L’Encyclopédie/1re édition/ALYPUM

Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 1p. 312-313).
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* ALYPUM, ou FRUTEX TERRIBILIS, (Hist. nat.) arbuste qui s’éleve à environ une coudée ; sa racine est couverte d’une écorce noirâtre, sa longueur est de quatre à cinq pouces, & sa grosseur de près d’un pouce de diametre en son collet ; elle est garnie, ou plûtôt partagée en trois ou quatre grosses fibres ; ses branches sont couvertes d’une petite pellicule d’une couleur de rouge brun, déliées & cassantes ; ses feuilles placées sans ordre, tantôt par bouquets, tantôt isolées, quelquefois accompagnées à leurs aisselles d’autres petites feuilles, sont de différentes figures : les unes ressemblent aux feuilles du myrte ; les autres s’élargissent vers le bout, ou sont en trident, ou n’ont qu’une pointe. Les plus grandes ont environ un pouce de longueur, sur trois ou quatre lignes de largeur, & sont épaisses & d’un verd éclatant. Chaque branche porte une seule fleur, quelquefois deux, mais rarement : ces fleurs sont d’un beau violet, & ont environ un pouce de diametre ; elles sont composées de demi-fleurons, & de leur milieu s’élevent quelques étamines blanches, avec un petit sommet noirâtre. Ces fleurons finissent en trois pointes, & n’ont qu’environ trois lignes de long, sur une ligne de large : chaque demi-fleuron porte son embryon, qui, quand la fleur est passée, devient une semence garnie d’une espece d’aigrette. Toute la fleur est soûtenue par un calice composé de feuilles disposées en écailles, chacune desquelles n’a que deux ou trois lignes de long sur une ligne de large.

On lit dans Clusius que les charlatans de l’Andalousie donnoient la décoction de cette plante pour les maladies vénériennes ; d’autres gens de même caractere la substituent au sené : mais la violente action de ce remede, qui n’a pas été nommé pour rien frutex terribilis, fait souvent repentir de son usage & ceux qui l’ordonnent, & ceux à qui il est ordonné. Mém. de l’Acad. des Sciences, 1712.

Cette plante a beaucoup d’amertume, son goût est aussi desagréable que celui du lauréole, & son amertume augmente beaucoup pendant six ans ; on la trouve en plusieurs endroits du Languedoc ; mais elle croît principalement en abondance sur le mont de Cete, dans cette province, auprès de Frontignan ; c’est pour cette raison que les Botanistes lui ont donné le nom d’Alypon-montis-Ceti. On trouve aussi l’Alypum dans plusieurs endroits de Provence, surtout dans ceux qui sont voisins de la mer & situés au midi.

Elle est un violent cathartique, & ne purge pas avec moins de force la bile, le phlegme, & les humeurs aqueuses, que le tithymale. Mais nous ne saurions trop répeter qu’on ne doit se servir d’un remede si violent qu’avec beaucoup de précaution. (N)