L’Encyclopédie/1re édition/DACTYLONOMIE
DACTYLONOMIE, s. f. (Arith.) ce mot est formé de deux mots grecs, δάκτυλος, doigt, & νομός, loi ; l’art de compter par les doigts. Voy. Numération.
En voici tout le secret : on donne 1 au pouce de la main gauche, 2 à l’index, & ainsi de suite jusqu’au pouce de la main droite, qui étant le dixieme, a par conséquent le zéro, 0. Voyez Caractere.
Cette façon de compter ne peut être que fort incommode. Comment, en effet, faire commodément les additions & autres opérations de l’Arithmétique par cette méthode ? comment peut-on seulement indiquer commodément un nombre donné, par exemple 279 ? Je sais qu’on l’indiquera en levant les trois doigts de la main qui désignent ces trois nombres, & en baissant les autres ; mais comment distinguera-t-on l’ordre dans lequel les chiffres doivent se trouver placés, ensorte que ce soit 279 & non pas, par exemple 297 ou 729, &c. Ce sera apparemment en ne montrant d’abord que 2, & tenant les autres doigts baissés, puis en montrant 7, puis 9 : mais une maniere encore plus commode d’indiquer ce nombre par signes seroit de lever d’abord deux doigts, puis sept, puis neuf. Au reste tout cela ne seroit bon qu’entre des muets. L’Arithmétique écrite est bien plus commode.
Il y a apparence que ce sont les dix doigts de la main qui ont donné naissance aux dix caracteres de l’Arithmétique ; & ce nombre de caracteres augmenté ou diminué changeroit entierement les calculs. Voyez Binaire. On auroit peut-être mieux fait encore de prendre douze caracteres, parce que 12 a plus de diviseurs que 10 ; car 12 a quatre diviseurs 2, 3, 4, 6, & 10 n’en a que deux, 2, 5. Au reste il est à remarquer que les Romains n’employoient point l’arithmétique décimale ; ils n’avoient que trois caracteres jusqu’à cent, I, V, X : C, étoit pour cent, D, pour cinq cents, M, pour mille : mais comment calculoient-ils ? C’est ce que nous ignorons, & qu’il seroit assez curieux de retrouver. (O)