L’Enclos du Rêve/06/Nos Rêves anciens

Alphonse Lemerre (p. 85-87).

NOS RÊVES ANCIENS

Nos rêves anciens, nos rêves nouveaux,
Tous les rêves dorment dans nos cerveaux.
Rêves de bonheur, rêves d’épouvante,
Aux souffles des Jours, désertant le nid,
En nos cœurs vibrants font à l’infini
Passer de la joie ou de la tourmente.
Tous les rêves dorment dans nos cerveaux.
Jardins d’idéals, rêves enchanteurs,
Ô rêves offrant vos fruits tentateurs,
Sur des branches d’or, à la main ravie,
Je veux cueillir seuls vos exquis butins.
Rêves clairs et frais comme des matins,
Rêves éclatants comme de la vie.

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Aux premiers bourgeons des avrils naissants,
Pour les vierges, pour les adolescents,
Rêves, accourez des blanches tendresses.
Ô rêves complices des chers aveux,
Semez de la douceur au fond des vœux
Et de la candeur au bord des caresses.

Aux mères en pleurs des soucis présents,
Rêves, accourez, rêves apaisants,
Câlins et berceurs comme des prières ;
Pour qu’elles aient foi dans les lendemains,
Montrez-leur, de vos bienfaisantes mains,
Tout un avenir peuplé de chimères.

Pour les sans abri, pour les malheureux,
Rêves, accourez, rêves généreux,
Bonnes visions de ferme dormante,
Où, pendant les soirs de neige, l’hiver,
On verrait, auprès d’un feu flambant clair,
Une hôtesse belle, accorte et clémente.

Et pour tous ceux-là qui vont élevant
Un drapeau qui flotte et qui claque au vent,
Vers la cime blonde où rit la victoire,


Pas inaccessibles, ni très lointains,
D’aurore empourprés, dressez-vous hautains,
Grands comme des arcs, ô rêves de gloire !

Rêves orgueilleux, rêves caressants,
Et miséricords et compatissants,
Oasis, aux vermeilles échappées,
Vous dont le mirage a hanté nos cœurs,
Rêves, accourez, ô rêves vainqueurs,
Leurrer pour jamais nos âmes dupées.