L’Encyclopédie/1re édition/ALLONGE

Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 1p. 287-288).
◄  ALLOGNE
ALLONGÉ  ►

ALLONGE, s. f. (Marine.) c’est une piece de bois ou un membre de vaisseau dont on se sert pour en allonger un autre. On éleve l’allonge sur les varangues, sur les genoux & sur les porques, pour former la hauteur & la rondeur du vaisseau. Les plus proches du plat-bord qui terminent la hauteur du vaisseau s’appellent allonges de revers. V. Varangues, Genoux, Porques.

Allonge premiere ou demi grenier, c’est celle qu’on empatte avec la varangue & le genou de fond. Allonge seconde ou seconde allonge, c’est celle qui est placée au-dessus de la premiere, & qui s’empatte avec le bout du haut du genou de fond.

Allonge de revers, ou troisieme allonge ; c’est celle qui acheve la hauteur du vaisseau par ses côtés. Lorsqu’il n’y a que deux allonges, la seconde s’appelle de revers.

Les allonges de revers different des premieres en ce qu’elles présentent leur concavité au lieu de leur convexité. Voyez la Planche IV. fig. 1. n°. 19, 20 & 21. où l’on voit la forme des allonges, & la maniere dont elles sont placées. Voyez aussi Planche V. fig. 3. 4. & 5.

Gabarit de trois allonges, ce sont les trois allonges l’une sur l’autre, qui forment les côtés du vaisseau.

Lorsque les allonges sont bien empattées sur les genoux, le vaisseau en est plus fort & mieux lié ; l’épaisseur des allonges est ordinairement des deux cinquiemes parties de l’étrave, à la hauteur des gouttieres du premier pont.

Leur rétrécissement qui donne la façon au vaisseau, est du tiers de la hauteur du pontal, c’est-à-dire du creux. Voyez Pontal ou Creux.

On met deux allonges aux deux côtés de l’étrave, & deux aux deux côtés de l’étambot pour affermir davantage ces pieces principales.

Le serre-gouttiere vient répondre entre les secondes allonges & les allonges de revers. (Z)

* Allonge, (Comm.) morceaux que ceux qui veulent frauder les droits de marque, dans le commerce des dentelles de Flandre, font renter sur de nouvelles pieces. L’Arrêt du 24 Juin 1684 portant que ces marchandises seront marquées aux allonges & à l’un des bouts, a obvié à cette contravention. Auparavant on faisoit passer successivement les allonges d’une piece à une autre.

Allonge, terme commun à la Menuiserie, Charpenterie, à la Taillanderie, Serrurerie, &c. & à un grand nombre d’autres arts tant en bois qu’en métaux, &c. Il se dit de toute piece rapportée à une autre de quelque maniere que ce puisse être, pour lui donner l’étendue en longueur qu’exige l’usage auquel on destine la piece avec son allonge.

* Allonge, s. f. c’est dans les boucheries un petit crochet qui sert à suspendre les animaux tués, ou entiers ou par morceaux. L’allonge est recourbée en sens contraire par ses deux bouts ; l’un de ces bouts est mousse, & l’autre est très-aigu, & ils semblent former avec le corps du crochet une s, dont le bec supérieur sert à embrasser la tringle du dedans de l’étale, & l’inférieur à entrer dans la viande & à la suspendre. Lorsqu’un animal est tué & dépouillé de sa peau, ou même avant, on lui passe à chaque patte de derriere une allonge, & on le suspend tout ouvert, en attendant qu’il acheve de se vuider de sang.

Allonges de Poupe, (Marine.) cormieres, cornieres, allonges de trepot. Ce sont les dernieres pieces de bois qui sont posées à l’arriere du vaisseau sur la lisse de hourdi & sur les estains, & qui forment le haut de la poupe. Quelques-uns les distinguent, appellant les deux allonges des deux bouts, cornieres, ou allonges de trepot ; & celle qui est au milieu, & qui a sous elle l’étambot, ils l’appellent allonge de poupe. On donne ordinairement aux allonges de poupe autant de long ou de hauteur au-dessus de la lisse de hourdi, qu’en a l’étambot. Les allonges des deux bouts sont posées droites sur les estains, & entretenues avec eux par des chevilles de fer & de bois.

On leur donne le plus souvent les deux tiers de l’épaisseur de l’étrave, & on les fait rentrer ou tomber en dedans, autant qu’il faut pour achever la courbe que les estains ont commencé à former, & par ce moyen il ne doit y avoir d’espace par le haut entr’elles que les trois cinquiemes parties de la longueur de la lisse de hourdi, ou deux piés plus que la moitié de cette longueur. Voyez la figure de cette piece, Planche 6. fig. 7 & sa position Planche 3. fig. t. RR. On dit poser les allonges.

Allonges d’étrave, ce sont deux pieces de bois qu’on met souvent aux deux côtés de l’étrave pour la fortifier. Voyez Etrave.

Allonges de porque, ce sont des allonges qui viennent joindre les porques, & qui sont dans les côtés des plus grands vaisseaux par-dessus le serrage. Les allonges de porque d’un vaisseau de 134 piés de long de l’étrave à l’étambot, doivent avoir dix pouces d’épaisseur, & de la largeur à proportion ; leur bout d’en-bas doit passer jusqu’au-de-là des fleurs, & le bout d’en-haut doit venir au plus haut point. En général, leur épaisseur doit approcher de celle des courbes ; mais elles doivent être entées plus avant dans les serre-gouttieres. Voyez Planche IV. Marine, fig. 1. n°. 28. & 29. (Z)

Allonges des potenceaux ; (Rubann.) ces allonges sont deux longues piéces de bois menues en forme de fortes lattes, que l’on attache sur la traverse du derriere du métier au-dessous des potenceaux. Ils sont posés obliquement, c’est-à-dire, que le bout est beaucoup plus élevé que celui qui porte sur la traverse. Cette obliquité est nécessaire pour que les différentes soies des roquetins ne traînent point les unes sur les autres. Ces allonges sont percées de quantité de trous dans leur longueur, pour passer les broches qui portent les roquetins : elles sont aussi soûtenues par différens supports qui sont de petits poteaux posés à terre. Voici l’usage de ces allonges : lorsque l’on fait du velours, il faut que toutes les branches soient mises à part sur quantité de petits roquetins enfilés par sept ou huit dans les broches des allonges : cette séparation est nécessaire, parce que si toutes ces branches étoient ensemble sur la même ensuple, une partie lâcheroit pendant que l’autre seroit roide ; ce que l’on évite en les séparant, chaque branche pouvant ainsi ne lâcher qu’à proportion de l’emploi. Il y a quelquefois 150 roquetins sur ces allonges & même davantage. Chaque roquetin a son contre-poids particulier, qui est un petit sac de toile où sont attachés les deux bouts d’une ficelle, laquelle ficelle s’entortille deux fois à l’entour de la moulure du roquetin : ce contre-poids reste toûjours en équilibre par ce moyen, la ficelle pouvant continuellement glisser à mesure que le contre-poids déroule. On se sert d’un petit sac de toile pour pouvoir contenir quantité de petites pierres, dont on diminue le nombre à mesure que le roquetin se vuide ; parce qu’il faut qu’il soit moins chargé alors, que lorsqu’il est plein. Il faut encore que chacune des branches de velours porte elle-même un petit poids ; ce qui se fait ainsi : on passe la branche dans une petite ficelle qui porte le petit poids dont il s’agit ; on peut mettre un maillon à cette petite ficelle, ce qui ne sera que mieux. Voici l’usage de tous ces petits poids : lorsque l’ouvrier enfonce une marche, le pas qu’il ouvre fait lever toutes ces branches, ainsi que tout le reste de la chaîne qui leve ; ces branches surtout obéissent à la levée ; & lorsqu’il quitte cette marche, le pas baissant occasionneroit de lâcher, si tous ces petits poids ne tenoient la branche en équilibre, puisque le roquetin ne peut s’enrouler, mais bien se dérouler, lorsqu’il est tiré en avant : chacun de ces petits poids s’appelle freluquet. Voyez Freluquet.

Allonges, ce sont des pieces du métier de Gasier. Voyez Planche III. du Gasier, fig. 2. Les pieces de bois 9, 10, 9, 10, assemblées chacune à un des piés de derriere du métier, perpendiculairement à ces piés, à tenon & à mortoise, & soûtenues en-dessous chacune par un aisselier, 10, 11, 10, 11, sont les allonges du métier. Elles servent à soûtenir l’ensuple de derriere, & donnent lieu à un plus grand déployement de la chaîne. Quand un métier est assez long, il est inutile de lui donner des allonges. Les allonges ne sont à proprement parler que des additions à des métiers mal-faits ou mal-placés : mal-faits, si n’étant pas assez longs pour donner le jeu convenable à la chaîne & aux parties de chaîne séparées par la lisse & par la tire, on est obligé d’y mettre des allonges : mal-placés, si les piés de derriere se trouvant trop hauts pour s’appliquer contre un mur incliné en-dedans d’une chambre, comme il arrive à tous les étages élevés, on est obligé d’avoir un métier court auquel on remédie par les allonges.

Allonges de portelots, (terme de riviere.) pieces de bois cintrées, posées sur les crochuaux d’un bateau foncet à la hauteur de la soûbarque. V. Crochuaux, Soûbarque.