L’Anti-Justine ou les délices de l’Amour (1864)/14

Vital Puissant ? (p. 38-40).

CHAPITRE XIV.

Le jeune homme, la fille et le moine.

Ma fille, en reconnaissant son amant, que son mari lui amenait pour l’enconner, avait rougi de pudeur et de désir ; elle trouva moyen de venir à moi pour me dire : « Faites disparaître la fille, on ne l’emploiera que cette nuit. » Je vis bien qu’elle voulait être foutue par son galant ; je cachai la putain ; voici maintenant le récit de ce qui se passa.

Dès que Connillette se fut commodément arrangée derrière le grand sopha, Conquette retourna auprès des deux hommes, qui la rapportèrent au foutoir, assise à cul nu sur leurs mains unies. « Allons, ma petite garce de femme, tu vas pourtant être dépucelée, foutue, lui disait Vitnègre ; mais ce n’est rien, c’est quand tu auras un gros vit cette nuit… » Il la troussait, l’arrangeait. « L’Enfonceur, que je te mette le vit dedans… Non, ma belle se le mettra elle-même : il faut qu’elle s’y accoutume. » Vitnègre sortit et je remarquai qu’il laissait la porte ouverte ; j’en augurai quelque noirceur, mais j’étais là. Timon, bien bas, dit à ma fille : « Vous le mettrai-je ? — Non, non, il est allé chercher des écoutants (ce mot glaça Timon). — Mais il vous estropiera !… — Je ne couche pas ici. » Alors l’amant satisfait la gamahucha doucement ; cependant la voluptueuse déchargea… Elle était aux anges quand j’entendis Vitnègre revenir ; je crus qu’il amenait le moine ; il entra rapidement, suivi de trois voisines… « Je vais vous montrer ça ; » en effet, il leur montra quelque chose dans sa chambre.

Cependant, mon amoureuse fille, gamahuchée par un amant aimé, fit un profond soupir ; les trois voisines prêtèrent l’oreille. « Ce n’est rien, dit Vitnègre ; ma femme est rentrée et je ne le savais pas : c’est pour elle cette étoffe-là. — Oh ! il faut la lui montrer, s’écrièrent les trois voisines. » Le monstre retint celle qui allait la chercher, il prit la lumière en disant : « Je vais auparavant voir si elle ne dort pas. » Il ne fut qu’à la porte, où il s’arrêta d’un air de méprise. Il recula, mais les trois voisines avaient vu comme lui, par-dessus son épaule, Conquette troussée, étendue à la renverse sur le pied du lit, la tête d’un homme entre les cuisses ; il les fit sortir par le corridor en se frappant le front.

Il avait rempli son but : si sa femme criait pendant la nuit, les trois voisines, qui se croyaient bien au fait, y mettraient les autres ; si madame Vitnègre périssait éculventrée par le timon du moine (qui étant très riche devait la payer soixante mille francs, et qui en avait déjà tué plusieurs, choisissant les plus étroites), ce serait la morte qui aurait tort.

Cependant Vitnègre rentrait auprès des deux amants, qui avaient changé de position. L’Enfonceur, après avoir déchargé par terre, s’était remis sur le ventre de ma fille. « Eh bien ! dit l’infâme mari, est-elle enfilée, bien enconnée !… Déchargez-vous ?… décharge-t-elle ?… — Nous avons déchargé, répondit Timon L’Enfonceur. — Je vais sortir, dit Vitnègre ; ramonez-la-moi encore pendant une bonne demi-heure que je serai dehors. Ne vous étonnez pas de ce que vous allez entendre : j’ai mes raisons pour cela. » Il alla dans le corridor, dont il ouvrit doucement la porte, et se mit à crier sourdement, comme s’il avait bourré sa femme à coups de pied : « Ah ! garce ! ah ! putain !… tu fous, sacrée salope, quand je suis sorti ; tu raccroches !… Je vais chez le commissaire ! » Il ouvrit la porte bruyamment, la referma de même, mais il dit tout bas avant de s’éloigner : « Remue du cul, ma petite femme ; courage, L’Enfonceur, fraie-la-moi bien. » — Voilà une ruse scélérate, dis-je à ma fille, pendant que Timon observait la sortie de Vitnègre ; le moine t’aurait tuée, et il ne néglige rien pour motiver ta mort — Sauvons-nous, me dit-elle. — Non, non, nous sommes assez pour te défendre. Feins à Timon que j’arrive. »

Le jeune homme rentra. « Voici mon papa qui arrive à propos. — Ah ! oui, reprit Timon, sa présence pare à tout, car j’allais proposer de nous enfuir, mais à présent, voyons ce qui arrivera, » Je lui montrai Connillette et lui fis entrevoir notre plan, que Timon trouva merveilleux. Le temps s’écoula vite, nous entendîmes revenir. Timon reporta la lumière dans la chambre, nous nous cachâmes, ma fille et moi, tandis que le jeune homme s’étendait sur le ventre de Connillette troussée. « Que ton vit ne m’approche pas, lui dit-elle, je suis gâtée ; que tes couilles ne me touchent pas le poil, j’ai des morpions !… »

Vitnègre entrait suivi du moine ; que le voisinage aux fenêtres prit pour le commissaire.