Inscriptions de l'Orkhon déchiffrées/I. L'alphabet

Impr. de la Société de littérature finnoise (p. 3-58).

Dans la Notice préliminaire intitulée Déchiffrement des inscriptions de l’Orkhon et de l’Iénisséi et que j’ai publiée dans le Bulletin de l’Académie Royale des Sciences et des Lettres de Danemark pour l’année 1893 (p. 285—299), j’ai communiqué l’alphabet des remarquables inscriptions mentionnées, surtout de celles de l’Orkhon, tel que j’ai réussi à le déchiffrer, et j’ai brièvement indiqué la voie suivie par moi pour atteindre à ce résultat, voie qui m’a conduit à commencer par déterminer les signes des voyelles par opposition aux consonnes, puis à apprécier séparément tous les autres signes, les mots 𐱅𐰭𐰼𐰃 tängri, 𐰚𐰇𐰠 𐱅𐰃𐰏𐰤 kül-tigin et 𐱅𐰇𐰼𐰜 türk me servant de point de départ. Finalement j’ai montré que la langue de ces inscriptions qui proviennent essentiellement du peuple appelé Tou-kioue par les historiens chinois, est un idiome turc pur, plus ancien qu’aucune des langues turques que nous connaissons jusqu’ici.

Je terminai cette courte notice en disant que je me réservais de communiquer ailleurs et en détail les résultats de mon déchiffrement. C’est là ce que je vais soumettre au monde savant. Je ferai d’abord quelques remarques sur l’alphabet, soit pour montrer ou — comme il serait prolixe, sinon impossible de répéter en détail toutes les considérations qui ont précédé les résultats définitifs, — au moins indiquer par une série d’exemples pourquoi j’ai assigné à chaque signe la valeur que je lui ai donnée, soit pour faire ressortir ce qu’il pourrait d’ailleurs y avoir à remarquer à l’égard de la manière dont l’alphabet sert dans les inscriptions à représenter les divers sons. Ceci me fournira aussi l’occasion de parler de divers phénomènes en fait de grammaire, tandis qu’il est en dehors du plan de cet ouvrage, de donner sous forme cohérente une grammaire ou un vocabulaire. J’y ajouterai quelques mots sur l’origine présumable de l’alphabet. Dans la seconde partie de mon ouvrage, j’essayerai de donner une transcription et une traduction des deux grandes inscriptions de l’Orkhon. Je dois tout d’abord faire remarquer que, si les langues turques ne me sont point étrangères, il s’en faut pourtant bien que je puisse me vanter d’en faire une spécialité. Si donc on veut considérer la difficulté particulière du sujet, l’on s’étonnera d’autant moins d’y voir que j’ai dû renoncer à expliquer divers détails ou qu’il y en a qui ne me font que trop bien sentir l’insuccès de ma tentative pour aller jusqu’au fond. En général je ne doute point que le langage et le texte des inscriptions ne renferment un grand nombre de choses susceptibles d’être modifiées dans l’avenir par les recherches de savants plus versés que moi dans les langues turques et dans l’histoire de l’Asie orientale. Néanmoins j’ai l’espoir que mon travail pourra en tout cas servir de base à des études ultérieures sur les remarquables monuments devenus aujourd’hui abordables à la science[1]. que les fragments peu nombreux nous permettent d’en juger, le dialecte de cette inscription n’est pas “turc” proprement dit, mais ouigour.

D’autre part j’ajoute les variantes les plus importantes et les moins douteuses qu’offrent les inscriptions de l’Iénisséi[2]. Du reste, quant à ces dernières inscriptions, je n’y toucherai que rarement: elles présentent tant de particularités qu’on doit en faire l’objet d’un travail à part. Ces particularités se révèlent, non seulement par les formes des lettres, mais encore pas la négligence qui y règne souvent, soit dans l'épellation des mots, soit dans la manière dont les inscriptions ont été taillées. On ne peut donc pas s’étonner qu’évidemment l’édition imprimée n’ait pas réussi à surmonter toutes les difficultés que présentent l’identification des signes et la reproduction typographique de ces inscriptions, et qu’il y ait beaucoup de détails qui suscitent de grands doutes (nous en verrons des exemples plus loin): je suis convaincu que sans pouvoir consulter les originaux ou des estampages exacts, ce serait peine perdue que de vouloir en tenter le déchiffrement ou l’interprétation en totalité. Même le dialecte paraît différer un peu de celui des inscriptions de l’Orkhon: on peut supposer que c’est une forme ancienne du kirghiz [3]. (Parmi les variantes, j’exclus les formes à rebours employées dans les cas où exceptionnellement on a écrit de gauche à droite. Je désigne par " qu’on emploie aussi la forme des inscriptions de l’Orkhon, et par — que telle lettre fait défaut, excepté les inscriptions dont le numéro est ajouté entre parenthèses.)

Dans le tableau j’exprime par un 1 les signes de consonnes qui ne s’emploient qu’en combinaison avec les voyelles vélaires a, o, u et, en général, y), et par 2 les consonnes dont l’emploi est restreint aux voyelles palatales.

  1. A l’égard du premier monument de l’Orkhon, l’éminent turcologue M. Radloff, a déjà pris les devants sur moi en publiant une nouvelle reproduction typographiée de l’inscription de ce monument, suivie d’une transcription et d’une traduction allemande et en se servant de la clef trouvée et communiquée par moi (Die alttürkischen Inschriften der Mongolei. I. Das Denkmal su Ehren des Princen Kül Tegin. Von W. Radloff. St. Petersburg, 1894, 35 pages. Dans ce qui suit, je désigne cet ouvrage par Denkm. Kül T.). Mon travail était déjà à peu près terminé, quand je reçus ce mémoire de M. Radioff ; mais après l’avoir reçu j’ai pensé devoir faire subir une revision à mon travail avant qu’on l’imprimât. C’est pour moi une grande satisfaction que non seulement M. Radlof ait accepté mon déchiffrement de l’alphabet — quant à un très petit nombre d’additions qu’il a cru devoir faire, j’en parlerai dans la suite — mais encore qu’à l’égard du déchiffrement des inscriptions, la grande majorité de ses résultats concordent parfaitement avec ceux auxquels j’étais déjà arrivé, tandis qu’il y a également des points dont l’intelligence lui a aussi peu réussi qu’à moi. Si, d’autre part, pour être juste, je dois reconnaître l’appui que m’a procuré le travail de M. Radiloff en ce qui concerne l’intelligence de divers détails difficiles ou douteux, il y a aussi, soit pour fixer les leçons du texte, soit relativement aux principes de la transcription et à la manière de concevoir les formes de la langue en question, soit enfin concernant l’interprétation, un assez grand nombre de détails où je suis arrivé à des résultats différents et, j’ose le croire, plus exacts que les siens. Il y a même certains points où son travail — je ne puis pas me dispenser de le dire, — me paraît dénoter une exécution trop précipitée. Pour cette raison je n’ai pas non plus pensé que le travail de M. Radloff devrait me détourner de publier celui que j’avais annoncé dans ma Notice préliminaire. J’ai l’espoir qu’au moins dans une partie des points où je m’écarte de M. Radloff, j’ai réussi à approcher plus que lui de la vérité.
  2. Inscriptions de l'Iénisséi recueillies et publiées par la société finlandaise d'archéologie. Helsingfors 1889. — O. Donner, Wörterverzeichniss zu den Inscriptions de l'Iénisséi, Ibid. 1892.
  3. Comp. Klaproth, Journal asiatique II, 1823, p. 5 et suiv. = Mémoires relatifs à l'Asie I, 1824, p. 160 et suiv. — Inscr. de l'Iénisséi p. 7.
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Orkh. III. Iénisséi Orkh. III. Iénisséi
𐰀 a, ä ,, 𐰁 𐰂 𐰘 j2 ,, 𐰙
𐰃 y, i ,, 𐰄 𐰪 i - (𐰫 XXXVII)
𐰆 o, u 𐰆 ,, 𐰭 ṅ (ng) ,, 𐰮
𐰇, ö, ü 𐰣 n1
𐰴 q (k1) 𐰤 n2
𐰶 q devant ou apres y 𐰢 m
𐰺 r1
𐰸 q devant ou apres o, u 𐰹 𐰼 r2
𐰍 ɣ g1
𐰚 k (k2) 𐰞 ł ,, 𐰟
𐰜 k devant ou après ö, ü
𐰠 l (l2)
𐰏 g g2 𐰲 č 𐰳
𐱃 t1 𐰱 ?
𐱅 t2 𐰽 s1 - comp. š
𐰑 d1 𐰾 s2
𐰓 d2 𐱁 š 𐱂
𐰯 p 𐰔 z 𐰕
𐰉 b1 𐰦 nd
𐰋 𐰅 b2 𐰨 nč
𐰖 j1 𐰡 ld


Ajoutez encore le double point ⁚ qu’on emploie pour séparer les mots.

Eu allant faire plus ample mention des divers signes, je ferai encore remarquer une fois pour toutes que dans la transcription j’exprime des voyelles qui, dans le texte original, ne sont pas écrites, mais qu’il faut sous-entendre, à l'aide de petits caractères, par exemple ałyp 𐰞𐰯, et que j’emploie ‿ entre deux mots qui dans l’original ne sont pas écrits séparément. Dans les exemples que je cite en cette partie de mon ouvrage, avec renvoi aux inscriptions I ou II, je suis la (fausse) indicatiou des lignes [1] donnée par les Inscriptions de l'Orkhon. Mais en général je n’ajoute point de renvois aux exemples, ces derniers étant aisés à retrouver à l’aide du vocabulaire joint à l’édition mentionnée. De même, je regarde en général comme superflu que les exemples cités par moi soient additionnés de parallèles avec les autres langues turques: je crois pouvoir supposer que, grâce au conservatisme phénoménal de cette famille de langues, la plupart de ces exemples seront d’emblée intelligibles pour quiconque a de simples connaissances d’une langue turque.

Voyelles

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Pour désigner les voyelles, on a les quatre signes que voici:

𐰀 a, ä 𐰃 y, i 𐰆 o, u 𐰇 ö, ü.

Le premier de ces signes, 𐰀, s’emploie presque exclusivement à la fin des mots, et y revient aussi avec une fréquence extraordinaire; d’autre part, je ne saurais citer aucun exemple sûr dans lequel un a, ä final des inscriptions de l’Orkhon eût été laissé sans indice[2]. Au contraire, tant au commencement des mots qu’à l’intérieur, les voyelles a, ä restent presque toujours sans indice. S’il faut lire a ou ä, soit que la voyelle figure dans l’écriture, soit qu’on l’y omette, cela dépend des consonnes du mot. Il est très rare de rencontrer un mot où aucune consonne ne fournisse de renseignement décisif sur la nature des voyelles. Je cite comme exemples: 𐱃𐰆𐱃𐰀 tuta tenant (gérundium), 𐱃𐰍𐰑𐰀 taɣda, sur la montagne, 𐱅𐰭𐰼𐰃𐰓𐰀 täṅridä, au ciel, 𐰴𐰍𐰣𐰴𐰀 qaɣanqa au khan, 𐰘𐰃𐰼𐰚𐰀 jirkä, au pays, 𐰣𐰃 any, acc 𐰭𐰺 anar, dat., 𐰦𐰀 anda, là (locatif, de 𐰆𐰞 ol, il), 𐰴𐱃𐰃𐰤 aqatyn son cheval blanc, 𐰢𐰭𐰀, à moi, sans doute comme dans la plupart des autres langues turques mana, non mana', en dépit du nominatif 𐰢𐰤 man. Comme exemples de remploi exceptionnel de 𐰀 dans d’autres positions, l'on peut citer 𐰀𐱃𐰃𐰤 I,34 = 𐱃𐰃𐰤 II,35 atyn, son nom; 𐰉𐰆𐱃𐰀𐰢𐰴𐰀 I,41 bu‿tamqa, ces signes ; 𐰖𐰆𐰍𐰞𐰀𐰢𐰾 ⁚ 𐰽𐰃𐰍𐱃𐰀𐰢𐰾 I,37 syɣtamys juɣłamys, ils se lamentaient et pleuraient (comp. la traduction).

Parmi les autres signes de voyelles, le signe 𐰃 est, à proprement parler, la voyelle i; mais, employé en combinaison avec les signes de consonnes qui caractérisent les voyelles vélaires, ce même 𐰃 représente certainement un autre son, savoir la variation mixte qui se retrouve encore dans la plupart des langues turques, et ressemble à Vy polonais. Dans ce sens, par conséquent avec les consonnes du premier groupe (celles qui se combinent avec les voyelles vélaires), nous transcrivons 𐰃 par y, et n’employons i qu’avec les consonnes du second groupe (avec les voyelles palatales). La possibilité d’une troisième signification de 𐰃 n’est peut-être pas exclue: j’y reviens tout de suite. — 𐰆 est à la fois u (ou français) et o, 𐰇 sert et d’ü (u français) et d’ö (eu français). Quant à décider laquelle des deux valeurs assumables pour chacun de ces signes on doit choisir pour les divers cas, l'unique règle pour nous est de suivre les dialectes turcs encore en usage. Il faut certainement admettre que la place des sons o, ö a été, comme dans la grande majorité de ces dialectes, limitée à la première syllabe du mot. C’est donc seulement pour la part de cette syllabe qu’il peut quelquefois y avoir doute sur ce point, et cela dans les seuls cas où les dialectes actuels sont incertains, ou dans les mots qu’on ne retrouve dans aucun de ces dialectes.

Ces trois signes de voyelles s’écrivent toujours, ainsi que 𐰀, à la fin des mots, par exemple 𐰞𐱃𐰃 ałty, six, 𐰘𐰃 jiti sept, 𐱅𐰇𐰼𐰇 törü, loi; les assez nombreux dérivés adverbiaux en 𐰍𐰺𐰆 ä, 𐰏𐰼𐰇 -gä comme quryɣaru, en arrière, 𐰃𐰠𐰏𐰼𐰇 ilgä, en avant; les géniudiums à terminaison vocalique (égaux au thème du présent, moins r?) comme 𐰞𐰃𐰋𐰃𐰼𐰢𐰾 ały‿birmis, littéralement: en prenant il donna, 𐰃𐱅𐰃 iti faisant, 𐰇𐰠𐰇 ölü mourant, 𐰉𐱁𐰞𐰖𐰆 bašlaju, commençant, 𐰾𐰇𐰠𐰘𐰇 süläjü, entrant eu campagne, faisant une expédition, etc.

Au contraire, dans les affixes, eu dehors de la fin du mot, ces trois voyelles s’omettent plus souvent qu’elles ne s’écrivent, par exemple 𐰆𐰍𐰞𐰣𐰭𐰔 oɣłanynyz, vos garçons (soldats?), 𐰞𐱃𐰢𐰔 — 12 —

ałtymyz nous prîmes, 𐱅𐰢𐰼𐰴𐰯𐰍, tämir‿qapyɣ porte de fer, 𐰋𐰃𐱅𐰏 bitig, écrit, 𐰾𐰃𐰓𐰏𐰠 äsidgil, écoute, 𐰲𐰃𐰢 = 𐰲𐰢 äčim, mon oncle; 𐰆𐱃𐰔 (= 𐰆𐱄𐰆𐰕 Ién. XX,64) otuz, trente, 𐰉𐰆𐰑𐰣 (= 𐰉𐰆𐰑𐰆𐰣 I,27 Ién. XX,73, XXV,411) budun, peuple; 𐰚𐰇𐰢𐱁 kümüš, argent, 𐰇𐰲𐰇𐰤 = 𐰇𐰲𐰤 üčün, à cause de. Dans les cas tels que 𐰺𐱃𐰸 artuq, plus, surplus, 𐰉𐰞𐰶 bałyq, ville, la voyelle de la seconde syllabe est indiquée par la consonne finale.

En raison de la relation réglementée qui, dans tous les idiomes turcs, existe entre les voyelles d'un mot, il est, la plupart du temps, facile de suppléer la voyelle sous-entendue, et en tout cas c'est à peine si, pour les lecteurs du temps, ce point a pu susciter aucune difficulté. Autre chose est le fait qu'il n'en reste pas moins diverses séries de cas où nous sommes fondés à douter de la nuance de la voyelle ou, en d'autres termes, de la portée que peut avoir eue riufiuence de l'harmonie des voyelles. En cela ma pensée porte sur- tout sur les cas où, à proprement parler, un affixe a les voyelles grêles y, i et où le thème contient une voyelle labiale: o, m, o, î7. Dans les langues turques connues, ces cas admettent, en plus ou moins forte proportion, une afi'ection labiale de la voyelle de l'affixe[3]. La question est celle-ci: Quelle attitude la langue de nos inscriptions a-t-elle piîse à cet égard ou, en tout cas, quels principes doit-on suivre dans la transcription? En somme, à mon sens, on doit soutenir qu'au moins dans la langue des deux grands monuments I et II, l'influence labiale de ce genre a été moins prononcée que dans la plupart des idiomes turcs plus récents, principalement dans les mots ayant plus de deux syllabes; mais en tout cas il n'y en a pas moins eu un commencement. Le phénomène de la labialisation se manifeste plus fortement dans la langue du monument m, qui ressemble à cet égard à Fouigour tel que nous le rencontrons dans le Koudatkou Bilik (comp. p. 7 — 8).

Parmi les affixes commençant par une consonne, nous trouvons toujours, par exemple, la terminaison de la 3e personne du prétérit sous les formes dy, di, ty, ti finissant par 𐰃 , par exemple 𐰉𐰆𐰡𐰃 bołdy, il devint, 𐰉𐰆𐰔𐰑𐰃 buzdy, il détruisit, 𐰇𐰠𐱅𐰃 ölti, il mourut. D'après quoi, l'on a bien aussi 𐰉𐰆𐰔𐰑𐰢 buzdym je détruisis (c'est indubitablement ainsi qu'on doit lire II,5, au lieu de 𐰉𐰆𐰔𐰑𐰆), 𐰉𐰆𐰔𐰑𐰢𐰔 buzdymyz, 1re personne du pluriel, etc. — La terminaison -myš, -miš du (participe du) prétérit garde également partout y, /, comme le montre l'épellation fréquente par I , car ce signe, en tant qu'il remplace ¥ §, ne peut s'employer qu'après y, i (voir plus bas), par exemple . — Quand à côté de -łyɣ, -lig on trouve des formes sans ɣ, g, comme bökli, fort, puissant, cela montre que la voyelle de l'affixe n'a pas été labialisée. D'autre part, la transcription chinoise de Kout-tho-louk (nom du père de Kül-téghin) suppose une forme telle que qutłuɣ, heureux (formé du thème monosyllabique qut + łuɣ qui concorde avec (à lire de gauche à droite) Ién. X,1; nous trouvons également, Orkh. III, 4, 5, 𐰚𐰇𐰲𐰠𐰇𐰏 küčlüg fort (comp. aussi 𐰆𐰞𐰆𐰍 III, 2, 10 ułuɣ, grand = 𐰆𐰞𐰍 ailleurs).

Eu fait d'affixes commençant par une voyelle (ou ajoutés à l'aide d'une voyelle insérée), l'influence labiale a manifestement été un peu plus forte, surtout quand l'affixe se termine par une consonne; mais c'est à peine si cette influence s'est exercée dans toute sa portée. Dans l'affixe pronominal de la 3e personne, nous trouvons toujours 𐰃 y, i, même après les voyelles labiales, par exemple 𐰆𐰍𐰞𐰃 oɣły, acc. 𐰆𐰍𐰞𐰃𐰤 oɣłyn, son fils; 𐰉𐰆𐰑𐰣𐰃 buduny, acc. -nyn, son peuple; süsi, acc. süsin, son armée (sü). Il est donc vraisemblable qu'on a également eu, avec y, i, 𐰆𐰍𐰞𐰢 oɣłym, mon fils, budunum, mon peuple, moi-même. C'est seulement dans I,17 qu'apparaît 𐰾𐰇𐰭𐰜𐰇𐰭 söṅüküṅ, tes ossements (𐱅𐰇𐰼𐰇𐰤 törün? II,68), et III, 5, 4, 𐰇𐰔𐰢 özüm, qui dénote au moins un certain degré d'influence labiale. — Devant la marque d'accusatif 𐰍 ɣ (après les voyelles palatales, 𐰏 g; comp. plus bas) nous trouvons 𐰆 u en 𐰴𐰺𐰞𐰸𐰆𐰍 (c'est ainsi qu'il faut lire I,68) qarłuquɣ, le(s) Karlouk(s) (nom de peuple), 𐰸𐰆𐰨𐰖𐰆𐰍 qončujuɣ I,21 = 𐰖𐰍 II,25, sens douteux, vraisemblablement épouse[4]). Mais est-ce qu'alors, par exemple 𐰉𐰆𐰑𐰣𐰍 désigne budunyɣ, ou forcément rien que budunuɣ? Je n'ose en décider, mais en transcrivant je préfère employer les formes non labialisées yɣ, ig. — Devant le suffixe du gérundium 𐰯 -p, on n'écrit jamais la voyelle (excepté dans 𐰖𐰆𐰺𐰃𐰯 I,6 = 𐰖𐰆𐰺𐰯 I,1 joryp, du thème dissyllabique jory-, aller); ou ne peut donc pas démontrer rigoureusement quelle a été la voyelle de la dernière syllabe dans des mots tels que 𐰉𐰆𐰞𐰯, étant, devenant, bołyp ou — comme dans presque toutes les langues turques modernes — bołup? 𐰆𐰞𐰺𐰯, étant assis, uryp ou urup?

A l'égard de ce point tout entier, il faut donc renoncer à acquérir certitude parfaite ou conséquence dans la transcription.

Dans la première syllabe d'un mot, et plus encore au commencement des mots, il est assez rare qu'on omette 𐰆 et 𐰇, et on les omet presque uniquement lorsque la présence d'une de ces voyelles est appelée par d'autres conditions, surtout quand elle est indiquée par l'une des consonnes 𐰸 ou 𐰜, par exemple 𐰖𐰸 = 𐰖𐰆𐰸 joq, non, 𐱃𐰸𐰆𐰔 passim, 𐱃𐰸𐰔 II,8 (𐱃𐰆𐰴𐰔 II 41, 49, Ién. XXV,6, 324) toquz, neuf (nom de nombre) (𐰉𐰞𐰭 II, 39, abusivement pour 𐰉𐰆𐰞𐰭 ibid. bułu, coin [du monde]); 𐰘𐰜𐰦𐰼𐰢𐰾 I,39 (23) = 𐰘𐰇𐰚𐰦0 jükündürmis, il fit se baisser, il courba; 𐰸𐰆𐰣𐰆𐰺𐱃𐰃 I,5, 8, ce qu'à mon avis il faut lire ogun‿urty (oqun, cas instrumen- tal de oq, flèche), il frappa de flèches, tua de coups de flèches; 𐰜𐰇𐱁 I,45 = 𐰇𐰚𐱁 II,71 et ailleurs, öküs, nombreux. Bien qu'on pût être porté à le soupçonner, la combinaison 𐱃𐰃𐰚𐰇𐰾𐰃, par exemple, dont le sens doit être „son nom et sa renommée", ne peut donc pas représenter aty‿öküsi, (racine ök, louer), mais il faut supposer un mot (ou äkü). (Est-ce que nous avons ce même mot dans 𐰚𐰇𐰾𐰓𐰯 I,29, peut-être kü‿äsidip, en entendant le bruit?)

Dans la première syllabe il en est autrement de 𐰃. On doit ici, à ce qu'il semble, faire une distinction de deux séries difiérentes de mots, à l'égard desquelles on constate une concordance remarquable avec les relations phonétiques des langues apparentées. — 15 —

D'un coté se trouvent les mots qui, dans tous les idiomes turcs, ont l'i pur. Dans ces mots-la, nos inscriptions ne comportent jamais l'omission de 𐰃; en tout cas c’est tellement exceptionnel, qu’il faut y voir une erreur, par exemple 𐰃 𐰤 𐰃 ini-, frére cadet; 𐰃𐰠𐰏𐰼𐰈‎ ilgä, en avant (trés souvent; une seule fois 𐰠𐰏𐰼𐰈 I,20); 𐰚𐰃𐱁𐰃, 𐰚𐰃𐰾𐰃 kiši homme; T f &, bir, un; toutes les formes de la racine 𐰋𐰃𐰠 bil-, savoir, par exemple, trés souvent 𐰋𐰃𐰠𐰏𐰀‎ bilgä, sage (seulement 𐰃𐰠𐰋𐰠𐰏𐰀 II,32 = 𐰃𐰠𐰋𐰃𐰠𐰏𐰀 I,30 ilbilgä, etc.).

Il y a, au contraire, d’autres mots où 𐰃 tantôt s’écrit, tantôt s'omet: dans le sens d’y, le cas est pourtant assez rare, par exemple 𐰘𐰃𐰢𐱁𐰴 = 𐰘𐰢𐱁𐰴 jymšaq, mou, tendre (turc orient., etc. jumšaq), tandis que, pour l’i palatal, la fréquence est d’autant plus grande, par exemple 𐰘𐰃𐰼 = 𐰘𐰼 jir, terre, pays; 𐰋𐰼𐱅𐰢 = 𐰋𐰃𐰼[𐱅]𐰢 birtim, je donnai, et autres formes de la méme racine; 𐰋𐰃𐰾 bis, cing, mais 𐰋𐰾𐰉𐰞𐰶 bisbałiq, Bichbalik (,,Cing- ville“), nom propre; 𐰘𐰃𐱅𐰃 = 𐰘𐱅𐰃 jiti, sept; 𐰘𐰏𐰼𐰢𐰃 = 𐰘𐰃𐰏~ jigirmi, vingt; formes du théme 𐰃𐰠 = 𐰠 il-, peuplade, empire; 𐰚𐰃 toujours dans les inscriptions de l’Orkhon = 𐰃𐰚𐰃 iki Ién. XXIV,74, deux; de méme, sans doute 𐱅𐰓𐰢𐰔 I,20, a côté de 𐰃𐱅𐰓𐰢𐰔 itdimiz, nous fîmes; 𐰚𐰇𐰠𐱅𐰏𐰤 I,62, autrement cest toujours 𐱅𐰃𐰏𐰤 -, kül_tigin, etc. Dans ces cas, les langues apparentées ont en majeure partie ä (e), parfois i, par exemple, äl, el, il, peuplade. Sans doute il est tout a fait invraisemblable que dans le dialecte méme de nos inscriptions l’on ait fait indistinctement usage des deux formes, en sorte que, par exemple, 𐰘𐰼 indique la prononciation jär, et 𐰘𐰃𐰼 la prononciation jir. Je suis plutôt porté a admettre qu’ici — comme aussi dans certains autres mots, qui ne figurent accidentellemeut que, soit avec 𐰃, comme ~𐱅𐰃 , ti, dire, soit sans 𐰃, comme la premiére syllabe de 𐰾𐰃𐰓 äsid, écoute, — le dialecte n’a eu ni ä ni i, mais un troisiéme son intermédiaire à ä (qui doit avoir été à peu prés l’a dans l'anglais fat) et i, de même que (d’aprés l'échelle phonétique des idiomes turcs) o inter- médiaire à a et u, les rapports avec i devenant par conséquent ceux de o à u, dö à ü: ce serait donc telle ou telle espèce de e (é) (et de méme un e mixte correspondant à y?). Faute de signe propre, on pourrait très bien concevoir ce son comme ayant été exprimé tantôt par ä, tantôt part i[5]. En attendant je n’ose point, quand je transcris, tenir compte de cette hypothèse, d’autant moins que l'e présumé ne pourrait guère être appliqué d’une manière conséquente; mais, comme je n’en regarde pas moins comme irréalisable la restitution phonétique exacte en dehors de ce que fournissent les inscriptions, je maintiens i lorsque, d’un mot donné, on trouve des formes ayant 𐰃 ou ne l’ayant pas, telles que jir, jir. Si, au contraire, il ne se trouve pas de formes latérales avec 𐰃, j’emploie ä, par exemple äsid[6].

Quant à la figuration des diphtongues, comparez ce qui vient plus loin sous les titres j(𐰘 ,𐰖 𐰪) et b (𐰉, 𐰋).

Consonnes.

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Relativement aux consonnes, il faut d’abord rappeler de nouveau que, pour la plupart d’entre elles, il y a deux signes diflférents, dont — 17 - l’un ne sert qu’en combinaison avec les voyelles vélaires (a, o, u et en général y), l’autre ne servant que combinée avec les voyelles palatales ä, ö, ü, i). Le son propre de la consonne a été sans doute dans la plupart des cas tout à fait le meme; 𐱃 ta, par exemple, n’a pas été différent de 𐱅 ; 𐰉 ba n'a pas différé de 𐰋 bä, etc . Toutefois il est indubitable que, tout comme aujourd’hui encore dans la plupart des idiomes turcs, il a existé une différence déterminée entre les sons vélaires 𐰴 (avec les formes latérales 𐰶 et 𐰸), 𐰍 et les sons palataux 𐰚 (et 𐰜), 𐰏. C’est pourquoi en transcrivant j’emploie différents signes: pour les premiers sons, q et ɣ, pour les derniers, k et g. Eux aussi, les deux signes de l, savoir 𐰞 et 𐰠, ont pu désigner deux sons différents, ł et l, que nous trouvons aujourd’hui encore dans la plupart des langues turques; j’ai cru utile de les distinguer dans la transcription [7]. Il est fort rare de voir confondues les deux séries de consonnes dans les inscriptions de l’Orkhon, surtout dans celles du monument I, où la taille est très soignée (on doit ici faire abstraction de certaines particularités qui marquent constamment l’emploi de 𐰾 s2 et de 𐰤 n2; à ce sujet, voir plus bas). En voici des exemples: 𐰴𐰑𐰔𐰓𐰀 I,63 au lieu de II rP* H II,11, tandis que, dansla reproduction typographique des Inscr. de l'Orkhon, les formes I,70, par exemple, sont dues à une faute de lecture: il faudrait lire .

Il est beaucoup plus fréquent de rencontrer de pareilles confusions dans les insriptions de l'Iénisséi, dans des formes telles que pour ärtim et une foule d'autres semblables.

On peut encore remarquer que les consonnes qui peuvent se présenter au commencement des mots sont q, k, t, b, j, s, č, plus rarement, n, m, š et, seulement dans des mots empruntés au chinois, l, jamais ɣ, g, d, , r, z et, paraît-il, p. Quand, au commencement d'un mot écrit, on trouve un signe représentant un de ces sons (ou les groupes nd, , ld), on doit toujoure considérer ce signe comme précédé d'une voyelle sous-entendue (comp. plus haut), tandis que le reste des consonnes est équivoque à cet égard. On doit au contraire, faire ressortir que toutes les consonnes simples, entre autres aussi ɣ, g, d, peuvent figurer aussi bien à la fin de mots ou de thèmes que dans le corps.

Plusieurs difficultés se rattachent à la question de la répartition de t et de d au commencement d'affixes, cas où dans certaines occurrences (comp. plus bas) il paraît y avoir quelque chose de conventionnel, sans que cependant j'ose nier qu'en tout ce qu'il y a d'essentiel, l'écriture n'ait tout de même reproduit les formes de la langue parlée[8].

Comme exemple de redoublement de consonnes pourrait servir 𐰃𐰠𐰠𐰏 illig(de il, peuplade, empire + -lig). Toutefois on omet souvent de redoubler les consonnes en de pareils cas.

Nous allons maintenant examiner de plus près les divers signes de consonnes.

𐰸, 𐰶, 𐰴

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𐰴 est le signe ordinaire de la vélaire explosive soufflée q (voir plus haut, p. 17), qui peut figurer en combinaison avec chacune des voyelles vélaires a, o, u et y, par exemple,) 𐰴𐰍𐰣 qaɣan, khan [9],𐰴𐰆𐰞 , quł esclave, qyłmys, fit; -qa, terminaison du datif (= ouig.) comme qaɣanqa, au khan, , jazyga, à la plaine; qułqaq oreille (ouig. id.), jabłaq, lâche, méchant (= ouig.).

A côté de 𐰴 et alternant avec ce signe figurent cependant deux autres signes, plus limités dans leur emploi et qui ont manifestement tout à fait la même valeur phonétique, savoir 𐰶, dont — 19 —

l’emploi n’a lieu que devant ou après la voyelle y ([^), et 4^ (Ién. ’^ celui-ci ne s’employant que devant ou après les voyelles o, u (» [10] par exemple, h M h ^ Hj^s = |^ [^ [^ ^ ibd. qyidy, il fit, H H h < !»’« = H 4 h H Ijfis ^Fî» quarante ; rV H H h <1 ^^^s et ailleurs = fV H H h H Ij*^ <iy^^^^ Kirghiz ; rp ^ ^ qyz, fille, ^^ ^ < nJ Ô h^’iyqda^ dans la ville ; — >|>vU = n|>H (Zî<^, un esclave ; i > vU n,39 et ailleurs = ^ > ^ 1,39 go/ ?, beaucoup [11]; fV > vU ^ souvent = rV H > ^ ^,41, 49, 4i H > -^ I^^. XXV,8, 324, ioqxiz^ neuf (nom de nombre) ; >> ^) ^ h vU ^ I," = T H > ^ I ?" toqyt (Pm, j’ai fait tailler ; h vU 4 D > ô ^^frtiqy^ son commandement.

𐰜 ,𐰚

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𐰚 est l’explosive palatale k, et peut figurer combinée avec chacune des voyelles palatales a, i, o, u, par exemple, h h Y ^ ^^^^h il vint, h ¥ h ^ kiëi, h I h ^ kisi, homme, a^ ^ h h Y M ktlL tiffn, n. pr., ^ f’ ^ kôh, bleu, H f’ ^ ^’^^’h une esclave, ^^ ^ T h ^ jirkd, au pays, ^ Y (^ 5^ h^gVk, principauté, noblesse. — 20 —

A côté de 𐰚‎, et tout à fait avec la même valeur phonétique, figure 𐰜 (Ién. 𐰝; comp. Donner, Wörterverzeichniss, p. 24), mais seulement avant ou après ö, ü (𐰇), par conséquent parallèle à la consonne vélaire [12], par exemple 𐰜𐰇𐰚 I,38 (𐰚𐰇𐰝 Ién. V,81; comp. Donner, 1. c. p. 18) = 𐰚𐰇𐰚 I,38, blue; 𐰜𐰇𐰠𐱅𐰃𐰏𐰤 I,15, 56 = ° 𐰚𐰇𐰠 n. pr.; rV r R 1,33, 37 = ,V 1^ ^ n,34, 37 kiin, soleil, jour ; ¥ t* R 1,45 qkiië = ¥ ^ f’ II,7i ôk^ê, nombreux ; ^ R h p 1,47 = ^ ^ 1^ h r ibd., ôtûk% épithète ou nom propre de la „foret natale" des Turcs (voir la traduction) ; | >^ X ^ R ^ 1,39 = I >> 4 vi :^ ^ [r* ^] 11,39 j’ù¥fid^rm% il fit se baisser ; R T t* h türk [13], turc; R X >^ Y h 5^ bilmädük, ignorance.

𐰍, 𐰏.

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Parallèlement aux sons soufflés q et k; dont on vient de parler, nous avons pour les sons en g correspondants les deux signes 𐰍, que je transcris y et qui ne s’emploie qu’avec les voyelles vélaires, et 𐰏, g, en combinaison avec des voyelles palatales. Aucun de ces sons ne peut figurer au commencement des mots, tandis que, dans d’autres positions, ces sons reparaissent très fréquemment et correspondent souvent aux q, k des langues apparentées; mais, d’autre part, à un seul phénomène près, ils se sont conservés là où les langues modernes les ont modifiés ou rejetés[14]; par exemple, qaɣan, khan, [^ Y "Yl/i richesse, f^ Y D fYI/y ennemi ; rV (^ h h ^^[f*^h prince, ^^ ^ Y h 5^ bilgà, sage, f^ ^ h ^^9^ (après un datif) jusque; Y Z ^y* montagne, Y 1 H Q^P^i Porte (ouig. qapuq, osm. qapu) ^ S( ^% prince, chef, $ h h 5^ ^’^'//» écrit (ouig. bitik), ^ Y h ^ biUgj savoir, sagesse (ouig. bilik) ; de même ^ h ’^^9j ^^u* comme, particule affixe qui n’est pas soumise à l’harmonie des voyelles, par exemple, ^ h h T f’ 5^ buritag, comme un loup, des loups, (𐰸𐰆𐰪𐱅𐰏 qoitag, comme un mouton, des moutons. Entre d'autres terminaisons qui contiennent ces sons, on peut signaler Taflixe adjectif extrêmement fréquent Y >] -/yy, ^ Y "'^//j comme Y J ) Y H ^"ï^^^'^ï^ ayant un khan, Y 'J ¥ ô i"^^^^? ayant une tcte, chef, ^ Y ^ T "Vâ:/'</, mâle. Parfois il se peut que dans cet affixe, comme cela arrive plus ou moins dans les idiomes turcs modeiTies, ^, g fasse défaut, cas auquel on doit naturellement écrire

la voyelle f^, par exemple, h Y ^ T ^^^*? h Y ^ f 5^ hôkli, fort, puissant. — Une particularité du dialecte de nos inscriptions c'est la terminaison y, // à l'accusatif, comme ^ ^ siùj, ace. de sii, armée, Y ) Y H (ff*nyr, ^ ^ ^ V tîg^n'g, ^ f Vg, homme (de môme, par ex., lén. XXV,28), etc. Sans oser faire l'historique de cette ter- minaison, j'incline à y voir une ancienne forme latérale de la ter- minaison -/ en turc-osman, dans le dialecte de l'Aderbeidjan et en yakout [15] ; la tenninaison -w/, au contraire, qui est répandue dans les autres idiomes turcs, ne figure ici que dans les pronoms tels que h ) > ô buny, ace. de tw, celui-ci, (proprement hun'y et l'on peut très bien penser que cette terminaison a pu, dès le commencement, être limitée aux pronoms et qu'elle a pu plus tard être étendue aux substantifs par voie d'analogie (obs. encore, dans les affixes prono- minaux, les formes d'accusatif en n extraordinairement nombreuses telles que rV h J Y > ^ï^U^^ ^cc. de f^ s| Y > ^ï^y^ son fils). — Une autre particularité de la langue des inscriptions, est Tusage de y, g dans les affixes de la 2"" personne du sing. et du plur. du pré- térit des verbes, au lieu de n que nous rencontrons dans toutes les langues apparentées, par exemple, Y ^^ H ô ^riPï, tu allas, Y N h H qyM^ty tu fis, ^ h Y r olVo^ tu mourus; ^ Y ^ ^ b h^'rd^r^z.l.ix, vous allâtes (mais 4i H )M ô h^^rcpH^Zy Atlas Radl. pi. XXVI, 4, tombeau à Askhete), rP ^ h T ^*'i'<y^^ vous fûtes (mais 4i S h T "rihVz, lén. XXI,34o). Mais, adapté aux substantifs, Taffixe de la 2*» personne a en général n (comp. plus bas >|), et c'est pure excep- tion, à peine même dans le mon. I, si y, ^ a pénétré jusqu'ici, comme Ç^ R S [ t* | ] [sH]ùilk'g, 11,22 = >| f^ R n| |^ | sunfgun, I,i7, tes ossements; rV (^ T t* h tôr^!/% 11,23 = rV H ^ T t* h torunhi, 1,19, tes lois (acc.). En somme, à cet égard aussi, Tesprit de conséqueuce est telle- ment dominant qu'il n'y a pas lieu de douter que récriture ne re- produise en essence les formes de la langue parlée même[16].

𐱅, 𐱃

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Pour t l'on a les deux signes ^ (mon. III q, Ongin ô» Kn. ^) et h, le premier pour les voyelles vélaires, l'autre pour les voyelles palatales, mais évidemment sans différence de prononciation, par exemple, Y ^ i^f, montagne, rV > ^ ^ toquz^ neuf (9), ^ > S ^ i^'iiut, Tangout (n. pr.), ^ Y h | syr^t, lamentation, ^ > ot^ feu, f^ ^ Hy 1® son nom, 2® son cheval, h ^ s] ""tly^ six, ) > ^ s| «//mm, or; - h T H h i'nri, ciel, rV ^ h h ti(j% prince, R T f h t^K turc, T >^ h i^'ni^r^ fer, h T t* h ^^^^ quatre, h h h ^ P^ù sept.

En fait d'affixes commençant par /, nous trouvons au locatif (et à l'ablatif?) -ta, -ià au lieu de l'ordinaire -da, -dà, après /, /, (r, w), comme ^^ ^ ^ > I) joita, sur le chemin, ^^ h Y S t* ^ kônHtâj dans le cœur, J^ h T ^ />^<^ !>«, à, un lieu, nT h rt* 1 T ^ ôrp^nta, à Eurpen (P). — De même, au prétérit, -ty, -ti au lieu de -dy, -di, en général après /, Z et r ainsi que d, qui alors s'efface, comme h ^ ^J ^ty, il prit, h h Y f olti, il mourut; ^ h T ""rti, il fut, ^ h T M kôrti, il vit, voyait, >^ h T h 5^ biri*m, je donnai, >^ h T Y t* ôl^ri^m, je tuai; ^ ^ f^ yty, il envoya (yd+ dy), ^ h 6^ h ^^'^*^> je relevai, rétablis {iyid + di). En outre le nom verbal en -tuq, -ttik à côté de -duq, -dük, comme 𐰉𐰆𐰞𐱃𐰸𐰃𐰦𐰀 bołtuqynda lors- qu'il était devenu; 𐰋𐰃𐰼𐱅𐰜birtük, donné, don.

𐰓 ,𐰑.

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Les signes de d sont 𐰑 avec les voyelles vélaires, 𐰓 avec les palatales. Le son même ne figure point au commencement des mots, mais souvent dans le corps, plus rarement à la fin, par exemple, H ^ "^^'^Qi PÎ^d (ouig. adaq, t. or., osm., etc. ajaq), [^ ^ X ^dgii, bon (ouig. àtkii ou adgu) Y ^ [) j"rf"y, qui marche à pied, fantassin (ouig. jadaq^ t. or. jajaq, osm. jaja)y ) )^ > ^ hud^n^ peuple (ouig. hudun ou pudun), h X f^ idi, maître; ^ Y §% 1,27, 24, u, etc., un titre (voir la traduction), x f^ | ^sid^ écoute, x f^ od, 10 temps, 20 bile.

Le sens de ces joignes ressort le plus manifestement de certains affixes (comp. plus haut, t) comme locatif (et ablatif) 4^ ^ -da, ^ x -(/a, par exemple, ^f" ^ Y ^ tyda^ sur la montagne, ^^ ^) ¥ ô ^"^^a, à la tête (sur le sommet, etc.), >r ^^ ^ 4 > I) jurtda, à la yourte, ^^ ]t^ < >| Ô h^'iyqda, dans la ville, ^^ X h T H H tHridà, au ciel, ^^ X T h ^ j^rfa, dans le pays (= J^ h T ^frta, p. 22); ou le pré- térit (l'imparfait) f^ ^ -dy, f^ X -rf/, par exemple, h ^^ ^ > ^ tutdijy il tint, h X h h ^^^'> î" fi^ h ^^ A > w^rfy» U s'envola, ^ ^^ S Ô ^"^^d^m, je comprimai, attaquai, >^ ^^ rV > ô ^"-^^^^"^ je dévastai, h X ^ h ^^fJ^^^^ U atteignit, attaqua, ^ ^^ 4 c) h'*rdy^ il alla (après r autrement en général t), udymadym, je ne dormais pas, >^ X f^ h h 5^ hitidUn^ j'ai écrit; en outre le nom verbal en -duq, -dük, par exemple, 𐰆𐰲𐰑𐰸𐰑𐰀 učduqda, quand il s'envola, 𐱅𐰏𐰓𐰜 tägdük, assaut, 𐰋𐰃𐰠𐰢𐰓𐰜 bilmädük, igno- rance.

Comp. avec t et d plus bas 𐰡 , 𐰦.

Il ne peut y avoir aucun doute que ce signe ne signifie p, sans distinction aucune suivant la sorte de voyelles que contiennent les mots en question. 𐰯 figure le plus souvent comme finale, surtout dans les gérundiums en -p (et aussi -pan, -pän) si extraordinairement fréquents ici comme dans tous les idiomes turcs [17], par exemple, 𐱃𐰆𐱃𐰯 tutyp, 𐱃𐰆𐱃𐰯𐰣 tutypan, tenant, ayant tenu, 𐰞𐰯 ałyp, prenant (ały dans la locution 𐰞𐰃𐰋𐰃𐰼𐰢𐰾 ały‿birmis est une autre formation du gérundium, voir p. 11), 𐰉𐰆𐰞𐰯 bołyp ou -up (voir p. 14), étant devenu, 𐰚𐰠𐰯 kälip, 𐰚𐰠𐰯𐰤, kälipän, venant, étant venu, 𐱅𐰃𐰯 tip, disant, etc. De même 𐰞𐰯 ałp, vaillant, 𐰸𐰆𐰯 qop, beaucoup (voir p. 19).

Dans le corps des mots aussi, 𐰯 figure assez souvent, par exemple, tämir‿qapyɣqa à la porte de fer, 𐱃𐰯𐰀 'tapa, contre, 𐱅𐰇𐰯𐰇𐱅 tüpüt, le Thibet.

Au contraire, le son p, ici comme dans la plupart des idiomes turcs et mongols, semble ne pas figurer au commencement des mots, où il est remplacé par b (si surtout certaines langues turques du Nord ont aujourd'hui le p dans cette position, c'est que très certainement il n'y faut pas voir un trait primitif, mais au contraire une évolution postérieure). Les seuls exemples qu'on ait de 𐰯 écrit au commencement des mots, sont les noms de peuple 𐰯𐰺 : 𐰯𐰆𐰺𐰢 I,37, II,37, noms inconnus, et ^ 1,22 (comp. 1,28, 40, 11,30, 39), ainsi que [)] II,45,, qui doit être apparenté avec le mot précédent. Il est indubitable que partout ici l'on a une voyelle a précédant p: apar‿apurym, apamyz [18] ""pa^

𐰉, 𐰋 (𐰅)

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Pour b l'on a deux signes: avec les voyelles vélaires, 𐰉 (avec diverses variantes dans les inscriptions de l'Iénisséi, voir p. 9); avec les voyelles palatales, 𐰋 (I,70 𐰅, mon. III, Ongin 𐰅 𐰅, 𐰅 5; de même Ién. 𐰋 et 𐰅, sans qu'il me soit clair s'il y a quelque différence dans la signification spéciale des deux signes; quelquefois même ils paraissent combinés, comme / 5 '5^ XVIII,73, b's ou 6'^if, cinq; corap. Donner, Worterverz. p. 7 et suiv.). Par opposition aux sons men- tionnés dans ce qui précède, h a sa place spéciale au commencement des mots, tandis que p semble y faire défaut, par exemple, > ^ bit, celui-ci, ) ^ y d '^w^'"j peuple, | >^ >] > ô ^oim^s, fut, et autres formes de la même racine, h ^) H ô ^"^y» î' alla, ¥ ^ h^s, tête; e S( h% prince, T h 5^ ^ir, un, J^ Y T h 5^ ^irla, avec, >> h T h 5^ hiri^m, je donnai, $ h h 5^ ^'^^^» écrit, h T 1^ 5^ ^"^'> '^"P-

On doit remarquer spécialement qu'ici nous trouvons h dans les cas où la syllabe thématique se termine par une nasale et où autre- ment tous les idiomes turcs (même Touigour), à la seule exception des langues méridionales telles que Tosmanli, ont permuté h en m. Ce point est donc un témoignage remarquable de l'ancienneté de notre langue, mais ne saurait servir de preuve péremptoire d'une plus proche parenté avec les idiomes turcs méridionaux ^). Ainsi nous trouvons h ) > ^ huny^ accusatif, et J^ viv > ^ huiida^ locatif et adverbe, ici, de > ^ iw, celui-ci (ouig., djag., etc. mwn/, munda, osm. bunijf hunda) i iV h 5^ hin'p^ en montant (à cheval) (ouig., djag., etc. mil}', osm. hin-y, >| h 5^ (p h '5^ ^^^' III,i87, H h '^ XIX,io) hin, mille (ouig., djag., etc. min, osm. hin) de même t^ ^ H 5^ ¥ngil^ éternel, ¥ ^ t^ $ H 5^ h^nyil^V^è, „pierre éternelle", monument, et dans les inscriptions de Tlénisséi ( i' >^ K (^ H '5^ XXI,i66?, > $ H -5^ XXIX,29, avec > au lieu de t^P)4'0HH^H'^ ¥nkii^q-ja, XXXII,i, Totteiman, Fiinf Suljckinschriften, Helsingfors 1891, pi. IX en haut, = >r(lHt^^H>> fn^nhl^q"ja, XXXII,37, Tôtterman, 1. c, pi. V, Vin,3, rocher étemel, commémoratif, monumental (ce mot ne figure d'ailleui-s que dans les langues ayant wi, telles que ouig., djag. màm/i^ altaï moAku, comp. mongol môngkc) de plus H > ^ huit^ peine, chagrin, 1,52, fP H H > ù huns^z, I,5o, II,i3, 64, ee, jjf M H > biitïsyz, lén. XIX,2i3, sans peine (ouig. mutuj, munqsuz, djag., yakout muiuj, comp. osm. hunal- être asphyxié, anxieux) 2). Le seul mot

  • ) Comp., par exemple, J. Schmidt: Die VericandtschaftsverhàUnisse der

indogerm, Sprachen, Weimar 1872, p. 19 et suiv.

  • ) M. Radloff, Denkm. Kûl 7'., p. 8, note 3, explique huh et huhsaz (c'est

là sa leçon) par „eine aus China zuerhaltende kostbare Waare" (marchandise précieuse qu'on peut tenir de la Chine). L'impossibilité de cette explication qui paraisse faire exception à cette règle, est ^ >^ m^Uy je, J^ >| >^ m"/ia, à moi, mais léu. ^ ^ h voir les citations dans Donner, Worierver:^. p. 12 (comp. osm. bàtij bana). Comp. ) ô H ^ t* H ^ k^huVrh^n, 11,24 = ) >^ 4 ^o 'i^rm^'n I,2o, nom de lieu.

Comme exemples de h dans le corps des mots ou à la fin je cite A Y ô ^ ^""^î^^ (ouig. tapqac), auguste, chinois^ H >j ô P j^^^â'» lâche (ouig. jabiaq, javiaq)j (V d ^ J"^^^^ faible, vilain (ouig. jaiw^, javu.s, turc or. ) ^ ^ b j^^^^) osm. • b j^^^)j h ô S *"%> son message, son édit (pas sa renommée) (ouig. sab, sav, saii), > H ^^^j eau (ouig. sub, suv)^ >r X 5^ bdà, à la maison, iV h 5^ ^bin^ sa mai- son (ace.) (donc àb maison = ouig. àp^ àb, av, osm. àv)y i iV 5^ I s'"*bùi% se réjouissant (ouig. sàbin-, savin-, osm. sdvin-). Concer- nant quelques-uns de ces mots on pourrait peut-être demander si b après une voyelle eût pu servir à exprimer v {iv) mais il est plus probable que partout le vrai sens est t, ancienne forme qui repré. sente le v des dialectes plus récents *).

𐰖, 𐰘, 𐰪

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Parmi ces trois signes [) représente j (i consonne) avec les voyelles vélaires, ^ (lén. XXXVII p?) avec les palatales; toutefois, au moins au commencement des mots, ^ s'emploie aussi toujoui^ devant la voyelle mixte y. Au commencement des mots ou des syl- labes, ces deux caractères sont très communs, pai* exemple, h V I), jyy, ennemi, fp Y [) jy^ brun, sombre, h fp I) j^^y, plaine, ¥ I) 1®

ressort clairement de II,i3, ei et de lén. XIX,2i3, ce dernier passage montrant de plus qu'on doit lire buhsyzy par conséquent avec Taffixe ordinaire -syz, sans, privé de.

>) Quant aux formes ouigoures, comp. Radioff, Das Kudatku Bilik, I, St.-Pétersb. 1891, p. LXXXEX. Se pourrait-il que ^ ^ ) Ci lén. XXXII,49, Tôtterman, loc. cit., pi. I, 6—9, VII, doive se lire ^bi^j^pj en chassant? En ce cas, notre ah signifierait nécessairement ati, car originairement, parait-il, ce thème ne contient pas 6, mais n ou y. Les cinq lettres précédentes ^1 h I T ^ devraient donc, à mon avis, se lire "nc"y^*st p, „en persécutant comme cela (et chassant)". Le reste de cette inscription est gravé d'une manière si désordon- née qu'il est impossible de le déchiflfrer avec certitude. âge, au, 20 larme, | >^ ^ H P jaratmys ((qui) a organisé [19], sU > I) , ^ I) (Ién. ^I^ I)) joq, non, jurtda, à la yourte; jir, terre, pays, jigirmi vingt, (h h P léu. XXXVn,43p) jiti, sept, (ibd. 110?) juz, cent; () jył(qa), (dans l')année, ibd. 172?) jyłqy, (troupeau de) chevaux, jys(qa), (à la) forêt, ri ¥ ^ h ^> ^ ^ jyn^^"Q, mou, tendre. Il est très rare que j soit tombé au commencement des mots devant y, i, ce qui est souvent le cas dans les dialectes modernes [20]), par exemple, H H h yr^q, lointain, pas jtjraq. Comme exemples des deux signes à l'intérieur des mots, je cite: sU H P > ô buj**ruq, commandement, officier, > I) >] ¥ ^"^^"iw, commençant, iV h I) ^ ^) h t/^ni^jf^n, je n'enverrai pas, iV ^ h h ^0*^> ®^ disant (afin que).

A la fin d'une syllabe, [) figure comme formant le dernier élément d'une diphtongue en i, par exemple, [) aj (), mois (accolé toujours, dans l'écriture, à d'autres mots, comme h sU ^ H P Ij^?, jj'rtuqy, un mois plus (quatre jours), I) M h 5^ H»*» bis*ncj'j, le cinquième mois, [) ^ baj, riche, H Y P > 11,5, H > Y P > m? 1» h tijyur, ouigour. (En fait de diphtongues palatales, il n'y a pas d'exemples; ^ semble donc ne jamais servir de cette manière à la fin d'une syllabe.)

Toutefois, en ce même sens, on emploie aussi, dans les inscriptions de l'Orkhon, 5, j^ue je transcris / et qui ne figure qu'à la fin d'une syllabe, le plus souvent dans le sens de 0(; Y ^ /yy, vertueux, civilisé (P), civilisation (P), >^ ^) B P fk^^^^ 11,9, j'étendis, je dispersai, B Y h A ^yfh pauvre, B ^ h ^ qy^^'h ^'^^ propre de peuple [21]), — 28 —

De la même manière on trouve aussi ^ après o dans (^ h B > si' qoiff/, comme un mouton, et après y dans 4^ B ^ fp "'^qi/f^ci, 1,7, très peu, à moins que ce ne soit une faut« pour J^ Y "^qyna, — az, peu, + Taffixe diminutif -qi/na {-fyna) [22]). Les inscriptions de Tlénis- séi, au contraire, n'emploient pas ce signe. Seulement dans celle de Kemtchik, Djirgak (XXXVII), qui présente beaucoup de particulari- tés, on trouve ^, par ex., >^ ^ >] ^ ^ 31 V'ii'^r^m, mes poulains (P).

Ces caractères représentent les diverses nasales. Je considère aussi comme appartenant à cette catégorie le son figuré par >|, la nasale vêlai re-palatale n (ou ly), bien que ceux qui ont inventé l'alphabet et ceux qui l'ont employé, aient pu y pressentir plutôt un symbole de la combinaison ng^ parallèle à viv m/, ^ i/c*. Ce même signe est commun à toutes les voyelles.

Le son n ne peut jamais figurer au commencement d'un mot. Quand nous trouvons >| écrit en pareil lieu, il y a toujours de sous- entendu une voyelle qui précède >|, par exemple 4 n| ";iv (égal à l'ouig.), à lui, lui (datif), h ^ Y H ^*^*', ^ h Y H ""^'l^K le premier, premièrement (an, particule devant le superlatif et semblables). Voici d'autres exemples: h T H h ^*'*'^'j ^^^1, t^ $ H 5^ Vngû^ éternel (voir plus haut p. 25), H f^ ^ hun, (unej esclave (à côté de >| > nJ^ qui^ (un) esclave), Y H t^ ^ hdn% cœur, esprit, ^ > H ^ i'^Mt, Tangout, nom propre, H >] > ftw/»*//, coin, point cardinal (ouig., koïbal, kara- gasse, mongol, bouriate id.), iV t^ H I 6*/'ww, titre d'un haut fonction- naire, emprunté, selon moi, au chinois siany- ou tsiangkiuv, général ou un titre analogue. En fait d'affixes ou peut remarquer n comme désinence du génitif, par exemple H iV >^ m^n*n, mon, à moi, H fp h 5^ bizh), notre, à nous, n| ) ^ y d ^^d'^n^n, II,4o, du peuple, — 29 —

HiVÇ^hKYt^^ 1iî*l^i^9*nh (cette formation est assez rare dans les substantifs, car le génitif s'exprime presque toujours sans dési- nence particulière, et par Taffixe possessif ajouté au mot régissant, par ex. f^ ^ : ) ^) > ^ hud**n Hy, le nom [ai] du peuple) ; n| -n sei-t également d'affixe possessif pour la 2® personne du singulier; pluriel ^ >| '11% 'ièz (comp. sous Y, $, p. 21), par exemple H >] V > ofi^h, 1,17, ton fils, ) H nJ y > o^i^n^n^ acc, 11,22, etc.; en outre >| 'U constitue la désinence du pluriel pour la 2® personne de l'impé- ratif, par exemple H Y h 5^ Vil% 1,42, 43, n,9, sachez, >| x | VdV<, 1,19, écoutez. 4^ n| 'ha forme le datif des pronoms et de Taffixe pronominal de la 3® personne, par exemple 4^ H >^ mV^a, à moi, 4^ H h ¥ P j^^yna, dans sa (n®) année, 4^ H T h ^ jirUïà, à son pays.

Le son n a les deux signes ) pour les voyelles vélaires et ^ (qu'il faut bien distinguer de fp z) pour les voyelles palatales. Après y, f^, cependant, l'emploi de j^^ est plus fréquent que celui de ). n n'y a que très peu de mots commençant par le son «, à peine d'autres que J^ j^^ m, quoi, quel, et ses dérivés 4^ ^ r^^ ncincàj com- bien, et >| j^^ nàûf quelque chose, chose, bien ^). Au contraire nous avons w, par exemple dans f^ ) «ny, le (acc), h ) H î^^y» où, ) > on, dix, ) Y H îV^ khan; ^ s^n 1,47, tu, j^^ $ f^ h tig% grince, >^ f^ ^ inUn, mon frère cadet {ini), iV t^ ^ ^u^h jour; ) ¥ h ^ qyè^n, en hiver, ) fp [) j^^^w, au printemps (11,56; cas instrumental; ici, après y, on écrit toujours ) ), | >^ ) >] h H qyi^nm^s, fut fait

  • ) 1,44 = 11,70 je trouve ce mot redoublé en ^ ^ ^ r|^, avec le sens de

„quicquid", dans la phrase n^nn^h 8%^m ^rs'^r que j'interprète, mot à mot, „quoi que soit mon message, mon édit" (comp. turc or. nàtnà, nitnà, quoi, nàmàrsâ, nimàrsà, quoi que ce soit, dont Vm [pour n?] semble ôtre due à l'influence de kinty kimàrsà). D'après les photographies, les deux j/^ sont très nets dans les deux inscriptions et ne peuvent être confondus avec ff ; la quatrième lettre seu- lement est douteuse: on ne voit distinctement que | , mais il y a des traces d'une barre transversale dans l'intervalle assez grand entre | et le double point. M. Radloff lit nnzs, ce qu'il corrige en nàiisiz („sans richesse"), et il traduit: yjWie mein Kuhm sich nicht auf Reichthum grtindet" (que ma renommée n'est pas fondée sur la richesse). A mon avis, non seulement la leçon nàhsiz, mais encore cette interprétation sont, à plusieurs titres, inadmissibles. En tout cas on aurait dû dire sabym nànsiz àrsàr. — 30 —

(qyi + yn, signe du passif), I,34 = ,|^ f^ )o II,35 et ailleurs, qynyn, son, leur khan (ace.), ri^ h >] Y > oyfyn, son, leur fils, etc. ; ) 1 ^ > ^ /«/y/)"n, ayant tenu, ri^ 1 Y ^ k^iyn, étant venu (comp. p. 23—24).

>^ est w, sans égard à la nature des voyelles. Au commencement du mot, on trouve m dans ^ >^ m^n^ je (comp. p. 20 sous % et p. 28 sous >|) ; en outre, par exemple, ^ ^ >^ ^mg% peine, fatigue, 4^ >> h ^, 4" >> ^ jima, tous (ouig. id.), h >> T 6^ h ^ jiifrmi^ vingt. >^ est très fréquent comme affixe de la l*"® personne du singulier, par exemple >^ iV h «w’tw, mon frère cadet (m ?), ^ >l Y > ofi^m^ mon fils, au datif 4^ >^ iV h m’ma, à mon frère cadet, 4^ >> ¥ I) i^^é^ma (4^ H ^® fè^mqa 11,27), dans ma (n®) année ; au plur. ff ^ -m^z^ -wfz^ comme rP >^ t* T t* h tôrilm’z, notre loi. Également dans les verbes, tels que >^ ^ >| "H^m^ je pris, >> h T h 5^ biri*m, je donnai, au pluriel fp >> ^ n| ""it^m^^j fP >^ h T h 5^ birt*m% et bien d’autres (remarquer cette dernière forme de la 1*^® personne du pluriel, différente de la forme ordinaire des langues turques : -rfyg, etc.). — Concernant Taffixe du participe (et de l’indicatif) du prétérit ¥ >^, | >^ -w^i, -m^ë, voir plus bas, sous ¥• A peu près dans le même sens, mais seulement comme une sorte de participe pur, se présente un affixe 4^ >^ Y» 4^ >^ 6^ ? ^^^^ la vocalisation est douteuse devant le m, -ywo, -Y^ma ou -y«maP etc., et auquel je ne connais pas de parallèle exact dans les langues apparentées, par exemple 4^ >^ $ T h ^ ^ kôi^g’mà ? n,2i = ¥ >> T h M kôi^rm’é 1,16, qui a élevé, 4^ >> $ T h ^» ^ui a donné, I,i6, 4^>^^hh5^ ?Qïûa écrit, I,4i, 42, 4^ >^ Y H 0» Q^î est allé, 1,17, n,22. — Avec >^ -ma-, -mà’^ on obtient, comme dans les autres langues turques, la forme négative des verbes, par exemple, ^ ^ ^ ^ ^ y uâym^di^m^ je ne dormais pas, >^ ^ >^ >] h H qyhn"d^mj je n’ai pas fait, ff >^ Y h 5^ bilm^z (qui) ne sait pas, ) > fP ^ >j > boim^zuti, qu’il ne soit pas. (Je dois mentionner ici que dans les deux inscriptions I et H, en turc proprement dit, il n’y a aucun exemple de cet affixe de l’infinitif, qui dans les langues turques est d’ailleurs général -maq, -màk [r^^ h | h A H >^ H 1,35] P, tandis que nous trouvons dans m, 4,9 :rJ>^Y^)>H • H >^ Y 6 H O qonu§m’*q V^Vfèmq,) — 31 —

H,T

représentent r, 4 avec les voyelles vélaires, ' auprès des pa- latales. La confusion des deux signes, dont les inscriptions de Tlé- nisséi présentent beaucoup d'exemples, est rare dans celles de TOr- khon, comme | >^ H ^ ^ [f^ ^] [j^J^'^w^^^^wV 11,39, au lieu de I ^ T® I>39 et ailleurs. Le son r ne figure jamais au commence- ment des mots; là où il paraît avoir cette position, il y a toujours une voyelle sous-entendue. En voici des exemples: 4^ H (ri^ h ^) (fkin^Yra, I,4o, entre (les deux), 4. ^ H "^^wg, plus, surplus; h^H> urty, il frappa, battit, h ^^ H ô ft**^^?/, il alla, J^ H H 2"^^^, noir; 6^ T ( ) » ionJ)^r% (dix) hommes (ace), h h T "^^^ il fut, T h 5^ bir, un, 4^ Y T h ^ ^«>^«? avec, h T H h ^"^^H ciel, R T f' h tûrh^ turc.

Exemples de r en affixes : pluriel en -iar, -lâr comme T Y $ 5^ ¥gl^r^ plur. de ^ 5^, ¥g, prince, chef, dignitaire, >^ H n| P ^ > sU qonë**ji^r^m, mes femmes (P comp. p. 13) (le plus souvent le pluriel n'a pas d'expression spéciale; surtout cette désinence ne figure jamais dans aucune forme verbale, ou la 3® personne du pluriel est toujours la même qu'au singulier); > H Y h H ^ 4^ quryy^ru, en arrière, t^ T 6^ Y h i^g^ril, en avant; le présent des verbes en r (participe et indicatif) comme H h H ô ^"^2/^ ^t H > H ô b'^rur, allant, il va, T Y h ^ 6i/V, sachant, il sait, H > D ¥ D j^'^i^r, étant âgé, X I T ^rs^r, étant (osm. isàr) ^ ; des dérivations transitives telles que >^ ^ H > ^ H > uriuri^m^ j'ai fait frapper, graver (ur + -tur), >> h T Y ^ oVrt^m, je tuai {ôl mourir + -[^]wr), h h T t^ Y ^ ¥lurUy il fit venir, apporta (kàl venir) 2).

Je mentionne encore ici le singulier affixe verbal H H > T I ®t^ avec le t transitif, ^ H H> h T L Qi^î sans doute doit se vocaliser 'S^r^'t'^ 'S*r^'t' et se rapprocher du kirghiz qati-syra-, perdre son sang („sich verbluten")^); par exemple | >> H H ) V H • I >^ T I Y

  • ) Les formes en -sar, -sàr, à ce qu'il paraît, ne sont pas seulement des

participes, mais aussi des subjonctifs, correspondant à -sa, -sa (3® personne) dans tous les autres dialectes turcs; voir par exemple I,i9, 59, 44, etc.

  • ) Comp. par exemple Mirza Kasem-Beg, Gramm. §§ 218, 363.

') Cité dans Kadloff, PhonetiJcj p. 258 et 428. Dans les assez grandes portions de Radloff, Prohen der VolksUtteratur der tûrk, Stàtntne SM-Sibiriens, que j'ai lues, je n'ai accidentellement noté aucun exemple de cette formation. — 32 —

Hsh-^mKs qY'nsyr^mKs^ 1,28, | >> h T I Y *ls*'f'^trn% | >> ^ H H ) Y H qyns^r'Hrn^s 1,26, 11,29. Cet affixe, j'en suis convaincu, a ici, tout comme dans le mot kirghiz, un sens privatif, en sorte que, par exemple, qayan'syra' signifie perdre le khan (déposer le khan, par opposition à qayan-la' 1,34, créer un khan?) et la forme transitive, faire perdre à qn son khan, piiver de son khan („dékhaniser" pour ainsi dire {sit venia verbo!))^). Je suis porté à relier cette forma- tion à Tafflxe 'Sy:s, -siz, privé de, sans, soit que -syra- représente 'syz-ra-, ou que r puisse être un simple changement de z^).

>) Voici les exemples des susdites formations qui se présentent dans nos inscriptions: 1,28 (I E 13) HsW^m^s q^y^s^r^m^s hud^n^y kûh^dnCs qui^dm^s, ils dépossédèrent des peuples (indépendants), ils déposèrent des khans et réduisi- rent en servitude les peuples (hommes et femmes), ou peut-être: ils réduisirent en servitude les peuples qui avaient perdu leur indépendance et leur khan (Radloff, qui vocalise également cet affixe comme -syra-, -sirà-, traduit, mais à tort selon moi: „sie hildeten einen Stamm und er nahm die Chanswûrde an, das Yolk diente ihm als Enechte und Mâgde^). D'après le contexte, ce passage et les deux passages cités plus bas, parlent seulement des relations des Turcs aux autres peuples sur lesquels ils étendent leur domination, et non point de leur évolution intérieure propre. I, 2« (I E 15) = 11,2» (II E 13) ill^g*g *l8^r^tm% q'^y^nPy^Y q^y%s^r"tm^8, f*f^y y*z^q%flmè^8^ etc., à ceux qui formaient un peuple (indépendant), il enleva leur peuple (c.-à-d. leur indépendance); ceux qui avaient un khan, il les priva de leur khan; il pacifia les ennemis, etc. (Radlofi*: „er fngte die iu Stammeu lebenden wieder stanunweise zusanmien, brachte die Chans- wiirde [ici qayaniyy est absolument adjectif, comp. plus haut p. 21; *qayaniyq serait le substantif] wieder zu ihrer Geltung" [?], etc.) ; de même 1,23 [I E is] ilVg'g ih'r^tdWz, qYni^y^y q^m^r^'id^m^z; I,3i (I E 10) iark hud^'n ôfr^fn ur**ys^r"t^j^n^ je veux tuer le peuple turc et le rendrai sans postérité (ici Rad- loff lit uruy asratajyn, et traduit: „wir wollen das [Fûrsten-, lire:] TUrkenvolk tôdton und die Kachkommen cmâhren^, interprétation qui, d'après le contexte, est tout à fait invraisemblable).

  • ) Comp. Radloff, Phonetik^ § 286, où sont cités quelques exemples de

cette permutation, fort rare à la vérité, de z en r. (Au moment d'envoyer mon manuscrit tout prêt, je tombe par hasard, dans Radloff, Wôrterbtich der Tàrk- Dialectej I, p. 829 et suiv., sur le mot àlsirà, dialecte de Kasan, „kraftlos wer- den, schwach werden, ermûden" (devenir sans force, s'affaiblir, se fatiguer) et alsiràt, „schwàchen, schwach machen**, (affaiblir, rendre faible) [en kirghiz eUirà „zerfallen, aus einander gehen" (se disloquer, se disjoindre)], avec l'explication que voici: de àl [(kas., kirgh., = arab. hâî) „Kraft, Macht" (force, pouvoir)] -(-«»-? + rày — ce qui forme un important et intéressant parallèle à l'interpré- tation de cet affixe telle que je l'ai avancée plus haut.) — 33 -

nI, Y

sont les sigues de i: le premier, >|, avec les voyelles vélaires, /, (comp. plus haut, p. 17); Tautre, Y? ' ^vec las palatales. Au coni- raencemeut des mots turcs purs, /, l se comporte tout à fait comme r. Voici quelques exemples: 'l >| P "fp, vaillant, 2® f'^p, en prenant, h ^ nI "ffy 1^ six, 2» il prit, ) > ^ n| "^fun, or, >> ^ n| H q"ftf*ii^, je restai, n| > sl^ quf, un esclave, i H >j > oi"ryp, étant assis ^), nI h ^ iy^i an, I >> si f^ H Q!/f^^% i' fit, >> n| Y > offi^m, mon fils; — ^ Y ^^ (proprement àllig?), cinquante, Y h? ^*'» peuplade, empire.

  • ) Le thème o^ur- remplace une forme primitive *ohur-j de même que

les formes transitives ôîûr-y tuer, kàîur-^ apporter, remplacent *ôUûr-, *kàltûr'; voir p. 31 sous le titre 4, ^. Du reste, M. Radloff transcrit partout ce thème verbal H ^ ^ j ^"^ figure avec différents affixes, non par oiur-, mais par iilar-, et en général il le traduit par „sich erheben" ou «erstarken** (s'élever, devenir fort). Toutefois je doute fort de la justesse de ce procédé, quoique, na- turellement, en face d'une autorité comme M. Radloif, je n'ose nier la possibilité d'une telle formation par r, si surprenante qu'elle puisse paraître: moi-même je ne connais que le turc oriental ulal-j yakout ulat- (f pour /), grandir (ouigour w^^^rfl-, uHa- id., Vàmbéry, Uigurische Sprachmonumente, p. 201, 202, turc orT -yaw-, -yrt/-, grandir, vieillir; comp. uiuq, ufuy, utu^ grand). Il y a tout« une suite de passages où le sens de s'asseoir, être assis, rester, demeurer, semble être la seule acception convenable et où, par conséquent, je n'ai point hésita à trans- crire ol^^r-; voir, par exemple, I,4i, i4, m, 47 (employé ici avec le régime direct au lieu du cas local, comme, par exemple, qon- 1,49). Ce qui est plus particulier, c'est l'emploi du thème H "J ^ ^ propos du khan (ou du chad)^ dans le sens de régner, monter sur le trône (et de la même manière la forme transitive ^ H "J ^ P<^"r signifier proclamer, créer khan qn, 1,15). Ici surgit donc la question de la possibilité de deux verbes diiférents, de telle manière qu'ici l'on doit peut-être lire M^ar-, ulari-. C'est ce que néanmoins je ne peux pas croire. Non seulement ladite hypothèse a priori serait invraisemblable, mais encore, à mon sens, il serait étonnant qu'on eût exprimé l'idée de régner par un verbe ne signifiant que grandir (on ne pourrait pas comparer remploi de kàHkr-, élever, 1,30, 16; 11,32, îi, ce thème ayant un sens tout différent, comp. Vàmbéry, Etymoî. Wôrterh. der turJcO'tatar, Sprachen, 1878, n° 114, I). On peut alors tout aussi bien admettre que nos Turcs ont employé le thème ofur- dans le sens de régner (être assis sur le trône ou monter sur le trône), figure dont nous trouvons le parallèle dans beaucoup de langues, bien que peut-être pas précisément dans les langues turques. Ce que considérant, j'emploie partout la transcription ohtr-. mais ce n'est pas sans hésiter.

3 — :u —

^ $ Y h 5^ bilffà, sage, -lY^ J^l% en venant, h h Y h^ oUi, il mourut, iV $ h h Y t^ ^ kuljig^n ^ V t" X 11,47 lisun = Li-tsoan (Schlegel) ou Li-tlisiouen (Stan. Julien; d'après la prononciation du temps, peut-être Li-tsûn?), nom propre chinois (voir la traduction).

Des affixes contenant /, l sont, par exemple, 4 >j -f'r, X Y 'I^^j voir p. 31; Y J -i^r, $ Y '1% voir p. 21; h ^ Y, ^yyiy, h Y ^ -V/H, qui forme une espèce d^adjectifs verbaux, voir par exemple II,u, 10 (comp. des formes ouigoures en -yqiy, -ikli^)); [>j Y "/*] Y $ -g% impératif, comme Y (^ X h I ^^cl9% IjS*, écoute; l est le signe caractéristique du passif, comme i Y T h h tir*l% 1,29, se rassemblant (tir + -lY-), etc.

A, Y-

La signification de ^ ®st manifestement c (c.-à-d. tch). La seule question possible est de savoir si, à côté de ^, la langue a pu avoir le son ^ (c.-à-d. dj), qui a dû alors être représenté par ce même signe. Dans la transcription j'emploie toujoui's c. Exemples:

B Y h A ^yY% pauvre; X V ^^> ^^^^1 ï^ V kV ^^***» P^^") ^ ^^^se de, $ A h ^ ^^^% peu, A Y ^ i"bY"c, auguste, chinois (ouig. iapqai), A Y h Vf^'^^ ^^is. En outre, les affixes J^ X "^^j "^^^ *els que >r A ô > H 5M6ia, comme de Teau, >r A Y ^ i^r^a^ comme une montagne, >r A ^ > ^^^^» comme du feu, >r A H > ô ^^àa^ comme une tempête? (djag. huran), 4^ A fP (^ t^ ûifzàâ^ comme un fleuve; et f^ ^ "^Z/, "^) affixe bien connu qui revient dans toutes les langues turques et s'attache aux thèmes soit nominaux, soit verbaux pour former des noms d'agent, par exemple, h A ^l^ ^ ^ i^tnfcy, garde des sceaux, h A ^ Y h I • h A Y > P J^Y^y ^^^ày^ qui pleure

  • ) Voir Vàmbér}', Uigurische Sprachmonumente, p. 39. (Si l'on ne

considère que la forme de cet affixe, on pourrait bien le lire -y"^y, -g^H et le rattacher i des gérundiums en -yfl/y, -a/y, etc. dans certains des autres idiomes turcs, comp. Mirza Kasem-Beg, Gramm., p. 145 § 328; Ilminsky, Bull, de VAc. itnp. de St.-Péth. I, 1860 p. 566 = Mélanges asiatiques IV, p. 68. Vâmbéry, Ca- gataische Sprachsttidieft, Leipz. 1867, p. 26. Le sens général de ces gérun- diums. „depuis que — ". ne convient pas dans nos textes et défend de maintenir un tel rapprochement.) — 85 —

et se lamente (des substantifs juy, pleurs, deuil, syyyi, lamentation), h A r* (^ h h itgùci^ faiseur (du thème verbal «7, faire, plus Taffixe nominal yw, gû; comp. ouig. -qu-cy, à présent -ufy, -y^y)* Attaché aux thèmes verbaux et ayant la signification d'un participe (présent ou futur), nous trouvons qu'après r et i, ?, cet affixe est généralement précédé d'un t, ou que i, l est remplacé par f^ , que je transcris Id. Je ne sais pas au juste si en pareils cas on a une syllabe entière où a, ci serait sous-entendu, par conséquent -taàyy -tdôi (on ne saurait guère comparer, par exemple, ouig. tut tacij qui tient, Vâmbéry, Uigtir. Sprachmonumente, p. 63, ch. IV, v. 26; p. 67, ch. V, v. 15, Radloff, Das Kudatku Bilik, p. 9 [11, 20], p. 10 [12,21] P), ou si, pré- cisément parce que tous les exemples ont l'élément en question, /, après r et i, l, ce t ne se rattache pas plutôt, sans voyelle inter- médiaire, à ô pour signifier telle ou telle particularité de la pronon- ciation, une certaine intensité ou quelque chose d'analogue, par exemple, h A ^ H nI > oi^rt'éy, 1,47, qui est assis (comp. p. 33, note), h A h T r* ^ 11,64 kort'ci, qui voit, h A h Y t^ olt'ci, mourant, mort, h A M H D fn^i^'cy, qui s'égare, h A M > ô f^ofd'cy I,6i, 59, 11,64 = h A ^ nI > ô ^of^'Sy 11,11, devenant, h A M H > ^ D j^tu^q^id'cy, I,6i, qui reste couché. Je ne sais guère comment h A >j ¥ 1 >l > ^^^ propre de cheval, doit se lire et s'expliquer. La forme la plus approchée est sans doute "fp^ë'^ôy; mais une forme comme, par exemple, Ipj'èi^cy n'impliquerait aucune impossi- bilité formelle. — Il y a quelque chose de singulier dans l'emploi de X d*^ 1* forme ) > A >l ^ !>»«> IIj32, hoicun, dont le con- texte semble devoir faire une 3** personne de l'impératif au lieu de hoisun, qu'il existe, qu'il subsiste.

Le caractère Y ^^ figure qu'un petit nombre de fois, mais re- présente évidemment le même son que X. Le seul document à l'aide duquel nous puissions déterminer la valeur de Jl^, est le dou- blet ¥ >> ^ Y n,83 = I >> ^ X h I»»ij «^'*^'^ (ow iSkWë?) dont le sens semble être quelque chose comme entra, ou rentra, retourna (formé, paraît-il, de iâ, intérieur, comme | >^ H ¥ ^ I»30j I >^ ^ ¥ ^ 1,29, ¥ >>® 11,10, i^Sifqm^S [ou C'Sq^m^ë?], sortit, de taë, extérieur). On a donc ici Y = A h '<^> ce avec quoi concorde 11,5, où nous trou- vons cote à cùt« les deux mots ayant clairement la même racine. f^ X ^j Y • 4^ ^ 6^ ^ A h ^à*k(fùna i^'kdl?, et dont le dernier est encore identique à f^ x ^ X f^ 1,3. Je transcris donc ce signe i‿č'.

, l,¥, fi'.

La parenté de ces caractères, au moins des trois premiers, se révèle tout de suite, sans qu'on ait à considérer leur valeur, quand on voit comment | alterne, dans certains cas, avec , dans d'autres avec ¥ (j'en citerai tout à l'heure des exemples); et si Ton consi- dère de plus près les cas où nous trouvons employés ces caractères, on ne tardera pas à voir qu'ils ne peuvent représenter que las sif- flantes.

Des trois premiers caractères, les deux dont l'emploi est le plus nettement limité, sont , qui est le s soufflé, avec les voyelles vélaires, et Y, qui représente § (ch français) et est adaptable à toutes les voyelles, bien qu'il figure moins souvent avec les voyelles palatales qu'avec les voyelles vélaires. | , au contraire, est d'une application plus compliquée. A proprement parler, 1® c'est le signe de s avec les voyelles palatales; mais 2® souvent aussi un emploi collatéral le fait figurer avant ou après la voyelle y [23]) au lieu de , et 3® enfin, il est commun, surtout dans l'inscription du mon. I, comme remplaçant de ¥ ^ avec (après) les voyelles palatales, en certains cas (la terminaison -m?/5), mais presque seulement dans le mou. I (et III), avec y. Le fait qu'en emi)loyant | dans ce dernier sens, ou est loin d'être conséquent, montre que ce ne peut être essen- tiellement qu'une particularité graphique de représenter le son .^ par le signe du s et qu'en règle générale du moins, on ne doit pas y voir de véritable changement phonétique de ë en s[24])^ pas même une particularité de dialecte personnelle à celui qui a rédigé ou taillé l'inscription. Conformément aux principes que je suis généra- lement dans ma transcription, je n'en maintiens pas moins ici s par- tout où il est écrit | (et ), et j'emploie S là seulement où l'original porte Y . Je le fais d'autant plus qu'il y a des cas où Ton ne peut pas en toute certitude décider si c'est le son s ou le son § qu'on a voulu représenter; d'autant plus aussi qu'il y a des cas où, avec plus ou moins de probabilité, l'on peut présumer des traces du changement de § en s dans la langue même [25] Citons quelques exemples où figurent ces trois caractères:

𐰽:𐰆𐰉? eau, > I) X s'^ju, par (au sens distributif, ouig. id., yakout ajy, Bôhtlingk, JaJcut. Wôrterb., p. 7), fp ^ ) H ^"ns^^^, innombrable, fp S ) > ^ tons^^, sans vêtement, 4^ H S ^^«^ ^^ bas (comp. coman astry, ouig. astyn), ^ ^) S ^"*'^!/> il (pressa, foula aux pieds) attaqua. — Dans les mots ri S V > ^ toy^s^q-, lever du soleil (J" ^) H S Y > ^ iort^yq-da, dans l'orient, 4" H S ¥ > ^ datif, proprement toy^^s^q-qa), et rl H ^ ô f^^t^a^q-j coucher du soleil (h H ^) H H ^ ô h^'iyàyq'iV'qy^ qui sont dans l'occident), et en face du toYuê, haiys de la plupart des autres langues, ^ û'a certainement pas le sens de è mais ici l'on doit voir des formations avec un autre affixe, -syg et non -š[26]. (Sur le monum. III, 3 on constate au contraire un écart d’avec le dialecte des autres monuments, savoir des formes qui concordent avec l'ouigour, telles que [fY] > ¥ 1° >d toy*sulrial, [SY] S ¥ 6 Od bsyfia).)

| : 1° s avec les voyelles palatales: pP \ | s*hz, huit, ) Y § | silk, pur, § | sii, armée (= ouig.), § | § | stisi, son armée, S| f tf inisi, son frére cadet, P | & Y f & dillgsiz, sans sagesse.

2° s avec la voyelle y: $>\° N syy%, lamentation, ¥ >> [PSS | syytamy§, II,a1 = | > $f SP Ls7, ils se lamentaient, PY P4130 beisyqyia, Iss = °{ Q Il,z6, au coucher (du soleil), 4 l’occi- dent (comp. plus haut), S | S * D gvysy, son ennemi, P | > D j*y%s’z, sans ennemis.

3° au lieu de ¥ §: | § & bis, cing (plusieurs fois) = ¥ f R bis, I23; S | SY Rist = f ¥ PY Aidt, Lee, (114), homme; extra- ordinairement souvent | >> -ms, -mis = ¥ >> -m¥5, -m‘s, affixe du prétérit (du participe), la premiére de ces formes surabondant en I, la derniére en II, (comp. | > J} J buémys, ayant trouvé, LIT, 1, s, Tén. | > T @rmis, était, XXTI1s, | > € H TP? XXXVII,a15, comp. Donner, Inscr. de VOrkhon, p. XLVI, autrement 5, par exemple, A Bd VT Amis, XX07, A > T XVIIL 129); | > bh Y stmis, Ia = ¥ Dh Y jitm's Ila, soixante-dix (comp. : A > 1A J dl-ms, soixante, Ién. I,3s); | N Fi dktis, luo = ¥ § A, ¥ ¥ PB Gkiis, nom- breux; | >> § 4 Aiim*s, Ian, = ¥ > PY htim'S Is, 38, I,67, argent; | ¥ § | sd7*s, combat, I,26, PP >> x | YN | sdvi*sd‘miz, nous combattimes, I,es, 65 = °¥ ¥ | sév*8- partout ailleurs.

Si Yon trouve seulement des formes en |, sans formes latérales en ¥, mais répondant aux formes en § des autres langues, il doit étre vraisemblable que l’écart d’avec ces derniéres formes est pure- ment graphique. Pourtant l’on ne peut pas nier a priori la possi- bilité d’un yéritable changement phonétique de § en s. Ainsi x [| 4sid, I,s3, Y & X PS | 4sidy't, Iss, (1,77), écoute, Y x P| 4sid4i, Las, (II,10), ete., 6coutez (= asit-, csit-, i5it- dans les autres langues); de méme | Nis, affaire, occupation, travail, dans la locution que présentent assez fréquemment soit I, soit II ®Th5^-$Ar*^Ç^Ih is^gjciic^g bir-, «donner (vouer) à qn (son) travail et (ses) forces", servir qn avec zèle, s'employer pour qn, comp., par exemple, osm. iè gii^j atfaires importantes, occupations sérieuses, ièlû gii^tii, sé- rieusement occupé [27].

¥ : ¥ ô f>^'y tête, ¥ t ^% Pien*e, ¥ D (lén. / D, n D, D D) j^è âge, au ; larme, ff S ¥ ""^^^^j sans nourriture, ¥ h ^ Jv^^ '* forêt noire, H ¥ ^ h ^ jy^^^^Qj mou; comme affixe dans la forme réciproque des verbes, par exemple: fp >^ X ¥ Y fP M sôzl^èdfmfz, nous nous parlâmes. Pour plus d'exemples, voir plus haut sous 1 , 3^.

Reste à parler d'un signe sur la nature duquel, en tant que sifflante, on ne peut avoir de doute, savoir ^ (en III et souvent dans les inscriptions de Tlénisséi, à l'envers : % [peut-être pour mieux le distinguer de ^ w^P]; pour d'autres formes de Tlén. voir p. 9). La valeur qui se présente immédiatement pour ce caractère et qui s'adapte partout, est z^ commun à toutes les voyelles. Ceci concorde avec le fait que rarement on le trouve écrit au commencement des mots et, en ce cas, manifestement de façon qu'on doit toujours le lire comme précédé d'une voyelle (a, a). Dans neuf cas sur dix nous avons ici le mot ^ (qui s'écrit toujours accolé au mot suivant) "^, peu, peu nombreux; autre exemple: h H > ft^ -^'Mgy, 1,2, ses (leurs) provisions (turc orient, azuq). Au contraire, ^ est fréquent dans d'autres positions, par exemple, rP > sU ^ toquz^ neuf, fp ^ > o/**^, trente, 4^ fi^ t* ozà^ en haut, dessus, h fp f^ ozi, lui-même, >^ rt^ r' o^'m, moi-même, h fp I) j^-sy, une plaine, ) Y fP H ff^îf^n- (avec différents affixes), gagner (djag. qazqan-), fp h 5^ biz^ nous; fp >^- 1® -myz, 'tniz, affixe de la V^ personne du pluriel, comme fp >> ^ T t^ h ioriim% notre loi; fp >> ^ s| ""Hym^z, nous prîmes, fP >^ h T 'V^m'^, nous fûmes, fP >> X h h itdhn% nous fîmes; 2» -mazj -màzj affixe de la forme négative du présent des verbes, comme

fF ^ Y h 5^ &//m*-2^, (qui) ne sait pas, ) > rF >^ >| > ô hoimzun, qu'il De soit pas, ue devienne pas.

Ces trois caractères occupent une position particulière, car il est manifeste qu'ils ne représentent pas des sons isolés, mais des combinaisons phoniques. Chacun d'eux est applicable à toutes les voyelles.

[^ ne figure pas très souvent; mais sa signification ressort du doublet >^ ri h H IIjis^ ^^ ailleurs = >^ ^ >) [^ f^ 1,12, qyil^m, je fis. On a donc ici [^ = ^ >) //. Avec ceci concordent les formes h M > ô» ¥ M H D (2*" personne), prétérit des thèmes >) > ^ hoi-, devenir, >) H D /*'^^-> se tromper, commettre une faute. De ce dernier thème additionné de Taffixe du nom verbal -duq, -tuq, nous trouvons ri^ h si/ M H D H^^e, et finalement nous trouvons [^ au lieu de >) devant Taffixe f^ X "^' (comp. plus haut p. 35) dans

1^ M h À nS D I.« et h A n > ô I," (comp. h A ^ vl > ô 11,11) des deux mêmes thèmes, j"/*^/- et loi-, ainsi que dans ^ A N H 1,61, de ->) i q"l'j rester. Ces formes fournissent donc toutes des indications dans le même sens, relativement à la signification de ce caractère.

Néanmoins on doit faire ressortir qu'en général, dans les ins- criptions de rOrkhon, [^ s'emploie seulement dans le petit nombre de thèmes que je viens de désigner, et seulement dans les cas où les langues apparentées ont hi, Id (/, l appartenant au thème, d à Taffixe); [^ au contraire ne remplace jamais un H^ /^commun aux langues tunjues (par exemple, c'est toujours exclusivement h ^ >) alff/, six, ou analoguas) [28]). On doit donc laisser indécise la question de savoir si [^ est à proprement parler ^/, H ou si ce ne serait pas plutôt /cZ, /(/ (de telle sorte qu'une forme comme h t1 > ô serait parallèle à f^ ^) L| ^, voir plus haut, p. 23), ou en tout cas signe commun de it, H et de id, Id. Telles que sont les inscriptions de rOrkhon à cet égard, je préfère en tout cas transcrire ici le caractère en question id, Id, et ne saurais voir un obstacle qui s'y oppose, dans le fait qu'il n'alterne qu'avec it, It, non pas avec W, W, parce que, après /, l, on écrit toujours f, pas d (là où Ton écrit ^ >), X Y» les sons /, / et d sont, k ce qu'il semble, toujours séparés dans la prononciation par l'interposition d'une voyelle, comme )^ X Y M ^f"d'hl*nt, j'entrai en campagne, je fis une expédition, comp. J^ Y N ^"^^'là'i impératif, 11,2; h ^) n| A nI h <1 WJ^^ci^Hly 1,65, il sabra, de f* | sii, armée, *qyii/c (ouig., djag., etc.), sabre, épée, additionnés de l'affixe ia, là, qui forme des verbes dénominatifs).

Parmi les inscriptions sibériennes, les n^« XXXIII (Tachebâ) et XXXVII (Kemtchik) sont seuls à fournir des exemples de [^ (Donner, WôrUrvcrz., p. 53, 65 et suiv). Mais ici la valeur parait être simplement //, //, par exemple, ) > M J'i/"-^» XXXin,i6, or; l P h M "UuJ"-^^^ XXXVIL108, six cents?; ^ >^ >^ N "^pnys^at?, ibid. 234, soixante chevaux?

viv (III o , Ongin id. à trois points) représente une combinaison semblable, dont le premier élément est n; c'est donc ni ou iid. En ce (lui concerne les inscriptions de l'Orkhon, je préfère transcrire partout m/, et cela pour les mêmes raisons qui m'ont fait transcrire Y fd. Voici les preuves de cette valeur du caractère en question: 1« les doubletis rF viv f^ ^ II,2o = rf^ h ri^ t^ ^ I,i*^ foVm/'V, ktmi% de jour (djag., osm. kiindiiz) f^ viv ^ I,i8, 11,23 = f* ^ ri^ ^ ^^^^ Jjhulfi, L'hiiii, lui-même (ouig. kandii, etc.); h viv (^ fp II,ii = h h ri^ (^ fP 1,63, ^^(ftidi, -nti, n. pr.; '2® le fait qu'un n à la fin d'un thème est toujoui-s tombé devant kùj , tandis que les formes qui se produisent de cette manière sont parallèles à celles formées à laide d'affixes commentant par t ou d, par exemple, ^ ^ ^ y ç) hudiutda, dans le peuple () ^) > â), vT viv Y H î/T*(if/û> d« I^ part du khan Y H )» t ^ h nI Y > oriyd(h dans, de son (ses) fils ( ^ M V > ), >^ ^ V fP H ff^^tiJ^in, je gagnai (= >^ <^ ) )/ ^ H lén. XX,3i; thème ) Y rP H )» ^ ^ H S s^'q^tul^m, je pensai, je me désolai () H S ); 3® cette valeur donne, partout où on la substitue, des formes intel- ligibles et exactes, par exemple, ^^ viv > ^ bunda, ici, ^f" v^y (^ o III, 2,13) «m/a, là, Y ^ "'i^^y, ainsi [29]), ) viv H g^^^n ou -d"/i, d'où, I >^ H viv > vl^ qond**rm^s^ il fit s'établir; de même H > viv Y è'^njuù (ou ë^'ntun), nom d'une localité à Test des Turcs, en chinois Chan- toung; A Y r • ) ^ h À II»*' cyti^'^n (ou àynV'n) yfc, espèce de bois précieux, (ouig. „tschintanj Aloeholz [bois d'aloèsj, chin. tschîn- thân^^ Klaproth, Abh. iib. die Sprache und Schrift der Uiguren, 1822, in-foL, p. 15).

Reste encore le caractère ^. Ici, il est vrai, nous manquons de doublets graphiques pour indiquer la route; mais diverses raisons rendent évident que ledit caractère ne saurait représenter un son isolé et convient seulement à une combinaison de consonnes commençant par Uj et l'unique valeur applicable, qui convient d'ailleurs à tous les cas, est ne (y compris également n^, si toutefois la langue a comporté ce son, voir plus haut p. 34). De cette manière nous trouvons diveraes formes pronominales: ^^ ^ > ^ buti^a^ tant, cette quantité (turc orient, mun^à), ^ ^ ""nëa, tant, à ce degré (t. or. ancà), ^ ^ ^ H^ncdy combien (ouig. nànca) les nombres ordinaux se terminent par ^ nc^ fait qui a son pendant le plus approximatif en ouigour, par exemple, ^ A t^ uc^nc, 1,8,64, troisième, ^ h T T h tôriUiôj 1,64, U,ii, quatrième, M h 5^ hishiô, cin([uième, ^ h h ^ jU*nc, septième, ^ ) > on^nc^ dixième ; en outre ^^ ^ h | T T t* h tôrtmrwà, conformément à ses lois ( $m- + -èa). 1,44 [30]) et 11,64 nous avons, deux fois même, le mot Y h ^ ^) ? Q^i® j® lis '"d^i^yy et rattache à l'ouigour adynzyq, -saq^ autrement (adyn, autre, en outre, au con- traire). Si j'ai raison, ne serait ici pour ns^ comme te pour is en bolcun, p. 35. — En dehors des affixes, nous avons ^, par exemple eu h ^) ^ S ^"a^ffyi il perça, vainquit (t. or., osm. b-an^-), ^ ^ h ^ jinèiij perle (t. or., osm. in^û). Double point.

Nous venons de parcourir en détail tous les 38 signes qui représentent les lettres de l'alphabet. L'écriture turque ajoute cepen- dant à ces caractères un signe de plus^ le double point (:), qui sert à la ponctuation^ car il est destiné à séparer les mots ou plutôt à marquer la fin d'un mot. Ce signe se met donc^ non seulement entre deux mots dans une même ligne, mais encore en général à la fin d'une ligne et jamais au commencement. (Je ferai remarquer entre parenthèses que jamais un mot ne se scinde d'une ligne à l'autre, mais que les lignes finissent toujours par un mot entier et peuvent en conséquence être d'inégale longueur. II ne faut en ex- cepter que les cas très rares où, pour des motifs spéciaux, on a visé à ordonner symétriquement les lettres, comme on Ta fait dans le fronton du monument III, où cet arrangement combiné avec les for- mes un peu raffinées des lettres mêmes, constitue un élément de Tomementation ; aussi dans ce fronton le double point ne figure-t-il nulle part.)

Toutefois il s'en faut de beaucoup (lue ce signe soit constamment employé après chaque mot: très souvent nous trouvons deux et même trois mots écrits de suite sans être séparés par le double point, et paraissant alors ne former qu'un mot. Dans la plupart das cas, cela n'est dû qu'à des considérations d'art graphique, et la règle principale est la longueur de chaque mot: tel mot qui ne se compose (e d'une lettre, comme ^ «/, cheval, [) "j, mois, f 'V, homme, ne s'écrit jamais seul, mais s'accole toujours au mot suivant ou au mot précédent; les mots de deux lettres se trouvent en général plus fréquemment fusionnés avec d'autres qu'écrits isolément; dans les mots de trois lettres, l'ordre est déjà renversé. En somme, moins les mots sont courts, plus la règle de les isoler par le double point fait loi, et plus les exceptions à cette règle se limiteront tout au plus aux cas où il y a une combinaison logique spéciale, par exemple, celle d'un substantif avec son adjectif, son nom de nombre ou ana- logue, les appositions ou les mots coordonnés, qui constituent comme un seul concept, une postposition avec le mot qu'elle régit, et autres semblables. Voici quelques exemples épars : 𐰴𐱃𐰃𐰤 aqatyn, I,1, sou cheval blanc; :𐱃𐰆𐰺𐰍𐱃 toryj't, I,8, cheval alezan, bai; 𐰆𐰞𐱃𐰦𐰀:𐰇𐰠𐱅𐰃 oł atanda ölti, I,8, ce cheval mourut là;

𐰇𐰔𐰀:𐰚𐰇𐰚:𐱅𐰭𐰣𐰼𐰃, I,40 = 𐰇𐰔𐰀:𐰚𐰇𐰚:𐱅𐰭𐰣𐰼𐰃 II,40 özü kök tänri, le ciel bleu en haut; : vT H ri^ h ^ ^kinj'ra, I,4o, entre les deux; : (^ T h ^ 'l^ijf% I,» (62), deux hommes (ace); : T rP T ^ h h ^ ytijUzJr, 1,28, 11,31, sept cents hommes; : ) Y h ^ h À *^"'*w. (/«y"/?, mon oncle le khan; : | >^ T ) Y H 1 nI Ij38 = «f • )® 11,38, "^^^^^y"/* 'hm's, c'était un vaillant khan; : (^ A T ^ (^ I h is'gjiuvuj, travail et force (ace; voir p. 39); : ^ A |^ 4, ^) H nI H D 11,29 = : ri^ r À r* • 4^" I>26 fHi*(fduq ^) uciut, par le décret, par la grâce; .' | ^ >l 1 > H qopj^imys, 1,39, il(s) pri(ren)t beaucoup.


Remarques sur l'origine de l'alphabet.

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Reste encore la question de Torigine de cet alphabet si singulier et de ses rapi)orts avec les autres alphabets. Je vais essayer de formuler brièvement ma manière de concevoir cette question, entrant aussi peu que possible dans des détails inconnus sinon par hypothèse.

S'en tenant exclusivement à la forme des lettres, sans pouvoir tenir compte de leur signification, il semble que jusqu'ici Ton ait été fortement enclin à chercher en Europe le point de départ de l'alphabet, et Ton ne peut nier que plus d^iu signe présente effectivement par sa forme une ressemblance plus ou moins frappante avec telles lettres de divers anciens alphabets européens. Ainsi M. Donner [31] a cru pouvoir signaler „la conformité générale existant entre les ca- ractères de riénisséi et ceux qui dérivent des alphabets du système d'écriture grecque en Asie Mineure, notiimment ceux des Lyciens et des Cariens[32]. Mais, outre que l'intervallechronologique considérable — environ raille ans — qui sépare les inscriptions turques des inscriptions d'Asie Mineure dont il s'agit, doit éveiller de forts doutes sur la rectitude de l'assertion, la différence complète qui se révèle entre les significations respectives de tons les signes de forme ana- logue, s'oppose le plus carrément possible à ce qu'on cherche par la susdite voie la filiation de l'ancien alphabet turc.

D'autres ont comparé notre alphabet aux anciennes runes du Nord et pensé qu'il a pu trouver son origine dans ces runes et venir d'Europe par le Nord de la Sibérie. Beaucoup d'autres aussi ont simplement appliqué à ces caractères turcs le nom de runes („runes de Sibérie", „runes de l'Iénisséi"); mais l'on ne saurait trop prémunir contre cet usage. Il n'y a pas le moindre motif d'emploj^er le nom de runes pour désigner plutôt ces caractères que tant d'autres alphabets, et cette dénomination n'est propre qu'à éveiller de fausses idées. Car il appert aujourd'hui qu'à l'instar des rapports avec l'alphabet grec et ceux de l'Asie Mineure, il n'y a pas trace de ressemblance, quant aux détails, entre les deux alphabets en ques- tion, et qu'entre eux on ne peut pas non plus imaginer de solidarité génétique. La ressemblance se réduit à certaines concordances de forme communes devant se présenter facilement d'elles-mêmes. Il y a surtout un point qu'on peut mettre en relief, c'est que l'alphabet turc, comme les runes, ne se compose essentiellement que de lignes verticales ou obliques et évite les traits horizontaux [33]) (le turc pourtant, contrairement aux runes, emploie parfois les lignes courbes; comp. ô? ^> D» ^)- Si mon ingénieux compatriote J.-H. Bredsdorff a eu raison de présumer, comme il Ta déjà dit en 1822, que pour la part des runes cette apparence est due surtout au fait que ces runes devaient être taillées dans le bois, ce qui rendait impraticables les traits suivant le fil [34]), il ne serait pas invraisemblable que le même motif ait pu accidentellement être pris en considération pour la forme des caractères turcs [35]).

Ni dans le Sud ni dans le Nord de l'Europe, on ne trouve donc de point de ralliement pour l'alphabet turc, et toute idée de lui trouver une origine européenne doit par conséquent s'évanouir.

Or, en examinant d'un peu plus près cet étrange alphabet et surtout l'originalité qui le détache de tous les alphabets que pourrait rappeler d'ailleurs la forme extérieure des caractères, savoir ses ditFérentes séries de signes pour les mêmes consonnes d'après les différentes voyelles, on ne saurait douter que, considéré dans son ensemble, il n'a pu surgir que pour s'adapter précisément à une de ces langues turques si distinctement caractérisées par la nature de leur vocalisme. S'il en est ainsi, on trouvera sans doute aussi tout de suite vraisemblable qu'un assez grand nombre de ces signes af- fectés aux mêmes sons doivent être l'invention libre de celui ou de ceux qui, appréciant le caractère phonétique de la langue turque, ont su composer si ingénieusement cet alphabet.

D'autre part il n'est pas moins clair que, non seulement l'impulsion qui a fait naître cet alphabet, mais encore le fonds propre d'où furent tirés ses caractères, doit provenir du dehors, et, pour trouver dans quelle direction remonter au point de départ, il n'ast pas nécessaire de chercher longtemps. Comme je crois possible de le démontrer avec certitude, et comme je l'ai déjà brièvement donné à entendre dans ma Notice préliminaire, c'est dans le Sud-Ouest, dans la région iranienne.

La source d'où est tirée l'origine de l'alphabet turc, sinon immédiatement, du moins par intermédiaire, c'est la forme de l'alphabet sémitique qu'on appelle araméenne [36]). C'est ce que prouvent quantité de ressemblances spéciales dans la forme et la signification des lettres, outre que la direction de l'écriture de droite à gauche concorde aussi particulièrement bien avec cela [37]).

On sait quelle extension prit, à dater des Achéraénides, l'al- phabet araméen dans l'empire perse, et quel rôle important il y a joué. Non seulement il s'y est maintenu longtemps, même sous les Sassanides, pour servii* à la langue araméenne, que parlait un grand nombre das sujets de Tempire perse, mais il est redevenu à son tour le prototype de divers autres alphabets qui plus tard se sont développés dans la région iranienne et chez les peuples voisins [38]). Celui de ces alphabets que nous connaissons le mieux, est l'alphabet pehlvi t-el que nous Pavons dans ses différentes phases d'évolution, en mon- naies, inscriptions et manuscrits (ainsi que dans Talphabet zend, fort proche parent du pehlvi) [39]). Mais à côté de l'alphabet pehlvi, l'épo- que s'étendant à peu près jusqu'au Vil*' siècle de notre ère, en a vu encore plusieurs autres, chez les peuples iraniens et leurs voisins. Ainsi on a signalé, dans des monnaies de Boukhara daUmt des VP et Vn* siècles, des traces d'un alphabet „sogdien", évidemment d'origine araméenne et ayant un cachet un peu moins cui'sif que Talphabet pehlvi[40]). Il y a encore une série de monnaies dont les légendes présentent un autre alphabet („khovarezmien"P) qui semble appartenir au même type principal que le sogdien, mais qu'on n'a même pas encore déchiffré [41]). A ceux-ci viennents'ajouter divei-s autres alphabets qui ont été en usage chez différents peuples „touraniens", devenus successivement voisins ou maîtres de peuples iraniens [42]). Toutefois ce que nous savons des détails de tous ces alphabets, présente de si grandes lacunes que, pour le moment, je ne vois pas la possibilité d'établir avec certitude à laquelle de ces sources on doit plutôt rapporter la base de Talphabet turc. Serait-ce directement à l'alphabet araméen même ou indirectement, par l'intermé- diaire de l'un des alphabets iraniens qui en dérivent?

Je dresse ici un tableau des caractères de Talphabet turc, tels qu'à mon sens ils proviennent, dii-ectement ou indirectement, de l'alphabet araméen. Des raisons de typographie me forcent, en ce qui concerne la forme exacte des lettres de l'alphabet araméen et de ses dérivés, à me contenter de renvoyer le lecteur aux passages cités plus haut, où l'on trouvera des renseignements sur ces alphabets, et je ne fais qu'indiquer, à l'aide des lettres hébraïques correspondantes, les parallèles qui me paraissent évidents ou, en tout cas, plus où moins plausibles. Par l'addition de a, p, s, je désigne que le caractère turc en question me paraît plutôt ressembler à la lettre con-espondante de l'alphabet araméen, du pehlvi ou du sogdien. (Quant à ce dernier, l'on doit se rappeler que c'est seulement un très petit nombre de ses lettres qui, somme toute, figurent dans les légendes peu nombreuses et peu variées des monnaies: si nous en savions davantage sur cet alphabet, ses points de ressemblance avec l'alphabet turc seraient peut-être plus considérables qu'il ne le paraît.)

n a, p {s retourné) = ^

n a, p = (^ P

■ («)• P (comp. zend), .9 = >

'^ (a) p = 4) rP (additionné du trait vertical)

{.a = |P)

n = H?

(^ P = h?)

b a (l'angle à droite), ;>:=>) ^ P = >>

(a), p, s = ) (c p

= A , n p. 37 noteP S P)

s a, (p)

= 1

(» P

= 5^, 5P)

i a

- s?

i„ P [au '■

sens

de

c]

= Y?)

P a

= ta)

"1 a, (p),

= H

ïï a, (p)

= Y Y (¥)

n (-J) a,

»

= h

Comme signes caractérisant spécialement l'alphabet araméen et ses dérivés, je mets surtout en relief les trois derniers, H? Y> h» tandis que, tout en concordant exactement avec le type araméen, ^ , par exemple, ne fait que reproduire en même temps le cachet sémitique commun. Si mes rapprochements sont justes, on pouiTa en outre noter que nous trouvons la lettre p adoptée en turc (^) et, peut-être, :: dans le sens de 5 {), Ceci pourrait dénoter que l'alphabet père a servi à une langue sémitique et, par conséciuent, a pu être une forme de l'alphabet araméen même; mais, d'autre part, cette forme a dû être tellement récente (lu'elle a côtoyé les alphabets dérivés (pehlvi, khovarezmien-sogdien). puisque d'autres parmi ses caractères semblent plutôt avoir leui's parallèles dans ces deux alphabets, — à moins que l'alphabet turc n'ait achevé son évolution seulement durant le cours d'une assez longue période et sous l'influence de l'alphabet primitif en ses diverses phases; à moins aussi que, dès Tabord, cet alphabet turc n'ait surgi d'un procédé éclecti(iue (comp. plus haut t , c P , r , :: ?).

Quant aux autres caractères turcs inexplicables de la manière (ju'on vient d'indiquer, il est bien possible que (juehiues-uns proviennent de l'emploi arbitraire de lettres supei'flues (telles <iue v?) ou de doublets autres que ceux auxquels on a déjà fait allusion (il y a, par exemple, des formes de " où à la rigueur on pourrait voir l'origine soit de ^, soit de ^P); peut-être aussi y a-t-il eu d'autres impulsions du dehoi-s, surtout de l'alphabet grec, (lue les auteurs de l'alphabet turc auraient bien pu voir, par exemple sur des monnaies. sans en comprendre rien, et auquel ils auraient pu emprunter la forme extérieure de tel ou tel caractère, sans égard à sa valeur (comme ). Cependant tout cela resterait à l'état d'hypothèses dénuées de toute espèce de preuves. Après tout, on doit bien considérer tous ces caractères comme des formations nouvelles n'ayant pas de modèle direct. Ainsi il est hors de doute que les trois caractères voyelles, , sont composés d'après un plan commun, soit qu'ils résultent tous d'une invention libre, soit que égale . En ce dernier cas, les deux autres ont dû être formés par analogie à f^, par l'addition arbitraire de traits accessoires diacriticiues. Les caractères consonnes de ce genre ne désignent essentiellement pas d'autres sons que ceux qui sont représentés dans la série précédente de caractères, et pour la plupart leur formation s'est faite seulement en vertu du principe propre de l'écriture, savoir les séries doubles de signes consonnes, tandis qu'un très petit nombre (trois) est destiné à désigner des combinaisons de consonnes. Ni dans l'un ni dans l'autre cas nous ne trouvons, dans les alphabets avoisinants que nous connaissons et datant d'une époque généralement mentionnable ici, quoi que ce soit de cori'espoudant. Ajoutez à cela, sous le rapport des formes, que si d'une part les signes d'origine araméenne sont, à très peu d'exceptions près, asymétriques, la relation des signes en question est telle que le nombre des carac- tères asymétriques est inférieur à celui des caractères symétriques . Elles aussi, ces considérations donnent à croire que tous ces caractères sont au fond des formations nouvelles indépendantes.

Si, en outre, on demande à quelle époque l'alphabet a pris naissance ou, en tout cas, est parvenu aux Turcs orientaux, nous pouvons avec assurance répondre que ce dernier fait n'a guère été possible avant l'époque où ce peuple a commencé à jouer un rôle dans l'Asie Centrale, par conséquent vei's le milieu du VI* siècle de notre ère. C'est aussi à cette époque ou peu après qu'ils commencèrent à étendre à l'Ouest leur domination, entre autres sur la Sogdiane, après avoir vaincu les Ephthalites et s'être ainsi mis en contact avec les peuples iraniens et la civilisation iranienne. En tout cas, c'est seulement peu de temps après ces événements que nous trouvons les Turcs en possession d'une écriture, l'ambassade turque qui alla à Constantinople en 568 apportant des lettres () que Tempereur lit avec l'aide d'interprètes [43]. Rien n'empêche de supposer que ces lettres ont été écrites avec cet alphabet; mais si les choses se sont passées ainsi, ou si leur alphabet a été un de ces autres alphabets dont on a laissé entrevoir l'existence dans ce qui précède, c'est ce dont naturellement on ne saurait rien savoir ni rien prouver [44].

En considérant les formes raides des lettres et l'affinité apparente de certaines d'entre elles avec les formes spécialement araméennes même d'ancien type, on aurait sans doute plutôt l'impression que notre alphabet doit être un peu plus ancien qu'on ne le croirait d'après ces faits. Toutefois, si Thypothèse énoncée p. 45 et suiv., et concernant la cause des formes angulaires des lettres, à l'instar des runes, est bien établie, cette difficulté, il est vrai, disparaît ou peu s'en faut: alors on pourrait expliquer la chose en disant que les lettres auraient reçu pour ce motif un plus fort cachet de raideur et, en apparence, d'antiquité qu'on n'aurait dû s'y attendre d'après l'époque à laquelle elles appartiennent. Mais d'autre part il est naturellement possible aussi — comme des allusions faites par des auteurs chinois peuvent même sembler le confirmer -— que dès l'abord l'alphabet n'ait pas pris naissance chez les l'urcs proprement dits (Tou-kioue), mais chez une autre tribu turque, spécialement celle des Ouigours, d'où il aurait été transporté chez les Turcs [45]. En ce cas, la conclusion serait que l'origine de cet alphabet aurait pu devancer un peu l'époque indiquée. On doit bien sûrement espérer et compter que l'avenir amènera de nouvelles trouvailles qui éclaireront mieux toutes ces questions. Les expressions des annales ou des auteurs chinois concernant les écritures des peuples étrangère sont en général trop flottantes et trop vagues pour qu'on puisse rien tirer de solide d'elles seules.

Des Turcs l'alphabet a continué sa route vers le Nord, surtout dans les régions de 1 lénisséi supérieur, c'est-à-dire, sans aucun doute, chez les Kirghiz, par conséquent encore chez une peuplade turque. Comme un certain nombre des formes de lettres que nous trouvons employées ici, sont indubitablement plus primitives que celles que nous rencontrons dans les deux grands monuments de l'Orkhon, nous pouvons supposer avec certitude que l'extension de l'alphabet aux régions de riénisséi est de beaucoup antérieure à ces deux monuments, et a dû avoir lieu au moins dans le VIIe siècle, sinon déjà au VP. On peut présumer que, dans ces régions lointaines, cet alphabet s'est aussi maintenu un peu plus longtemps que chez les Turcs et les Ouigours; mais là-dessus on ne peut rien préciser, car, autant que je puisse voir, les inscriptions de l'Iénisséi ne contiennent aucune indication chronologique directe.

Après le renversement de l'empire turc, en 745, par les Ouigours, l'ancien alphabet turc se présente encore à nous, sous des tonnes évidemment plus jeunes et plus raffinées, dans le monument III de rOj'khon, qui provient de la dynastie ouigoure et paraît dater de 784. Mais ce serait bien aussi là le dernier document relatif à cette écriture, et en outre nous trouvons déjà sur le même monument l'écriture qui prend alors la haute main jusqu'au moment où, à son tour, elle est supplantée par l'alphabet arabe: l'écriture dite ouif/oure, émanée de TEstranghélo syriaque. On doit supposer que si l'écriture ouigoure triomphe de l'ancien alphabet turc malgré la supériorité de ce dernier pour les moyens de représenter les différents sons, c'est d'une part, en général, la puissance avec laquelle une ci- vilisation étrangère exerce son influence, d'autre part, le fait qu'é- tant cursifs à un haut degré, ces caractères sont plus commodes à tracer, tandis que la portée de l'ancienne écriture n'était calculée que pour Tentaille sur bois ou pierre. Il serait en outre intéressant de découvrir, dans l'écriture ouigoure, des réminiscences, non pas de forme naturellement, mais de principe datant de cette antique écriture. Mais je ne crois pas qu'il y eu ait, de ces rémiuisceuces [46]). Le seul point de ce genre dont il puisse être question, serait peut-être Tusage du caractère représentant i pour correspondre non seulement à i, mais fréquemment aussi à Va de la plupart des langues moder- nes, usage (iui se répète aussi dans l'emploi de l'alphabet arabe. Toutefois je doute que la supposition d'une telle filiation dans ce phénomène soit admissible, et je suis plutôt porté à voir partout des manifestations parallèles d'un seul et même motif, celui que j'ai in- diqué plus haut, p. 15 et suiv.

Ainsi donc l'ancien alphabet turc disparait sans vestiges après une existence de quelques centaines d'années. II.

TRANSCRIPTION ET TRADUCTION

DES TEXTES

(MONUMENTS I ET II).
==
Introduction.
==

Comme le peuple dont proviennent ces inscriptions, savoir les Turcs ou, comme les Chinois les appelaient, les Tou-kioue (Tou- kue), avaient, pendant les deux siècles que dura leur empire, beaucoup de relations, soit de paix, soit de guerre, avec les Chinois, il est tout naturel que, dans les annales contemporaines de la dynastie des Thang, qui régna en Chine de 618 à 907, et dans d'autres ouvrages de la riche littérature chinoise, ouvrages qui ont puisé dans ces annales, nous trouvions bon nombre de détails sur ces relations et sur le peuple Tou-kioue lui-même.

Divers auteurs ont communiqué des traductions ou des extraits de ces récits chinois, et par là les ont rendus accessibles à la science européenne. Les travaux les plus importants de ce genre dont j'aie pu disposer, sont les suivants: Deguignes, Histoire générale des Huns, des Turcs, des Mogols, etc., t. I, 2e partie (Paris 1756), p. 367 et suiv. ; Visdelou, Supplément à la Bibliothèque Orientale d'Herbelot (Maëstricht 1776), p. 40 et suiv.; Stanislas Julien, Documents historiques sur les Tou-kioue (Turcs). Extraits de Pien-i-tien et traduits du chinois (Journal asiatique, 6e série, t. III et IV, Paris 1864[47])). Los Turcs entrèrent aussi en relations avec l'empire byzantin: en 568, ils envoyèrent une ambassade à Constantinople. En revanche, l'année suivante, on envoya, sous la conduite de Zemarkh, une ambassade grecque au «khagan» turc «Dizaboul». C'est surtout à ce propos que divers auteurs byzantins, notamment Ménandre Protector et Théophylacte Simocatta, donnent des renseignements sur les Turcs, renseignements qui sont pourtant assez insignifiants en comparaison de ceux dont nous sommes redevables aux Chinois.

Pour servir de donnée à l'intelligence de la teneur des inscriptions et contrôler ce qu'elles nous racontent, je jugerais convenable de présenter ici quelques points principaux de l'histoire des Turcs en suivant, mais seulement en seconde main, la version chinoise. Cet exposé consiste en des extraits empruntés aux ouvrages précités, surtout au mémoire de Stan. Julien. (Les passages reproduits littéralement, sont mis en « ».) Quant à la reproduction des mots et noms chinois, je regrette de n'avoir pu être conséquent; toutefois je m'en tiens en général à ce même auteur, à moins d'indication contraire.

Voici d'abord quelques notices sur les mœurs des Tou-kioue [48]:

«Les Tou-kioue laissent flotter leurs cheveux, jettent à gauche le pan de leur vêtement[49], et habitent sous des tentes de feutre. Ils se transportent d'un lieu à un autre, suivant qu'ils y trouvent de l'eau et des herbes. Leur principale occupation est l'élève des troupeaux et la chasse. Ils font peu de cas des vieillards, et montrent une grande estime pour les hommes qui sont dans la force de l'âge. Ils ont peu d'intégrité et de honte du mal, et ne

  1. Voir ma Notice préliminaire p. 5—6 = 289—290.
  2. M. Radloff l’admet assez souvent. A mon sens, il a tort.
  3. Voir Radloff, Vergleich, Grammatik der nôrdlichen Tûrksprachen, 1. Phonetik (Leipzig 1882) §§ 35—40, 50—53. Comp. le même auteur dans l'Internationale Zeitschr. fur allgem, Sprachwiss. II, p. 18—20.
  4. Non pas qunčaj- avec a, comme le transcrit Radloff, Denkm. Kül T., K20, Kb9, comp. 𐰴𐰆𐰨𐰆𐰖 Ién. 1,9, XX,12. XV,9 il faut sans doute lire 𐰴𐰆𐰨𐰆𐰖𐰢 ou 𐰨𐰖𐰢 au lieu de 𐰴𐰚𐰅, leçon de l'édition imprimée. (Comp. turc orient., osm. qonšu, voisin?)
  5. En somme, les idiomes turcs auraient-ils eu dès l'origine un pareil son, capable de se fusionner plus tard soit avec ä, soit avec i? Quant à la possibilité de retrouver, dans la langue comane, un e différent de ä et de i, voir Codex Cumanicus, ed. Cornes Géza Kuun (Budapestini ISSO), p. XC et suiv. Comp. d’autre part Radloff dans l'Internationale Zeitschr, II, p. 23 et suiv.; là, cependant, la possibilité d’un e n’est pas mentionnée directement.
  6. Dans son ouvrage plusieurs fois cité, Denkm. Kül T., p. 1 et suiv., M. Radloff a aussi mentionné le même phénomène et avancé l’opinion que voici : le signe 𐰃 ne représente pas seulement y, i, mais au commencement d’un mot et dans la 1re syllabe il peut aussi être tout simplement l’expression du son ä. M. Radloff transcrit donc partout jär, äl etc. (mais hiîgày etc.). Toutefois je doute fort que ce soit fondé. On doit entre autres faire ressortir que cet alternat entre 𐰃 et un ä non figuré ne peut généralement se présenter que dans une certaine série de mots, tandis qu’il y a beaucoup de mots qui de fait ont ä à la première syllabe et dans lesquels la figuration de ce son pourrait paraître aussi nécessaire, sinon plus nécessaire que dans beaucoup de ces mots-là, mais où l’on ne trouvera jamais tracé le 𐰃. Et, en somme, pourquoi écrire, par exemple, 𐰘𐰃𐰼 , si la prononciation était jär tout simplement ? C’est bien 𐰘𐰼 qui en serait l’expression adéquate, ne pouvant signifier autre chose que jär, tandis que le 𐰃 rendrait seulement équivoque la lecture.
  7. Coucernaut ces sons-là, comp. Radloff, Phonetik, p. XVI— XVll et § 148 et suiv.
  8. Dans Denkm. Kül T., M. Radloff suppose une vaste confusion de consonnes soufflées (sourdes) et de consonnes vocaliques (sonores), surtout t et d, partiellement aussi q et yj k et g ; par conséquent il introduit, dans la transcription, de nombreux changements motivés par la théorie ou réglés sur les formes des idiomes turcs modernes. Je considère un pareil procédé comme mal fondé et, sous ce rapport aussi, je m'en tiens ponctuellement à la désignation telle que la donne Poriginal.
  9. Le signe qui figure, par exemple, sur le fronton du mon. I, côté de l'Est, „marque du khan“, est évidemment dû à un entrelacement des lettres de ce mot.
  10. Lorsque, devant ou après ces deux signes, la voyeHe, soit ^, soit ^, est omise dans l’écriture, j’emploie pour ^ dans la transcription qy^ vg et pour v^, uq, etc., au lieu d’écrire la voyelle avec un petit caractère.
  11. Il est possible que ce mot qui revient si fréquemment, n’ait pas partout la môme signification. Toutefois, dans la grande majorité des passages, il signifie évidemment beaucoup et correspond au kôp à voyelle palatale des autres dialectes. L’alternat des vocalisations palatale et vélaire n’est, bien que rare, pourtant pas impossible à rencontrer dans les idiomes turcs (comp. p. ex. |^ ’^ ^ |^ ^ jôg^hru I,jo, 50 = turc or., osm. joqary, la partie supérieure, en haut). En combinaison avec un substantif, qop prend le plus souvent place après lui (de même que, par exemple, jitnà, qamyy^ tous) et fréquemment il semble presque remplacer le pluriel formé par la terminaison -iar^ -lâr, dont l’emploi dans nos inscriptions est très restreint. M. RadlofiF, dans Denkm. Kûl 71, traduit ordinairement qop par „sich erhebend" (en s’élevant), qu’il considère par conséquent comme gérundium au lieu de *qopupj et fait allusion (loc. cit., p. 8, note) à la possibilité d’une autre explication comme répondant au persan lû^ i>gut gewirkt (bien travaillé). Je ne puis adhérer à aucune de ces explications : même abstraction faite des difficultés de forme, la première n’est applicable au contexte que dans le plus petit nombre des passages, et il en est également ainsi de l’autre : en outre, à ce qu’il parait, on ne trouve pas, dans nos textes, des mots empruntés au persan.
  12. En transcrivant j’emploie pour 𐰜, sans 𐰇, ük, , etc.; comp. p. 19, note 1.
  13. Le r intermédiaire n’empêche donc point que dans ce seul mot ü influe sur la figuration de k. Il serait certainement inadmissible de songer ici à une prononciation dissyllabique: türük.
  14. Comp. Radloff, Phonetik §§ 269, 3G3— 364.
  15. Est-ce que y^ g a pu d'abord se développer comme remplaçant de y, i après les thèmes en voyelle, (comp. le mongol, où en ce cas on a -gi au lieu de -i)?
  16. Je suis étonné de voir que, dans Denktn. Kûl T.j p. 3, M. RadlofiF dit que nY ^t ^ comme marques flexionneUes à la fin des mots semblent avoir une valeur un peu différente", et je m'étonne que plus tard, dans sa transcription, il reproduise ces signes (je substitue ici mes signes aux siens) tantôt y, g, tantôt n (2® personne des verbes), tantôt n ou ny, ni (à l'accusatif), tantôt ya^ gà (dans des formes d'accusatif où il voit un datif). On ne comprend pas pourquoi l'on s'aviserait d'écrire y, g dans certains cas déterminés et sans aucune inconséquence, si la langue avait ici des sons tout autres, sons que, bien entendu, l'écriture est en état de représenter, et représente, dans d'autres cas, d'une manière tout aussi conséquente. Je ne puis donc pas non plus comprendre qu'on soit fondé à faire des changements aussi arbitraires, si ce n'est naturellement dans les très rares cas où il serait permis de supposer une faute réelle commise par celui qui a gravé l'inscription.
  17. Voir par ex. Mirza Kasem-Beg, Gramm. d. türk.-tatar. Sprache, Leipzig 1848, p. 140 et suiv., § 312—317.
  18. Ce thème apa- figure seulement combiné avec le thème 𐰲𐰇 čü- plutôt äčü- dans les formes äčüm‿apam et äčümiz‿apamyz, où -m et -miz, -myz doivent être les affixes pronominaux de la 1e personne, sing. et plur. Le sens exact de chacun de ces mots m'est inconnu, mais le tout signifie évidemment quelque chose comme mes, nos ancêtres, aïeux. (M. Radloff, dans Denkm. Kül T., ne traduit pas ces mots.)
  19. C'est sans doute ainsi qu'il faut lire aussi II,4i, dans le titre du khan: t^riH j^r"im^éj à sens passif, ^institué par le ciel" (non pas j^r^tm^è^ „qui a illuminé le ciel", comme je l'avais interprété dans ma Notice préîim, p. 13 = 297).
  20. Comp. Radloff, Phonetik §§ 244, 247.
  21. Radloflf, Denkm, Kûl T., lit aiduqpour le mot nJ^ ^ h ? qui reparait plusieurs fois, et le traduit par „ nommé". Ceci étant correct, nous aurions donc ici ai exprimé par f^. Mais il est très étonnant que dans ce seul mot on ait été conséquent en faisant usage de cette désignation-là, qui autrement ne figure jamais, et de plus, l'ordre des mots dans certains passages me parait susciter des difficultés contre cette interprétation. Il m'est impossible de lire ce mot autrement que yduq, envoyé, donné par le destin, bienheureux, béni (venant de yd, envoyer; conipT Radloff, Worterhuch d. Tûrk- Dialecte, I, p. 1383 et 1381). En tant que ce mot est joint à des noms de montagnes ou de sources, cela pourrait bien avoir rapport à la foi des Turcs païens, dont comp. Radlofif, Aus Sibiriefi, Leipzig 1884, U, p. 7.
  22. Comp. azyyna, Radloflf, Wôrterb. I, p. 575; Phonetik p. 239 § 399; p. 33.
  23. Jamais avec les autres voyelles appartenant au groupe vélaire, a, o, u. Le signe | en combinaison avec les consonnes caractéristiques de ce groupe accuse toujours le voisinage de la voyelle y.
  24. Comp. Radloff Phonetik §§ 208, 278 et suiv., 344 etsuiv.
  25. Au début j'avais pensé employer un caractère spécial, par exemple é, au lieu de | , dans les cas où il remplace 8 mais la raison susmentionnée m'y a également t'ait renoncer. — 11 est singulier que, dans les inscriptions de l'Iénis- séi, non seulement le signe même manque, mais il ne semble pas exister de signe particulier pour 5 près des voyelles vélaires. Autant que je puisse voir, on em- ploie dans ce cas simplement la même désignation que pour s. Pour le son s on a deux ou trois signes différents: / (et plus rarement H) qui ne parait figurer — et avec les voyelles vélaires et avec les palatales — que dans ledit sens (voir quelques exemples dans ce qui suit), et f » signe équivalant au ¥ (III Y) ^^^ inscriptions de l'Orkhon, mais dont la valeur est peut-être s dans quelques cas, tels que XXV,96, où la désinence f^ Y représente peut-être -*i/, affixe pronomi- nal de la 3« personne, ou XXV,378 H Y /^ > /^ = XXI,33 H Y /^ > h tuts'W? (comp. des formes en 4 ^ [P* 31] dans les inscriptions de l'Orkhon, telles que H H ^) ^ ^ lj*7> 11:72?). Parmi ces signes, Y est indubitablement, au début, ê (comp. plus bas les remarques sur l'origine de l'alphabet), taudis que pour le moment je n'ose pas décider si / (ainsi que H?) n'a été originairement qu'une variante de Y ou s'il a pu avoir une autre valeur (par exemple, celle de &* ?). Dans ce dernier cas il a dû s'introduire une confusion dont il faut réserver à l'avenir, et par voie de recherches plus approfondies, une solution (telle que, par exemple, la possibilité d'un commencement de fusion entre les sons è et s?).
  26. Comp. peut-ctre J | YN, ce que je lis non pas disk, mort (Radl.), mais il"s‘k, part, portion, division, comp. das et alts dans les autres dialectes. La forme ¢ | 3 2) (voir plus bas) indique que l'aftixe a la voyelle y, i,
  27. Radlotf, Denkm. Kiil T., lit et transcrit «*•, intelligence, sens, le mot eu question. La locution osmanli citée plus haut me parait décidément parler contre cette manière de voir, (h T ^ ¥ h? comme on le lit dans les Inscr, de VOrkhon^ 11,67, n'a pas ici sa place, mais y figure par erreur au lieu de r T e Y r »</rû:)
  28. Le texte typographie des Inscr. de VOrkhon 1,21 porte ^ Y I N » mais, p. 48, cette leyou est rectifiée eu >^ Y H i ' î » ^^^^ pourtant r| uc saurait être correct. [Radloff. Denkm. Kiil T., p. 13, lit >^ Y h Ni qu'il transcrit aiti/ (ilim^ et il traduit ce passage entier par „dem hatten wir uusere seclis Stamme dcr Kuntschajug verliehen**.] A n'en pas douter, on doit lire ^ Y I r I &tw7'i», ma sœur cadette (turc orient, singil) et ce passage signifie: „nous lui donnâmes ma sœur cadette pour épouse" (quant au mot (/on c'MJ- comp. plus haut, p. 13).
  29. Oomp. Y ^ )> I^û. XXII.io, le seul exemple que j'aie noté dela coml>inaison ^ ) . Dans les inscriptions de TOrkhon on ne trouve jamais ni ^ ) ni X jt* seulement [^ )?], h rt* ou ViV.
  30. Ou verra que dans la manière dont, après examen scrupuleux des photographies, je lis et comprends tout ce passage, je m'écarte beaucoup de M. Radloff.
  31. Oujaryłqaduq Les langues apparentées fluctuent entre l'une ou l'autrede ces formes, mais la première semble être la plus primitive.
  32. Inscriptions de l'Orkhon, p. XLIII et suiv.
  33. La seule exception qui contienne d'une manière conséquente le trait horizontal, est le caractère Y des monuments de l'Orkhon I et II; mais c'est h peine aussi la forme originelle de ce signe, qui doit bien plutôt se présenter sous l'aspect de fî Y* Au surplus, la forme des signes de ces deux monu- ments est quelquefois sans doute moins primitive que dans certains autres monu- ments, surtout ceux de l'Iénisséi, par exemple, vU vis-à-vis de 't^, ^ [III o ] vis-à-vis de ^ .
  34. Comp. Wimmcr, Die Bunenschrift, Berlin, 1887, p. 97 et suiv.
  35. Comp. ce que rapportent les écrivains chinois sur les Turcs (Tou-kioue). „Ils n'ont point d'écriture [c.-à-d. d'écriture comme la chinoise], et pratiquent des entailles sur des plaques de bois pour faire des contrats", Stan. Julien, Documents historiques sur les Tou-kioue, dans le Journ. asiatique, 6^ série, III, 1864, p. 351. Autre part nous lisons: „Les caractères de leur écriture ressemblent à ceux des barbares", ibid., p. 335. Comp. Abel Rémusat, Recherches sur les langues tartares, Paris 1820, p. 65 et suiv.
  36. De même que je dois considérer comme arbitraires et mal réussies les interprétations publiées par M. le professeur A. Tôtterman dans divers petits mémoires et portant sur certaines des inscriptions de l'Iénisséi (Souliek), je ne puis pas non plus approuver les rapprochements qu'il établit entre les signes de l'écriture de Souliek et ceux des alphabets sémitiques (Studien uber die SnljeJc- felsen-Inschri/ten dans l'Ôfversigt af Finska Vetensk. Societetens Fôrhandlingar, XXXI, Helsingfors 1889, pi. III; comp. Fûnf Suljekinschriften nach ihren Tex- ten festgestelît, ibid. 1891, in 4", pi. X). Le signe h * est le seul où par hasard nos opinions se rencontrent. — Dans le Babylonian and Oriental Recardy VIT, no 4, déc. 1893, p. 94, M. le professeur Terrien de Lacouperie a formulé l'hypothèse que notre alphabet est une adaptation des caractères indo-bactriens et himyarites. J'avoue que je ne peux aucunement me ranger à cette hypothèse du savant orientaliste. Il est vrai qu'en apparence cet alphabet indo-bactrien présente une certaine ressemblance d'habitus général avec l'alphabet turc; mais cette ressemblance s'efface entièrement, aussitôt qu'on passe aux détails, excepté peut-être un très petit nombre de points (tels que s, f, ï?), ce dont l'explication doit, à mon sens, être cherchée dans une souche commune: l'alphabet sémitique (araméen). En ce qui concerne l'alphabet himyarite, il m'est au contraire im- possible d'y trouver un point de ralliement quelconque pour notre alphabet, et je ne vois pas non plus que les faits historiques invoqués par ce savant auteur, suffisent i écarter les difficultés historiques et chronologiques qui s'opposent à l'admission de ladite hjrpothèse.
  37. Quand on écrit de haut en bas et, de plus, de telle manière que les lignes se suivent de droite à gauche (voir ma Notice préliminaire, p. 4 = 288 et suiv.), j'ai la plus grande tendance à y voir une imitation secondaire du chi- nois, laquelle, surtout dans les inscriptions I et II de l'Orkhon, a dû être très naturelle d'après les circonstances dans lesquelles elles ont été tracées (comp. la traduction). Le fait que dans ce cas les signes sont couchés, montre toutefois qu'antérieurement on a dû avoir l'habitude d'écrire par lignes horizontales, de droite à gauche. Je doute donc qu'on puisse d'emblée mettre ceci en parallèle avec ce que Hiouen-Thsang raconte des habitants de Souli (Kachgar), savoir qu'ils ont une écriture de 32 lettres et qu'ils lisent de haut en bas (Hiouen- Thsang, Mémoires trad. par Stan. Julien, Paris 1857, I, p. 13).
  38. Voir, par ex., Ph. Berger, Ilistoire de l'écriture dans Vantiquité, Paris 1891, p. 213 et siiiv., et le tableau vis-à-vis de la p. 300. Taylor, The Alphabet y London 1883, I, p. 250, II, 219 et siiiv.
  39. Comp. la Zeitschrift fttr vergleicli. Sprachforsch. XXIV, pi. I (Hilbsch- mann-Euting); Berger, loc. cit., p. 249 et suiv.; Taylor, loc. cit. II, p. 236 et suiv.; Drouin, Observations sur les monnaies à légendes en pehlvi et pehivi-arabe, Ucvuc archéologique, 3* série, IV— VI, 1884—85 (pi. V (XVII), XXIII); le môme, La numismatique araméenne sous les Arsacides, Journ. Asiat., 8^ série, XIII, 18vS9, p. 376 et suiv.
  40. Lerch, Sur les monnaies des Boukhar-Khoudahs, Travaux de la 3« session du Congrès internat, des Orientalistes, St.-Pétersbourg 1876, II, p. 417 et suiv. Comp. Drouin, Revue archéol. VI, 1885, p. 146 et pi. XXIII,io; le môme. Journal numism. 1891, p. 222; Catalogue des monnaies arsacides, etc. décrites par A. de Markof (Collections scientifiques de l'Inst. des langues orientales, partie V, St.- Pétersbourg 1889), p. 133, n«« 1—9.
  41. Markof, 1. c, n<>« 734—771, p. 49—54: M. Drouin (Journ. num. 1891 p. 222, comp. p. 466) comprend ces deux alphabets sous le nom d'„araméo-kourhan**.
  42. Comp. Drouin, Journ. num. 1891, p. 215 et suiv. (Les monnaies touraniennes), et ibid. p. 454 et suiv. (Sur quelques monnaies turco-chinoises des VI«, vue et Vm» siècles).
  43. Menandre Protector, ch. 18 (Fragm. histor. Graec. coll. C. Muller, IV, Paris 1851, p. 226).
  44. M. Drouin (Revue archéol. VI, 1885), p. 146; Revue numism. 1891. p. 466) songe en ceci à l'alphabet „araméo-kouchan„ (khovarezmien et sogdien) en supposant que «cette écriture resta celle des Turcs occidentaux jusqu'à la conquête ouigoure (745), pendant que les caractères „runiques" étaient employés par les Turcs orientaux de l'Altaï et de Karakorom*.
  45. Comp. Ab.Rémusat, Recherches sur les langues tartares. p. 45; Drouin. Revue archéol. VI. 1885, p. 145; Radioff, Das Kudatku Bilik, p. LXXXIV et suiv.
  46. J'ajoute que les ressemblances spécieuses de Talphabet turc et l'alpha- bet dit hunttO'Scythique (voir P. Kirâly de Dada. Babyl. and Oriental Kecord VI, n*> 10, 1893, p. 227 et suiv., 233) sont trop peu nombreuses et trop impercep- tibles pour justifier une parente des deux alphabets.
  47. Comp. en outre (Gaubil,) Abrégé de l'histoire chinoise de la grande dtjnnsiie Tang, dans les Mémoires concernant l'histoire, etc, des Chinois, XV (Paris 1791) et XVI (ibid. 1814; malheureusement je n'en ai pu consulter que le tome XVI : Klaproth, Tableau historiques de l'Asie (Paris 1826 surtout p. 113 et suiv ; A. Heikel dans Inscriptions de l'Orkhon, p. XVII et suiv. Je regrette vivement que les ouvrages russes du Père Hyacinthe (Bit-chourin) relatifs à l'histoire de l'Asie Centrale, ne se trouvent pas dans nos bibliothèques, de sorte que je n'ai pu les utiliser.
  48. Journ. asiat , 6e s., III, p. H31 et suiv. (sous l'année 558), p. 351 et suiv. (sous l'année 581 ; Visdelou, 1. c. p. 56 et suiv Les notices regardent donc un temps plus ancien que celui de nos inscriptions; mais, à coup sûr, les détails rapportés n'ont subi que très peu de changements pendant cet intervalle.
  49. «Les Chinois le jettent à droite, et considèrent l'usage contraire comme le signe auquel on reconnaît qu'une nation n'est pas civilisée


Je dresse ici l’alphabet turc (ou turc-altaïque) comme je l’ai donné dans ma Notice préliminaire, en plaçant comme formes princi¬ pales (bien qu’indubitablement elles ne soient pas toujours les plus primitives) les caractères, au nombre de 38, qui figurent sur les deux grands monuments „turcs“ proprement dits, c’est-à-dire ceux qui sont marqués I et II dans les Inscriptions de VOrkhon recueillies par Vexpédition finnoise 1890 et publiées par la société finno-ougrienne (Helsingfors 1892), et K et X dans l'Atlas der Alterthümer der Mongolei, im Auftrage der Kais . Alcademie der Wissenschaften heraus- gegeben von Dr . W. Radloff (Saint-Pétersbourg 1892) [1]. Dans le tableau j’ajoute d’abord les variantes qui figurent sur le monument III des Inscriptions de l'Orkhon(pl. XXXV de l'Atlas de Radloff), monument postérieur d’environ 50 ans aux susdits et qui date du temps de la dynastie ouigoure. L’inscription en caractères turcs que porte ce monument, à côté d’inscriptions en caractères ouigours et en chinois, n’offre pas seulement de petits écarts dans la forme des signes, mais encore dans la langue : autant que les fragments peu nombreux nous permettent d’eu juger , le dia¬ lecte de cette inscription n’est pas „turc“ proprement dit, mais ouigour. D’autre part j’ajoute les variantes les plus importantes et les moins douteuses qu’offrent les inscriptions de l’Iénisséi[2]. Du reste, quant à ces dernières inscriptions, je n’y toucherai que rarement: elles présentent tant de particularités qu’on doit en faire l’objet d’un travail à part . Ces particularités se révèlent , non seulement par les formes des lettres , mais encore pais la négligence qui y règne souvent, soit dans l’épellation des mots, soit dans la manière dont les inscriptions ont été taillées. On ne peut donc pas s’étonner qu’évidemment l’édition imprimée n’ait pas réussi à surmonter toutes les difficultés que présentent l’identification des signes et la reproduction typographique de ces inscriptions, et qu’il y ait beau¬ coup de détails qui suscitent de grands doutes (nous en verrons des exemples plus loin): je suis convaincu que sans pouvoir consulter les originaux ou des estampages exacts, ce serait peine perdue que de vouloir en tenter le déchiffrement ou l’interprétation en totalité. Même le dialecte paraît différer un peu de celui des inscriptions de l’Orkhon: on peut supposer que c’est une forme ancienne du kirghiz [3]. (Parmi les variantes , j’exclus les formes à rebours employées dansles cas où exceptionnellement on a écrit de gauche à droite. Je désigne par ” qu’on emploie aussi la forme des inscriptions de l’Orkhon, et par — que telle lettre fait défaut, excepté les inscriptions dont le numéro est ajouté entre parenthèses.)

Dans le tableau j’exprime par un 1les signes de consonnes qui ne s’emploient qu’en combinaison avec les voyelles vélaires (a, o, u et, en général, y), et par 2les consonnes dont l’emploi est restreint aux voyelles palatales.

Orkh. III. Iénisséi Orkh. III. Iénisséi
𐰀 a, ä ,, 𐰁 𐰂 𐰘 j2 ,, 𐰙
𐰃 y, i ,, 𐰄 𐰪 i - (𐰫 XXXVII)
𐰆 o, u 𐰆 ,, 𐰭 ṅ (ng) ,, 𐰮
𐰇, ö, ü 𐰣 n1
𐰴 q (k1) 𐰤 n2
𐰶 q devant ou apres y 𐰢 m
𐰺 r1
𐰸 q devant ou apres o, u 𐰹 𐰼 r2
𐰍 ɣ g1
𐰚 k (k2) 𐰞 ł ,, 𐰟
𐰜 k devant ou après ö, ü
𐰠 l (l2)
𐰏 g g2 𐰲 č 𐰳
𐱃 t1 𐰱 ?
𐱅 t2 𐰽 s1 - comp. š
𐰑 d1 𐰾 s2
𐰓 d2 𐱁 š 𐱂
𐰯 p 𐰔 z 𐰕
𐰉 b1 𐰦 nd
𐰋 𐰅 b2 𐰨 nč
𐰖 j1 𐰡 ld


Ajoutez encore le double point ⁚ qu’on emploie pour séparer les mots.

Eu allant faire plus ample mention des divers signes, je ferai encore remarquer une fois pour toutes que dans la transcription j’exprime des voyelles qui, dans le texte original, ne sont pas écrites, mais qu’il faut sous-entendre, à l'aide de petits caractères, par exemple ałyp 𐰞𐰯, et que j’emploie ‿ entre deux mots qui dans l’original ne sont pas écrits séparément. Dans les exemples que je cite en cette partie de mon ouvrage, avec renvoi aux inscriptions I ou II, je suis la (fausse) indication des lignes 1) donnée par les Inscriptions de l'Orkhon. Mais en général je n’ajoute point de renvois aux exemples, ces derniers étant aisés à retrouver à l’aide du vocabulaire joint à l’édition mentionnée. De même, je regarde en géné¬ ral comme superflu que les exemples cités par moi soient addition¬ nés de parallèles avec les autres langues turques: je crois pouvoir supposer que, grâce au conservatisme phénoménal de cette famille de langues, la plupart de ces exemples seront d’emblée intelligibles pour quiconque a de simples connaissances d’une langue turque.

  1. Ce ne sont pourtant pas les seules inscriptions que nous aient laissées les Turcs (Tou-kiôue). Il y faut joindre par exemple celles qui sont reproduites sur la planche XXVI de YAtlas de Radloff, surtout l’inscription assez longue trouvée près de l ’Ongin . Cependant , à l ’aide de la photographie seule , il est impossible d’en lire plus que des parties assez rares. Quelques-uns des caractè¬ res (par exemple t1, b2, m) ont , dans l’inscription de l’Ongin, des formes plus arrondies que dans les inscriptions I et II,
  2. Inscriptions de Vlénisséi recueillies et publiées par la société finlandaise d 'archéologie. Helsingfors 1889 . — O. Donner , Worterverzeichniss su den Inscriptions de Vlénisséi. Ibid . 1892.
  3. Comp. Klaproth, Journal asiatique II , 1828, p. 5 et suiv. = Mémoires relatifs à l'Asie I , 1824, p. 160 et suiv. — Inscr , de Vlénisséi p . 7.