Histoire universelle/Tome I/II/II

Société de l’Histoire universelle (Tome Ip. 60-61).
Ceylan

La nature a fait de Ceylan un jardin merveilleux ; ses annales qui ont commencé de dérouler leurs péripéties l’an 240 av. J.-C. et se sont pratiquement déterminées en 1314 en ont fait un musée : annales toutes religieuses mais qui ne furent pas exemptes pour cela de périls et de violences. Occupée par les Tamouls, un des peuples du Dekkan, Ceylan fut convertie au bouddhisme par Asoka qui confia à ses propres enfants le soin de son évangélisation. Les monastères aussitôt s’édifièrent en grand nombre. Çakya Mouni avait marqué de son vivant sa prédilection pour les beaux ombrages, les paysages de choix, les fleurs… C’est dans des parcs attrayants, au bord de l’eau, que s’étaient groupés ses premiers disciples pour méditer et s’entretenir. Ceylan n’était-il pas pour le bouddhisme un lieu prédestiné ? La religion dès lors y régna sans conteste. Les souverains de l’île ne furent grands qu’en raison de leur piété, de la protection accordée par eux aux moines et du zèle dépensé à entretenir les missions. Ceylan devint un grand centre d’expansion fervente, principalement vers l’est ; la sainteté des sanctuaires y attira d’autre part de nombreux pèlerins. Lorsque les bouddhistes se virent persécutés dans l’Inde soit par le brahmanisme soit plus tard par l’islamisme, ils y cherchèrent un refuge et un abri. Çà et là des hérésies surgirent qui divisèrent les moines et déchaînèrent de violentes controverses mais en général la paix régnait aidée peut-être par la torpeur tropicale. À partir de l’an 1000 les choses changèrent. Les Tamouls du Dekkan passèrent à plusieurs reprises le détroit pour des expéditions où l’anti-bouddhisme et l’intérêt matériel avaient sans doute parts égales. Puis ce furent en 1277 des pirates malais de Sumatra qui ravagèrent l’île. Peu belliqueux, les Cinghalais n’usaient point de représailles. Un seul de leurs rois est réputé avoir pris sa revanche en portant à son tour la guerre chez l’ennemi. Les Tamouls revinrent à la charge et en 1314 s’emparèrent du nord de l’île. Ce fut la fin de sa douce prospérité. Ceylan s’endormit et rêva de son passé parmi les ruines de ses pagodes.