Ingres d’après une correspondance inédite/LXXII

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LXXII
(Sans date).

Effectivement, j’ai revu monsieur Reynaud. J’ai reçu le Maire et ces messieurs avec bien du plaisir, comme compatriotes et gens distingués.

Tu sais peut-être que j’ai accepté de peindre la Salle de l’Empereur Napoléon Ier à l’Hôtel-de-Ville. Il faut donc que, d’ici au premier janvier, j’aie terminé cette œuvre considérable. Je n’ai pas un moment à perdre pour arriver au but, et Dieu sait si je suis occupé. C’est pour cela que j’ai dit adieu au monde qui bourdonne autour de moi.

Ta dernière lettre efface heureusement le triste effet de la précédente, à laquelle j’ai pris la plus vive part. Mais j’éprouve un bien grand plaisir à la bonne nouvelle de ton mariage, et je te sais bien gré de m’en avoir informé des premiers. C’est une chose très sérieuse par les détails que tu me donnes sur cet événement auquel, tu n’en doutes pas, nous prenons le plus vif intérêt, et nous t’envoyons nos vœux les plus tendres ! J’aime beaucoup qu’on épouse son cousin. Même famille, on se connaît mieux ; on a vécu ensemble. Je félicite aussi cet heureux cousin et cette famille qui acquiert une telle fille. Tu nous tiendras au courant de l’époque de ton mariage pour que, dans ce moment suprême, nos tendres vœux vous parviennent en idée, puisque nous ne pouvons y assister.

On dit, ma chère, que tu es dans un état sacré ; c’est un gage de bonheur de plus pour toi. Mais pour la peinture et la musique, qu’en sera-t-il ? Ces arts charmants que tu cultives, vas-tu les oublier, comme beaucoup de jeunes personnes, ou bien forcément les négliger ? Chère petite Madame, que le feu que tu as pour eux ne s’éteigne jamais !

Je n’avais pas compris que vous veniez nous faire vos adieux, hier. Votre départ me cause beaucoup de regrets. Je ne veux pas être trop exigeant et vous faire revenir encore, Quai Voltaire. Je vous renouvelle donc ici mes tendres adieux…