G. Charpentier et Cie, éditeurs (p. 229).
LE SOIR



À DIEU


 
Ô Dieu, Juge infaillible et Sagesse suprême,
S’il est vrai que tu sois, toi que j’ai blasphémé ;
S’il est vrai que je doive un jour, nu, désarmé,
Au pied de ta justice abattre mon front blême :
 
Tu me pardonneras mes cris et mon blasphème,
Car j’en suis innocent et je t’aurais aimé ;
Le crime est au destin ; ses coups m’ont déformé :
La douleur veut qu’on doute et ne veut pas qu’on aime.
 
Tu sais, et tu sais seul, quel désespoir secret,
S’acharnant sur ce cœur maudit, le dévorait ;
Seul, tu connais combien la plaie était profonde.

J’ai tu mon mal à ceux dont l’âme en eût souffert,
Et stoïque damné qui souriais au monde,
J’ai fait rire mes pleurs et chanter mon enfer !