L’Association française pour l’avancement des sciences. — Le Congrès scientifique de Lyon

L’Association française pour l’avancement des sciences. — Le Congrès scientifique de Lyon
Revue des Deux Mondes, 2e périodetome 107 (p. 691-704).
ASSOCIATION FRANCAISE
POUR L'AVANCEMENT DES SCIENCES

CONGRES SCIENTIFIQUE DE LYON.

Si la culture des sciences est à toutes les époques un avantage immense et même une indispensable condition de prospérité pour les pays bien portans, elle devient à de certaines heures une impérieuse nécessité, une chance de salut pour ceux qui sont malades. C’est une heureuse fortune pour nous assurément d’être redevenus maîtres de notre sol, mais la libération du territoire ne suffit pas. Il faut songer aussi à la libération de l’esprit public, occupé par tant de funestes chimères, esclave de tant d’instincts détestables, entretenus par l’ignorance encore plus que par la passion, et qui provoquent des folies de tout genre alternant avec de pernicieuses langueurs. Telles sont probablement les réflexions qui ont suggéré à la fin de l’année 1871 à plusieurs de nos savans la pensée de fonder l’Association française pour l’avancement des sciences. Deux de ces savans, Combes et Delaunay, moururent au milieu des démarches qu’ils avaient entreprises pour la constituer. MM. Wurtz, Claude Bernard, de Quatrefages, d’Eichtal, Broca et quelques autres confidens de ces premières tentatives les continuèrent bientôt avec un zèle ardent. Grâce à leurs efforts, l’association fut définitivement constituée le 22 avril 1872, et tint dès le mois de septembre suivant à Bordeaux, sous la présidence de M. de Quatrefages, une première session dont le succès fut du meilleur augure pour l’avenir. Le congrès de Bordeaux ne procura pas seulement aux savans réunis dans cette ville l’occasion d’écouter un grand nombre de communications sur les questions scientifiques les plus diverses, il établit des relations entre ces hommes qui ne se connaissaient guère et que les circonstances n’avaient jamais rassemblés. Le public bordelais montra une vive sympathie pour cette œuvre qui prenait au sérieux la devise de l’association : par la science, pour la patrie.

La deuxième session a eu lieu dans la ville de Lyon vers la fin du mois d’août dernier. Grâce à la bienveillance de la municipalité, grâce au dévoûment actif de plusieurs savans lyonnais, le congrès a été accueilli dans la seconde ville de France de la façon la plus cordiale, et ses travaux y ont été suivis avec une attention soutenue. C’est à l’hôtel de ville que les sociétaires se sont réunis. M. de Quatrefages, qui présidait, lut un discours plein de réflexions élevées et judicieuses sur la nécessité d’accorder dans la conduite des affaires et de la vie une plus grande place à la science, sur le besoin impérieux de substituer en France des habitudes graves et laborieuses à la funeste légèreté qui nous a perdus. « Avec la patrie pour but, la science pour moyen, le passé pour leçon, l’avenir pour espérance, n’oublions rien, dit-il, et travaillons ! » Travaillons, oui, c’est bien aujourd’hui le mot de toutes les questions. Les rapports lus par M. Gariel et par M. George Masson sur l’état actuel de l’association témoignent que le nombre des hommes disposés à l’encourager dans la voie marquée par son président s’accroît rapidement depuis qu’elle existe. On comptait au congrès de Lyon près de 400 membres, parmi lesquels une vingtaine de savans étrangers. C’est avec l’un de ceux-ci, M. Carl Vogt, que nous entrerons en matière.

M. Vogt est le type du savant cosmopolite. Il est né en Allemagne, d’où il a été exilé pour des raisons politiques, et il ne marque point de partialité pour son pays natal. Il a vécu à Paris et fréquenté nos savans, qu’il semble affectionner ; il a même écrit récemment en faveur de la France et de l’esprit français des pages énergiques, éloquentes. Il a beaucoup voyagé par le monde entier, en naturaliste surtout, en touriste souvent. Enfin il professe aujourd’hui l’histoire naturelle à l’académie de Genève, et il compte parmi les hauts personnages du gouvernement helvétique. C’est un homme d’une érudition germanique, à laquelle il joint une lucidité d’esprit française et des convictions philosophiques qu’il exprime avec une liberté de parole singulièrement audacieuse. Ses écrits, consacrés aux plus obscures questions, aux plus délicates controverses de l’ethnologie, de l’anthropologie et de la physiologie, résolvent tout sans pitié au détriment de la tradition et de la métaphysique. C’est un de ces apôtres convaincus et passionnés de la science expérimentale, au gré desquels il n’y a rien à conserver des sentimens et des idées qui ont été durant de longs siècles la forte sève de l’humanité.

La communication la plus attachante de M. Vogt a été une conférence publique sur les volcans faite dans la grande salle du Palais du Commerce. La majorité des géologues avait admis jusqu’ici que les volcans sont des soupapes par lesquelles s’échappe une portion de feu central, c’est-à-dire une partie des matériaux incandescens contenus à l’intérieur profond du globe terrestre. M. Vogt nie l’existence du feu central, et cherche l’explication des phénomènes volcaniques non dans l’existence d’un foyer interne de chaleur, mais dans les causes externes qui peuvent à la surface de la terre engendrer de la chaleur. Avant d’arriver à cette explication, l’orateur a tracé un tableau des phénomènes volcaniques. Rien de dramatique et de saisissant comme cette description des opérations les plus terribles de la nature minérale. A la précision du langage et à la fermeté de l’accent, on devinait que M. Vogt a visité les régions volcaniques en activité aussi bien que les cratères éteints, qu’il a eu la bonne fortune d’aborder aux rivages glacés de l’île Jean Mayen, que depuis Jean Mayen lui-même aucun navigateur n’avait visités. Il explique comment le cône volcanique se forme par l’accumulation et le mélange de la lave en fusion avec les matériaux solides que le volcan lance en l’air, tels que les cendres et les rapilli, et il insiste particulièrement sur la mobilité de la masse hétérogène ainsi constituée. Pour en donner une idée, il rappelle l’apparition de l’île volcanique Julia, qui émergea en 1831 des eaux de la Méditerranée, en vue des côtes de Sicile, et disparut quelques mois après emportée par les flots. M. Vogt tire de ces faits la conclusion que les volcans éteints qui existent encore n’ont jamais été submergés. En effet, un cataclysme aqueux les aurait bouleversés ; or ces volcans éteints, en particulier ceux du Puy-de-Dôme, du Vivarais, des bords du Rhin, qui datent de l’époque tertiaire, ne portent aucune trace de l’action des eaux, et témoignent par leur intégrité même qu’il n’y a pas eu de submersion universelle postérieurement à leur formation.

A la suite de ces détails plus descriptifs et pittoresques, M. Carl Vogt a proposé sa théorie de l’action volcanique. D’après lui, les affaissemens et tassemens continuels de terrain qui se produisent à la surface de la terre donnent naissance à des quantités énormes de chaleur, et c’est la chaleur d’origine mécanique, ainsi dégagée, qui fond les roches, réduit l’eau en vapeur et provoque les réactions violentes dont les éruptions sont la conséquence. Au lieu d’admettre que les volcans sont des soupapes par où le feu central se fraie une issue, M. Vogt les considère comme des résultats de mouvemens superficiels de la couche terrestre. Les preuves et les argumens qu’il invoque à l’appui de cette théorie n’ont point paru suffisamment nombreux et démonstratifs aux hommes autorisés en mécanique et aux géologues, et la doctrine du feu central, admise presque sans contestation depuis Dolomieu, garde auprès d’eux sa valeur. Quand bien même M. Vogt aurait expliqué les volcans sans le concours de cette doctrine, il resterait à interpréter l’ensemble des soulèvemens, et c’est une tâche que le célèbre naturaliste genevois n’a pas encore essayé de remplir.

A côté de la géologie, dans le cadre de laquelle rentre l’étude des volcans, une science nouvelle a pris depuis quelques années une place considérable dans les préoccupations des savans et du public. Cette science excite encore plus la passion que l’intérêt et soulève plus de polémiques ardentes que de paisibles discussions. Elle a pour objet de reconstituer, à l’aide de quelques pierres taillées et de quelques ossemens tirés du sol, où ils gisaient depuis des milliers d’années, l’histoire naturelle et sociale de ceux de nos ancêtres qui vivaient avant les derniers bouleversemens du globe. A coup sûr, ces études, dont on désigne l’ensemble sous le nom d’anthropologie préhistorique, ont une importance qu’il serait puéril de nier, mais qu’on est arrivé dans ces derniers temps à exagérer beaucoup. Les promoteurs et les amateurs de ces recherches, purement historiques, et statistiques, ont cru qu’ils avaient découvert tout un monde inattendu de choses et d’idées, qu’ils allaient renouveler toutes les antiques conceptions sur l’humanité et même sur la nature. En fait, les connaissances que l’anthropologie préhistorique nous procure restent et resteront forcément incomplètes et incertaines, elles ne revêtiront jamais le caractère d’abstraction et de raison qui seul pourrait leur conférer le droit de prendre place dans la science. L’évolution de celle-ci, considérée comme systématisation des activités simples et des lois générales du monde, n’a rien à faire avec les explorations curieuses de l’anthropologie. Ces réflexions nous sont suggérées par une excursion que l’association a faite à Solutré, près Mâcon. Il s’agissait précisément d’aller examiner une station préhistorique. Solutré est un village situé au flanc des belles collines du Mâconnais, à 12 kilomètres environ de Mâcon. Plusieurs savans de Mâcon et quelques membres du conseil-général de Saône-et-Loire s’étaient chargés d’organiser l’excursion. Ces messieurs, après nous avoir reçus et offert un lunch à la gare, nous conduisirent en voiture au village de Solutré, pavoisé en notre honneur. Arrivés là nous mîmes pied à terre et nous prîmes la route des fouilles, guidés, par le maire, par M. Arcelin et M. l’abbé Ducrost. Ce sont ces deux derniers savans qui, de concert avec un ; investigateur dont on déplore la perte récente, M. de Ferry, ont exploré et fait connaître tout ce que renferme la station préhistorique de Solutré. M. Arcelin surtout a consacré à ce travail plusieurs années[1]. La station de Solutré présente les vestiges de l’homme préhistorique qu’on rencontre dans toutes les stations du même genre : débris de cuisine, ustensiles, ossemens d’hommes et d’animaux. On trouve là, dans des tranchées creusées à 3 ou 4 mètres de profondeur, des dalles de pierre représentant des plates-formes sur lesquelles on rencontre parfois des cadavres humains entourés d’une foule d’objets usuels. On ne sait pas si ces plates-formes sont des âtres de foyers d’habitation, c’est-à-dire des fonds de hutte ou des sépultures. Tout près, on découvre divers ustensiles en silex, flèches, lances, etc., tous taillés très finement, en forme de losange, de feuille de saule ou de feuille de laurier. Les couteaux, les éclats, les grattoirs, les nucléi de toute structure et de toute dimension sont fort abondans. Pas de scies, ni de hachettes, ni d’outils tranchans. Les instrumens en os sont de simples lissoirs, des poinçons ou des manches d’outils. Les objets d’art et les dessins sont fort rares. Les flèches et les aiguilles en os manquent complètement. Non loin de ces restes de la grossière civilisation de nos ancêtres gisent d’énormes quantités d’ossemens de mammifères, tels que le cheval, le renne, l’éléphant, le cerf, le bœuf, le loup, le lièvre, etc. Le cheval et le renne prédominent. La station de Solutré est particulièrement caractérisée par une accumulation extraordinaire d’ossemens de chevaux brisés et calcinés qui forment là un magma de plusieurs mètres d’épaisseur sur une étendue très grande. On estime à près de quarante mille le nombre des cadavres de chevaux agglomérés dans ces couches singulières. Les avis les plus contradictoires ont été émis par les hommes compétens pour expliquer la présence de ces animaux. Les squelettes humains ne sont pas rares. On en a déterré un sous nos yeux. Les crânes de ces squelettes prouvent qu’il y avait à Solutré deux races d’hommes dont la plus ancienne était dolichocéphale, races contemporaines de la fin des temps quaternaires, postérieures à celles du Moustier, antérieures à celles de Laugerie-Basse, de La Madeleine et des Eyzies. Après avoir écouté les discussions infinies que soulèvent les insolubles difficultés préhistoriques entre les personnes qui se passionnent pour ces problèmes, après avoir consciencieusement visité les tranchées qu’on offrait à leur observation, les membres du congrès, au nombre de près de deux cents, prirent place vers midi autour d’une table somptueusement servie sur la hauteur même qu’habitaient, il y a de longs siècles, nos ancêtres de l’époque quaternaire. Beaucoup de toasts furent portés à la fin du déjeuner. C’est dans un de ces toasts que M. l’abbé Ducrost déclara que la religion accepte tous les faits bien démontrés, et n’impose aux savans aucune croyance géologique contraire à l’observation.

Le surlendemain de l’excursion de Solutré, M. Aimé Girard, professeur au Conservatoire des arts et métiers de Paris, a donné au Palais des Arts une conférence sur les derniers progrès des industries chimiques. Dans un langage d’une correction élégante et d’une saisissante lucidité, il a passé en revue la situation actuelle des industries les plus importantes, et le tableau a paru d’autant plus attachant qu’il témoigne de la prospérité de notre pays autant que de la fécondité de la science. Le pivot des industries chimiques est l’acide sulfurique. Chauffé avec le sel marin, cet acide nous fournit le sulfate de soude, facile à transformer en carbonate de soude, et l’acide chlorhydrique, c’est-à-dire les agens fondamentaux de la fabrication des savons, de la verrerie, de la papeterie, du blanchiment, de la teinturerie. Chauffé avec le salpêtre, il engendre l’acide nitrique, avec lequel on décape les métaux, on purifie les huiles, on fabrique les bougies, on prépare les couleurs d’aniline. Bref, l’industrie chimique d’un pays est en proportion de l’acide sulfurique qu’il consomme. Jadis il fallait fabriquer cet acide avec du soufre natif extrait du sol volcanique de la Sicile. Bientôt, le soufre de Sicile étant devenu insuffisant, on a été obligé de recourir à une autre source. Ce sont des industriels de Lyon, MM. Perret, qui ont découvert en 1830 le moyen de fabriquer l’acide sulfurique avec les pyrites (sulfures de fer et de cuivre). Ces pyrites furent extraites d’abord des mines de Chessy, près de Villefranche ; lorsque celles-ci furent épuisées, on exploita celles de Saint-Bel et de Sourcieux près l’Arbresle. Depuis on en a rencontré d’autres dans le Gard, dans l’Ardèche, et aujourd’hui dans l’Europe entière c’est à la combustion de pyrites analogues à celles du bassin du Rhône qu’on demande tout l’acide sulfurique que réclament les industries chimiques. Or la quantité de cet acide est prodigieuse. L’Europe en produit annuellement près de 800 millions de kilogrammes, c’est-à-dire de quoi remplir un canal de 2 mètres de profondeur, de 10 mètres de largeur et d’une longueur de près de 30 kilomètres.

On vient de voir que l’action de l’acide sulfurique sur le sel marin donne du sulfate de soude. Quand le manufacturier a obtenu ce dernier produit, il le transforme en carbonate de soude. Pour réaliser cette conversion si précieuse à l’industrie, on chauffe à 1,000 degrés environ dans des fours à réverbère le sulfate mélange préalablement à des quantités déterminées de charbon et de craie ; mais il ne suffit pas de chauffer, il importe d’agiter continuellement la masse. C’est une des opérations les plus pénibles des arts chimiques. En face du four dont les portes viennent d’être ouvertes, deux ou trois ouvriers se présentent. Nus jusqu’à la ceinture, ils saisissent d’énormes pelles en fer, des ringards gigantesques dont le manche ne mesure pas moins de 10 mètres de longueur, dont le poids atteint quelquefois 50 kilogrammes, et, armés de ces outils formidables, ils soulèvent, ils brassent les 1,000 ou 1,200 kilogrammes de matière incandescente qui bouillonne dans le four. Or voici que ce travail exténuant, pendant lequel les forces musculaires de l’ouvrier s’épuisent douloureusement, disparaît peu à peu de la soudière. On commence à remplacer le four à soude ordinaire par un appareil nouveau qui de lui-même, au moyen d’un mécanisme approprié, détermine au sein de la masse génératrice de la soude l’agitation nécessaire à la formation de cet alcali ; cet appareil est un énorme cylindre horizontal de 5 mètres de longueur sur 3 mètres de diamètre auquel une petite machine à vapeur imprime un mouvement de rotation sur son axe, et que traverse de bout en bout la flamme d’un foyer. Les matières premières jetées pêle-mêle, agitées, soulevées sans cesse par la rotation même du cylindre, réagissent rapidement les unes sur les autres, et la soude se forme sans que le bras d’un manœuvre soit nécessaire pour faciliter la réaction. Le rôle de l’ouvrier soudier se borne à diriger la machine motrice, dont il accélère ou ralentit la marche, travail où l’attention intelligente se substitue à l’effort brutal.

Par une naturelle transition, M. Aimé Girard entretient ensuite l’auditoire d’un autre alcali, rival de la soude, la potasse. Jadis on extrayait la potasse des cendres de bois. C’est parce que ces dernières contiennent beaucoup de potasse soluble mélangée à des sels calcaires et à des produits siliceux insolubles qu’on les emploie pour la lessive du linge. Tant que la consommation du bois n’a pas dépassé certaines proportions, on a pu l’incinérer pour en extraire la potasse. Malheureusement le bois devient de jour en jour plus rare ; force a donc été de renoncer au salinage, qui n’est plus pratiqué que dans quelques parties de la Russie et en Amérique. Où prendre par suite la potasse que la fabrication du cristal, des savons mous, du salpêtre, consomme en si grandes quantités ? C’est l’industrie du sucre qui, la première, a fait concurrence à la fabrication des potasses forestières. La betterave enlève au sol où elle végète les sels de potasse qu’il contient. Une betterave de 2 kilogrammes renferme près de 2 grammes de ces sels. Soumise aux opérations successives que la préparation du sucre comporte, cette racine fournit en définitive trois produits, un tourteau que l’on donne à manger aux bestiaux, du sucre et de la mélasse. Eh bien ! c’est dans la mélasse que se concentrent les potasses de la betterave, et c’est de la mélasse que M. Dubrunfaut a découvert en 1840 le moyen de les séparer. Cette source, qui fournit à la France près de 6,000 tonnes de potasse par an, n’a pas tardé à être insuffisante, et les industriels ont dû se préoccuper d’en chercher une autre. C’est alors qu’on a songé à cette Mme inépuisable de potasse qui est l’eau de mer ; Parmi les composés salins que l’eau de mer tient en dissolution se trouve le chlorure de potassium. Il ne faudrait pas croire pourtant que l’extraction de ce sel soit chose facile. Il a fallu, pour rendre cette opération pratique, les recherches persévérantes de M. Balard et l’industrieuse ténacité d’un des plus habiles manufacturiers du midi, M. Merle, de Salyndres. Rien ne saurait donner une idée des difficultés qu’a coûtées l’installation des appareils de concentration et de refroidissement au moyen desquels on retire la potasse des eaux-mères des marais salans. Cette belle industrie était en pleine activité et nous rapportait des millions, quand elle reçut, il y a quelques années à peine, le coup le plus terrible et le plus inattendu. On venait de découvrir à Stassfurt, dans la Prusse saxonne, des couches énormes d’un minerai de potasse presque pur, de chlorure de potassium natif (carnalite). L’apparition des potasses allemandes sur le marché européen fit tomber du jour au lendemain le prix du chlorure de potassium de 55 francs à 22 francs les 100 kilogrammes. Les industriels français, il faut le dire à leur honneur, n’en ont pas été découragés. M. Merle et ses collaborateurs se sont remis à l’œuvre avec une opiniâtre ardeur et une plus savante énergie, ils ont modifié et amélioré leurs procédés, et notre industrie des eaux-mères en Camargue a recommencé, il y a peu de temps, à livrer au commerce 1,000 ou 1,200 tonnes de potasses qui, sous le double rapport du prix et de la qualité, n’ont rien à redouter de la concurrence étrangère.

La fabrication du papier n’a eu longtemps qu’une seule matière première, le chiffon ; mais, la consommation du papier ayant augmenté dans une proportion énorme, on a eu recours à divers produits restés jusque-là sans emploi, tels que les jutes et les phormiums que l’Inde et l’Australie nous envoient sous la forme d’emballages grossiers. La paille du seigle et du blé, qui ne servait qu’à la fabrication des papiers jaunes et communs, a été, par l’action successive des alcalis et du chlore, transformée en une pulpe blanche et soyeuse, parfaitement appropriée au moins à la production des papiers ordinaires, dont on fait les journaux. L’Angleterre, après avoir monopolisé le sparte d’Espagne et l’halfa d’Algérie, est parvenue à retirer de ces végétaux si durs une magnifique pâte à papier ne le cédant en rien aux plus belles pâtes de chiffons. Enfin nous voyons aujourd’hui de tous côtés, en France, en Angleterre, en Allemagne, s’élever de vastes établissemens où le bois lui-même, le pin, le sapin, le tremble, sont convertis en pâte à papier. Déchiqueté par un coupe-racine puissant, le bois est jeté dans d’énormes chaudières autoclaves, et là soumis pendant six heures à l’action combinée d’une lessive de soude concentrée, d’une température de 200 degrés et d’une pression de 14 atmosphères. Sous cette triple influence, la matière incrustante du bois s’oxyde et se dissout, les fibres se dissocient, et à la place du tissu ligneux résistant et cassant la chaudière est remplie d’une masse souple qu’on décolore en quelques heures, et qui procure finalement une pâte à papier d’une blancheur parfaite. C’est ainsi que l’industrie papetière prend une extension de plus en plus grande. En France, la consommation du papier était en 1854 de 60 millions de kilogrammes. Elle était l’année dernière de 130 millions. Avec cette quantité de papier, on pourrait faire à l’équateur de la terre une ceinture de 60 mètres de large.

Les États-Unis et l’Angleterre font plus de papier que la France ; en revanche, c’est nous qui fabriquons le plus de sucre de betteraves. Cette grande industrie, née en France, y est parvenue aujourd’hui à une perfection presque absolue. Vers 1836, la betterave donnait chaque année à la France 3 millions de kilogrammes de sucre ; cette année, la production atteindra 450 millions de kilogrammes. Notre consommation est loin d’égaler ce dernier chiffre ; il y a là par conséquent un important élément d’exportation. D’ailleurs ce n’est pas seulement par la belle qualité de ses produits que notre industrie sucrière mérite attention. Elle évite le raffinement et sait obtenir du premier jet des sucres blancs, cristallisés, sans odeur et dès à présent fort recherchés.

Il nous est impossible d’indiquer même sommairement les communications dont la médecine et la chirurgie ont été l’objet dans les séances du congrès. L’intérêt qu’elles présentent a été d’ailleurs effacé par celui d’une lecture à laquelle l’apparition du choléra en France donne une néfaste actualité. M. le docteur Blanc, chirurgien-major de l’armée britannique, a étudié le choléra dans l’Inde, et son opinion est que la maladie n’est pas dans l’air, qu’elle se transmet d’homme à homme par les évacuations, et que la plupart du temps l’eau employée en boisson est le véhicule des germes morbides contenus dans ces évacuations. Voilà en deux mots sa théorie[2]. Avant d’indiquer les faits qu’il invoque à l’appui et les conséquences qu’il en tire, il convient de marquer brièvement les conditions dans lesquelles l’épidémie actuelle a pris naissance. C’est à Hurdwar, localité sainte située sur les bords du Gange, à 13 milles environs de l’endroit où le fleuve quitte l’Himalaya, que le fléau se déclara en 1867. Le campement d’Hurdwar est formé d’une bande de terre de 9 milles de long sur 3 milles de large, au centre de laquelle s’écoule le fleuve : 3 millions de pèlerins s’y étaient établis au commencement d’avril. Le 12 de ce mois, les prêtres assignèrent pour le bain sacré un espace de 200 mètres de long sur 10 de large, séparé du reste des eaux par des barrières. Les pèlerins, arrivant en masses serrées de tous les points du campement, se précipitèrent dans ce couloir étroit, qui depuis l’aurore jusqu’au coucher du soleil fut encombré par une foule immense. Les pèlerins ne se contentent pas de se plonger dans ces flots bien vite infectés, ils y déposent les cendres de leurs parens défunts, ils y lavent leurs vêtemens. De plus ils boivent tous sans exception de l’eau du fleuve, et quand plusieurs membres d’une même famille se baignent ensemble, chacun donne à boire aux autres dans sa main. Dès le lendemain 13 avril, huit cas de choléra furent reçus dans les hôpitaux de Hurdwar, où l’on n’en avait pas vu un seul depuis plus de neuf ans. Les pèlerins, se dispersant de tous côtés pour retourner chez eux, répandirent rapidement le mal. Partout l’explosion du fléau suivit de près le retour des pieux voyageurs. Le 21 mai, le choléra régnait épidémiquement à Peshawar, où il fit périr 92 hommes de la garnison. De là il passa dans le Kachmir et dans l’Afghanistan. Vers la fin de 1867, il était en Perse, d’où il gagna la Russie orientale, pour se répandre peu à peu dans presque toute l’Europe. Or M. Blanc, d’accord avec beaucoup de médecins anglais de l’Inde, est convaincu que l’eau infectée du Gange est le moyen par lequel les quelques pèlerins qui étaient arrivés du fond de l’Inde à Hurdwar avec le choléra ont transmis cette affection à la plupart des autres.

L’épidémie de choléra qui a désolé l’Amérique en 1866 fournit une autre preuve de la propagation du choléra par l’eau potable. On trouve dans les documens officiels du département de la guerre à Washington des témoignages comme celui-ci : « Les troupes dans les casernes ont joui d’une grande immunité. Le 116e régiment, campé près de l’hôpital de Sedgwick, et pourvu là d’eau de citerne, a été entièrement exempt de choléra. Tout récemment ce régiment a été envoyé en garnison dans la ville. Durant un ou deux jours, l’eau de citerne et l’eau distillée vinrent à manquer en partie, quelques hommes burent de l’eau du Mississipi. Immédiatement deux cas de choléra se déclarèrent. De l’eau distillée fut de nouveau fournie aux hommes, et il n’y eut plus un cas de choléra dans le régiment. » Les tribus aborigènes qui habitent les bas-monts du Bengale, depuis Orissa jusqu’à Nagpore, ont la plus grande aversion pour les gens de la plaine, et ces derniers, Hindous orthodoxes, croiraient se perdre en touchant à la nourriture, en buvant de l’eau ou en se servant des vêtemens des aborigènes. Or il arrive que ceux-ci ne connaissent pas le choléra. Ils n’ont certes pas plus de souci de l’hygiène que les Hindous de la plaine, mais les eaux qu’ils boivent ne subissent pas le contact de malades ni d’objets souillés. M. Blanc invoque enfin le témoignage de M. Murray, inspecteur-général des hôpitaux du Bengale. M. Murray a fait en juin 1869 un rapport officiel qui est un résumé des informations recueillies par près de cinq cents médecins anglais dans les différens gouvernemens de l’Inde. On y lit ceci : « Le corps humain semble être le principal moyen de reproduction, de multiplication et de dissémination du poison. Cela a été déjà entièrement prouvé par l’histoire du progrès des épidémies qui ont sévi aux Indes, en Europe et en Amérique. L’histoire de l’épidémie de Hurdwar en 1867 a démontré que la maladie rayonne d’un seul point dans les directions prises par les voyageurs. Il y a des faits très nombreux et parfaitement établis qui démontrent que le poison avait été mêlé à l’eau de certains puits ou réservoirs, et que ceux qui ont ou de cette eau ont contracté le choléra. L’épidémie qui débuta à Hurdwar nous offre des exemples de villageois pris de choléra deux jours après l’infection des étangs des villages. Ces étangs avaient été infectés soit par des pèlerins qui s’y étaient baignés, soit par des vêtemens de cholériques qu’on y avait lavés. » M. Blanc examine d’autre part les causes diverses qui semblent avoir quelque rapport avec le degré de violence d’une explosion cholérique, et il conclut de la discussion des faits que, si certaines conditions hygiéniques mauvaises, si certains états du sol ou de l’atmosphère peuvent avoir de l’influence sur une épidémie, ils n’en sauraient aucunement provoquer la genèse ou déterminer la marche. C’est par l’homme et les eaux qu’il infecte que le choléra se propage essentiellement, et non point par un miasme errant capricieusement dans l’atmosphère.

S’il en est ainsi, la prophylaxie du choléra devient chose aisée. M. Blanc déclare en effet que peu d’épidémies sont aussi faciles à éviter que le choléra, si l’on veut prendre un peu de peine. Il suffit de désinfecter avec énergie toutes les évacuations cholériques, d’éviter l’encombrement des malades atteints de choléra, de veiller avec le plus grand soin à ce que l’eau potable soit préservée de tout contact avec des objets ayant servi aux malades, enfin de faire observer partout les préceptes d’une rigoureuse hygiène. M. Blanc cite plusieurs exemples de disparition complète du choléra dans des localités de l’Inde où il avait réussi à faire prévaloir ces principes. Il parle aussi de l’heureuse efficacité du changement de localité. Quand des cas de choléra se déclarent dans une station militaire de l’Inde, les troupes quittent leurs casernes et vont se loger sous des tentes à quelques kilomètres de là Si de nouveaux cas ne surviennent plus après quelques jours, les casernes sont nettoyées et désinfectées, et les troupes y retournent. Si de nouveaux cas sont constatés dans le campement, celui-ci est changé et reporté quelques kilomètres plus loin, jusqu’à disparition complète du choléra.

M. Blanc raconte à ce sujet qu’en juin 1866 il était en Abyssinie, au camp de l’empereur Théodoros, qui le retenait captif. Le camp était installé à Zagé, près du lac Tana, dans un endroit bas et entouré de marécages. Des fièvres et des dyssenteries y sévissaient cruellement, puis le choléra y fût importé par des recrues provenant du pays de Tigré, où l’épidémie régnait. Chaque jour, le fléau tuait des centaines de soldats. L’empereur fit alors transporter le camp sur les collines de Korata. L’épidémie ne perdit point de son intensité, et l’église était remplie de cadavres au point que l’on n’y pouvait pénétrer. Les rues adjacentes étaient encombrées de morts autour desquels les parens en pleurs attendaient nuit et jour que des tombes fussent creusées. Enfin le 14, Théodoros consulta M. Blanc, qui dit à l’empereur de maintenir aussi pure que possible l’eau dont les hommes se servaient pour leur boisson, de marcher avec son armée vers les hauts plateaux du Begemder en remontant les cours d’eau, puis d’évacuer et d’isoler rigoureusement, loin du camp, dans des localités situées sous le vent, les malades nouveaux qui se présenteraient. Théodoros fit exécuter soigneusement ces prescriptions, et au bout de quelques semaines l’épidémie avait entièrement disparu. Tous ces déplacemens laissent les troupes dans les mêmes conditions générales d’agglomération, d’aération, de nourriture ; une seule chose a changé pour elles, la qualité des eaux qu’elles boivent.

Les conclusions pratiques à tirer de ces observations sont fort nettes. Il convient tout d’abord, en temps de choléra, de se méfier des eaux potables et de boire de préférence des eaux minérales ou même de l’eau distillée, bien aérée, qu’on mélange au vin. M. Blanc dit qu’aux Indes beaucoup de personnes, pendant les épidémies, font leur thé, leur café et leur soupe avec de l’eau aérée qui se vend en bouteilles et qu’on fait venir d’une ville où la maladie ne sévit pas. Tous les lieux occupés et les objets souillés par les cholériques devront être lavés et désinfectés au moyen d’eau tenant en dissolution une substance antiseptique, telle que l’acide phénique ou le chlorure d’alumine. Il importe surtout de faire bouillir, sans perdre une minute, la literie et le linge des malades dans la solution désinfectante. « Soyez modérés en toute chose, ajoute M. Blanc ; évitez les alimens indigestes, les fruits verts, les denrées altérées, les excès de toute nature, et bannissez toute frayeur. » Nous n’avons pas la moindre objection à faire aux conclusions si optimistes, si rassurantes, du savant praticien de l’armée des Indes touchant l’efficacité certaine de ces diverses mesures prophylactiques. Peut-être opposerions-nous quelques argumens à sa théorie de la propagation exclusive de l’épidémie par les eaux potables ; mais ce n’est pas le moment d’approfondir ce sujet.

A côté des conférences et des séances consacrées exclusivement à la science, séances dans lesquelles plusieurs centaines de mémoires ont été analysés ou discutés, les organisateurs du congrès avaient réservé une place aux divertissemens. L’excursion de Solutré a été surtout une agréable promenade pour ceux qui ne sont pas convaincus de l’importance extraordinaire des études anthropologiques. La piquante causerie de M. Ferdinand de Lesseps à propos du chemin de fer transasiatique, dont le directeur du canal de Suez a conçu le projet, a charmé un auditoire qui avait le droit de se montrer difficile. Une des journées qui laisseront le plus de gais souvenirs dans l’esprit des membres de l’association est celle qui a été employée à une excursion aux usines de La Voulte, dans l’Ardèche. Nous avons quitté Lyon le matin, au nombre de près de 200, sur un grand bateau à vapeur, avec lequel nous avons descendu le fleuve rapide, aux rives si pittoresques. A dix heures, une table immense, servie sur le pont, rassembla pour un festin frugal tous ces savans, de rangs, de talens et de goûts si divers, amicalement réunis dans la communauté des mêmes sentimens. Vers midi, on débarquait à La Voulte. Le but de l’excursion était la visite des hauts-fourneaux, fonderies et forges de la compagnie de Terre-Noire. Presque tous les membres du congrès connaissaient déjà la plupart des grandes opérations métallurgiques. Ce qu’ils ne connaissaient point et ce qu’ils admirèrent, c’est le vieux château de La Voulte, bâti pour les ducs de Soubise à la fin du XVIe siècle, tout au bord du Rhône, et le magnifique panorama qui s’offrit à leurs regards depuis la terrasse du château, où l’on avait servi pour eux les plus beaux fruits et les plus fins cépages. Il n’y a pas de plus splendides perspectives aux Alpes et aux Pyrénées que celle des collines et des pics du Dauphiné vus du point où nous étions. C’est un décor gigantesque, où les teintes chaudes et foncées des premiers plans contrastent avec le blanc radieux et l’azur mat des sommets lointains bizarrement découpés.

Il faut rappeler enfin le dîner de gala que M. Guimet a offert à l’association dans sa belle propriété de Neuville-sur-Saône, et surtout les fêtes qu’il a données en son honneur au parc de la Tête-d’Or, à Lyon. M. Guimet ne se contente pas de porter dignement le nom de son père, l’inventeur de l’outremer artificiel ; il travaille à répandre l’instruction et à fortifier la moralité dans ce bourg de Neuville, dont il est le bienfaiteur. L’instruction et la moralité, c’est-à-dire la lumière et la sagesse, n’est-ce pas là en définitive tout l’objectif de l’association française ? Il ne s’agit pas, en répandant les études scientifiques, en sollicitant pour elles les sympathies actives du public, d’introduire indiscrètement la préoccupation exclusive de la science partout, ni de convertir tous les hommes en savans. La science, en tant que culture abstraite de l’esprit et philosophie intérieure du monde, restera le lot d’mi petit nombre. La grande masse des hommes sera toujours nécessairement occupée par d’autres labeurs ou volontairement divertie par d’autres agrémens. La mission principale des associations populaires comme celle dont il est question ici doit être par conséquent bien moins d’aider à la multiplication des savans que de provoquer des adhésions éclairées à l’office de libération et d’émancipation que remplit la science, et de répandre ce qui est le nerf et la moelle de la science, l’esprit scientifique. L’esprit scientifique n’est autre en soi que l’instinct du travail et de la patience, le sentiment de l’ordre, de la réalité et de la mesure, et l’on conviendra qu’entendu de la sorte rien ne saurait être plus salutaire aux hommes. Quand on est convaincu que l’harmonie est la suprême raison des choses, que les bouleversemens, les violences et les infractions à la loi sont contraires à l’évolution régulière et lente des phénomènes, que l’avenir se rattache au passé par le présent, et qu’ils ne sont tous trois que les parties solidaires d’un même tout, ouvrage d’une idéale intelligence, on devient jaloux, et on désire que les autres le deviennent, de cet esprit de paix sereine et d’ordre inaltérable qui pénètre le monde.

Si l’esprit scientifique doit régler l’esprit pratique en introduisant dans les mœurs et dans la vie plus de sagesse et de gravité, dans l’industrie plus de sûreté et de précision, l’esprit scientifique à son tour doit être soumis à une direction d’un ordre plus élevé, celle de l’esprit philosophique. Nous touchons ici à un point fort délicat. On peut dire de la philosophie ce que M. l’évêque d’Orléans disait à l’assemblée nationale en parlant de la religion. La philosophie ne gêne pas nos savans, elle leur manque. De là l’irrésolution des entreprises, la divergence des directions, l’incohérence des travaux, l’obscurité des idées. C’est à cela, bien plus qu’à l’insuffisance des ressources matérielles, qu’il convient d’attribuer l’état d’infériorité relative de notre activité scientifique. Ah ! de combien nos savans dépasseraient ceux du reste de l’Europe, s’ils se fortifiaient par une plus claire notion des vérités de l’ordre spéculatif, par un goût plus vif des doctrines, par une plus juste confiance dans la vertu des abstractions !

La séance de clôture du congrès a eu lieu le jeudi 28 août. Après une allocution un peu mystique de M. le préfet Ducros, on a procédé à l’élection du bureau et au choix d’un lieu de réunion pour l’année prochaine ; M. Wurtz, vice-président cette année, sera président l’an prochain, M. d’Eichtal vice-président, et c’est à Lille que le congrès siégera en 1874. La réunion aura dans la capitale de la Flandre un aspect un peu différent, le personnel des assistans sera un peu modifié ; mais l’esprit de l’association sera le même, et il faut souhaiter qu’il ne change jamais.


FERNAND PAPILLON.

  1. Voyez le grand mémoire in-4o publié par MM. Arcelin et de Ferry, intitulé le Maçonnais préhistorique, 1870, et un essai fort curieux de reconstitution de la société humaine qui habitait Solutré, intitulé Solutré, ou les chasseurs de rennes de la France centrale, par M. Adrien Arcelin, in-8o ; Paris 1872.
  2. Ces conclusions confirment à peu près celles que nous avons formulées dans la Revue du 15 octobre 1872. — Nous devons rappeler que dès 1849 un savant médecin de notre marine, M. Ch. Pellarin, avait émis les mêmes idées sur la contagion du choléra.