Iconologie (Cesare Ripa, 1643)/II/Symmetrie

Symmetrie.


ELle ſe donne à connoiſtre par vne Femme de ſinguliere beauté, bien proportiõnée en toutes les parties de ſon crops, dont le milieu ſe couure d’vne Eſcharpe bleuë, ſemée d’Eſtoilles, & où ſont repreſentées les ſept Planettes. A quoy i’adiouſte qu’elle a deuant elle la ſtatuë d’vne Venus toute nuë, dont elle prend les proportions, auec vn Compas & vne Regle qu’elle tient en ſes deux mains.

La Symmetrie, dont le nom tiré du Grec ſignifie vne iuſte & conuenable meſure qui ſe fait de toutes ſortes de choſes, eſt icy figurée par vne Femme de grande beauté, pource qu’en effect on appelle beau tout ce à quoy on ne peut adiouſter ny diminuer pour le rendre plus accomply qu’il eſt.

Sa nudité ſignifie que toutes les parties du corps doiuẽt auoir de la correſpondance à l’eſtre de ſon egalité, de ſon ordre & de ſa proportion. Par l’Eſcharpe de couleur bleuë, toute ſemée d’Eſtoilles, eſt repréſenté le Ciel, dans le mouuement duquel, ſuiuant l’opinion de la pluſpart des Philoſophes, ſe rencontre vne certaine proportion qu’ils appellẽt Harmonique. Ce qu’ils preuuent manifeſtement par l’exemple du Soleil & de la Lune, dont l’vn fait la diſtinction du Iour et de la Nuict auec vne merueilleuſe Symmetrie, & l’autre de meſme, bien que changeante, ne laiſſe pas d’eſtre parfaitement reglée en ſon cours, & dans les diuers effets qu’elle produit.

En ſuite de ces choſes il faut remarquer qu’elle ne tient pas ſans raiſon vne Regle & vn Cõpas, dont elle ſe ſert à prendre les proportions & les meſures d’vne statuë de Venus. Car il eſt monſtré par là, comme i’ay dit cy deuant, que d’vne iuſte Symmetrie ſe forme neceſſairement vne parfaite Beauté, qui par deſſus toutes choſes ſe fait remarquer au corps humain, où elle eſclate auec rauiſſement, & au delà de toute merueille. Ce qui fait dire à Marſille Fiſcin, qu’elle merite qu’on en faſſe cas, comme d’vn portrait de la Beauté diuine.