Je t’avois despitée, et ja trois mois passez

Je t’avois despitée, et ja trois mois passez
Les Amours, Texte établi par Hugues VaganayGarnier2 (p. 319-320).

XXIII

Je t’avois despitée, et ja trois mois passez
Se perdoient, Temps ingrat, que je ne t’avois veuë,
Quand destournant sur moy les esclairs de ta veuë,
Je senty la vertu de tes yeux offensez.
Puis tout aussi soudain que les feux eslancez,
Qui par le ciel obscur s’esclattent de la nuë,
Rasserenant l’ardeur de ta cholere esmeuë,
Sou-riant tu rendis mes pechez effacez,

J’estois vrayment un sot de te prier, Maistresse :
Des Dames je ne crains l’orage vengeresse.
En liberté tu vis, en liberté je vy.
Dieu peut avec raison mettre son œuvre en pouldre.
Mais je ne suis ton œuvre, ou sujet de ta fouldre :
Tu m’as tres-mal payé pour avoir bien servy.