L’Âme nue/Vierges mortes
G. Charpentier et Cie, éditeurs, (p. 83).
VIERGES MORTES
à georges charpentier
Œillets blancs, lilas blancs et violettes blanches :
Et le char sépulcral s’en va vers les caveaux,
Sinistre et chaste, au pas rythmique des chevaux
Qui bercent les grands draps déployés sur leurs hanches.
Ô vierges ! D’autres Mais fleuriront les pervenches,
Les baisers écloront dans les Avrils nouveaux
Et la brise des Juins grisera les cerveaux :
Mais vos corps sans désirs dormiront sous les planches.
Toujours ! Et c’est fini sans être commencé !
Votre avenir d’hier a mille ans de passé :
Vos cœurs immaculés sont morts avant de naître.
Lilas blancs, œillets blancs… Vous vous en retournez
Vers l’immense sommeil des choses, sans connaître
Le seul bien que la vie accorde à ses damnés !