera de cet objet sur la rétine, ne paroîtra pas à l’œil plus confuse, quoique cet objet se trouve placé à une beaucoup plus grande distance. Les auteurs ne conviennent point entr’eux quel est ce degré d’éloignement, avec lequel le diametre de la prunelle n’a plus de rapport sensible.

Le second moyen plus général, & ordinairement le plus sûr que nous ayons pour juger de la distance des objets, c’est l’angle formé par les axes optiques sur cette partie de l’objet sur laquelle nos yeux sont fixés.

Nos deux yeux font le même effet que les stations dont les Géometres se servent pour mesurer les distances. C’est-là la raison pour laquelle ceux qui n’ont qu’un œil se trompent si souvent, en versant quelque liqueur dans un verre, en enfilant une aiguille, & en faisant d’autres actions semblables qui demandent une notion exacte de la distance.

Le troisieme moyen consiste dans la grandeur apparente des objets, ou dans la grandeur de l’image peinte sur la rétine. Le diametre de ces images diminue toûjours proportionnellement à l’augmentation de la distance des objets qu’elles représentent ; d’où il nous est facile de juger par le changement qui arrive à ces images, de la distance des objets qu’elles représentent, sur-tout si nous avons d’ailleurs une connoissance de leur grandeur. C’est pour cette raison que les Peintres diminuent toûjours dans leurs tableaux la grandeur des objets à proportion de l’éloignement où ils veulent les faire paroître. Mais toutes les fois que nous ignorons la véritable grandeur des corps, nous ne pouvons jamais former aucun jugement de leurs distances par le secours de leur grandeur apparente, ou par la grandeur de leurs images sur la retine. C’est ce qui fait que les étoiles & les planetes nous paroissent toûjours au même degré d’éloignement, quoiqu’il soit certain qu’il y en a qui sont beaucoup plus proches que les autres. Il y a donc une infinité d’objets dont nous ne pouvons jamais connoître la distance, à cause de l’ignorance où nous sommes touchant leur véritable grandeur.

Le quatrieme moyen, c’est la force avec laquelle les couleurs des objets agissent sur nos yeux. Si nous sommes assûrés que deux objets sont d’une même couleur, & que l’un paroisse plus vif & moins confus que l’autre, nous jugeons par expérience que l’objet qui paroît d’une couleur plus vive, est plus proche que l’autre. Quelques-uns prétendent que la force avec laquelle la couleur des objets agit sur nos yeux doit être en raison réciproque doublée de leurs distances, parce que leur densité ou la force de la lumiere décroît toûjours selon cette raison. En effet, la densité ou la force de la lumiere est toûjours en raison réciproque doublée des distances ; car puisqu’elle se répand sphériquement, comme des rayons tirés du centre à la circonférence, sa force à une distance donnée du centre de son activité doit être proportionnelle à la densité de ses rayons à cette distance. Mais il ne s’ensuit pas de-là que la force avec laquelle les objets agissent sur notre vûe décroisse de même selon cette proportion : la raison en est sensible ; car comme la force de la lumiere diminue par la distance de l’objet d’où elle part, de même la grandeur de l’image sur la rétine décroît aussi selon la même proportion ; & par conséquent cette image sera aussi vive & agira aussi fortement sur la rétine quand l’objet sera éloigné que quand il sera proche. D’où il s’ensuit que l’objet paroîtra à toute sorte de distance aussi clair & aussi lumineux, à moins qu’il n’y ait quelqu’autre cause qui y apporte du changement. Pour connoître cette cause, nous n’avons qu’à laisser entrer dans une chambre obscure par un petit trou un rayon du soleil ; car ce rayon ou ce faisceau de rayons paroissant dans toutes les positions de l’œil comme une ligne de lumiere, il est évident que toute la lumiere ne continue pas son chemin selon la ligne droite, mais qu’il y en a une partie qui est réflechie en tous sens de tous les points du milieu qu’elle traverse, & que c’est par le moyen de ces rayons réflechis que le faisceau de lumiere est visible. Par conséquent ce même faisceau de lumiere, à cause de la diminution continuelle qu’il souffre, doit devenir continuellement de plus foible en plus foible, & cela proportionnellement à l’opacité du milieu à-travers duquel il passe : si l’air est pur & serain, il y aura peu de lumiere de réflechie, & il s’en transmettra une moins grande quantité : mais il n’est jamais si pur qu’il n’y ait toûjours quelque partie de la lumiere réflechie ou interrompue dans son trajet, & par conséquent sa force doit toûjours décroître, à mesure que la distance de l’objet d’où elle part augmente. Puis donc que la force de la lumiere décroît ainsi continuellement à proportion que la distance de l’objet d’où elle part augmente, il s’ensuit que les objets doivent toûjours paroître moins lumineux & plus teints de la couleur du milieu à travers desquels ils sont apperçus, à proportion de l’éloignement où ils seront par rapport à nos yeux. Lors donc que nous savons d’ailleurs que deux objets sont de la même couleur, si l’un paroît d’une couleur plus vive & plus frappante que l’autre, nous avons appris par l’expérience à conclure que celui qui paroît d’une couleur plus vive est le plus proche ; & c’est par cette raison que les corps lumineux ou très-éclairés paroissent toûjours plus proches qu’ils ne le sont en effet. De-là il est aisé de rendre raison pourquoi une chambre paroît plus petite après que ses murs ont été blanchis, & pourquoi pareillement les collines paroissent moins grandes & moins élevées lorsqu’elles sont couvertes de neige. Dans ces cas & dans d’autres de cette nature, la vivacité & la force de la couleur font paroître ces objets plus proches, d’où nous concluons qu’ils sont plus petits ; car nous jugeons toûjours de l’étendue & de la grandeur des corps, par la comparaison que nous faisons de leur grandeur apparente avec leurs distances. Par la même raison on explique encore pourquoi le feu & la flamme paroissent si petits lorsqu’on les voit à une grande distance pendant la nuit. La prunelle étant alors fort dilatée, laisse passer une plus grande quantité de rayons de lumiere dans l’œil, & cette lumiere agissant plus fortement sur la rétine, doit faire paroître l’objet plus proche, d’où l’on juge qu’il est plus petit. Comme les objets brillans & lumineux paroissent plus proches & plus petits qu’ils ne sont en effet, ceux au contraire qui sont obscurs, & ceux qui ne sont que foiblement éclairés, paroissent toûjours plus éloignés & plus grands à raison de la foiblesse & de l’obscurité de leur couleur. C’est ce qu’on remarque particulierement lorsqu’on regarde des objets obscurs à l’entrée de la nuit ; car ces objets paroissent alors toûjours plus éloignés & plus grands, que lorsqu’on les voit pendant le jour. C’est aussi par la même raison que la distance apparente & la grandeur des objets paroissent augmentées, lorsqu’on les voit à-travers un air chargé de brouillards ; car une plus grande quantité de lumiere étant interceptée, ou irrégulierement brisée dans son passage à-travers le brouillard, il en entrera moins par la prunelle, & elle agira par conséquent d’une maniere plus foible sur la rétine ; donc l’objet sera réputé à une plus grande distance & plus grand qu’il n’est. L’erreur de la vûe qui provient de cette cause est si grande, qu’un animal éloigné a été quelquefois pris pour un animal beaucoup plus gros étant vû par un tems de brouillard. Cette opacité de l’atmosphere, qui empêche une partie de la lumiere de parvenir jusqu’à l’œil, est encore la raison pourquoi le soleil, la lune, & les planetes paroissent plus foiblement lorsqu’elles sont proches de l’horison, & qu’elles deviennent plus brillantes par rapport à nous, à mesure qu’elles s’élevent ; parce que les rayons qui en partent ont une plus grande étendue d’air à traverser, & rencontrent plus de vapeurs lorsque ces astres sont proches de l’horison, que lorsqu’ils sont dans une plus grande élévation. Il semble encore que ce soit là une des raisons pourquoi ces corps paroissent toûjours plus grands à mesure qu’ils approchent de l’horison. Car puisqu’ils paroissent plus foibles ou moins brillans, ils paroîtront aussi à une plus grande distance ; d’où il s’ensuit qu’ils doivent paroître plus grands, par la raison que les objets paroissent tels lorsque l’air est chargé de brouillards. Il semble que nous pouvons avec assûrance conclure de tout ce qui vient d’être dit, que les couleurs apparentes des objets nous servent beaucoup pour nous faire juger de leurs distances, lorsque nous connoissons d’ailleurs la force & la vivacité de leur couleur à toute autre distance donnée. C’est en suivant ce principe, que les habiles peintres représentent sur un même plan des objets à diverses distances, en augmentant ou en diminuant la vivacité des couleurs, selon qu’ils ont dessein de les faire paroître plus proches ou plus éloignés. Il est bien vrai que la prunelle par la vertu qu’elle a de se contracter, se met toûjours dans un degré de dilatation proportionné à la vivacité ou à la force de la lumiere ; d’où l’on pourroit penser qu’il nous est impossible de juger de la distance des objets par le secours de leur couleur apparente, ou par la force avec laquelle elles agissent sur nos yeux. Mais il est aisé de répondre à cela, que l’état de dilatation ou de contraction de la prunelle nous est connu, parce qu’il dépend du mouvement de l’uvée que nous sentons, & qui procede du différent degré de force avec lequel la lumiere agit sur nos yeux, qui par conséquent doit toûjours être senti. Il s’ensuit de-là que quoique la prunelle par sa contraction ne laisse pas entrer dans l’œil une plus grande quantité de rayons, lorsque l’objet est proche que lorsqu’il est éloigné, nous connoissons cependant la force de la lumiere qui en part, parce que nous sentons que la prunelle est alors contractée. D’ailleurs lorsque la prunelle est dans un état de contraction, nous voyons plus distinctement que lorsqu’elle est dilatée, ce qui nous aide encore à juger de la distance des objets.

Le cinquieme moyen consiste dans la diverse apparence des petites parties des objets. Lorsque ces parties paroissent distinctes, nous jugeons que l’objet est proche ; mais lorsqu’elles paroissent confuses, ou qu’elles ne paroissent pas du tout, nous estimons qu’il est à une grande distance. Pour entendre cela il faut considérer que les diametres des images qui se peignent sur la rétine, diminuent toûjours à proportion que la distance des objets qu’elles représentent augmente ; & par conséquent un objet peut disparoître lorsqu’on le placera à une si grande distance de nos yeux, que la peinture qu’il fera sur la rétine, soit insensible à cause de sa petitesse ; & plus l’objet sera petit, plûtôt il cessera d’être visible : de-là vient que les petites parties d’un objet ne seront pas apperçues à toutes les distances ; car la partie la moins sensible sera toûjours plus petite ou plus grande, proportionnellement à la distance plus ou moins grande de l’objet même. Ainsi la plus petite partie visible à la distance d’un pié, deviendra invisible à celle de deux piés ; la plus petite partie visible à deux piés, disparoîtra à trois, & ainsi de toute autre distance à l’infini. Il résulte évidemment de ce que nous venons de dire, que lorsque l’œil peut voir distinctement les petites parties d’un objet, nous devons juger qu’il est plus proche qu’un autre dont nous ne voyons point du tout les mêmes petites parties, ou dont nous ne les voyons que confusément.

Enfin le sixieme & dernier moyen consiste en ce que l’œil ne représente pas à notre ame un seul objet, mais qu’il nous fait voir en même tems tous ceux qui sont placés entre nous & l’objet principal dont nous considérons la distance. Par exemple, lorsque nous regardons quelqu’objet éloigné, tel qu’un clocher, nous voyons pour l’ordinaire plusieurs terres & maisons entre nous & lui ; or comme nous jugeons de la distance de ces terres & de ces bâtimens, & que nous apperçevons en même tems le clocher au-delà de tous ces objets, nous concluons qu’il est beaucoup plus éloigné, & même qu’il est bien plus grand que lorsque nous le voyons seul & sans l’interposition d’aucun autre objet visible. Il est cependant certain que l’image de ce clocher qui est peinte sur la rétine, est toûjours la même dans l’un & dans l’autre cas, pourvû qu’il soit à une égale distance ; d’où l’on voit comment nous connoissons la grandeur des objets par leur distance apparente, & comment les corps placés entre nous & un objet, influent dans le jugement que nous portons au sujet de son éloignement. Il en est à-peu-près de ce jugement comme de celui que nous formons sur la grandeur de notre durée, par le souvenir confus de tout ce que nous avons fait & de toutes les pensées que nous avons eues, ou, ce qui est la même chose, de la grandeur & l’étendue du tems qui s’est écoule depuis telle action ; car ce sont ces pensées & ces actions qui mettent notre ame à portée de juger du tems passé ou de l’étendue d’une partie de notre durée : ou plûtôt le souvenir confus de toutes ces pensées & de toutes ces actions, est la même chose que le jugement de notre durée, comme la vûe confuse des champs & des autres objets qui sont placés entre nous & le clocher, est la même chose que le jugement que nous formons sur le clocher. Voyez essais & observ. de Medec. de la soc. d’Edimb. tome IV. p. 323 & suiv. Article de M. Formey.

Ajoûtons à cet article, d’après plusieurs philosophes, que quoique le sens de la vûe nous serve à juger des distances, cependant nous n’en aurions jamais eu d’idée par ce sens seul, sans le secours de celui du toucher. Voyez l’article Aveugle, la lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voyent, & les articles Vision, Toucher, & c. Voyez aussi l’essai de M. Jurin sur la vision distincte & non distincte, imprimé à la fin de l’Optique de M. Smith.

Distance accourcie, distantia curtata, signifie en Astronomie, la distance d’une planete au soleil réduite au plan de l’écliptique, ou l’intervalle qui est entre le soleil & le point du plan de l’écliptique où tombe la perpendiculaire menée de la planete sur ce plan. On l’appelle ainsi, parce que la distance réelle d’une planete au soleil est plus grande que sa distance réduite au plan de l’écliptique, puisque la premiere de ces distances est l’hypothénuse ou le grand côté d’un triangle rectangle, dont la distance accourcie est un des petits côtés. Voyez Lieu & Distance. (O)

Distance, (Art milit.) c’est dans l’ordre de bataille, l’espace ou l’intervalle qu’on laisse entre les corps de troupes dont l’armée est composée, ou qui sont rangés en ordre de bataille ou en ligne. Voyez Armée. Les rangs des différens corps de troupes doivent avoir des distances reglées. M. le maréchal de Puysegur donne douze piés à la distance d’un rang à l’autre dans le bataillon ; il prétend que c’est celle qui convient le mieux pour les marches & les différens mouvemens du bataillon. En bataille les files n’ont point de distance entr’elles, il faut au contraire qu’elles se touchent pour être plus en force : on leur donne deux piés d’épaisseur, pour l’espace occupé par le soldat. Dès que les distances des rangs & des files en bataille sont reglées, « il faut (dit l’illustre maréchal que nous venons de citer) que celle des files & des rangs en marchant, aussi-bien que pour tous les mouvemens, soient les mêmes qu’en bataille ; car dès que ces distances sont reglées pour un bataillon en bataille, si on le fait marcher tout entier, il ne doit en marchant ni les étendre ni les resserrer, afin que par-tout où l’on peut l’arrêter dans sa marche, il soit toûjours en bataille ; ce qui ne seroit pas s’il les changeoit ». Art de la guerre par M. le maréchal de Puységur.

Des troupes qui combattent ne peuvent avoir trop d’attention à garder leur ordre de bataille & leurs distances ; il est impossible qu’elles se soûtiennent & qu’elles agissent, lorsqu’elles font une espece de masse sans ordre ; c’est ce qui est bientôt remarqué de l’ennemi. « J’ai vû (dit M. le duc de Rohan dans son parfait capitaine) Henri le Grand poursuivant huit cents chevaux avec moins de deux cents, juger qu’ils ne rendroient point de combat, parce qu’ils se confondoient & n’observoient point leurs distances ; ce qui arriva comme il l’avoit prédit ». (Q)