L’éducation publique en Californie

L’ÉDUCATION PUBLIQUE EN CALIFORNIE.


Aucune nation n’a plus fait que les États-Unis pour les écoles primaires. Les États de l’Est ont, à cet égard, une réputation dès longtemps acquise et, malgré son existence toute récente, la Californie se fait gloire de ne leur céder en rien.

San-Francisco renferme cinquante-deux écoles publiques. J’ai visité les plus importantes d’entre elles ; j’ai trouvé partout de vastes salles bien éclairées et aérées avec soin, des cours assez spacieuses, des corridors bien disposés pour faciliter l’entrée et la sortie des élèves, des cabinets de toilette pour les soins de propreté. En classe, chaque enfant a sa petite table à part, formant habituellement un tout avec le siége qu’il occupe. Cette table, faite de bois de chêne ou de laurier, a la forme d’un pupitre ; elle renferme ce qui est nécessaire pour écrire ; ’élève peut y serrer ses cahiers ainsi que les livres classiques. Chaque table est séparée des autres par un assez grand espace ; elle est isolée sur quatre côtés presque toujours et, en tous cas, sur trois ; dans ce dernier cas, elle porte le siége de l’élève qui occupe le pupitre placé devant. La classe se trouve ainsi divisée en un grand nombre d’allées rectangulaires permettant une libre circulation dans tous les sens ; les élèves n’ont pas les occasions de dissipation qu’un plus grand rapprochement leur fournirait. Sur trois côtés de la salle sont appliqués aux murs, à une hauteur convenable, des panneaux d’ardoise dont peuvent se servir à la fois tous les élèves pour faire leurs problèmes et préparer leurs devoirs. Sur le quatrième côté règne l’estrade du professeur, à droite et à gauche de laquelle sont des siéges pour les officiers publics qui viennent inspecter l’école et pour les visiteurs désireux d’assister à quelques exercices. Tout autour de la salle sont appendus des paysages qui représentent des baies, des promontoires, des lacs, des montagnes, des glaciers : On y voit également des cartes géographiques, des tableaux de poids et mesures et autres tableaux pour l’enseignement. Enfin, dans une ou plusieurs classes, est placé un piano droit où même un piano à queue pour les études de musique et pour l’accompagnement des exercices de callisthénie.

J’ai remarqué en général chez les élèves une attitude sérieuse, une bonne tenue et de la propreté. Un grand nombre, et surtout les filles, m’ont semblé fort zélés pour l’instruction. J’en ai interrogé plusieurs et j’ai obtenu des réponses très-satisfaisantes sur les mathématiques, la géographie, l’histoire naturelle. Des enfants de onze à treize ans ont su donner exactement la latitude et la longitude de quelques grandes villes, indiquer la différence d’heure entre San-Francisco et New-York, entre New-York et Londres, classer dans la série animale la baleine et la chauve-souris et indiquer les effets du Gulf-Stream dans l’Atlantique et du Black-Stream dans le Grand Océan.

J’ai visité des écoles publiques dans le nord et dans le sud de la Californie et je leur ai trouvé partout les mêmes caractères. Ces caractères les voici :

L’instruction est gratuite pour tous. La constitution de la Californie confère à chaque citoyen majeur le droit de suffrage ; l’élection s’applique aux fonctions administratives aussi bien qu’aux fonctions politiques. Dès lors le maintien des institutions et la sûreté de l’État exigent que chaque homme puisse devenir un électeur capable. Cette aptitude ne peut facilement s’acquérir sans l’instruction ; il faut donc mettre celle-ci à la portée de tous et dans ce but la rendre entièrement gratuite. L’intervention de l’État se justifie pleinement ; l’expérience n’a-t-elle pas démontre qu’on ne peut en pareille matière se contenter de l’initiative privée ? La gratuité n’est pas moins nécessaire ; car il ne faut pas que la pauvreté des parents leur soit un motif ou tout au moins un prétexte pour ne pas envoyer leurs enfants à l’école.

Cette éducation gratuite n’est pas une charge imposée sans mesure à tous les citoyens ; elle est au contraire maintenue dans de justes limites, dans la limite de l’instruction nécessaire, par la sagesse de l’esprit américain. À toute tentative faite pour étendre le programme de l’enseignement public, pour créer, par exemple, des écoles industrielles libres, les vieux maîtres de la Californie répondent que leur gouvernement n’est point un gouvernement paternel, en ce sens qu’il n’est pas dans son essence de se substituer aux familles pour faire apprendre un métier aux enfants. Une grande différence existe, on le voit, entre la théorie californienne et celle des pays de l’Europe chez lesquels l’instruction primaire n’est point gratuite, tandis que l’État donne gratuitement l’enseignement professionnel dans des écoles d’agriculture et d’arts et métiers.

L’éducation publique ne constitue pas un monopole ; la liberté de l’enseignement existe à tous les degrés. Les maîtres des écoles publiques sont obligés de subir des examens, rendus chaque jour plus difficiles, et sont admis aux divers emplois d’après la valeur du diplôme qu’ils ont obtenu. Quant aux instituteurs privés, aucune condition ne leur est imposée ; ils ouvrent leurs établissements comme ils l’entendent. Les parents font leur choix et ce choix s’affirme de plus en plus en faveur des écoles publiques : un dixième seulement du nombre des enfants, recensés en 1877 dans les écoles, a fréquenté les institutions privées.

L’instruction est laïque : l’enseignement de toute doctrine religieuse est formellement interdit par la loi. Il ne faudrait pas en conclure que les Américains considèrent la religion comme inutile à l’éducation de l’enfance. Leur opinion est toute contraire. Mais ils sont convaincus que l’État n’a pas pour fonction d’enseigner un dogme religieux ; d’après eux, cette fonction appartient essentiellement aux familles et aux divers clergés, qui ont toute facilité pour la remplir. Les écoles publiques ne renferment, en effet, que des externes ; les élèves sont libres chaque jour à quatre heures ; ils le sont également pendant la journée entière du samedi et du dimanche ; il leur reste donc plus de temps qu’il n’en faut pour assister à un enseignement et à des exercices confessionnels. J’ai constaté, à l’aide des renseignements qu’ont bien voulu me fournir les ministres des divers cultes, qu’à San-Francisco 93,000 enfants en moyenne assistaient aux catéchismes ; j’ai calculé, d’autre part, d’après des données statistiques fort exactes, qu’il n’existait pas, dans les écoles publiques et privées, plus de 19,000 élèves, ayant de 9 à 17 ans, aptes par conséquent à suivre les enseignements du culte. Il semble donc qu’en général, les familles donnent à leurs enfants l’instruction religieuse.

Dans l’opinion des Américains, les enfants élevés côte à côte sans distinction de culte, ne connaîtront ni l’animosité ni tout au moins la division que trop souvent la croyance engendre ; ils acquerront au contraire cet esprit de tolérance, que j’ai constaté à un si haut degré dans les mœurs publiques et privées de la Californie.

L’éducation est obligatoire en droit, facultative en fait. Si la loi n’est point appliquée, cela tient à deux causes. D’une part, les résultats obtenus en si peu d’années sont jugés assez satisfaisants ; sur 200,000 enfants ayant de 5 à 17 ans, 150,000 ont été enrôlés en 1877 dans les écoles publiques ou privées. D’autre part, l’esprit américain répugne à la contrainte ; l’opinion publique n’admettrait pas une violation trop étendue du droit naturel des pères de famille. On est donc sûr que si, dans les grandes villes comme San-Francisco, la loi venait à recevoir son exécution, il n’y aurait pas à craindre cette oppression taquine qui, sur le continent européen, se fait quelquefois sentir aux administrés.

Les femmes jouent un grand rôle dans les écoles publiques de la Californie, comme professeurs aussi bien que comme élèves. J’ai vu partout leur autorité respectée par les garçons eux-mêmes sans aucune difficulté ; on les considère comme plus aptes que les hommes à l’enseignement primaire. Dans l’État, sur 3,167 maîtres il y a 1,983 institutrices ; à San-Francisco, il y a 563 femmes sur un nombre total de 632 professeurs.

Comme on le sait, les écoles publiques sont communes aux deux sexes ; les garçons sont d’un côté de la classe et les filles de l’autre. Ce système est fort controversé ; mais l’enquête la plus attentive ne m’a révélé aucun inconvénient au point de vue de la moralité.

Un trait saillant de l’éducation publique en Californie consiste en ce fait qu’elle offre un caractère essentiellement local. L’État est divisé en 52 comtés et 1,898 districts scolaires. Il existe dans chaque district une commission, Board of trustees, composé de trois membres, nommés par les citoyens pour un terme de trois ans et renouvelable par tiers chaque année. Construire avec l’autorisation de ses _mandants les bâtiments d’école, nommer les maîtres et gérer généralement toutes Îles affaires scolaires, telles sont, en quelques mots, les fonctions d’ailleurs gratuites de cette Commission, Chaque comté a un surintendant des écoles, County superintendent, élu tous les deux ans. Ses fonctions sont salariées ; elles consistent principalement à répartir entre les divers districts les fonds provenant des taxes du comté et de l’État, à veiller à l’observation des lois et des règlements généraux. Il y a au siége du gouvernement, à Sacramento, un surintendant des écoles pour l’État de Californie, State Superintendent of Public Instruction. Il est nommé pour quatre ans, il reçoit un salaire ; il est principalement chargé de répartir entre les divers comtés les fonds scolaires de l’État et d’adresser tous les deux ans un rapport détaillé sur les écoles au gouverneur de la Californie. Enfin, il existe une Commission d’éducation de l’État, State Board of Education, composé du gouverneur de la Californie, du surintendant de l’instruction publique, du principal de l’École normale et des surintendants de six comtés. Ses fonctions sont gratuites et consistent surtout à prescrire les règlements généraux et les matières de l’enseignement pour toutes les écoles, à déterminer les règles pour l’examen des maîtres. Comme on le voit, d’après cette description rapide, la direction scolaire appartient réellement aux commissions de district, qui l’exercent dans la plénitude de leur indépendance et sous leur responsabilité directe devant leurs électeurs. Les fonctionnaires du comté et de l’État ne font peser aucune autorité hiérarchique sur les Commissions de district qui sont élues. par le suffrage direct des citoyens et dont les attributions sont parfaitement définies par la loi ; ils ont seulement pour mission de veiller et de concourir, chacun dans son domaine propre, à l’exécution de la loi.

Un autre caractère saillant du système d’éducation publique en Californie est la nomination, par le suffrage universel, des officiers chargés de la diriger. En étudiant le système électif, il faut considérer deux choses : la qualité des officiers élus et la durée de leur mandat. Sur chacun de ces points des objections se sont produites ; je ne puis les discuter ici. Je me borne à dire que, malgré quelques abus, les choix sont généralement bons ; il est certain notamment que les surintendants de l’instruction publique ont toujours été élus parmi les maîtres les plus distingués ; c’est à leur initiative, à leurs lumières, à leurs efforts incessants que la Californie est redevable de son système d’éducation populaire. Quant à la durée du mandat, variable de 2 à 4 ans, de bons esprits la considèrent comme trop courte et voudraient la voir prolongée.

Quoi qu’il en soit, ce que j’ai rencontré et ce qui m’a frappé chez ces administrateurs élus et temporaires, c’est d’une part, leur zèle et les efforts qui en sont la conséquence, d’autre part, leur indépendance relative et la dignité professionnelle qui en résulte.

Les Californiens pensent qu’il ne suffit pas de rendre l’instruction gratuite et qu’il faut encore la mettre libéralement à la portée de tous. Aussi ont-ils dépensé en 25 ans de 1852 à 1877, pour les besoins courants des écoles publiques, la somme de 137,880,000 francs. Pour l’année 1877, les dépenses se sont élevées à 13,835,000 francs, ce qui fait 91 fr. 20 c. par élève inscrit dans les écoles publiques et 145 francs par élève assidu. Cette somme payée par l’État, les comtés et les villes est égale à 73 % du budget des dépenses de l’État pour cette année. À San-Francisco, la dépense a été, en 1877, de 3, 661, 000 francs, soit 44 francs par habitant de race blanche et 21 % des dépenses totales de la cité.

Il y avait en Californie en 1877, 2,485 écoles élémentaires, divisées en huit classes ; l’âge d’admission dans les écoles publiques étant de 6 ans, la première classe correspond à 13 ans. On a bâti dans cette même année 412 écoles nouvelles. À chaque école est annexée une bibliothèque, dont la dotation annuelle ne résulte pas seulement de donations privées, mais encore 10 % du fonds scolaire de l’État, jusqu’à concurrence de 250 francs. Les bibliothèques des écoles valent 1,037,000 francs. Quant à l’ensemble de la propriété scolaire comprenant les terrains, les bâtiments, le mobilier, les livres et les appareils, il est évalué à 30 millions de francs, soit 38 francs par habitant.

Sur 200,000 enfants de toute race et de tout sexe, dont l’âge est compris entre 5 et 17 ans, 68 % ont été inscrits dans les écoles publiques, c’est-à-dire les ont fréquentées pendant un temps plus ou moins long, 8 % l’ont été dans les écoles privées, 24 % n’ont fréquenté aucune école. Si l’on considère non pas les enfants inscrits, mais les élèves réguliers, c’est-à-dire ceux qui par leur assiduité appartiennent réellement aux écoles, ces proportions deviennent respectivement 49,8 et 49 %. Il convient de remarquer que l’âge scolaire est compté par la loi entre des limites fort étendues (5 à 17 ans), eu égard aux habitudes américaines de travail précoce ; que parmi les 200,000 enfants recensés, il y a ceux des nègres, des Indiens et ceux de cette race mexicaine mêlée si réfractaire à l’instruction ; enfin que 41 % des enfants sont nés de deux parents étrangers. Quoi qu’il en soit, la Californie ayant 900,000 habitants, 193 habitants sur 1,000 habitants reçoivent l’éducation scolaire. Cette proportion s’élèverait à 165, si l’on prenait le nombre des enfants inscrits. Il n’est pas sans intérêt d’indiquer que le nombre des élèves par 1,000 habitants est approximativement : en Prusse, 460 ; en Suisse, 134 ; en Suède, 446 ; dans les Pays-Bas, 134 ; en France, 111 ; en Italie, 54.

On se préoccupe beaucoup en Californie d’avoir des instituteurs capables ; les plus louables efforts sont faits journellement dans ce but par les grandes cités et par l’État. Aucun professeur ne peut être employé s’il ne produit un diplôme ou un certificat au surintendant du comté. Cette licence comprend plusieurs ordres, d’après les capacités du maître attestée par les examens qu’il a subis et d’après l’expérience qu’il a acquise dans l’enseignement. La licence de premier ordre est le diplôme à vie, qui n’est décerné par l’État qu’aux instituteurs ayant dix ans de pratique ; la licence de dernier ordre est le certificat de troisième degré, qui est valable, suivant les cas, pour un ou deux ans, qui ne peut être accordé qu’aux femmes et qui n’autorise à enseigner que dans les quatre petites classes. La carrière de l’enseignement primaire étant classée en Californie parmi les professions libérales les plus utiles, on à constamment élevé le traitement des professeurs. Le salaire moyen mensuel a été en 1877 de 419 francs pour les hommes et de 348 francs pour les femmes ; cette différence résulte seulement de la qualité des diplômes, car à diplôme égal les instituteurs et les institutrices sont également payés.

Les conférences locales d’instituteurs existent en Californie comme dans le reste des États-Unis. Les instituteurs de chaque comté sont annuellement convoqués par le surintendant. La session dure de trois à cinq jours, les séances sont publiques et tout le monde peut y prendre la parole ; les pères de famille ont ainsi une excellente occasion de discuter sur l’éducation de leurs enfants avec les maîtres auxquels ils l’ont confiée.

Les matières de l’enseignement primaire sont la lecture, l’écriture, la grammaire, l’orthographe, la composition littéraire, la géographie, l’histoire des États-Unis, l’arithmétique, la physique, la physiologie. Dans toutes les écoles et dans toutes les classes on apprend aux enfants à chanter en chœur ; dans toutes les classes un peu élevées on leur enseigne la musique vocale ; j’ai entendu des chœurs exécutés par des Jeunes filles avec accompagnement de piano et cette audition n’aurait pas déparé bien des concerts. Dans certaines villes existent de hautes écoles pour l’enseignement primaire supérieur, qui se confond avec l’enseignement secondaire, et des écoles cosmopolitaines où les élèves apprennent le français et l’allemand.

Les officiers publics dans leurs visites aux écoles, les maîtres éminents dans les réunions professionnelles ne cessent de recommander aux instituteurs comme base de leur enseignement ce qu’ils appellent le sens commun. Les élèves doivent être enseignés de manière à acquérir, à bien comprendre et à bien digérer les connaissances nécessaires. On doit se garder de fatiguer leur mémoire en la surchargeant de détails secondaires. Le professeur doit recourir le plus possible à l’enseignement oral, de manière à frapper l’attention des enfants et à leur apprendre à écouter ; 1l ne doit pas laisser sans application dans l’esprit des élèves des idées abstraites qu’ils ne conserveraient qu’avec le secours de la mémoire. Par exemple, il ne suffit pas qu’ils sachent par cœur la définition du mètre, du litre, du kilogramme ; il faut qu’ils puissent, sans hésitation et avec une approximation suffisante, dire quelles sont les dimensions d’une salle, la capacité d’un réservoir, le poids d’un fardeau. On donne cette aptitude aux enfants par ce qu’on appelle les object lessons, leçons d’objets, c’est-à-dire en les dressant à connaître le monde extérieur par l’exercice de leurs sens.

J’ai recueilli les questions posées en 1876 et 1877 dans les écoles publiques de San-Francisco. Par exemple, des élèves de la première division, qui correspond à l’âge de 13 ans, ont eu à répondre aux questions suivantes : Expliquez la théorie du puits artésien ? — Par quoi les marées sont-elles causées ? — Par quoi les courants de l’Océan sont-ils causés ? Parlez du courant équatorial. — A quels endroits un vaisseau partant de New-York pour aller à San-Francisco : rencontrera-t-il des calmes ? — Quelle est la course du Gulf-Stream ? Quelle est sa vitesse moyenne ? Où est-il le plus rapide ? Que lui arrive-t-1l quand il atteint les Îles Britanniques ? Quel est son effet sur l’atmosphère et le climat de l’Europe Occidentale ? — Donnez la biographie complète de Washington. — Indiquez un article importé de chacun des pays suivants : Brésil, Tahiti, Îles Sandwich, Chine, Japon, Espagne, France, Mexique, Cuba, Territoire d’Alaska et de Washington, etc.

Les limites de cet article m’interdisent de multiplier les citations. On les trouvera en grand nombre ainsi que bien des faits, bien des opinions que je n’ai pu enregistrer ici, dans mon ouvrage sur la Californie, qui est actuellement sous presse et dont j’ai consacré la première partie à l’Éducation publique.

Je termine par quelques chiffres. La Californie dépense annuellement par habitant pour l’instruction primaire 15 fr. 85 c. ; elle paie au gouvernement fédéral pour les services de la guerre (armée, marine, fortification), 7 fr. 50 c. Ces deux ordres de dépenses sont respectivement : pour l’ensemble des États-Unis, 10 fr. 90 c. et 7 fr. 50 c. ; — pour la Prusse, 2 fr. 75 c. et 12 fr. 40 ; — pour l’Autriche, 4 fr. 85 c. et 7 fr. 50 c. ; — pour la France, 1 fr. 55 c. et 24 fr. 80 c. ; — pour l’Italie, 0 fr. 75 c. et 8 fr. 50 : — pour l’Angleterre et le Pays de Galles, 8 fr. 55 c. et 20 fr. 90 c. ; — pour la Suisse, 4 fr. 75 c. et à 5 fr 40 c. etc.

Telles sont les écoles publiques de la Californie, ouvertes librement à tous les cultes, à toutes les nationalités, à toutes les classes ; où le juif se rencontre auprès du catholique ; où le Français et l’Allemand coudoient l’Américain et l’Écossais, où le pauvre est assis à côté du riche. Le sentiment de l’égalité et l’esprit de tolérance s’y développent naturellement, sans effort. Si les fléaux de l’antagonisme et de l’envie sont loin de sévir en Californie au même degré que dans les États de l’Europe, ne faut-il pas l’attribuer en partie au régime des écoles publiques ? Les Américains le pensent et ils aiment à citer les paroles adressées par un instituteur de Boston à un visiteur : « Cet enfant qui vient de recevoir le premier prix d’excellence est le fils d’un scieur de bois ; cet autre, qui a obtenu le second prix, est le fils du Gouverneur du Massachusetts ».