Hymnes profanes/IV/Si j’ai trop aimé celle qui me peine

Bibliothèque de La Plume (p. 51-52).




Si j’ai trop aimé celle qui me peine
Ô mon Dieu ! pourquoi m’avez-Vous maudit ?
Quand vous étiez homme avez-vous pas dit
Que vous pardonniez à la Madeleine !

Seigneur, pardon si je suis criminel,
Si je souffre trop et si je blasphème,
Mais me voilà seul, Seigneur, et je l’aime
Plus que votre terre et que votre ciel !

Ah ! je m’humilie et demande grâce,
Pour ce seul amour je suis trop puni !
Mais de vos regards si j’étais banni,
Que voudriez-Vous, Seigneur, que je fasse ?


Ne me traitez point comme un révolté,
Mais souvenez-Vous que je suis un homme
Dont l’amour funeste est votre œuvre en somme,
Puisqu’on aime par votre volonté !

Seule, sans appui, mon âme chancelle
Et si vous veniez à m’abandonner,
J’irais me tuer, j’irais me damner
Seigneur ! voulez-vous ma mort éternelle ?

Faites que j’oublie ou rendez la moi !
Car le Désespoir guette d’heure en heure
Dans ces profondeurs où je hurle et pleure
Ce cœur affolé de doute et d’effroi !