Journal (Eugène Delacroix)/5 mars 1855

Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 3p. 11-12).

5 mars. — Concert de l’aimable princesse. Le concerto de Chopin a produit peu d’effet. Ils s’obstinent à le jouer au lieu de ses délicieux petits morceaux. La pauvre princesse et son piano disparaissent sur ce théâtre. Quand la Viardot a préludé, pour chanter des mazurkas de Chopin arrangées pour la voix, on a senti l’artiste ; c’est ce que me disait Delaroche, qui était près de moi, dans cette place où j’avais été relégué, après avoir offert la mienne aux dames de Vautreland.

Ces courts fragments de symphonie d’Haydn entendus hier m’ont ravi autant que le reste m’a rebuté. Je ne puis plus consentir à prêter mes oreilles ou mon attention qu’à ce qui est excellent.

Sur le respect immodéré des maîtres : citer la froideur de certains Titien, le Christ au tombeau, etc., etc.[1].

Oculos habent et non vident veut dire : De la rareté des bons juges en peinture.

— Sur le style… ne pas confondre avec la mode.

  1. Delacroix a déjà formulé, en des années antérieures, un jugement analogue à celui que nous trouvons ici et qui parait pour le moins déconcertant. On retrouvera plus loin, dans l’année 1857, une sorte d’amende honorable, présentée par lui-même. Voir sur ce point notre Étude, p. xlvii.