Horizons/Les chalands

Pour les autres utilisations de ce mot ou de ce titre, voir Les chalands.
HorizonsEugène Fasquelle (p. 38-39).

LES CHALANDS


À Ch. Th. Féret.


Aux tournants troubles de la Seine, mes chalands
Avec leurs mariniers blonds et roux à l’arrière,
Défilent sous mes yeux, à la remorque, lents,
Un pot de fleurs à leurs fenêtres batelières.

J’aime les regarder, bien chargés, bien fournis.
Ils sont assis sur leur reflet quand ils s’arrêtent,
Et l’eau douce vient caresser comme une bête
Et faire respirer leurs beaux ventres vernis.

La Seine de Paris sans verdure et sans grève,
Je voudrais la quitter pour m’en aller comme eux,
— Passant au fil de l’eau par Rouen et la Hève, —
Regagner l’estuaire avec son cap brumeux.


Car ils vont jusqu’au bout de ma Seine normande,
Et moi, certains soirs lourds ou certains matins clairs,
Je sens, rien qu’à les voir, que mon âme demande
Quelque chose… Et je suis en peine de la mer.