I

L’ÉTAT AU-DESSUS DES LOIS INTERNATIONALES


Les traités internationaux ne lient pas l’État. Apologie de la guerre. ― Le système tient tout entier dans une certaine manière de concevoir l’État, sa nature et son rôle. On trouvera peut-être qu’une telle idée est trop abstraite pour avoir eu sur les esprits une action profonde ? Mais on verra qu’elle n’est abstraite qu’en apparence et recouvre, en réalité, un sentiment très vivant.

On s’entend généralement pour voir dans la souveraineté l’attribut caractéristique de l’État. L’État est souverain en ce sens qu’il est la source de tous les pouvoirs juridiques auxquels sont soumis les citoyens, et que lui-même ne reconnaît aucun pouvoir du même genre qui lui soit supérieur et dont il dépende. Toute loi vient de lui, mais il n’existe pas d’autorité qui soit qualifiée pour lui faire la loi. Seulement, la souveraineté qu’on lui prête ainsi d’ordinaire n’est jamais que relative. On sait bien qu’en fait l’État dépend d’une multitude de forces morales qui, pour n’avoir pas une forme et une organisation rigoureusement juridiques, ne laissent pas d’être réelles et efficaces. Il dépend des traités qu’il a signés, des engagements qu’il a librement pris, des idées morales qu’il a pour fonction de faire respecter et qu’il doit, par conséquent, respecter lui-même. Il dépend de l’opinion de ses sujets, de l’opinion des peuples étrangers avec laquelle il est obligé de compter.

Outrez, au contraire, cette indépendance, affranchissez-la de toute limite et de toute réserve, portez-la à l’absolu, et vous aurez l’idée que Treitschke se fait de l’État[1]. Pour lui, l’État est ἀυτάρϰης, au sens que les philosophes grecs donnaient à ce mot : il doit se suffire complètement à soi-même ; il a et ne doit avoir besoin que de soi pour être et pour se maintenir ; c’est un absolu. Faite uniquement pour commander, sa volonté ne doit jamais obéir qu’à elle-même. « Au-dessus de moi, disait Gustave Adolphe, je ne reconnais personne, sauf Dieu et l’épée du vainqueur. » Cette fière formule, dit Treitschke, s’applique identiquement à l’État[2] ; encore la suprématie de Dieu n’est-elle guère réservée ici que pour la forme. En somme, « il est dans l’essence même de l’État de n’admettre aucune force au-dessus de soi[3] ».

Toute supériorité lui est intolérable, ne fût-elle qu’apparente. Il ne peut pas même accepter qu’une volonté contraire s’affirme en face de la sienne : car tenter d’exercer sur lui une pression, c’est nier sa souveraineté. Il ne peut avoir l’air de céder à une sorte de contrainte extérieure, sans s’affaiblir et sans se diminuer. Un exemple concret, mis sous ces formules, en fera mieux comprendre le sens et la portée. On se rappelle comment, lors des affaires du Maroc, l’empereur Guillaume II envoya à Agadir une de ses canonnières ; c’était une façon comminatoire de rappeler à la France que l’Allemagne n’entendait pas se désintéresser de la question marocaine. Si, à ce moment, la France, pour répondre à cette menace, avait envoyé dans le même port, à côté du Panther, un de ses vaisseaux, cette simple affirmation de son droit eût été considérée par l’Allemagne comme un défi, et la guerre eût vraisemblablement éclaté. C’est que l’État est un être éminemment susceptible, ombrageux même ; il ne saurait être trop jaloux de son prestige. Si sacrée que soit à nos yeux la personnalité humaine, nous n’admettons pas qu’un homme venge dans le sang un simple manquement aux règles ordinaires de l’étiquette. Un État, au contraire, doit considérer comme une insulte grave le moindre froissement d’amourpropre. « C’est méconnaître, dit Treitschke, les lois morales de la politique que de reprocher à l’État un sens trop vif de l’honneur. Un État doit avoir un sentiment de l’honneur développé au plus haut point, s’il ne veut pas être infidèle à son essence. L’État n’est pas une violette qui ne fleurit que cachée ; sa puissance doit se dresser fièrement et en pleine lumière ; il ne doit pas la laisser discuter même sous forme symbolique. Le drapeau a-t-il été offensé ? Son devoir est de réclamer satisfaction et, s’il ne l’obtient pas, de déclarer la guerre, si minuscule qu’en puisse paraître la raison ; car il doit exiger absolument que des égards lui soient témoignés, en rapport avec le rang qu’il occupe dans la société des nations[4]. »

Les seules limitations possibles à la souveraineté de l’État sont celles qu’il consent lui-même quand il s’engage par contrats envers d’autres États. Alors, du moins, on pourrait croire qu’il est tenu par les engagements qu’il a pris. À partir de ce moment, semble-t-il, il a à compter avec autre chose que lui-même : ne dépend-il pas du pacte conclu ? Mais, en fait, cette dépendance n’est qu’apparente. Les liens qu’il a contractés ainsi sont l’œuvre de sa volonté ; ils restent, pour cette raison, subordonnés à sa volonté. Ils n’ont de force obligatoire que dans la mesure où il continue à les vouloir. Les contrats d’où ces obligations dérivent visaient une situation déterminée ; c’est à cause de cette situation qu’il les avait acceptées ; qu’elle change, et il est délié. Et comme c’est lui qui décide souverainement et sans contrôle si la situation est ou non restée la même, la validité des contrats qu’il a souscrits dépend uniquement de la manière dont il apprécie, à chaque moment, les circonstances et ses intérêts. Il peut, en droit, les dénoncer, les résilier, c’est-à-dire les violer, quand et comme il lui plaît.

« Tous les contrats internationaux ne sont consentis qu’avec cette clause : rebus sic stantibus (tant que les circonstances seront les mêmes). Un État ne peut pas engager sa volonté envers un autre État pour l’avenir. L’État n’a pas de juge au-dessus de soi et, par conséquent, tous ses contrats sont conclus avec cette réserve tacite. C’est ce que confirme cette vérité qui sera reconnue aussi longtemps qu’il y aura un droit international : dès qu’une guerre a éclaté, les contrats entre les États belligérants cessent d’exister. Or, tout État, en tant qu’il est souverain, a tous les droits de déclarer la guerre quand il lui plaît. Par conséquent, tout État est en situation de dénoncer à volonté les contrats qu’il a conclus… Ainsi, il est clair que, si les contrats internationaux limitent la volonté d’un État, ces limitations n’ont rien d’absolu[5]. »

Tandis que, dans les contrats entre particuliers, réside une puissance morale qui domine les volontés des contractants, les contrats internationaux ne sauraient avoir cet ascendant ; car il n’y a rien au-dessus de la volonté d’un État. Il en est ainsi non seulement quand le contrat a été imposé par la violence, à la suite d’une guerre, mais encore quand il a été librement accepté. Dans tous les cas, quels qu’ils soient, « l’État se réserve d’apprécier l’étendue de ses obligations contractuelles[6] ». Ce principe peut choquer les juristes, juges et avocats ; mais « l’histoire n’est pas faite pour être considérée du point de vue auquel se placent les juges dans les procès civils[7] ». C’est là un point de vue de « philistins » qui ne saurait être celui de l’homme d’État, ni de l’historien[8].

À plus forte raison, un État ne saurait-il accepter la juridiction d’un tribunal international, de quelque manière qu’il soit composé. Se soumettre à la sentence d’un juge, ce serait se placer dans un état de dépendance, inconciliable avec la notion de souveraineté. D’ailleurs, dans des questions vitales comme sont celles qui opposent les États entre eux il n’y a pas de puissance étrangère qui puisse juger avec impartialité. « Si nous commettions la sottise de traiter la question d’Alsace comme une question ouverte et si nous laissions à un arbitre le soin de la trancher, qui croira sérieusement qu’on puisse en trouver un qui soit impartial[9]. » Aussi bien, ajoute Bernhardi[10], au nom de quel droit prononcera le juge ? Invoquera-t-il ce sens de la justice que chacun de nous trouve dans sa conscience ? Mais on sait tout ce qu’il a de vague, d’incertain et de fuyant ; il varie d’un individu à l’autre, d’un peuple à l’autre. S’appuiera-t-on sur le droit international établi ? Mais nous venons de voir que ce droit repose lui-même sur des accords éminemment précaires que chaque État peut légitimement dénoncer à sa guise. Il exprime la situation respective des États, et celle-ci est perpétuellement en voie de changement. Il laisse donc la place libre aux préjugés individuels et nationaux. En un mot, un tribunal international suppose un droit international institué, fait de normes impersonnelles, impératives, qui s’imposent à tous et qui ne sont contestées par aucune conscience droite : or, un droit international de ce genre n’existe pas.

Un État se doit à lui-même de résoudre par ses propres forces les questions où il juge que ses intérêts essentiels sont engagés. La guerre est donc la seule forme de procès qu’il puisse reconnaître, et « les preuves qui sont administrées dans ces terribles procès entre nations ont une puissance autrement contraignante que celles qui sont usitées dans les procès civils[11] ». C’est pourquoi, tant qu’il y aura entre les États des compétitions, des rivalités, des antagonismes, la guerre est inévitable. Or la concurrence est la loi des États plus encore que des individus ; car, de peuple à peuple, elle n’est atténuée ni par la sympathie mutuelle ni par la communauté de culture et l’attachement à un même idéal. Sans la guerre, l’État n’est même pas concevable. Aussi le droit de faire la guerre à sa guise constitue-t-il l’attribut essentiel de sa souveraineté. C’est par ce droit qu’il se distingue de tous les autres groupements humains. Quand un État n’est plus en situation de tirer l’épée comme il veut, il ne mérite plus son nom. « On peut encore, par convenance, par politesse et amabilité, l’appeler un royaume. Mais la science, qui a pour premier devoir de dire la vérité, doit déclarer sans ambages qu’un tel pays n’est plus un État… C’est par là que la couronne de Prusse se distingue des autres États allemands. Seul, le roi de Prusse a qualité pour déclarer la guerre. La Prusse n’a donc pas perdu sa souveraineté comme les autres États[12]. »

La guerre n’est pas seulement inévitable : elle est morale et sainte. Elle est sainte, d’abord parce qu’elle est la condition nécessaire à l’existence des États et que, sans État, l’humanité ne peut pas vivre. « En dehors de l’État, l’humanité ne peut pas respirer[13]. » Mais elle est sainte aussi parce qu’elle est la source des plus hautes vertus morales. C’est elle qui oblige les hommes à maîtriser leur égoïsme naturel ; c’est elle qui les élève jusqu’à la majesté du sacrifice suprême, du sacrifice de soi. Par elle, les volontés particulières, au lieu de s’éparpiller à la poursuite de fins mesquines, se concentrent en vue de grandes choses, « et la petite personnalité de l’individu s’efface et disparaît devant les vastes perspectives qu’embrasse la pensée de l’État ». Par elle, « l’homme goûte la joie de communier avec tous ses compatriotes, savants ou simples d’esprit, dans un seul et même sentiment, et quiconque a goûté ce bonheur n’oublie plus jamais ce qu’il a de doux et de réconfortant ». En un mot, la guerre implique un « idéalisme politique » qui entraîne l’homme à se dépasser soi-même. La paix, au contraire, c’est le « règne du matérialisme » ; c’est le triomphe de l’intérêt personnel sur l’esprit de dévouement et de sacrifice, de la vie médiocre et vulgaire sur la vie noble. C’est le renoncement « paresseux[14] » aux grands desseins et aux grandes ambitions. L’idéal de la paix perpétuelle n’est pas seulement irréalisable ; c’est un scandale moral[15], une véritable malédiction[16]. « N’est-ce pas, en effet, un renversement de la morale que de vouloir exclure l’héroïsme de l’humanité ? » C’est un non-sens que d’invoquer contre la guerre les principes du christianisme : la Bible dit expressément que l’autorité a pour devoir de tirer l’épée. Aussi « est-ce toujours des époques fatiguées, sans vigueur et sans enthousiasme, qui se sont complues dans ce rêve d’une paix éternelle ». Ce fut le cas après le traité d’Utrecht comme après le congrès de Vienne. D’après Treitschke, au moment où il écrivait, l’Allemagne traversait une période du même genre. Mais, ajoute-t-il, on peut être assuré qu’elle ne durera pas. « Le Dieu vivant veillera à ce que la guerre revienne toujours, comme le terrible remède dont a besoin l’humanité[17]. »


L’État est Puissance. Suppression des petits États. ― En résumé, l’État est une personnalité impérieuse et ambitieuse, impatiente de toute sujétion même apparente ; il n’est vraiment lui-même que dans la mesure où il s’appartient complètement à lui-même. Mais, pour pouvoir jouer ce rôle, pour contenir les velléités d’empiétement, imposer sa loi sans en subir aucune, il faut qu’il possède de puissants moyens d’action. Un État faible tombe nécessairement sous la dépendance d’un autre et, dans la mesure où sa souveraineté cesse d’être entière, il cesse lui-même d’être un État. D’où il suit que ce qui constitue essentiellement l’État, c’est la puissance. Der Staat ist Macht, cette formule, qui revient sans cesse sous la plume de Treitschke, domine toute sa doctrine.

Ce qui fait d’abord et avant tout cette puissance, c’est la force physique de la nation ; c’est l’armée. L’armée se trouve ainsi occuper, dans l’ensemble des institutions sociales, une place tout à fait à part. Ce n’est pas seulement un service public de première importance, c’est la pierre angulaire de la société ; c’est « l’État incarné[18] ». Quand, avec Treitschke et l’Allemagne contemporaine, on fait de la guerre une chose très sainte, l’armée, organe de la guerre, ne peut pas ne pas participer de cette sainteté. Certes, une armée nombreuse et fortement organisée ne suffit pas à assurer la puissance de l’État. Encore faut-il que la politique, « dont la guerre n’est que la forme violente », soit conduite par des esprits clairs et justes, par des volontés énergiques, conscientes du but où elles doivent tendre et persévérantes dans l’effort. Il faut aussi que les soldats aient l’entraînement moral, les vertus militaires sans lesquelles le nombre et la technique la plus savante sont sans effet. La puissance de l’État suppose donc de sérieuses qualités morales. Mais ces qualités ne sont pas recherchées pour elles-mêmes : elles ne sont que des moyens en vue de donner à l’armée son maximum d’efficacité ; car c’est par l’armée que l’État réalise son essence. C’est le principe même du militarisme[19].

Il y a eu, il est vrai, des États qui ont cherché de préférence leur grandeur et leur gloire dans les arts, dans les lettres, dans la science : mais ils manquaient ainsi à la loi fondamentale de leur nature et c’est une faute qu’ils ont payée chèrement. « Sous ce rapport, l’histoire universelle offre, au penseur qui réfléchit, le spectacle d’une justice implacable. Le rêveur peut déplorer qu’Athènes, avec sa culture raffinée, ait succombé devant Sparte, la Grèce devant Rome, que Florence, malgré sa haute moralité, n’ait pu supporter la lutte contre Venise. Le penseur sérieux reconnaît qu’il en devait être ainsi. Tout cela est le produit d’une nécessité interne. L’État n’est pas une académie des arts. Quand il sacrifie sa puissance aux aspirations idéales de l’humanité, il se contredit et va à sa ruine[20]. » Un État n’est pas fait pour penser, pour inventer des idées neuves, mais pour agir. « Ce n’est pas Fichte, Paul Pfïzer ou d’autres chercheurs qui ont fait l’Allemagne ; c’est Guillaume Ier, c’est Bismarck. Les grands penseurs de la politique ont leur gloire ; mais ils ne sont pas les véritables héros de l’histoire ; ce sont les hommes d’action. » Les fondateurs d’États ne sont pas des génies, au sens intellectuel du mot. L’empereur Guillaume n’avait rien de génial, mais c’était un homme de calme et de ferme volonté. C’est la force du caractère qui faisait sa force[21].

Mais si l’État se définit par la puissance, les États ne méritent d’être appelés ainsi que dans la mesure où ils sont réellement puissants. Les petits pays, ceux qui ne peuvent se défendre et se maintenir par leurs seules forces ne sont pas de véritables États, puisqu’ils n’existent que par la tolérance des grandes Puissances. Ils n’ont et ne peuvent avoir qu’une souveraineté nominale. C’est le cas notamment des États neutres, tels que la Belgique, la Hollande et la Suisse. Leur indépendance, en effet, n’est garantie que par des conventions internationales dont nous savons la fragilité. Que l’un des contractants en vienne à juger qu’elles ne sont plus en rapport avec la situation respective des Puissances, et il a le droit de se délier. Treitschke nous indique même, par une omission involontaire, qu’à ses yeux l’autonomie de la Belgique et de la Hollande ne répond plus à l’état présent de l’Europe ; car il dit de la Suisse, mais de la Suisse seule : « Aussi longtemps qu’il ne se produira pas de changement essentiel dans la société actuelle des États, la Suisse peut compter sur une longue existence[22]. » Le silence qu’il observe sur les deux autres États neutres est significatif. Il y a, d’ailleurs, d’autres passages où il dit expressément de la Hollande qu’elle doit normalement rentrer dans la « vieille patrie allemande », que ce retour est « hautement désirable[23] », que l’Allemagne « a besoin de la Hollande comme de son pain quotidien[24] ». Et quant à la Suisse elle-même, elle est avertie que le droit à l’existence qui lui est concédé est tout conditionnel, par conséquent provisoire : il ne vaut que rebus sic stantibus ; la menace n’est qu’ajournée.

D’une manière générale, il ne parle qu’avec mépris du petit État, de ce qu’il appelle, d’un mot intraduisible, la Kleinstaaterei. « Dans la notion même du petit État, dit-il, il y a quelque chose qui prête incontestablement au sourire. En soi, la faiblesse n’a rien de ridicule ; mais il en va tout autrement de la faiblesse qui affecte les allures de la force[25]. » L’idée d’État éveille celle de puissance ; un État faible réalise donc une contradiction. Une fierté, un orgueil sans bornes, voilà, par excellence, les vertus de l’État. Or « il n’y a que les grands États où puisse se développer un véritable orgueil national, signe de la valeur morale d’un peuple[26] ». Les larges perspectives qui y sont ouvertes aux individus y développent un « sens mondial » (Weltsinn). On ne peut plus se laisser enfermer dans des limites trop resserrées ; on a besoin d’espace. La domination de la mer agit surtout dans ce sens. « La mer libre libère l’esprit. » Le petit État, au contraire, rapetisse tout à sa mesure. Il développe une mentalité de gueux (eine bettelhafte Gesinnung) : on apprend à n’y estimer l’État que d’après les impôts qu’il lève. « De là résulte un matérialisme qui a, sur les sentiments des citoyens, la plus déplorable influence[27]. »

De ce tableau, Treitschke conclut que l’existence des petits États n’est plus aujourd’hui qu’une survivance sans raison d’être. Suivant lui, il est dans la nature des choses qu’ils disparaissent : ils sont fatalement destinés à être absorbés par les grands États. Et comme la dignité de grand État n’est pleinement reconnue qu’à cinq Puissances (l’Italie nous est présentée comme seulement à la veille d’être admise dans cette aristocratie des peuples européens)[28], on entrevoit ce que deviendrait la carte de l’Europe si les conceptions de Treitschke, qui sont aussi celles de l’Allemagne actuelle, venaient jamais à se réaliser.



  1. Politik, I, p. 41.
  2. Politik, 1, p. 37.
  3. « Das Wesen des Staates besteht darin, dass er keine höhere Gewalt über sich dulden kann » (ibid.).
  4. « Mag der Anlass noch so kleinlich erscheinen » II, p. 550.
  5. I, p. 37-38.
  6. I, p. 102.
  7. II, p. 550.
  8. I, p. 102-103.
  9. I, p. 38.
  10. Unsere Zukunft, ch. V.
  11. I, p. 73.
  12. I, p. 39-40.
  13. I, p. 115.
  14. « Der faule Friedenszustand » (I, p. 59).
  15. « Dass der Gedanke des ewigen Friedens… ein unsittliches Ideal ist, haben wir schon erkannt » (II, p. 553).
  16. « Der Unsegen des Friedens » (I, p. 59).
  17. I, p. 76. ― Tous les passages cités, sans être accompagnés d’une référence spéciale, sont empruntés aux p. 72-76 du tome I.
  18. II, p. 361.
  19. II, p. 354-363.
  20. I, p. 34.
  21. I, p. 34.
  22. I, p. 42.
  23. « Dass aber wenigstens Holland noch einmal zum alten Vaterland zurückkehrt ist… dringend zu wünschen » (I, p. 128).
  24. I, p. 218.
  25. I, p. 43.
  26. I, p. 44-45.
  27. I, p. 43. Treitschke veut dire que, dans les petits pays, on considère comme le meilleur gouvernement celui qui coûte le moins cher et, pour cela, lève le moins d’impôts. C’est, ajoute-t-il, perdre de vue « que l’État comme la coquille de l’œuf, ne protège pas sans exercer une compression ».
  28. « Italien ist nahe daran, in ihn hineinzukommen » : l’Italie est près d’y entrer (dans le cercle des grands États) (I, p. 42).