L’Encyclopédie/1re édition/CACHET

Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 504).

* CACHET, s. m. petit instrument qu’on peut faire de toutes sortes de métaux, & de toutes les pierres qui se gravent, & dont on se sert pour fermer des lettres, sceller des papiers, &c. par le moyen d’une substance fusible sur laquelle on l’applique. Voy. l’article Sceau. Il y a des cachets en bague, c’est toûjours une pierre gravée & montée en or ou en argent : il y en a à manche ; ils sont ordinairement d’argent, le manche en est en poire, & la matiere du manche d’ébene, d’ivoire, de bouis, &c. Il y en a qui sont tout d’or ou d’argent ; ils sont petits ; ils ont une poignée proportionnée, qu’on prend entre le pouce & l’index quand on les applique sur la cire. Mais de quelqu’espece que soient les cachets, ils se fondent tous, & ils ont le même usage & la même forme principale, je veux dire une surface plane, ronde, ou ovale, sur laquelle on a gravé en creux ou des armes, ou une tête, ou quelques figures d’hommes, d’animaux, de plantes, &c. Cette gravure en creux appliquée sur une matiere molle, rend ces figures en relief. Voyez l’article Gravure. Les cachets ont été à l’usage des anciens : il nous en reste même quelques-uns d’eux qui sont précieux par le travail. Celui qui est connu sous le nom de cachet de Michel-Ange, peut être mis au nombre des chefs-d’œuvres de gravure antique. Il est au cabinet du Roi : c’est une petite cornaline transparente, gravée en creux, que l’on croit avoir servi de cachet à Michel-Ange, & qui dans un espace de cinq à six lignes, contient quatorze figures humaines, sans compter des animaux, des arbres, des fleurs, des vases, &c. & un exergue, où l’on voit encore des monticules, des eaux avec un petit pêcheur, &c.

On prétend que le tout est une espece de fête qu’on célébroit anciennement en mémoire de la naissance de Bacchus. On remarque d’abord deux femmes dont l’une tient sur ses genoux un enfant nud ; c’est Bacchus, dit-on, avec sa nourrice, & la belle Hippa dont il est parlé dans les hymnes d’Orphée. Le vieillard assis par terre est Athamas, mari d’Ino, ou si l’on veut, un faune qui tient une patere, & qui fait une libation, &c. C’est ainsi que M. de Mautour qui a tâché d’expliquer le cachet dont il s’agit, amene à son système toutes les autres figures de la pierre, hors celle du cheval.

M. Bourdelot prétend au contraire que les puanepsies sont le sujet de la cornaline de Michel-Ange. Voy. Puanepsies. Il prend la figure humaine couronnée d’olivier, élevant de la main droite un vase, & tenant de la gauche les renes d’un cheval, pour Thesée ; le cheval pour le symbole de Neptune, pere de Thesée ; les autres figures d’hommes & de femmes, pour des Athéniens & des Athéniennes qui prennent part à la fête ; l’enfant entre les bras de la mere, pour le signe de la délivrance de ce tribut ; & le petit pêcheur de l’exergue, pour l’image de la paix que Thesée avoit assûrée à son pays.

Quoi qu’on puisse dire du talent des modernes & des progrès des beaux Arts parmi nous, nous aurions de la peine à trouver quelqu’ouvrage dans le même genre, qu’on pût comparer à la piece dont il s’agit, soit pour sa difficulté, soit pour sa perfection.