L’Encyclopédie/1re édition/COAGULATION

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COAGULATION, s. f. (Physiq. & Chimie.) Le mot de coagulation pris dans son sens le plus étendu, exprime tout changement arrivé à un liquide composé, par lequel ou la masse entiere de ce liquide, ou seulement quelques-unes de ses parties, sont converties en un corps plus ou moins dense.

Ce changement s’opere dans ces liquides par un grand nombre de causes différentes, qui constituent tout autant d’especes de coagulations qui ont la plûpart des noms particuliers, & qu’on ne désigne même presque jamais par le nom générique de coagulation, qui a été borné par l’usage à quelques especes particulieres.

Les coagulations de la premiere espece, ou improprement dites, sont la congellation ou condensation par le refroidissement, la concentration ou rapprochement par le moyen de l’évaporation, la précipitation, la crystallisation. Voyez Congellation, Evaporation, Précipitation, & Crystallisation.

Les coagulations de la seconde espece, celles pour lesquelles cette dénomination est consacrée, sont premierement la coagulation spontanée du lait, du sang, de certains sucs végétaux, par exemple, celui de la bourrache & du cochléaria, &c. 2° celle du blanc-d’œuf & des autres lymphes animales, par un degré de chaleur répondant au cent cinquante-sixieme du thermometre de Fahrenheit, selon les observations du docteur Martine : 3° la coagulation des matieres huileuses par le mêlange des acides ; celle du lait par les acides, par les alkalis, & par les esprits fermentés ; celle des matieres mucilagineuses ou farineuses délayées, par les alkalis, &c.

Nous sommes forcés d’avoüer que la théorie de la coagulation spontanée du lait, du sang, & des sucs gélatineux des végétaux, est encore pour nous dans les ténebres les plus profondes, & que nous n’en savons pas davantage sur la coagulation des lymphes animales par le moyen du feu : nous ne pouvons attribuer cette derniere coagulation à aucune espece de dissipation des parties aqueuses qu’on supposeroit constituer auparavant leur fluidité, puisqu’au degré de chaleur requis cet épaississement se fait dans l’eau aussi-bien qu’à l’air libre.

La condensation de ces matieres par cette cause, est une des exceptions les plus remarquables à cette loi physique presque générale, par laquelle les degrés de rareté ou de laxité du tissu des corps sont à-peu-près proportionnels à leur degré de chaleur.

Quant à la troisieme espece de nos coagulations proprement dites, savoir l’épaississement des matieres huileuses, &c. par les acides, &c. nous pouvons au moins les ramener par une analogie bien naturelle à la classe générale des corporifications qui dépendent de la combinaison des différens principes, comme des acides avec les différentes bases terreuses ou métalliques, &c. Voyez Mixtion.

La coagulation du lait par cette cause ne peut être cependant que très-difficilement rangée avec ce genre d’effets ; car on n’apperçoit pas trop comment quelques gouttes d’acides, quelques grains d’alkalis, ou une petite quantité d’esprit-de-vin, peuvent se distribuer assez également & en une proportion suffisante dans une grande quantité de lait, pour en lier les parties au point de leur faire perdre leur fluidité en si peu de tems. Voyez Lait. (b)