PRÉFACE



J’ai passé vingt-huit années de ma vie au milieu des peuples les plus divers, dans les cinq parties du Monde. Grâce aux soins que ma profession me permettait de donner aux indigènes et à l’étude de leurs langues, j’ai pu gagner leur confiance et voir de très près leurs mœurs, genre de vie, habitudes, etc… Ma spécialité des maladies des organes génitaux-urinaires m’a permis d’étudier sur le vif, et de recueillir de nombreuses et précieuses confidences.

Je ne me suis pas contenté d’observer les effets des passions humaines : il m’a paru indispensable de remonter à leurs causes morales, et d’en faire l’étude psychologique.

Tout en suivant, à l’Étranger, la route scientifique tracée par le maître Tardieu, je n’ai pas cherché à refaire sa remarquable Étude Médico-légale sur les Attentats aux Mœurs. J’ai placé la question sur un terrain plus vaste. Avec Moreau (de Tours), j’admets un sixième sens, le Sens Génésique, dont il a démontré psychologiquement l’existence, en prouvant que ses fonctions spéciales étaient distinctes des autres sens. C’est l’étude philosophico-médicale de ce sixième sens que j’ai eue en vue dans ce travail, ainsi que l’examen des perturbations qu’il subit sous l’influence non seulement du tempérament et de la constitution des diverses races, mais aussi des mœurs et des superstitions religieuses.

Ce n’est donc pas ici un ouvrage obscène, mais un document psychologique pour l’histoire générale de l’Amour dans la race humaine, une pierre apportée à ce vaste édifice à peine en construction. À côté de l’étude médico-légale pure, j’ai dû entrer à fond dans la recherche et l’examen philosophique des causes premières.

J’ai vu tout ce que je raconte, car rien ne m’a arrêté dans ce que je crois être la vérité. Ce que je n’ai pas vu, je le tiens de témoins oculaires dignes de créance. J’ai sondé chez mes clients le fond souvent bourbeux du cœur humain, et, fort de ma conscience, je l’ai éclairé avec le flambeau de la Philosophie. On peut me croire.

Je n’écris que pour le petit nombre des gens studieux, chercheurs de l’immuable vérité, à qui je l’offre ici sans voiles, dépouillée des oripeaux conventionnels. Je puis de la sorte révéler hardiment ce qu’il aurait été impossible d’écrire dans un récit ordinaire de voyage, qui peut et doit être mis entre les mains de tous.

J’ai cherché, d’ailleurs, et je crois avoir réussi à me faire comprendre sans sortir des bornes de la décence, par d’emploi le plus scrupuleux du langage médical.

Docteur Jacobus X…
Paris, Avril 1893.