Journal (Eugène Delacroix)/25 novembre 1854

Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 2p. 494-495).

25 novembre. — Mes journées se passent à travailler ; je suis heureux de m’enterrer dans l’étude. Heureuses, heureuses distractions ! douce tranquillité que les passions ne peuvent donner ! Je manque malheureusement toutes mes affaires : je ne peux écrire une lettre ni faire une visite.

Je n’ai pas encore vu ces dames d’Augerville, et le moment se passe.

Avant dîner, chez Mme de la Grange : c’est une aimable personne, pleine de l’envie d’être bonne et agréable. Ensuite dîné chez Chabrier ; je me suis peu diverti ; des lampes assassines, des bougies partout.

X… venu le soir de Saint-Cloud pour y retourner : quatre ou cinq mois ont beaucoup changé mon ami. C’est un homme qui a beaucoup perdu à se trouver dans la sphère où il est comme égaré, eu égard à ses opinions tranchées, au moins à celles dont il faisait parade.

Mme Chabrier me parle de la vie que mène Poinsot : rentré le soir vers minuit, — il sort presque tous les soirs, — il se déshabille et reste jusqu’à près de trois heures du matin sans se coucher, à penser et à se reposer. Il mange ensuite et va au lit immédiatement. Ne sonne son déjeuner que vers dix ou onze heures, reste chez lui sans recevoir jusque vers deux heures ; va à ses affaires. Dîne entre sept et huit heures, quand il dîne chez lui, et va dans le monde ensuite. Vieillard prétend qu’il n’a jamais beaucoup travaillé.