Journal (Eugène Delacroix)/26 mai 1855
26 mai. — Dîné chez Mme Villot ; j’y ai trouvé Mme Herbelin, Rodakowski[1], Ferré et Nieuwerkerke. Nouvelle sortie contre les fleurs qui jonchent la table.
Le soir, à neuf heures, Nieuwerkerke me mène chez le prince Napoléon, pour le premier jour de ses soirées… Quelle foule ! Quels visages ! Le républicain Barye, le républicain Rousseau, le républicain Français, le royaliste Un Tel, l’orléaniste Celui-ci ; tout cela se pressant et se coudoyant. Il y avait des femmes charmantes, Mme Barbier entre autres, infiniment à son avantage.
Je suis sorti tard, et ai été prendre une glace au café de Foy : celles du prince étaient détestables.
Ma nuit a été mauvaise dans la première partie ; je me suis relevé qu’il faisait petit jour et me suis promené ; cela m’a remis. J’ai joui de ce moment solennel où la nature reprend des forces, où royalistes et républicains sont endormis d’un commun sommeil.
- ↑ Rodakowski avait remporté une première médaille à l’Exposition universelle de 1855, et Delacroix avait puissamment contribué à faire obtenir cette récompense à une œuvre qu’il jugeait des plus remarquables, le portrait du général Dembinski, déjà exposé en 1852 et dont il est question plus haut (tome II, p. 156).