L’Étudiant de Salamanque/Partie IV

QUATRIÈME PARTIE

Salió en fin de aquel estado, para caer en el dolor más sombrío, en la más desalentada desesperación y en la mayor amargura y desconsuelo que pueden apoderarse de este pobre corazón humano, que tan positivamente choca y se quebranta con los males, como con viguedad aspira en algunos momentos, casi siempre sin conseguirlo, à tocar los bienes ligeramente y de pasada.

(La protección de un sastre ; novela original por D. Miguel de los Santos Alvarez).

spiritus quidem promptus est ; caro vero infirma.
(S. Marc. Evang.)

Voyez don Félix, l’épée à la main, le visage serein et le cœur ferme ; le frère vengeur d’Elvire est, lui aussi, tombé mort, sans miséricorde, à ses pieds.

Et plein d’une tranquille audace, il s’avance par la rue fatale du Cercueil, sans redouter d’horribles apparitions ni se laisser troubler par l’image de Jésus.

La lampe moribonde qui brûlait, lance en tremblotant son dernier éclat, et la sombre nuit a recouvert la rue mystérieuse d’une obscurité profonde.

L’audacieux Montemar dirige ses pas, au hasard, dans les ténèbres, quand, ayant parcouru une partie de la rue, soudain, près de lui, il entend un soupir.

Il sentit une haleine glisser sur son visage, et malgré lui ses nerfs se crispèrent ; mais le premier mouvement passé, ils reprirent leur rigidité première.

« Qui va là ? » demande-t-il d’une voix calme, qui ne feint pas le courage et ne trahit pas la crainte, l’âme pleine d’une vigueur invincible, se fiant à sa lame de Tolède.

Il tâtonne autour de lui et jure, l’impie ; puis il reprend sa marche téméraire, lorsque soudain, une figure fatidique s’avance vers lui, enveloppée de voiles blancs.

Flottante et vague, elle dissipe les brumes épaisses, s’anime, grandit d’une lumière douteuse et, dans les ténèbres, sa blancheur argentine apparaît.

Comme un point brillant, astre de pure lumière sans tache, elle perce le sombre horizon et brille au loin dans l’ombre.

Les yeux fixés sur elle, Montemar la regarde avec plus d’étonnement que de crainte ; il la prend peut-être pour une étoile vagabonde qui tourne dans l’espace des cieux,

ou bien pour un mensonge de ses propres yeux, pour une vaine forme créée par son illusion, ou bien pour une ridicule fantaisie du vin qui lui a enfin troublé la tête.

Mais jamais les fumées du nectar de Jerez n’auraient suffi à bouleverser son esprit, car c’est en vain que mille fois il a essayé de s’enivrer en de frénétiques orgies.

« Dieu pense me faire peur : que n’est-ce, se dit-il en riant, le diable lui-même ! aussi bien, vive Dieu ! saurait-il qui je suis, le monarque cornu de l’Abîme ! »

Comme il prononçait un blasphème si insolent, la lampe du Christ se ralluma et il vit une femme voilée de blanc, agenouillée devant l’image.

« Bienvenue soit la lumière, dit l’impie, j’en rends grâces à Dieu ou au diable », et avec une résolution audacieuse et ferme, avec un courage téméraire, il se dirige vers la femme voilée.

Pendant qu’il marche, la lumière, l’image, la dame dévote semblent s’éloigner, mais s’il s’arrête, rien ne bouge plus et l’image laisse tomber larme sur larme

de ses yeux immobiles. Mais sans que la crainte ni la douleur qu’elle inspire arrêtent les pas hardis et impies de Montemar, il regarde Jésus face à face.

Il semble que la rue s’ébranle et chemine ; il sent la terre lui manquer sous les pieds ; ses yeux sont fascinés par le regard mort du Christ, violemment fixé sur lui.

Et au milieu du délire qui obscurcit son esprit et qu’il impute au vin qui a fini par l’enivrer, d’une main insolente il saisit la lampe sur l’autel où elle éclaire l’image de Dieu,

et l’approche brutalement du visage que recouvre le voile pudique ; mais, soudain, le vent éteignit la lumière et la blanche dame se dressa.

Alors il lui sembla un instant voir un visage qui lui rappelait peut-être confusément de vagues souvenirs et de joyeuses réminiscences de temps meilleurs déjà passés.

Un visage d’ange qu’il aperçut dans un rêve comme une sensation qui a caressé l’âme, couvrant le front d’un nuage de tristesse, incomprise à jamais de la raison.

La blanche robe que l’on voit flotter dessine dans l’ombre ses formes élégantes, et son pied glisse sans bruit comme si elle foulait de moelleux tapis.

Telle nous avons vu, sous les rayons de la lune, une voile fugitive croiser au loin, tantôt enflée en poupe par la brise sereine, tantôt confondue avec l’écume de la mer,

de même l’espérance, blanche et vaporeuse, passe devant nous comme une illusion, émeut l’âme d’une anxiété craintive, tandis que la sévère raison la repousse.

DON FÉLIX

« Quoi ! vous me laissez sans réponse ? Vous refusez ma compagnie ? C’est peut-être quelque vieille dévote ?… La chose serait plaisante !

C’est en vain que vous vous taisez, ô duègne, et que vous me faites signe que non : moi, j’ai décidé que oui, et je veux vous accompagner.

Je veux savoir où vous allez, si vous êtes belle ou laide, qui vous êtes et comment vous vous nommez. La chose serait-elle impossible,

seriez-vous Satan en personne, avec ses flammes et ses cornes, jusque dans l’enfer, vous devant et moi derrière,

en dépit du ciel même, vive Dieu ! nous entrerons ; car je veux, quoi que vous fassiez, satisfaire mon désir.

Et pardonnez-moi, Madame, si mon insistance est trop hardie, mais ce serait chose peu courtoise que de vous laisser seule à pareille heure :

il y va de mon honneur ; par Dieu, je ne voudrais pas que l’on crût que la crainte m’a empêché de suivre une dame. »

Un sourd gémissement du fond de la poitrine, craquement du vase éclatant de douleur, dont la faiblesse frappe à peine l’ouïe, mais dont l’acuité déchire le cœur ;

gémissement d’amer souvenir, de peine présente, de regret incertain ; haleine mortelle, venin qui s’exhale de la mer empoisonnée qui recouvre l’âme ;

gémissement de mort — fut celui que poussa la blanche figure, et silencieusement son pied glissa : telle agite ses ailes une sylphide amoureuse qui ride à peine les eaux du lac.

Hélas ! celui qui a vu se perdre en un jour le bonheur que son cœur croyait éternel, et qui, en une nuit de brumes, dans une agonie profonde, est resté mourant sur une mer sans plages…

et seul, emportant avec lui, impérissable compagne, sa cruelle douleur, a vu rompre le charme magique de son âme — sa peine — son amie et son amante la plus fidèle ;

celui qui a vu ses soupirs emportés par le vent, ses larmes de tristesse se perdre dans la mer, sans que personne n’accoure et n’entende sa voix, le ciel et le monde étant insensibles à son malheur…

celui qui a vu la lune briller au ciel, calme et sereine, pendant qu’il pleurait, les hommes passer sur la terre sans qu’aucun ne détourne les yeux à ses plaintes,

et qui, redoutant lui-même l’ironie du monde, a caché sa peine au plus profond de son cœur, et, refoulant ses sanglots dans son âme, a revêtu ses lèvres d’un faux sourire !…

ah ! celui qui a compté les heures qui passent, heures qu’abrégeait autrefois le plaisir, et qui, aujourd’hui, seul et pleurant, songe comment, avec elles, ont fui à jamais les bonheurs de la veille,

qui sait que ces plaisirs qu’il a perdus, le malheureux, n’ont pas fui du monde, qu’ils y sont encore, que lui vit dans le même monde où il a toujours vécu et que ces plaisirs n’existent plus pour lui !!

ah ! celui qui découvre enfin le mensonge, celui qui a palpé la triste réalité, qui voit le squelette de ce monde et lui a arraché follement sa fausse parure…

ah ! celui qui ne vit que dans le passé !… celui qui nourrit son âme de sa douleur, appelant dans son angoisse les heures qui ont fui, les heures qui ont fui et ne reviendront pas…

celui qui a souffert d’une douleur si barbare, celui qui, durant des nuits entières, sans dormir, sur un lit d’épines et maudissant le ciel, a compté des heures éternelles d’anxiété infinie ;

celui qui a senti son cœur brisé vouloir s’échapper de sa poitrine, s’accroître son délire, s’accroître son dépit, et la douleur lui nouer cent fois une corde au cou ;

celui qui a senti ses larmes de tristesse figées par la douleur en un lac vénéneux de glace déchirante, l’étouffer en débordant, sans jamais trouver en son désespoir ni consolation, ni espérance, ni trêve…

celui-là aurait compris le gémissement du blanc fantôme, seule réponse qu’il donna à don Félix ; il aurait senti son immense douleur, il aurait pesé son immense signification.

DON FÉLIX

« Si vous cherchez quelque ingrat, je m’offre à vous bien volontiers ; mais, ou cette réserve est trompeuse, ou vous êtes en butte aux mauvais procédés de quelque mari jaloux.

« Ai-je deviné ? Sotte manie ! Il y a de quoi me rendre fou, si vous vous entêtez dans ce silence ; avec les muets, ô ma reine, j’agis beaucoup et parle peu. »

Pour la seconde fois l’étudiant entendit une voix de suave mélodie qui semblait l’écho lointain d’un chant harmonieux,

battement langoureux d’un cœur qui aime, sentiment ineffable de tendresse, soupir d’amour partagé, le premier oui de la femme encore pure.

« Pour moi, les amours ont pris fin, tout est mort pour moi dans le monde ; le ciel a dénoué pour toujours les liens qui m’attachèrent à la terre. »

Ainsi parla sa voix mystérieuse et tendre, qui donnait l’illusion d’autres mondes, écho de ceux qui sous la froide tombe jouissent en paix d’un éternel repos.

Montemar, ne songeant qu’à son aventure, jugea que la dame devait être belle et même facile : l’heure, la rue et la nuit obscure sont pour son ardeur de nouveaux stimulants.

— Il y a du danger à me suivre. — La belle objection ! — Peut-être vous en repentirez-vous bientôt. — Vous, peut-être. — Vous offensez le ciel. — Je me recommande au diable. — Allez-vous-en, monsieur, et ne tentez pas Dieu.

— Je sens que votre fierté m’énamoure de plus en plus, et si Dieu se fâche, parbleu, il aura tort : qu’il me mette dans vos bras et me tue aussitôt après. — Cette heure-ci sera peut-être votre dernière heure !…

Ne songez plus, don Félix, aux délires du monde. — Ah ! vous me connaissez ! — Hélas ! tremblez pour vous ! Tremblez que de vaines jouissances ne se changent en peines éternelles ! — Assez de sermons,

j’attends le carême pour les écouter ; et parlons d’amour, c’est un plus doux entretien ; quittez ce ton solennel et sévère qui, je vous le jure, madame, vous va fort mal ;

la vie est la vie : lorsqu’elle s’achève, le plaisir s’achève avec elle. Pourquoi la rendre esclave de peines incertaines ? Pour moi il n’y a jamais ni veille ni lendemain.

Si je meurs demain, tant pis ou tant mieux, comme l’on dit, que m’importe ? Que je profite du présent, que je jouisse à cette heure, et que le diable, si cela lui plaît, m’emporte quand je mourrai.

— Que ta volonté soit faite, ô mon Dieu ! — s’écria la figure fatidique : et cependant don Félix sent redoubler son ardeur et chemine derrière elle.

Ils traversent des rues tristes,
des places mystérieuses,
des murs en ruines,
où dans la mystérieuse
nuit orageuse,
la sorcière maudite
chante d’une voix rauque
ses prières
et ses faux exorcismes,
et fait lever les morts
des tombeaux.
On entend l’écho
de leurs pas qui sonnent le creux
dans la solitude,
pendant que dans le silence
gît la cité
et qu’Aquilon qui brame
berce son sommeil
de sons lugubres.

Ils traversent une rue, puis une autre, toujours plus loin, toujours plus loin : la route n’a pas de terme et ils ne cessent jamais de marcher. Ils vont, passent, retournent, laissant cent rues derrière eux ; ils se suivent pas à pas et avancent toujours. Montemar commence déjà à s’égarer et à se perdre, ne sachant où il va, ne devinant pas où il est. Il parcourt d’autres rues, d’autres places, une autre ville : il voit des tours fantastiques se détacher de leur base éternelle, et leurs lourdes masses noires se mettre en mouvement, s’appuyant sur leurs angles qu’elles fixent sur le sol, en enjambées inégales et lentes. À leur allure monotone, les cloches ébranlées sonnent des glas mystérieux ; tandis qu’en des danses grotesques, cent spectres sautent autour, en la lente mesure de ce funèbre fracas. Les girouettes s’inclinent en passant devant lui, les spectres le saluent, et il entend les échos des cloches se renvoyer son nom en cent langues de métal.

Mais bientôt le bruit cesse : tout se replonge dans le silence, dans une paix muette, et la ville disparaît soudain : palais et temples se changent en champs solitaires, en une lande déserte, silencieuse et mélancolique, sans lumière, sans air, sans horizon, perdue dans l’immensité. Il pense qu’il marche sans pouvoir s’arrêter jamais, mû par une impulsion étrange, avec des efforts précipités : son guide va devant lui, mystérieux et muet ; il le suit d’un pas rapide, et voici que, devant ses yeux s’élève, sur les ailes de l’ouragan, une vision sublime. Dans l’épaisse obscurité il voit briller un visage phosphorescent au milieu de pâles éclairs, serpents de lumières, avortons lumineux de la tempête : et tandis qu’il se demande s’il dort, s’il rêve, ou s’il est fou, si un tel prodige, un tel délire est la vérité, soudain il se retrouve à Salamanque ; il aperçoit les édifices, reconnaît où il est et en son vertige affolé, accuse encore le vin et se met à jurer. Ils continuent à marcher, elle devant, lui derrière.

« Vive Dieu ! se dit-il, ou Satan plaisante, ou je n’ai pas ma raison, ou le malaga que j’ai bu fume encore dans ma tête.

« Ombres, fantômes, visions… ce glas funèbre et ces grosses tours qui, confusément, dansent en la mesure d’une telle musique…

« Je vais perdre l’esprit au milieu de tant de choses étonnantes, car je les ai bien vues ces tours, qui, semblables à des mules de louage, marchaient avec leurs clochettes.

« Et cette femme, qui peut-elle être ? Mais serait-ce le diable en personne, que diantre cela me fait-il ? D’autant plus que les vêtements qu’il porte en cette occurrence lui vont à ravir.

« Noble dame, j’imagine que vous êtes nouvelle venue dans la ville ; marcher ainsi est folie : ou vous vous êtes égarée, ou vous marchez pour le plaisir de marcher.

« Elle s’est entêtée à ne pas répondre, ce qui chez une femme est la plus bizarre folie, et se figure que je dois l’aimer pour sa seule démarche. »

Cependant don Félix cheminait à tâtons : devant lui marche la blanche vision ; la sombre nuit triple son épouvante, Aquilon redouble ses cris horribles.

Les girouettes de fer grincent en tournant, on entend résonner un craquement de chaînes : dans les tours, les cloches élevées, inquiétées par le vent, rendent des sons cadencés.

Un bruit de pas de gens qui viennent, marchant en mesure avec une sourde rumeur, qui s’arrêtent de temps en temps et semblent prier en un murmure confus,

arriva bientôt aux oreilles de don Félix : bientôt il vit briller dans le lointain une centaine de lumières ; bientôt il vit que, en longues files, murmurant lugubrement,

s’avançaient des êtres vêtus de deuil ; et bientôt il voit avec terreur plus prés de lui, qu’ils portaient un cercueil sur leurs épaules, et que deux cadavres y étaient étendus.

Les lumières, l’heure, la nuit, tout semble cacher un secret terrible, infernal. Quand le monde gît, mort, en un profond sommeil, quand tout annonce à l’homme qu’il devra mourir,

qu’il a follement affronté la dure tourmente de la vie, à la merci du vent, quand une voix triste compte ses heures et qu’il voit ses pompes changées en boue,

il faut qu’il ait une âme de diamant, celui qui ne sent pas son cœur palpiter d’horreur, celui qui comme don Félix, plein d’un calme serein, ne se met à penser ni à Dieu ni au diable.

À pas lents, chuchotant, le lugubre cortège arriva tout près, et la blanche dame, priant dévotement, mit les deux genoux à terre.

Le chapeau sur la tête, debout, indifférent, don Félix regarde passer le cercueil, et demande, de son air insolent, les noms de ceux qui vont au sépulcre.

Mais quelle fut sa surprise, quelle fut sa stupeur, quand saisi d’horreur, il vit avec épouvante que l’un était don Diego de Pastrana et l’autre, Dieu saint ! et l’autre c’était lui !…

Lui-même, son image, sa figure, ses traits, c’était lui-même enfin : il hésite, se tâte, et un moment, sent courir dans ses veines la froide crainte.

Après tout, il était homme, et les nerfs de l’homme tremblèrent un moment, et un moment il eut peur ; mais bientôt ils recouvrèrent leur ancienne vigueur, bientôt son impassibilité lui revint au cœur.

« Pastrana, dit-il, on fait bien de l’enterrer ; mais m’enterrer, moi, est chose vaine, et demain je me plaindrai de cette erreur.

« Dites, l’homme en deuil, qui va-t-on enterrer ? — L’étudiant endiablé, don Félix de Montemar », — répondit l’homme au capuchon.

« Tu mens, farceur. — Non, certes. — Alors, dites-moi qui je suis, s’il vous plaît, car je ne comprends pas comment je suis, en même temps, ici vivant, et là mort.

— « Je ne vous connais pas. — Pardieu, si je me fâche, je te ferai pleurer tes moqueries de telle sorte qu’une autre fois tu reconnaîtras Montemar.

« Maraud !… mais ce n’est qu’une illusion des sens, le monde va à l’envers, les diables s’amusent à me faire faire des faux pas.

« Ce fanfaron de don Diego ! La peste soit de ses mensonges ! Quand il est tombé mort, il s’en est allé aussitôt en enfer raconter qu’il m’avait tué ! »

Parlant ainsi il éclata de rire et tourna dédaigneusement le dos : il frisa sa moustache, assura son épée, et s’approcha de la dame dévote.

« Mais enfin, où demeurez-vous ? Car il se fait tard, madame. — Tard, pas encore ; il le sera dans une heure. — Vous dites vrai, il sera plus tard que maintenant.

« Cette voix dont vous voulez m’effrayer me fait vous aimer davantage : j’ai fait mon deuil du salut de mon âme, jugez si je me soucierai de Dieu et de Satan.

« — Chaque pas que vous faites vous approche de la mort, don Félix. Ne tremblez-vous pas ? Votre cœur ne vous dit-il pas que vous allez à la mort ? »

Ainsi parla la femme, d’un ton mélancolique et sombre, et ses sourds accents, résonnant aux oreilles de l’impie, rugirent dans la voix du vent tempétueux.

Les pierres choquèrent les pierres, la terre retrembla sous ses pas, les oiseaux de nuit se rassemblèrent et il sentit leurs ailes l’effleurer.

Dans l’ombre il vit errer des yeux fulgurants, inspirant l’épouvante, sautant toujours sur lui, haletants, des yeux d’horreur qui le regardaient sans cesse.

Il les vit et ne trembla pas : il porta la main à son épée et, intrépide, se rua sur l’ombre : il ne trouva ni ombre, ni rien ; il ne vit que les yeux fixés sur lui.

Impatient, il leva les siens vers le ciel, grinça des dents et blasphéma ; l’infernal désir croissant en lui, il dit sur un ton de dépit :

« Continuez, madame, allons en avant : tant mieux si vous êtes le diable lui-même ; Dieu, le diable et moi, faisons connaissance, et que cette confusion prenne fin une fois pour toutes.

« Pardieu ! je jure que je suis las d’un si long sermon, d’une si longue comédie ; rien n’ébranle ma ferme volonté, sachez enfin, qu’où vous irez, j’irai.

« La vie n’a qu’un but, un but fixe ; l’âme n’a qu’un terme : maintenant en avant. » Il dit, puis marche derrière elle avec un calme plein de décision.

Et la dame s’arrêta à une porte : et c’était une porte très haute dont les battants s’ouvrirent aussitôt qu’elle frappa, obéissant à une mystérieuse poussée ; l’étudiant entra derrière la dame ; ni pages ni servantes n’accoururent ; à la lumière de bougies fantastiques, ils parcourent des galeries désertes.

Avec un charme trompeur, la vision glisse sans bruit sur les dalles, toute cachée sous la blanche mante dont les plis balaient le sol ; cependant elle poursuit sa route dans le long corridor, et Montemar la suit, Montemar plein de hardiesse, dont la témérité frise la folie, mais résolu à mener à bout son aventure.

Les lumières, comme des torches funèbres, répandaient une lueur languissante et livide, et à l’entour, en mouvements inégaux, les ombres s’éloignaient ou se rapprochaient : ici l’on voyait des arcs ruinés, sépulcraux, là des urnes et des statues, des colonnes brisées, des cloîtres à moitié abattus, pleins d’herbes, tristes, humides et obscurs.

Tout est vague, chimérique et sombre ; c’est un édifice sans base ni fondations : il ondule comme un navire fantastique qu’agite sur ses ancres un vent de bourrasque. Tout y gît dans un silence effrayant et froid : on n’y a jamais entendu ni la rumeur ni le souffle de l’homme ; le temps s’y écoule en silence, enseveli dans le sommeil.

Les heures mortes suivent les heures mortes à l’horloge de cette vie-là, ombres d’horreur qui tournent effrayantes, apparaissant dans une fuite peureuse ; seules et tristes habitantes de ce noir et funèbre repaire, elles semblent à celui qui altère leur paix, la fantastique chimère d’un rêve.

Et c’est sur lui qu’elles fixent leurs yeux caves qui, du fond de la longue galerie, brillent au loin comme des charbons rouges et épouvanteraient la vaillance elle-même : elles montrent sur leur visage leur courroux de voir foulée leur sombre demeure ; tantôt elles s’avancent en groupes, tantôt elles s’évanouissent dans l’ombre.

Figure satanique et grandiose, le front haut, Montemar chemine, esprit sublime en sa folie, provoquant la colère divine : œuvre fragile de matière impure, l’âme qui la soutient et l’éclairé l’égale à Dieu, et d’un vol audacieux s’élève jusqu’à son trône et le défie.

Nouveau Lucifer, le front frappé de la foudre vengeresse, âme rebelle que la crainte n’effraie pas, abattue, mais jamais vaincue : c’est l’homme, enfin, qui, dans son anxiété, brise les bornes de la prison de la vie, somme Dieu de lui en rendre raison et essaie de découvrir son immensité.

Fredonnant une chanson bachique, il traverse cette demeure chimérique, la démarche audacieusement indifférente, la moquerie aux lèvres, le regard hardi : de tristes échos qui le suivent répètent, sur une monotone mesure, le bruit de ses pas et les coups de l’épée qui le heurte tandis qu’il marche.

Ce bruit étrange et unique qui remplit les échos de cette demeure, répercuté par le sol et les plafonds, résonne dans sa solitude profonde : il y expire comme le funèbre gémissement que pousse en sa douleur l’âme en peine qui, au bout du corridor long et obscur, semble sortir du mur entr’ouvert.

Et dans cet autre monde et dans cette autre vie, monde d’ombres, vie qui est un songe, vie qui, confondue avec la mort, ceint ses tempes de jusquiame mortelle, — monde, vague illusion décolorée de notre monde et rêve vaporeux, — ce bruit et sa folie insensée sont la seule image de la vie humaine.

Car là, son mystérieux guide blanc semble l’illusion de l’âme qui tantôt est caressée par l’espoir impie, tantôt s’évanouit quand elle est touchée par lui : nuage blanc, flottant, qui, dans la nuit sombre, se berce sur les ailes du zéphyr ; son vêtement gracieux flottant au vent, semble, en son mouvement muet,

la douce fumée d’un aromate brûlé qui, en ondes, monte se perdre dans l’air, rayon de lune qui sur le coteau gris, tel qu’une agrafe, a son sommet dans l’éther, sylphe qui apparaît enveloppé de l’aube et étend dans l’azur nébuleux ses ailes d’ombres noires teintes de lumière, indécises entre l’aube et la nuit.

Agile, rapide, aérienne et vaporeuse, les pieds touchant à peine le sol, la magique vision au voile blanc traverse cette demeure ténébreuse ; image fidèle de l’illusion heureuse que l’homme trouvera peut-être au ciel, pensée sans forme et sans nom qui fait prier et blasphémer l’homme.

Jusqu’à l’extrémité du long corridor, Montemar suit son guide silencieux et descend un escalier de marbre noir, en spirale, long, étroit et tortueux, qu’il voyait sans cesse suspendu en l’air, tourner autour de lui d’un mouvement violent, rapide, vertigineux.

Il se prolonge et s’étend en une spirale éternelle, en un tourbillon infini ; la pensée de Montemar est plongée dans une folle extravagance ; il fait mille chutes, et, enveloppé dans cette violente rotation, se figure être en l’air, se dégage et, sans que s’arrête l’impétueux mouvement, tournoie mille fois, roule dans des abîmes.

Et tombant de degré en degré, il blasphème et jure en un langage immonde ; son vertige furieux s’accroît, et rapidement précipité dans les profondeurs, tantôt il entend les sifflements de l’ouragan, le monde passant confusément devant lui, tantôt il entend des cris, des voix, des battements de mains, des applaudissements et des éclats de rire brutaux,

des pleurs et des soupirs, des plaintes et des gémissements, des moqueries, des sarcasmes, des rires et des insultes ; et en mille groupes çà et là rassemblés, il voit levés au dessous de lui, au dessus de lui, des hommes, des femmes, tous confondus, en un sot travail, avec des gestes gais, qui le regardent pleins d’un étonnement stupide et tournent dans le tourbillon perpétuel.

Il sent enfin que soudain il s’arrête, et demeure un instant interdit ; mais aussitôt le courage lui revient : il ouvrit les yeux et se dressa sur ses pieds : il pensa tout d’abord à la blanche dame, regarda autour de lui et la vit assise au pied d’un triste monument, au milieu de la salle, seule.

C’était un monument noir, solennel, qui se dressait au milieu de la salle et il semblait à Montemar, ô prodige, que ce fût à la fois une tombe et un lit : sa folle pensée imagina que cette tombe ouverte l’attendait ; elle imagina aussi que le lit était la molle couche d’un époux.

Et alors Montemar ayant recouvré son audace, et résolu à pousser à bout son aventure, défie le ciel et l’enfer, le cœur ferme, l’esprit décidé : il se dirige vers la blanche vision, la conjure de découvrir son visage, et s’asseyant à ses pieds, lui parla ainsi d’un accent enflammé.

« Diable, femme ou vision, qui, à en juger par le chemin qui conduit à cette demeure, es une pure rêverie ou une invention diabolique,

que ce soit de la part de Dieu ou de la part du diable, qui donc nous a conduits ici tous deux ? Dites-moi enfin qui vous êtes, pour que je sache avec qui je parle :

car mon cœur résolu palpite plus que jamais, maintenant qu’en une confusion si grande et en un mystère si irritant, ma raison me découvre

qu’un pouvoir suprême s’est mêlé ici invisiblement, pouvoir que je ressens mais ne crains pas, bien décidé à pousser jusqu’au bout cette aventure. »

Alors
on entend
un funèbre
gémissement
d’amour,
sur un ton

triste, doux,
comme la plainte
dolente
qui a été arrachée
de l’âme :
comme un profond
soupir qu’exhale
un cœur
moribond.

Une musique triste,
languissante et vague
qui meurtrit l’âme
et la caresse tout à la fois ;
douce harmonie
qui inspire au cœur
de la mélancolie,
comme le murmure
du souvenir
d’un ancien amour,
en même temps berceuse
et peine amère
du cœur.

Extase magique,
cantique idéal,
qui vague dans les airs
et en sonores rafales
va augmentant :
sublime et obscure,
rumeur prodigieuse,

sourd accent lugubre,
écho sépulcral ;
musiques lointaines ;
roulement monotone
d’un tambour voilé de deuil ;
ouragan proche,
qui agite à peine
la cime de l’arbre
et brame déjà ;
vagues agitées
de la mer sauvage
dans la nuit sombre,
les vents en repos,
dont le rugissement
se mêle au gémissement
du mur qui trembleur
les sent arriver ;
fracas effrayant,
présage infaillible
de la tempête.

Et en un rapide crescendo,
les sons lugubres
se font entendre de plus près
en un rauque bramement ;
comme un tonnerre qui dans les montagnes
va se répercutant,
comme rugissent les entrailles
d’un effroyable volcan.

Un bruit de voix, des cris,
un claquement d’os effilés,
un grincement de dents,
les fondations qui tremblent,
les dalles du pavé
qui vont s’ouvrant peu à peu
brisant leurs joints
en un éclatement effrayant,

voilà ce qu’entend Montemar, et le bruit
croît plus proche, et en même temps
il entend se choquer des crânes
décharnés et séchés ;
la terre tremble autour de lui,
des vents en bataille beuglent,
les vagues en colère rugissent,
le tonnerre rauque éclate,
des plaintes tristes s’exhalent,
des lamentations s’élèvent :
tout est en une furieuse harmonie,
tout est en un frénétique tapage,
tout est en un bouleversement confus,
tout est mêlé et divers.

Et bientôt le fracas augmente
confus et mêlé en un son
qui, rauque, dans les voûtes profondes
bourdonne et tonne furieusement ;
et un écho qui, aigu, semble
la voix de l’ange du jugement,
s’éleva en clameur stridente
effrayante et sonore ;
il entendit à ses pieds, des tombes bouleversées,
les morts, entendant soudain
la haute volonté de Dieu,
claquer des dents avec fracas,
heurter les pierres de leurs crânes
en une rage et des efforts féroces,
essayant de briser la dalle
et de fuir de leur éternelle demeure.

Et tout à coup il sentit la salle
s’abîmer dans une horrible explosion
et à ce bruit infernal
il vit cent spectres se dresser :
ils fixèrent sur lui les cavités de leurs yeux
et leurs doigts secs ;

puis se regardèrent entre eux
et le désignèrent de nouveau ;
et les mains gauches enlacées,
d’un geste de doute et d’effroi
le contemplant, et leurs mains droites étendues
avec étonnement vers l’audacieux mortel,
s’approchèrent lentement
et l’entourant, inclinèrent
leur tête desséchée, dont la grimace
immobile et ironique, indiquait la crainte.

Et alors la vision voilée de blanc au fier Montemar tendit une main : un contact de glace lui fit crisper les nerfs et il essaya en vain d’y résister audacieusement :

tout son sang coagulé en une masse glacée transmet à son cœur une sensation galvanique, cruelle, nerveuse et froide, hystérique et horrible…

Malgré elle et maudissant le ciel, Montemar retira sa main, et, téméraire, la portant à son voile qu’il tira vers lui, il lui découvrit la face.

C’est son époux !! clamèrent les échos, c’est m’épouse qui a trouvé enfin son mari !! Les spectres crièrent avec joie : C’est l’époux de soif éternel amour !!

Et elle cria alors : Mon époux !! Et (désenchantement fatal ! triste vérité !) la blanche dame à l’élégante allure était un squelette sordide, horrible !…

Aussitôt, un seigneur aux éperons dorés, de belle prestance, quoique le visage fût d’une pâleur mortelle, la poitrine percée d’un grand coup d’épée, du sang coulant encore de son cœur,

s’approche et dit, en lui tendant la main que Montemar serre impassible : « La parole que vous donnâtes est enfin tenue : voyez, doña Elvire est désormais votre épouse :

« je vous pardonne ma mort. — Certes, don Diego, reprit à son tour don Félix, tranquillement, je me réjouis de vous voir si calme, car, par ma foi, je ne pensais pas vous revoir.

« Quant à ce spectre que vous appelez mon épouse, vous venez m’offrir une étrange union : sa figure n’est certes ni aimable ni belle ; mais ne vous figurez pas que je veuille vous offenser :

« je la prends pour femme, car c’est chose certaine, et je pense que mon plan n’échouera pas, qu’en une conjoncture si bizarre, mon épouse ne me fatiguera pas autant morte que vivante.

« Mais auparavant, dites-moi si c’est Dieu ou le démon qui m’a amené en ce lieu, car je voudrais voir l’un ou l’autre et avoir au moins Luzbel pour témoin de mon mariage :

« l’un des deux ou tous les deux, avec toute leur cour, tandis que ces nobles spectres sont ici, ne perdraient pas beaucoup en venant à ma noce… Don Diego, mon frère, ne pensez-vous pas ainsi ? »

Don Félix dit cela en fronçant les sourcils et en jetant fièrement autour de lui d’audacieux regards empreints d’un profond dédain capable de braver le Dieu par lequel il jure.

Le squelette carié, livide, le presse étroitement dans ses bras froids, longs et sales, et, avide, le caresse jalousement : sa bouche caverneuse cherche la bouche de Montemar ; sa face répugnante, aride, décharnée et jaune atteint et frôle sa joue.

Et lui, enveloppé dans ses sèches articulations, sent leurs nœuds se resserrer de plus en plus ; une mer de sueur baigne son front intrépide, et sa fureur s’accroît de son impuissance ! C’est en vain qu’angoissé il lutte pour se dégager. Plus il redouble ses efforts, plus le spectre grossier, qui l’emplit d’horreur, se presse contre lui et le désire.

Et voici que, en un furieux tourbillon,
en une fantastique danse aérienne
dont l’esprit de l’homme ne peut
suivre le mouvement rapide,
les spectres commencèrent leur ronde :
tel, en circuits impétueux le vent
agite perpétuellement des tourbillons
d’épaisse poussière et de feuilles sèches.

Et pendant qu’ils élèvent leurs mains desséchées,
de leur bouche sans langue
sort comme un lugubre écho
semblable à un hurlement, une voix
effrayante, monotone, informe,
pareille à celle du vent
au sein des âpres roches.

« Chantons, dirent leurs cris,
la gloire, l’amour de l’épouse,
qui, heureuse, enlace à jamais
dans ses bras l’époux qu’elle aima :
que sa bouche se joigne à sa bouche,
que des délices éternelles soient scellées
par une suave et amoureuse caresse,
par un langoureux baiser d’amour.

« Que l’épouse et l’époux enlacés,
unis en de mutuels embrassements,
reposent pour toujours en paix,
en un doux et éternel repos ;

qu’une torche fatidique éclaire
leur noce de sa funèbre lueur
et préside à leurs voluptés ; que le tombeau
soit leur lit nuptial. »

Cependant la ronde frénétique
qui s’agite en un mouvement impétueux,
précipite de plus en plus
son vertige incessant ;
elle se hâte de plus en plus,
elle s’emporte de plus en plus,
et se défait en cercles
de plus en plus violents.

Elle s’échappe, roue chimérique,
et semble un point noir
dont le tournoiement s’évanouit
sous une lumière fantastique,
et ses lugubres hurlements
qui se propagent, effrayants,
fendent les airs rapides,
encore plus prolongés.

Et à ce vertige si continuel,
à ce charme si funeste,
à ce chant si horrible,
à cette lutte si terrible ;
entre les bras lubriques
qui le pressent prisonnier,
entre les mille caresses
du squelette hideux,

le courage jamais abattu
Montemar affaibli
sentit lui manquer
son corps déjà éreinté ;
et en même temps que son esprit
dément sa faiblesse,

la matière flasque et vile,
commence à s’évanouir.

Il éprouve un délire
confus, étrange,
une langueur, des nausées
et une angoisse excessive :
il voit des ombres et des lumières,
la salle qui tourne
et des esprits
qui vont et viennent.

Puis au loin,
tristement à son oreille
un écho dolent
et languissant résonna,
comme la mélodie
qu’une brise d’amour
et un souffle d’harmonie
ont formée la nuit.

Il sent bientôt
sa poitrine oppressée
et défaillante,
ses yeux troubles,
ses paupières lourdes,
tomber mollement :
sa tête s’incline
sur sa poitrine,
et malgré lui,
il sent ses bras
alanguis, faibles
tomber inertes.

Puis il voit
une flamme
qui s’enflamme

et meurt ;
il entend l’écho
perdu
d’un gémissement
qui a expiré.

Telle, douce,
soupire
la lyre
que frappa,
en un suave
accord,
du vent
la voix

légère,
son
bref.

Cependant, en nuages de carmin et d’écarlate, l’aube rougeoyante répand sa lumière, et joyeusement le jour qui naît égayé et embellit les hautes tours : le ciel est serein, la matinée calme, la brise douce, transparente et froide ; le soleil, avec sa beauté, verse à la terre des rayons de paix et de bonheur céleste.

La nuit s’est enfuie et avec la nuit s’étaient enfuies ses ombres et ses femmes fantastiques ; à son silence et à son calme succédaient le tapage et la rumeur des ateliers ; les hommes revenaient à leurs travaux, à leurs efforts et à leurs plaisirs frivoles ; quelques-uns allaient à leurs affaires l’âme pleine d’affliction et de crainte,

car le bruit courait, arraché par les larmes du cœur endurci du pécheur, que cette nuit-là, à Salamanque, sous l’apparence d’une femme, revêtu d’une mystérieuse tunique blanche, le diable était enfin venu chercher Montemar !… Et si tu dis, lecteur, que c’est une fable, comme on me l’a contée je te la conte[1].


  1. Y si, lector, dijerdes ser comento,
    Como me lo contaron te lo cuento.

    Ces deux vers qui terminent le poème d’Espronceda sont de Sébastian de Castellanos.