L’épluchette/Au restaurant à la mode

Gérard Machelosse (p. 39-40).


Au restaurant à la mode

Un jour, maître Gros-Jean Deschamps,
Dut laisser ses prés, ses champs
Et se rendre à la ville
Pour une affaire de famille
À régler pardevant
Son notaire.
Le tabellion recevant
Un fort honoraire,
De belle humeur se sent ;
Il invite maître Gros-Jean
À dîner à tel restaurant
Très fashionable.
Les voilà donc bientôt à table.
Rustaud prenait de tous les mets
Car, il n’avait jamais
Trouvé chère aussi bonne.
Le service l’impressionne
Et le gêne un peu, surtout
Le garçon qui se tient debout
Derrière sa chaise.
Jean pour cacher son malaise
Imite en tout son vis-à-vis
Afin de suivre l’étiquette ;
Du regard prenant avis

Du geste qu’il guette
Chez le tabellion.
Le repas fini, le garçon
Présente
À chacun un bol d’eau,
Et Gros-Jean pressente
Quelque chose de nouveau.
Cependant, le notaire
Est lent à procéder
Et Gros-Jean de lui demander
Sur un ton de mystère :
— De cette eau, que faut-il faire ?
— Se laver les doigts, répond
Son hôte, le notaire.
— Ah ! fit Jean, comme de raison !
Mais… ousqu’est l’savon ?