L’Encyclopédie/1re édition/BIENHEUREUX

Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 245).

BIENHEUREUX, ce terme a diverses acceptions. En Théologie, il signifie ceux à qui une vie pure & exempte de toutes souillures, ouvre le royaume des cieux. Qui pourroit peindre l’étonnement de l’ame, lorsque la mort venant à déchirer tout-à-coup le voile qui l’environne dans un corps mortel, & à rompre tous les liens qui l’y attachent, elle est admise à la vision claire & intuitive de la divinité ! là se dévoilent à ses yeux les profondeurs incompréhensibles de l’Etre divin, la grandeur ineffable de son unité, & les richesses infinies de son essence : là disparoissent les contradictions apparentes des mysteres, dont la hauteur étonne notre raison, & qui sont enveloppés & comme scellés pour nous dans les Ecritures : là s’allume dans l’ame cet amour immense, qui ne s’éteindra jamais, parce que l’amour divin sera son aliment éternel. V. Paradis, Vision intuitive.

Le terme de bienheureux est aussi pris pour ceux à qui l’Église décerne dans ses temples un culte, subordonné néanmoins à celui qu’elle rend à ceux qu’elle a canonisés. La béatification est un degré pour arriver à la canonisation. Voyez ces articles.

Bienheureux se dit, en Morale, de ceux qui coulent dans une heureuse tranquillité des jours purs & exempts de nuages & de tempêtes, voyez Bonheur ; ou plûtôt bienheureux s’applique à des événemens particuliers ; heureux à tout le système de la vie. On est bienheureux d’avoir échappé à tel danger ; on est heureux de se bien porter. (X)