IL FAUT RIRE



Janvier recommence encor,
Et nous retrouve d’accord :
Gaîté, viens monter ma lyr ;
        Il faut rire…
        Il faut rire
Rire et toujours rire.

Fidèles à notre plan,
Depuis le premier de l’an
Jusqu’à l’heure où l’an expire,
        Il faut rire…, etc.

L’an qui fuit ne revient plus ;
Mais nos regrets superflus
Ne pouvant le reproduire,
        Il faut rire…, etc.

L’hiver nous glace aujourd’hui ;
Mais en songeant qu’après lui
Un nouveau printemps va luire,
        Il faut rire…, etc.

Tant que nous aurons des yeux
Pour voir minois gracieux,
Taille fine et doux sourire,
        Il faut rire…, etc.


Tant que nous aurons des dents
Et des repas abondants,
De nos goûts dût-on médire,
        Il faut rire…, etc.

Tant que la foudre en éclats
Dans nos caves n’ira pas
Tourner le vin qu’on en tire,
        Il faut rire…, etc.

Tant qu’un merveilleux blondin
Sifflera Georges Dandin
Avant de savoir écrire,
        Il faut rire…, etc.

Tant que, voyant ses monts d’or,
La jeune Agnès à Mondor
Dira : pour vous je soupire !
        Il faut rire…, etc.

Tant qu’un sot et vieux barbon
Dira, croira tout de bon
Qu’à sa femme il peut suffire,
        Il faut rire…, etc.

Tant qu’un médecin savant
Au nombre des ci-devant
Ne viendra pas nous inscrire,
        Il faut rire…, etc.

Dût-il en un tour de main
Nous expédier demain,
En entrant au sombre empire
        Il faut rire…, etc.


Sûrs d’y rencontrer Favard,
Vadé, Piron et Panard,
Le moyen de ne pas dire :
        Il faut rire…, etc.

Avec eux dansant en rond,
Aux échos de l’Achéron
Que nos chants fassent redire
        Il faut rire…, etc.

Que l’infernal souverain,
Brisant son sceptre d’airain,
Avec nous chante en délire :
        Il faut rire…, etc.

Par cet exemple entraînés.
Que les diables aux damnés
Disent : « C’est trop longtemps frire ;
        Il faut rire…, etc.

Qu’enfin de l’enfer au ciel,
Un chorus universel
Crie à tout ce qui respire :
        Il faut rire…
        Il faut rire
Rire et toujours rire.