L’Encyclopédie/1re édition/CONSENTEMENT

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* CONSENTEMENT, AGRÉMENT, PERMISSION, (Gramm.) termes relatifs à la conduite que nous avons à tenir dans la plûpart des actions de la vie, où nous ne sommes pas entierement libres, & où l’évenement dépend en partie de nous, en partie de la volonté des autres. Le consentement se demande aux personnes intéressées ; la permission se donne par les supérieurs qui ont le droit de veiller sur nous, & de disposer de nos occupations ; l’agrément s’obtient de ceux qui ont quelqu’autorité ou inspection sur la chose dont il s’agit. Nul contrat sans le consentement des parties : les moines ne sortent point de leurs maisons sans une permission : on n’acquiert point de charge à la cour sans l’agrément du Roi. On se fait quelquefois prier pour consentir à ce qu’on souhaite ; tel supérieur refuse des permissions, qui s’accorde des licences ; un concurrent protégé rend quelquefois l’agrément impossible.

* Consentement, sub. m. (Logiq. & Morale.) c’est un acte de l’entendement, par lequel tous les termes d’une proposition étant bien conçûs, un homme apperçoit intérieurement, & quelquefois désigne au-dehors, qu’il y a identité absolue entre la pensée & la volonté de l’auteur de la proposition, & sa propre pensée & sa propre volonté. La négation & l’affirmation sont, selon les occasions, des signes de consentement. L’esprit ne donne qu’un seul consentement à une proposition, si composée qu’elle puisse être ; il faut donc bien distinguer le consentement du signe du consentement : le signe du consentement peut être forcé ; il n’en est pas de même du consentement. On a beau m’arracher de la bouche que mon sentiment est le même que celui de tel ou de tel, cela ne change point l’état de mon ame. Le consentement est ou exprès, ou tacite, ou présumé, ou supposé : il s’exprime par les paroles ; on l’apperçoit, quoique tacite, dans les actions ; on le présume par l’intérêt & la justice ; on le suppose par la liaison des membres avec le chef. Les misantropes rejetteront sans doute le consentement présumé ; mais c’est une injure gratuite qu’ils feront à la nature humaine ; il est fondé sur les principes moraux les plus généraux & les plus forts : les difficultés qu’on pourroit faire sur le consentement supposé, ne sont pas plus solides que celles qu’on feroit sur le présumé. Le pacte exprès naît du consentement exprès ; le tacite, du tacite ; le présumé, du présumé, & le supposé du supposé. Le consentement de l’enfance, de la folie, de la fureur, de l’ivresse, de l’ignorance invincible, est réputé nul : il en est de même de celui qui est arraché par la crainte, ou surpris par adresse ; en toute autre circonstance, le consentement fonde l’apparence de la faute, & le droit de châtiment & de représaille. Voyez Pacte.

Consentement des parties, (Œconom. anim.) s’entend d’une certaine relation ou sympathie, par le moyen de laquelle, lorsqu’une partie est immédiatement affectée, une autre à une distance se trouve affectée de la même façon.

Ce rapport mutuel ou ce consentement des parties, est sans doute produit par la communication des nerfs, & par leur distribution & leurs ramifications admirables par tout le corps. Voyez Nerf.

Cet effet est si sensible, qu’il se manifeste aux yeux des medecins : ainsi une pierre dans la vessie, en tiraillant ses fibres, les affectera & les mettra dans de telles convulsions, que les tuniques des intestins seront affectées de la même maniere par le moyen des fibres nerveuses ; ce qui produira une colique. Ces tiraillemens s’étendent même quelquefois jusqu’à l’estomac, où ils occasionnent des vomissemens violens : c’est pourquoi le remede en pareil cas doit regarder la partie originairement attaquée.

Les Naturalistes supposent que la ramification de la cinquieme paire des nerfs aux parties de l’œil, de l’oreille, à celles de la bouche, des joues, du diaphragme, & des parties environnantes, &c. est la cause du consentement extraordinaire de ses parties : c’est de-là qu’une chose savoureuse vûe ou sentie, excite l’appétit, & affecte les glandes & les parties de la bouche ; qu’une chose deshonnête vûe ou entendue, fait monter le rouge au visage ; que si elle plaît, elle affecte le diaphragme, & excite au rire les muscles de la bouche & du visage ; & qu’au contraire si elle afflige, elle affecte les glandes des yeux & les muscles du visage, tellement qu’elle occasionne des larmes.

Le docteur Willis, cité par M. Derham, attribue le plaisir du baiser, l’amour, & même la luxure que ce plaisir excite, à cette paire de nerfs qui se ramifiant, & aux levres & aux parties génitales, occasionne une irritation dans celles-ci par l’irritation des premieres.

Le docteur Sach pense que c’est du consentement des levres de l’utérus à celles de la bouche, qu’une femme grosse étant effrayée de voir des levres galeuses, il lui survint des pustules toutes semblables aux levres de l’utérus. Chambers.

Il ne faut au reste regarder toutes ces explications que comme de pures conjectures. La maniere dont nos sensations sont produites, est une matiere qui restera toûjours remplie d’obscurité pour les Physiciens. Voyez Sympathie.