CHAP. XXXV.

Pandore (1).

Ce qu’on a dit de Pandore, que pétrie de limon, elle transmit aux autres humains le vice de son origine, n’est pas tolérable non plus. Voici ce que je crois qui en est : Pandore était une Grecque très-riche, qui ne sortait jamais sans se plâtrer le visage d’une quantité de terre cosmétique. Il n’y a pas autre chose ; mais les commentaires ont fait de cela une histoire impossible (2).

(1) La fable de Pandore n’a jamais été mieux traitée que par le plus ancien des poètes qui l’a reproduite deux fois. Hésiode, dans les travaux et les jours, suppose que Jupiter, irrité de ce que Prométhée a ravi le feu du ciel pour le communiquer aux mortels, ordonne à Vulcain de pétrir une statue de terre et d’eau, et aux principales déesses de la douer des charmes les plus séduisants mais les plus perfides. Les Dieux s’empressent d’exécuter les ordres de Jupiter, qui sourit en songeant combien il sera vengé des hommes par ce don funeste ; mais il faut s’arrêter : une sèche analyse ne saurait donner une idée de cette fleur de poésie si suave et si fraîche encore dans les beaux morceaux des plus anciens poètes (V. Hésiode, les travaux et les jours, v. 44-92, p. 214-217 de la collection des poètes gnomiques de Brunck, Lips. 1817). V. Hyginus, fable 42 (p. 249-250 de Mythogr. lat. de Van Staveren).

(2) Dion Chrysosthôme (dans son second discours sur l’envie tom. 2, p. 422 de l’édition publiée par la veuve de Reiske, Leipsig 1784) après avoir raconté l’anecdote connue de ce peintre, qui, pour faire ressortir la frivolité des critiques dont son tableau avait été l’objet plaça à côté du premier un autre cheval exécuté, d’après la réunion de tous les avis qu’on lui avait donnés et qui ressemblait à tout autre animal plutôt qu’à un cheval ; rappelle aussi Pandore qui, réunissant les dons divers qu’elle avait reçus des Dieux, n’en formait pas moins un assemblage un peu fou et très-méchant.