Hymnes profanes/0/Ce cœur mort, le voilà qui renaît de ses cendres

Bibliothèque de La Plume (p. 7-8).




À M. Henri Becque.


Ce cœur mort, le voilà qui renaît de ses cendres,
Et qui reprend confiance en lui-même, et repart
Vers des espoirs lointains, sans halte ni retard,
Parce que deux yeux noirs se sont faits doux et tendres.

Pourtant j’avais juré de n’aimer jamais plus !
Drapé dans mon orgueil comme dans un suaire,
Je m’étais étendu sur mon lit mortuaire
Et me laissais mourir comme un vieillard perclus.

Mais voici qu’ont éclos le soleil et les fleurs !
Les doux pommiers sont blancs comme des épousées, —
Et le bois mort lui-même a d’étranges poussées,
Voici le renouveau des viriles ardeurs !


Réveille-toi, mon cœur, surgis comme Lazare !
Dans ce tombeau glacé tu n’étais qu’endormi,
Lève-toi ! Lève-toi ! et vibre encor parmi
Les baisers du soleil éclatant en fanfare !