L’Encyclopédie/1re édition/DÉFLORATION

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DÉFLORATION, s. f. (Hist. mod.) action par laquelle on enleve de force la virginité à une fille. Voyez Virginité. La mort ou le mariage sont l’alternative ordonnée par les juges, pour réparer le crime de défloration. Plusieurs anatomistes faisoient de l’hymen la véritable preuve de la virginité ; persuadés que quand on ne le trouve point, il faut que la fille ait été déflorée. Voyez Hymen.

Les anciens avoient tant de respect pour les vierges, qu’on ne les faisoit point mourir sans leur avoir auparavant ôté leur virginité. Tacite l’assûre de la fille encore jeune de Sejan, que le bourreau viola dans la prison avant que de la faire mourir. On attribue aux habitans de la côte de Malabar la bisarre coûtume de payer des étrangers pour venir déflorer leurs femmes, c’est-à-dire en prendre la premiere fleur.

Chez les Ecossois, c’étoit un droit de seigneur de déflorer la nouvelle mariée ; droit qui leur fut, dit-on, accordé par leur roi Evenus, qu’on ne trouve pas néanmoins dans la liste que nous en avons. On prétend que ce droit leur fut ôté par Malenne, qui permit qu’on s’en rachetât pour un certain prix qu’on appelloit morcheta, ou un certain nombre de vaches par allusion au mot de marck, qui dans les langues du Nord signifie un cheval. Buchanan dit aussi qu’on s’en rachetoit pour un demi-marc d’argent.

Cette coûtume a eu lieu dans la Flandre, dans la Frise, & en quelques lieux d’Allemagne, si l’on en croit différens auteurs.

Par la coûtume d’Anjou & du Maine, une fille après vingt-cinq ans se peut faire déflorer, sans pouvoir être exhérédée par son pere.

Ducange cite un arrêt du 19 Mars 1409, obtenu par les habitans d’Abbeville contre l’évêque d’Amiens, qui faisoit racheter pour une certaine somme d’argent la défense qu’il avoit faite de consommer le mariage les trois premieres nuits des noces : ce qui étoit fondé sur le quatrieme concile de Carthage, qui l’avoit ordonné pour la révérence de la bénédiction matrimoniale. Chambers. (G)