Histoires poétiques (éd. 1874)/Le Village de Marie
Qand près de vos maisons je passe tout rêveur,
Bonnes gens du Moustoir, n’ayez point de frayeur,
Je suis un amoureux, et non pas un voleur.
C’est ici, dans cette bruyère,
Qu’enfant, je poursuivais naguère
Une enfant, comme moi légère.
Où nous courions tous deux, seul je viens, ô douleur !
Bonnes gens du Moustoir, n’ayez point de frayeur.
Je suis un amoureux, et non pas un voleur.
Sa coiffe flottant autour d’elle,
On eût dit une tourterelle
Qui vient de déployer son aile.
Hélas ! l’oiseau sauvage a trouvé l’oiseleur !
Bonnes gens du Moustoir, n’ayez point de frayeur,
Je suis un amoureux, et non pas un voleur.
Et le dimanche, au bourg, plus d’une
Disait, jalouse : « Cette brune
Sera la fleur de la commune. »
Ô brune enfant qu’un autre aspira dans sa fleur !…
Bonnes gens du Moustoir, n’ayez point de frayeur,
Je suis un amoureux, et non pas un voleur.