L’Éducation de la Jeune Fille par elle-même/Chapitre 8

Société Saint-Augustin (p. 55-60).
Huitième causerie.
COMMENT PERFECTIONNER SA SANTÉ.

À première vue, il semble inutile de recommander le soin de son propre corps ; en réalité quelques conseils ne seront pas inutiles ; car, en hygiène peut-être plus qu’ailleurs, il y a beaucoup de préjugés à combattre et de soins essentiels à rappeler.

L’organisme humain a besoin d’aliments :

1o Pour son entretien et la réparation de l’usure journalière. À cette fonction, une faible partie de la ration suffit.

2o Pour la production d’efforts musculaires (travail). La quantité d’éléments nutritifs nécessaire à cette fin dépend de la somme d’énergie à produire.

3o Pour la production de la chaleur organique. Cette fonction absorbe une partie de la ration pouvant atteindre les deux tiers de celle-ci.

4o Pour fournir les matériaux nécessaires à l’accroissement.

La ration doit être composée de manière à renfermer, en nature et en quantité, les éléments correspondant à ces exigences. Le 1er et le 4e réclament surtout des aliments azotés ; le 2e et le 3e exigent des graisses et des hydrates de carbone. Parmi les aliments, on mettra donc au premier plan les farineux, les matières grasses et les légumineuses ; au second plan, la viande. Beaucoup de personnes semblent méconnaître la haute valeur nutritive des légumineuses.

En ce qui concerne les boissons nous signalerons que :

a) les potages sont excellents pour ouvrir l’appétit :

b) la bière est une boisson saine et nutritive ; on ne doit pas la prendre avec excès ;

c) on fera aussi un usage très modéré de vin ;

d) le cacao et le chocolat sont des boissons nutritives surtout lorsqu’elles sont préparées au lait : elles renferment beaucoup de principes azotés et calorifiques ;

e) le thé et le café sont des boissons stimulantes, mais non nutritives. Le café, pris après le dîner, facilite la digestion, mais pris dans la soirée, il produit l’insomnie ; en tout temps, il facilite le travail de l’esprit et agit sur le système nerveux. Le thé agit comme le café. Éviter les excès.

— Comment faut-il manger ?

a) Il faut manger sans hâte, bien mâcher, déguster ses aliments, les laisser séjourner dans la bouche un temps suffisant pour s’y imprégner de la quantité de liquide salivaire nécessaire à une bonne digestion. (Fletchérisme).

b) Il faut prendre les aliments et les boissons à une température convenable. Trop de froid ou de chaleur nuit aux dents et à l’estomac et entrave la digestion. Ne pas descendre en dessous de 10-12° ni aller au-dessus de 50°. En hiver, les aliments chauds sont préférables aux aliments froids : on épargne ainsi à l’organisme la dépense qui serait nécessaire pour élever la température de l’aliment à celle du corps.

L’intempérance a tué plus de personnes que la faim. Mangeons pour vivre et ne vivons pas pour manger. Ne consommons que des aliments sains.

L’exercice est absolument indispensable au maintien de la santé et au développement normal du corps. Tout organe qui ne fonctionne pas s’atrophie et tout organe qui travaille se fortifie. Cette première loi de l’activité humaine, la science l’explique et l’expérience la confirme surabondamment. Le mouvement est aussi nécessaire au développement des facultés de l’âme : il faut qu’il y ait équilibre entre le travail de l’esprit et celui du corps.

Le meilleur des exercices est incontestablement le travail en plein air ; mais comme tout le monde n’a pas le privilège de vivre à la campagne, il faut bien que l’on ait recours aux exercices physiques, tels la gymnastique, la promenade, la natation, etc.

La gymnastique est salutaire, pourvu qu’elle soit exécutée d’une façon rationnelle et basée sur les lois de l’anatomie et de la physiologie. Elle offre surtout comme avantages :

a) de produire au plus haut degré tous les effets de la contraction musculaire en général ;

b) d’offrir une variété de mouvements s’adressant aux bras, aux jambes, au tronc, à la tête, à la poitrine, à l’abdomen, etc., favorisant le développement harmonique du corps ;

c) de stimuler les fonctions de nutrition et d’exercer une heureuse influence sur les fonctions de relation (sensations, locomotion) ;

d) d’augmenter la maîtrise de soi et le sang-froid ;

e) de développer l’esprit d’initiative et l’adresse ;

f) de contribuer à faire acquérir ou à développer la beauté du corps, sa souplesse, sa grâce, en un mot, de lui conserver tous les avantages de la jeunesse :

g) d’être à la portée de tous les âges et de toutes les conditions.

Pratiquons assidûment la gymnastique afin d’affermir notre santé, de corriger les mauvaises attitudes, de faire l’éducation de la volonté dans son action sur les muscles et de perfectionner la coordination des excitations nerveuses. Appliquons-nous-y avec méthode, en vue du but hygiénique, esthétique, économique et utilitaire que nous devons atteindre.

Le jardinage, met aussi en mouvement toutes les parties du corps et offre le grand avantage de se pratiquer au grand air. Ne le négligeons pas, évitons cependant les travaux trop fatigants et ceux qui exigent que le dos soit constamment courbé et la tête fortement penchée.

La promenade convient à tous, particulièrement aux personnes à vie sédentaire, aux intellectuels et aux vieillards. Elle a aussi l’avantage de se pratiquer en plein air et de distraire l’esprit. Lorsqu’on s’y livre par hygiène, il faut veiller à ce qu’elle soit assez continuée pour amener de la chaleur à la périphérie et assez accélérée pour donner une douce moiteur à la peau. Ayons soin d’avoir des chaussures hygiéniques.

La natation combine les avantages des exercices musculaires avec les effets produits par l’eau dans laquelle ils s’exécutent. Ces derniers varient suivant la nature et la température de l’eau ; les bains de mer et de rivière valent mieux que ceux pris dans l’eau stagnante : les bains froids sont fortifiants, les bains chauds sont des bains de propreté. Ajoutons encore que la natation repose les centres nerveux, provoque des inspirations profondes et enhardit. L’on ne doit jamais prendre de bain avant que la digestion ne soit achevée, mais c’est un préjugé de croire que l’on ne doit jamais entrer dans l’eau quand on est en transpiration. À la sortie du bain il convient, de s’essuyer vite et de se frictionner énergiquement ; une évaporation rapide refroidit le corps.

Le canotage est aussi un excellent exercice musculaire qui développe les muscles des bras, la cage thoracique et qui fait acquérir l’esprit d’initiative.

La bicyclette est salutaire à condition qu’on s’y adonne modérément, qu’on prenne une bonne position initiale et qu’on évite les refroidissements.

Le tennis donne du mouvement, c’est la course forcée en plein air ; mais la balle lancée toujours par le même bras présente l’inconvénient de développer le corps d’une façon peu harmonique.

Quant au foot-ball, tant à la mode de nos jours, il va sans dire que ce jeu ne convient pas aux femmes : il exige des mouvements trop violents des jambes et de trop fortes contractions des muscles abdominaux.

Remarquons que les bons effets de la gymnastique et des sports seraient de beaucoup diminués si l’on n’observait pas les règles d’une hygiène bien comprise.

Livres à lire :

Lagrange, L’exercice chez les jeunes gens. — Paris, Alcan, 4 fr.

Cryns. Guide d’hygiène populaire. — Bruxelles, Manceaux.