L’Encyclopédie/1re édition/CRYPTOGRAPHIE
CRYPTOGRAPHIE, s. f. (Littérature.) du grec κρύπτω, condo, je cache ; & de γράφω, j’écris : écriture secrete ou cachée, inconnue à tout autre que celui à qui on l’adresse.
Les anciens en ont eu l’usage, mais personne n’en avoit donné des regles avant l’abbé Tritheme, qui mourut en 1516. Il avoit composé sur ce sujet six livres de la Polygraphie, & un grand ouvrage de la Stéganographie, dont les termes techniques & mystérieux firent penser à un nommé Boville que cet ouvrage ne renfermoit que des mysteres diaboliques ; & c’est sur ce principe que plusieurs auteurs, & entr’autres Possevin, ont écrit que la Stéganographie étoit pleine de magie. L’électeur palatin Frédéric II. fit brûler, par une vaine superstition, l’original de cette Stéganographie, qu’il avoit dans sa bibliotheque. Mais plusieurs auteurs célebres & moins crédules, tels que Vigenere & d’autres, ont justifié l’abbé Tritheme. Le plus illustre de ses défenseurs fut le duc de Lunebourg, dont la Cryptographie fut imprimée en 1624 in-fol. & Naudé dit que ce prince a si bien éclairci toutes les obscurités de Tritheme, & si heureusement mis au jour tous ses prétendus mysteres, qu’il a pleinement satisfait la curiosité d’une infinité de gens qui souhaitoient de savoir ce que c’étoit que cet art prétendu magique. Caramuel donna aussi, dans le même dessein, une Stéganographie en 1635. Le P. Gaspard Schot, Jésuite allemand, & un autre Allemand nommé Heidel, ont aussi donné des traités de Cryptographie ou de Stéganographie. Voyez Stéganographie.
Jean-Baptiste de la Porte Napolitain, a fait cinq livres sur la même matiere ; & le chancelier Bacon en a aussi traité dans ce qu’il dit de l’accroissement des Sciences. Baillet, Jugem. des sav. tom. II. p. 530. Voyez Chiffre & Déchiffrer. (G)