Hetzel (p. 135-147).

IX

un point de droit.

Le 22, le Seamew mouilla de bon matin devant Ponta-Delgada, capitale de Saint-Michel, sa dernière escale aux Açores.

Grande de sept cent soixante-dix kilomètres carrés, comptant près de cent vingt-sept mille habitants, cette île est la plus importante de l’archipel, et sa capitale, avec ses dix-sept mille âmes, est la quatrième ville du royaume de Portugal. Protégée à l’Est et à l’Ouest par deux caps : la Ponta-Delgada, qui lui donne son nom, et la Ponta-Galé, une digue de huit cent cinquante mètres de long achève de rendre très sûre sa rade fermée, suffisante pour cent navires.

C’est entre cette digue et le rivage que le Seamew avait mouillé, au milieu d’un grand nombre d’autres bâtiments à voiles et à vapeur. Au Nord, Ponta-Delgada s’élevait en terrasses, séduisante par ses maisons très blanches symétriquement disposées. De tous côtés, elles rayonnent, s’égrenant peu à peu dans un océan de jardins superbes, qui font à la ville une verdoyante auréole.

La plupart des passagers s’étant trop attardés dans leurs couchettes, la descente à terre fut remise à l’après-midi. Trois jours pleins étant consacrés à l’île de Saint-Michel, et quatre ou cinq heures devant largement suffire à parcourir Ponta-Delgada, il n’y avait pas lieu de se presser.

Cependant, ce n’est pas sans orages que cette décision put être adoptée. Certains manifestèrent un mécontentement très vif. Saunders et Hamilton furent parmi les plus grincheux, cela va de soi. Encore un accroc au programme ! Cela devenait intolérable ! Ils allèrent porter leurs doléances à l’Administration.

L’Administration répondit que ces messieurs étaient libres de descendre à terre, si le cœur leur en disait. Saunders répliqua qu’on devait y descendre TOUS, avec Administrateur et interprète, et, ce, aux frais de l’Agence. Thompson lui conseilla alors de persuader ses compagnons, et l’entrevue prit fin sur un ton assez aigre.

En résumé, deux passagers seulement débarquèrent dans la matinée : le sauvage jeune couple qui voyageait à sa manière. Thompson se tint pour assuré de ne les revoir qu’à l’heure même du départ.

Quant à Saunders et Hamilton, ils durent ronger leur frein. Avec quatre ou cinq de leurs compagnons presque aussi désagréables qu’eux-mêmes, ils occupèrent leurs loisirs par un échange d’aimables propos.

Ce groupe d’opposants n’était pas bien nombreux. Il existait pourtant, et Thompson fut obligé de constater que ses bourreaux faisaient des prosélytes. Pour la première fois, une scission légère, mais réelle, séparait les hôtes du Seamew en deux camps heureusement très inégaux. Le motif en était futile, mais il semblait que tous les désagréments précédents revinssent à la mémoire et fissent masse pour grossir hors de raison l’incident actuel.

Thompson s’en remit au temps.

Après le déjeuner, en effet, quand les embarcations eurent déposé tout le monde, sauf l’irréconciliable Johnson et le pestiféré Blockhead, sur le quai de Ponta-Delgada, toute mésintelligence parut oubliée, et l’on procéda, sous la conduite de Robert, à la visite de la ville, en rangs dont la régularité annonçait la concorde.

On visita ainsi les églises et les couvents que renferme Ponta-Delgada, et, sous l’obsession des cloches éternellement agitées, on parcourut jusqu’au soir ses rues étroites et sales.

Quelle déception ! Les maisons, si blanches de loin, apparaissaient de près lourdes et massives. Sur la chaussée, des

ponta-delgada.

porcs, énormes pour la plupart, au milieu desquels il fallait se frayer un passage, se promenaient avec désinvolture. Et cette ceinture de verdoyants jardins ? De hautes murailles les mettaient à l’abri du regard. À peine si, au-dessus de la crête des murs, on apercevait de loin en loin la cime d’un de ces rosiers blancs ou de ces camélias, qui, à Saint-Michel, atteignent communément la taille d’un grand arbre.

Cette rébarbative promenade rembrunissait les touristes à vue d’œil. L’annonce du retour fut bien accueillie.

La colonne, en redescendant la pente, ne s’avançait plus dans l’ordre admirable qu’elle avait jusque-là respecté. Sans doute, trop grand était leur respect de la discipline, pour que ces calmes Anglais osassent la braver ouvertement du premier coup. Mais une évidente lassitude se faisait sentir. Des intervalles séparaient les rangs, dont les uns s’étaient illégalement augmentés au détriment des autres. Il y avait des traînards. Thompson constatait et soupirait.

En arrivant au bord de l’eau, les touristes eurent un choc de surprise. Sur le quai, grouillait une foule nombreuse, d’où sortaient des clameurs irritées. Des poings s’élevaient en des gestes de menace. Deux partis étaient évidemment en présence, échangeant de préalables injures, prêts à les transformer en horions. L’émeute de Tercère allait-elle recommencer ?

Thompson, et derrière lui tous les passagers, s’était arrêté indécis. Impossible de parvenir aux canots du bord, à travers la foule qui en interdisait l’accès. Restaient les embarcations du pays, et certes il n’en manquait pas dans le port, mais, ce qui manquait, c’étaient les mariniers. Autour des touristes, pas une âme. Toute vie s’était concentrée en face du Seamew, à l’endroit où la foule houleuse semblait sur le point de vider une querelle inconnue.

Tout à coup, Thompson poussa un cri. Six embarcations s’étaient détachées du quai, et, accompagnées par les hurlements de la foule, elles s’éloignaient à force de rames, en deux groupes distincts, trois paraissant appuyer la chasse aux autres. En tout cas, elles se dirigeaient certainement vers le Seamew, et, après l’expérience faite à Tercère de la violence açorienne, on devait trembler sérieusement pour le navire. Au comble de l’agitation, Thompson se promenait de long en large sur le quai.

Il prit soudain son parti. Halant sur la bosse d’un des canots les plus proches, il embarqua résolument, entraînant avec lui Robert, qu’accompagnèrent Roger et les Lindsay. En un instant, la bosse fut larguée, l’ancre ramenée, et, sous l’impulsion des quatre nageurs, le canot se dirigea rapidement vers le navire menacé.

Électrisés par cet exemple, les autres passagers se hâtèrent de l’imiter. Des embarcations se remplirent, les hommes saisirent les rames familières à la plupart des Anglais, et cinq minutes plus tard une escadre en miniature troublait les eaux du port du choc de ses avirons.

Thompson, en accostant le Seamew, fut en partie rassuré. Les six canots suspects appartenaient en effet à deux camps opposés, et leur antagonisme apportait aux assiégés un secours inespéré. Chaque fois que l’un d’eux tentait un mouvement en avant, un canot du parti adverse se mettait en travers, et rendait impossible l’approche de l’escalier gardé d’ailleurs par une douzaine de marins.

« Qu’y a-t-il donc, captain ? demanda Thompson essoufflé en sautant sur le pont.

— Je n’en sais rien, monsieur, répondit flegmatiquement le capitaine.

— Comment ! captain, vous ne savez pas ce qui a pu motiver une pareille émeute !

— Absolument pas, monsieur. J’étais dans ma chambre, quand Mr. Flyship est venu me prévenir qu’une jeune fille était montée à bord et que des groupes aux allures menaçantes se rassemblaient sur le quai. J’ignore si l’un de ces faits découle de l’autre, car il m’a été impossible de comprendre un mot au damné jargon de la petite.

— Et cette enfant, captain, qu’en avez-vous fait ?

— Elle est au salon, monsieur.

— J’y vais, dit Thompson avec emphase, comme s’il eût couru à la mort. En attendant, captain, continuez à veiller sur le navire dont vous êtes responsable. »

Le capitaine, pour toute réponse, sourit dans sa moustache d’un air dédaigneux.

La situation, du reste, ne semblait pas bien critique. Les passagers avaient traversé sans peine la ligne des belligérants. Les uns après les autres, ils montaient à bord. Le Seamew pouvait subir longtemps sans dommage un blocus si mal gardé.

En somme, il était certain que, si, pour des motifs inconnus, le Seamew avait des ennemis sur la terre de Saint-Michel, il y possédait aussi, pour des raisons également ignorées, de solides alliances, dont le concours actuellement tout au moins suffisait à sa défense.

Cependant, Thompson et Robert étaient entrés dans le salon. Ainsi que l’avait annoncé le brave capitaine, ils trouvèrent une jeune fille littéralement écroulée sur un divan, le visage enfoui dans ses mains et toute secouée de sanglots. En entendant venir les deux hommes, elle se releva vivement, et, dessinant un modeste salut, elle découvrit un charmant visage, qui exprimait pour le moment une cruelle confusion.

« Mademoiselle, dit Robert, une sorte d’émeute entoure ce bâtiment. Pourriez-vous nous dire si cette émeute a quelque rapport avec votre présence ici ?

— Hélas ! monsieur, je le crois, répondit la jeune fille en pleurant de plus belle.

— Dans ce cas, mademoiselle, veuillez vous expliquer. Votre nom, d’abord ?

— Thargela Lobato.

— Et pourquoi, reprit Robert, Mlle Lobato est-elle venue à bord ?

— Pour être protégée contre ma mère ! répondit résolument la jeune Açorienne.

— Contre votre mère !

— Oui, c’est une méchante femme. Et puis…

— Et puis ?… insista Robert.

— Et puis, murmura la jeune Thargela dont les joues s’empourprèrent, à cause de Joachimo Salazar.

— Joachimo Salazar ? répéta Robert. Qui est ce Joachimo Salazar ?

— Mon fiancé, répondit Thargela en se cachant le visage dans ses mains.

thargela lui montra un grand jeune homme.

Robert tordit sa moustache d’un air ennuyé. Voilà une affaire qui prenait un tour ridicule. Que faire de cette enfant ? Ainsi que le fit observer Thompson avec impatience, ils n’étaient pas venus à Saint-Michel pour protéger les amours des jeunes filles contrariées dans leurs inclinations. Robert estima toutefois qu’un peu de morale suffirait à remettre le calme dans cette tête folle.

— Voyons, voyons, mon enfant, dit-il d’un ton bonhomme, il faut rentrer chez vous. Vous n’avez pas réfléchi sans doute qu’il est mal de se mettre en révolte contre sa mère.

Thargela se redressa vivement.

— Elle n’est pas ma mère ! cria-t-elle d’une voix rauque, les joues pâlies par une subite colère. Je suis une enfant abandonnée à cette misérable femme, dont je porte le nom, faute d’en avoir un autre que celui de Thargela. Et d’ailleurs, quand même elle serait ma mère, elle n’a pas le droit de me séparer de Joachimo.

Et, s’écroulant sur la banquette, Thargela fondit de nouveau en larmes.

— Tout cela est très joli, mon cher monsieur, dit Thompson à Robert. Mais enfin, si triste que soit la situation de cette enfant, cela ne nous regarde pas, et nous ne pouvons rien pour elle. Veuillez le lui faire comprendre. Il est temps que cette comédie finisse.

Mais, aux premiers mots que Robert prononça pour expliquer leur impuissance, Thargela releva son visage illuminé d’une joie triomphante.

— Vous le pouvez ! Vous le pouvez ! s’écria-t-elle. C’est la loi !

— La loi ? insista Robert.

Mais il eut beau retourner la question sous toutes ses faces. La loi était pour elle, Thargela savait cela, et ne savait que cela. D’ailleurs, si ces messieurs anglais voulaient être mieux renseignés, que n’appelaient-ils Joachimo Salazar ? Il n’était pas loin. Celui-là savait tout. Il répondrait à toutes les questions.

Et, sans attendre de réponse, Thargela, entraînant Robert sur le pont, l’amena près du bastingage de bâbord, et lui montra avec un sourire dont son frais visage fut tout illuminé, un grand jeune homme debout à la barre de l’une des embarcations belligérantes.

— Joachimo ! Joachimo ! » appela Thargela.

À ce cri, des vociférations répondirent. Quant au timonier, donnant un heureux coup de barre, il accosta le Seamew et sauta sur le pont, tandis que son embarcation retournait au combat.

C’était vraiment un beau garçon à l’air franc et décidé. Son premier soin fut d’élever Thargela dans ses bras et de la gratifier à la face des cieux et de la terre de deux baisers sonores qui firent redoubler les hurlements des camps adverses. Ce devoir rempli, un vif colloque s’engagea entre les fiancés, puis enfin, Joachimo, se tournant vers les passagers qui contemplaient cette scène avec curiosité, les remercia en nobles termes de l’aide qu’ils voulaient bien apporter à sa chère Thargela.

Robert traduisit fidèlement. Quant à Thompson, il fit la grimace. Quel diplomate, ce garçon ! Ne l’engageait-il pas maintenant vis-à-vis de l’équipage et des passagers ?

Cependant Joachimo continuait sa harangue improvisée. Ce qu’avait dit Thargela était exact. La loi des Açores permettait aux jeunes gens de se marier à leur goût, à l’aide du moyen qu’elle avait adopté. Il suffisait de quitter, dans ce but, la demeure de ses parents, pour échapper ipso facto à leur autorité, et pour tomber sous celle du juge, alors obligé de donner, s’il en était requis, l’autorisation désirée. Certes, Joachimo ne connaissait pas par le menu les termes de cette loi, mais on pouvait se rendre sur-le-champ chez le corrégidor, qui éclairerait ces messieurs anglais tant sur la valeur morale de la femme Lobato, que sur les droits de sa pupille Thargela et du fiancé de cette dernière, le disert Joachimo. Que, si l’on demandait pourquoi Thargela avait choisi le Seamew comme refuge, plutôt que la maison d’un ami, c’est tout simplement que les pauvres n’ont pas d’amis. En outre, la femme Lobato, demi-sorcière, demi-prêteuse sur gages, tenait, soit par crainte, soit par intérêt, la moitié du bas peuple des faubourgs, ainsi que le prouvait la manifestation actuelle. Sur la terre ferme, Thargela eût donc couru le risque d’être reprise. À bord du Seamew, sous la sauvegarde du noble peuple anglais, il n’en serait certainement pas de même.

Ayant dit, l’habile orateur se tut.

Son trait de la fin avait porté. Le jeune Açorien en avait pour preuve le changement d’attitude de sir Hamilton. Sans le connaître, il s’était attaché à convaincre ce personnage, que sa tenue gourmée désignait comme le plus rébarbatif de tous ses auditeurs. Or, incontestablement, Hamilton s’était dégelé. Même, il avait approuvé d’un signe de tête la conclusion du discours.

Thompson, indécis, jetait de droite à gauche des coups d’œil furtifs.

— Que pensez-vous de tout cela, captain ? demanda-t-il.

— Hum ! fit le capitaine, en se détournant modestement.

Mais, derrière lui, le fidèle Artimon était à son poste.

— Vous qui êtes gentleman anglais, dit-il à ce vieil ami, repousseriez-vous une femme, monsieur ?

— Hum ! fit à son tour Thompson, en coulant vers les passagers un regard incertain.

— Ma foi ! monsieur, dit Alice Lindsay en s’avançant courageusement hors du cercle de ses compagnons, je pense que, sans rien préjuger, on pourrait du moins faire ce que propose ce garçon, c’est-à-dire aller chez le corrégidor qui nous tracera notre devoir.

— Qu’il soit fait selon votre désir, Mrs. Lindsay, s’écria Thompson. L’Agence n’a rien à refuser à ses passagers.

Des bravos éclatèrent. Évidemment, le jeune couple avait fait la conquête des habitants du Seamew. À ces applaudissements, seul Hamilton évita de joindre les siens. Phénomène surprenant, son attitude était soudain redevenue, correcte toujours, mais glacée. Une citoyenne américaine en ayant en quelque sorte pris la direction, cette affaire avait subitement cessé de l’intéresser. C’était désormais chose à régler entre ces deux peuples inférieurs : Portugais et Américains. L’Angleterre, dans sa personne, n’avait plus rien à y voir.

— En tous cas, reprit Thompson, cette démarche ne pourra être faite qu’après notre dîner, dont l’heure doit être même largement dépassée. Il restera alors à traverser la ligne des assiégeants. Vous devriez, mon cher Professeur, soumettre le cas à ce garçon.

— Je m’en charge, » déclara Joachimo.

S’approchant du bastingage, il héla les belligérants, et leur fit part de la résolution prise. Sa communication reçut des accueils divers. Mais enfin, du moment qu’il ne s’agissait plus d’un enlèvement, d’un rapt avec la complicité d’étrangers, du moment que cette affaire devait recevoir une solution régulière, il n’y avait qu’à se soumettre, et l’on se soumit, chaque parti restant libre au demeurant de s’attribuer la victoire. Les abords du Seamew se dégagèrent aussitôt, et quand, le dîner terminé, Thompson et Robert, en compagnie de Joachimo, débarquèrent sur le quai, ils le trouvèrent revenu à un calme relatif.

Toutefois, c’est escortés par un assez nombreux concours de populaire que les trois compagnons parvinrent au bureau de l’official. Le corrégidor n’y était pas, et un agent dut se mettre à sa recherche. Il arriva bientôt. C’était un homme entre deux âges, chauve, au teint de brique cuite, indiquant un tempérament irascible et bilieux. Irrité sans doute de ce dérangement imprévu, il interrogea aigrement ses tardifs visiteurs.

Robert le mit en peu de mots au courant des faits et lui demanda son avis. Mais, si rapidement qu’il eût exposé l’affaire, il avait été trop prolixe encore au gré de l’impatient corrégidor, dont les doigts battaient sur la table, derrière laquelle il était assis, une marche extrêmement orageuse.

« Femme Lobato, répondit-il en style télégraphique, réputation déplorable. Joachimo Salazar et fille Thargela, excellente. Droit absolu de cette dernière de se réfugier où il lui convient. et d’épouser qui bon lui semble, quand moi, corrégidor, l’aurai ainsi ordonné. Telle est la loi. Toutefois, ne puis donner pareil ordre, que si Thargela le réclame, soit de vive voix, soit par une attestation écrite.

— La voilà, dit vivement Joachimo, qui tendit une lettre au corrégidor.

— Bien ! approuva celui-ci, en saisissant une plume dont il se servit pour tracer un menaçant paraphe sur une feuille imprimée. Aujourd’hui, le 22. Mariage, le 25. Je désigne don Pablo Terraro, église Sao Anthonio.

Le corrégidor se leva et appuya violemment sur un timbre.

À ce signal, deux agents pénétrèrent dans le cabinet du magistrat.

« Messieurs, bonsoir ! » prononça celui-ci, tandis que les trois justiciables se retrouvaient dans la rue.

« Voilà une affaire arrangée, mon brave, dit Robert à Joachimo. Dans trois jours, vous épouserez votre Thargela.

— Oh ! messieurs, messieurs, comment vous remercier ? s’écria Joachimo, qui pressait chaleureusement les mains des obligeants étrangers.

— En rendant votre femme heureuse, mon garçon, dit Robert en riant. Mais qu’allez-vous faire, jusqu’au jour de votre mariage ?

— Moi ? demanda Joachimo étonné.

— Oui. N’avez-vous rien à craindre de tous ces énergumènes de tantôt ?

— Bah ! fit avec insouciance le jeune homme en montrant ses deux bras, j’ai ça. »

Et, sifflotant gaiement un air de danse, il se perdit dans les rues sombres de la capitale de Saint-Michel.