L’Encyclopédie/1re édition/ARROSER

◄  ARROSEMENT
ARROSOIR  ►

ARROSER, v. act. (Jardinage.) rien n’est plus utile que d’arroser les végétaux ; c’est le seul remede contre les grandes chaleurs de l’été & les grands hâles du printems. L’heure la plus convenable aux arrosemens, est le matin ou le soir, afin de conserver la fraîcheur pendant la nuit. Si le Jardinier solitaire avance, contre le sentiment & l’usage de tout le monde, que le danger est très-grand d’arroser le soir ; on soûtiendra au contraire, qu’il ne faut point arroser durant le jour ; les plantes risqueroient d’en être endommagées, parce que l’eau trop échauffée par le soleil pourroit occasionner dans la terre un feu, qui pénétrant jusqu’aux racines, dessecheroit ensuite la plante : il faut encore que l’arrosement ne soit pas trop abondant, parce qu’il désuniroit trop les principes actifs de la végétation, & causeroit de la pourriture ; une eau modérée, telle que deux seaux à chaque arbre, & souvent réiterée, est plus utile.

Les arrosemens, quand ils sont équivalens aux pluies, servent à dissoudre les sels de la terre, qui, sans cela, resteroient en masse ; ils mêlent l’eau avec l’air, & procurent une nourriture convenable aux tendres parties des jeunes plantes. Si l’on a eu soin de mettre du fumier sur la superficie d’un arbre nouvellement planté, l’eau passant à travers ce fumier, comme par un crible, ne fera point de mortier, & tombera goutte à goutte sur la racine de l’arbre. Les arrosemens que l’on donne à des plantes délicates, telles que les fleurs, ne doivent pas tomber en pluie & sur la cime des fleurs, ce qui les détruiroit ; il suffit de jetter l’eau au pié avec un arrosoir à goulot. Le buis nouvellement planté demande un peu d’eau la premiere & la seconde année. On arrose les orangers, grenadiers, & autres arbres de fleurs avec beaucoup de ménagement, quand ils entrent dans la serre & qu’ils en sortent ; lorsqu’ils sont exposés à l’air, ils demandent plus d’eau, surtout dans la fleuraison ; ordinairement il suffit de les mouiller une fois la semaine, lorsqu’on voit leurs feuilles mollasses & recoquillées, ou que les terres se fendent. Il y a des plantes qu’il faut arroser plus souvent que les autres, telles que les fleurs, les légumes ; d’autres qu’on n’arrose point du tout ; plusieurs prétendent qu’il vaut mieux n’y point jetter d’eau, que d’en jetter par intervalles ; la charmille, par exemple, est un des plans qui aiment le plus l’eau ; ou il la faut arroser continuellement, c’est-à-dire, de deux jours l’un, ou n’y pas jetter une goutte d’eau. Il y a encore des arrosemens en forme de pluie, pour mouiller les branches & les feuilles des arbres en buissons, tant orangers que fruitiers, quand on les voit se fanner ; ceux qui seront trop haut, seront arrosés avec des seringues ou des pompes à bras. (K)

Arroser les capades, le feutre & le chapeau, termes de chapellerie, c’est jetter de l’eau avec un goupillon sur l’ouvrage, à mesure qu’il avance, & qu’il acquiert ces différens noms. Les Chapeliers arrosent leurs bassins quands ils marchent l’étoffe à chaud ; & le lambeau ou la feutriere, quand ils la marchent à froid. Voyez Chapeau.