Histoire socialiste/Consulat et Empire/17

, sous la direction de
Jules Rouff (p. 361-368).

CHAPITRE III

Cinquième coalition.

LA CAMPAGNE D’AUTRICHE

Depuis la paix de Presbourg (1805), qui lui avait infligé une mutilation et une cruelle humiliation, l’Autriche n’avait cessé d’être le centre de l’agitation antinapoléonienne, et la cour de François II était tout entière acquise au parti de la guerre. On n’attendait qu’une occasion de prendre une revanche impatiemment désirée, et la malheureuse aventure d’Espagne apparut à tous marquer l’heure décisive des prochaines hostilités.

En mars 1809, les armements furent poussés avec une prodigieuse activité et, dès cette époque, cent vingt mille combattants, au moins, étaient prêts à entrer en campagne, sous les ordres de l’archiduc Charles, de l’archiduc Jean, de l’archiduc Ferdinand, des généraux Jellachich et Stoichewitz. Une milice territoriale, la landwehr, fut créée par surcroît, et l’impératrice, aidée par les dames de la haute aristocratie, brodait de ses propres mains les drapeaux des régiments.

Les efforts diplomatiques secondaient, sans répit, les préparatifs militaires, et François, en personne, multipliait les négociations pour essayer de détacher de notre alliance le czar Alexandre, singulièrement hésitant entre ses engagements si récents d’Erfurt et son désir de se débarrasser d’un allié trop encombrant. Napoléon n’ignorait rien, comme on pense, ni de ces préparatifs, ni de ces intrigues, et lui aussi, revenu précipitamment d’Espagne, en 1809, travaillait hâtivement à la constitution d’une formidable armée.

Jamais, peut-être, la tyrannie impériale n’atteignit un tel degré d’arbitraire ; jamais la conscription ne causa de plus terribles saignées dans la nation, jamais en tous cas, elle ne se fit avec plus de brutalité et de cynisme.

Napoléon appelle non seulement le contingent de 1809, mais encore il enrôle deux classes à l’avance et rappelle trois classes libérées.

À ces troupes, à ces recrues soudainement réunies, il fallait des officiers et des sous-officiers ; mais Napoléon n’était point embarrassé de trouver de nouveaux cadres, tant son imagination était féconde en monstrueuses inventions. En Espagne, déjà, il avait eu l’idée d’arracher à leurs études, dans tous les lycées de France, les adolescents les plus robustes pour les envoyer à la guerre : il fallait de la chair fraîche pour les canons insatiables !

Au mois de décembre 1808, il donne l’ordre à Fouché de dresser une liste de dix familles par département et de cinquante pour Paris, désignées parmi les plus anciennes et les plus riches, et d’envoyer de force leurs enfants à l’école de Saint-Cyr.

« Si l’on fait quelque objection, ajoutait le despote, il n’y a pas d’autre réponse à faire que : tel est mon bon plaisir. »

C’était la terreur organisée dans tout le pays, et si nous en voulons un tableau singulièrement tragique, nous pouvons l’emprunter à la plume véhémente de Chateaubriand, qui s’écrie[1] :

« Le code de la conscription sera un monument éternel du règne de Bonaparte. Là se trouve réuni tout ce que la tyrannie la plus subtile et la plus ingénieuse peut imaginer pour tourmenter et dévorer les peuples : c’est véritablement le code de l’enfer. »

« Les générations de la France étaient mises en coupes réglées, comme les arbres d’une forêt : chaque année quatre-vingt mille jeunes gens étaient abattus. Mais ce n’était là que la coupe régulière : souvent la conscription était doublée ou fortifiée par des levées extraordinaires ; souvent elle dévorait d’avance les futures victimes, comme un dissipateur emprunte sur son revenu à venir.

« On avait fini par prendre sans compter, l’âge légal, les qualités requises pour mourir sur un champ de bataille n’étaient plus considérés, et l’inexorable loi montrait à cet égard une merveilleuse indulgence. On remontait vers l’enfance, on descendait vers la vieillesse : le réformé, le remplacé étaient repris ; tel fils d’un parent artisan, racheté trois fois au prix de la petite fortune de son père, était obligé de marcher. Les maladies, les infirmités, les défauts du corps n’étaient plus une raison de salut. Des colonnes mobiles parcouraient nos provinces comme un pays ennemi, pour enlever au peuple ses derniers enfants. Si l’on se plaignait de ces ravages, on répondait que les colonnes mobiles étaient composées de beaux gendarmes qui consoleraient les mères et leur rendraient ce qu’elles avaient perdu ! Au défaut du frère absent, on prenait le présent. Le père répondait pour le fils, la femme pour le mari : la responsabilité s’étendait aux parents les plus éloignés et jusqu’aux voisins. Un village devenait solidaire pour le conscrit qu’il avait vu naître. Des garnisaires s’établissaient chez le paysan et le forçaient à vendre son lit pour les nourrir ; pour s’en délivrer, il fallait qu’il trouvât le conscrit caché dans les bois. L’absurde se mêlait à l’atroce : souvent on demandait des enfants à ceux qui étaient assez heureux : pour n’avoir point de postérité ; on employait la violence pour découvrir le porteur d’un nom qui n’existait que sur le rôle des gendarmes ou pour avoir un conscrit qui servait déjà depuis cinq ou six ans. Des femmes grosses ont été mises a la torture afin qu’elles révélassent le lieu où se tenait caché le premier né de leurs entrailles ; des pères ont apporté le cadavre de leur fils pour prouver qu’ils ne pouvaient fournir ce fils vivant. Il restait encore quelques familles dont les enfants plus riches, s’étaient rachetés ; ils se destinaient à former un jour des magistrats, des administrateurs, des savants, des propriétaires, si utiles à l’ordre social dans un grand pays ; par le décret des gardes d’honneur, on les a enveloppés dans le massacre universel. On en était venu à ce point de mépris pour la vie humaine et pour la France d’appeler les conscrits la matière première de la chair à canon. On agitait parfois cette grande question, parmi les pourvoyeurs de chair humaine, de savoir combien de temps durait un conscrit : les uns prétendaient qu’il durait trente-trois mois, les autres, trente-six. Bonaparte disait lui-même : « J’ai cent mille hommes de revenu ! »

Dans un article récent paru dans la Nouvelle Revue, sous la signature de M. Leymarie, nous trouvons encore une page édifiante sur la conscription et sur la façon de poursuivre les réfractaires.

« Napoléon, dit M. Leymarie, voulut, avec une sorte de passion, avoir raison de l’insoumission qui, sous le régime impérial, prit des proportions inconnues jusqu’alors. Ce grand consommateur d’hommes savait bien que les jeunes gens rebelles à la loi étaient, pour la plupart, vigoureux, énergiques, déterminés ; il ne pouvait accepter l’idée de perdre pour ses armées cet élément précieux en laissant se fondre, avant même qu’ils fussent réunis, les contingents qu’il demandait à la conscription.

« Quelques faits donneront une idée de la sévérité déployée dans la répression des réfractaires et de leurs complices.

« La commission militaire établie à Trêves, en 1810, pour juger les séditieux qui avaient troublé la tranquillité publique dans le département de la Sarre, lors du tirage au sort de la garde nationale, condamna à la peine de mort 16 individus, dont 6 contumax ; 26 aux fers, 11 à la détention, et tous solidairement aux dépens.

« Un fait bien caractéristique se passa en 1812 dans le département de la Haute-Vienne. Le tribunal de Bellac condamna la veuve de Fiénas, François et Jean de Fiénas, ses fils, chacun à un an de prison et 500 francs d’amende, aux dépens, comme receleurs de Fiénas, leur fils et frère, conscrit réfractaire.

« En 1808, Jean Barrère de Caupenne est également condamné à huit ans de fers pour s’être servi d’un faux passeport. »

Veut-on savoir, maintenant, puisque nous en sommes sur ce chapitre, ce que coûta à la France le règne de Napoléon, dont quelques-uns s’enorgueillissent encore ? M. d’Hargenvilliers, directeur de la conscription sous Napoléon, a donné le chiffre officiel de un million sept cent mille victimes pendant dix ans, rien que parmi les Français. Dans ce chiffre ne sont pas compris tous les étrangers, Allemands, Polonais, italiens, etc., etc., qui combattaient sous nos drapeaux. Avec eux, on arriverait à près de cinq millions de victimes !

Et c’est ce régime d’infamies et de massacres, de terreur, de tortures, de tueries et de pillages que les césariens, moins de cent ans après, veulent imposer encore à notre civilisation !

Pour égaler la férocité tyrannique du maître, il n’y avait que la lâcheté révoltante des valets.

Et, parmi ces valets, ceux dont l’échine était la plus souple, dont l’aplatissement paraissait le plus abject furent les membres du Sénat impérial. Nulle assemblée ne mérita, dans l’histoire de notre pays, plus de mépris et plus de malédictions.

C’est à lui, c’est à sa complaisance que Napoléon venait demander, pour la forme, les levées d’hommes, les appels de conscrits. C’est à lui que, sur un ton comminatoire, l’empereur dictait ses ordres et quand, le 15 août 1809, le ministre Champagny vint lire un rapport insolent, où la guerre contre l’Autriche était déclarée, il ne se trouva pas un membre pour faire entendre un murmure de protestation contre une campagne où tant de sang français allait encore se répandre. Au contraire, une adresse fut rédigée par les vils flatteurs, pour remercier Napoléon de sa communication, et lui offrir en holocauste les 30 000 hommes de la conscription de 1810.

« On se demande, s’écrie un pamphlétaire anonyme, dans une brochure du temps, intitulée : Les Quatre Philippiques[2], on se demande si ce n’est pas le Sénat préposé à la conservation de nos institutions qui a creusé l’abîme où nous nous trouvons en inventant et fondant successivement le tyran et la tyrannie, en donnant l’apparence de formes légales à toutes les mesures atroces proposées par le tyran, en envoyant annuellement deux ou trois cent mille hommes à la boucherie ! »

Et plus loin :

« Vous, sénateurs de Bonaparte, vous, ses compagnons de la journée de Saint-Cloud, ses adeptes sous le Consulat, ses muets lors de l’assassinat du duc d’Enghien, ses témoins ou ses juges dans le procès de Moreau, vous recevez chaque mois le prix de la terreur impériale que vous répandez dans toutes les familles ! »

« Ce corps, écrit Grégoire dans ses Mémoires, qui devait être si auguste, n’a guère été que le bureau d’enregistrement des volontés d’un tripot qu’on appelait la réunion. On n’arrive aux séances du Sénat que pour faire ce qui est fait. À l’idée de Sénat conservateur devaient s’associer des idées imposantes, et sur elles devaient reposer les espérances nationales. Qu’a-t-il conservé ? Rien que le traitement de ses membres ! »

Une caricature intitulée : Manière de voir sous l’Empire, et conservée aux estampes de la Bibliothèque nationale, représente un sénateur ayant la bouche, les yeux et les oreilles bouchées avec des pièces d’or !

Dès lors, Napoléon n’avait rien à ménager, et, en présence de l’opinion publique bâillonnée, du Parlement esclave, il pouvait impunément se lancer dans une nouvelle aventure. On entra en campagne.


(D’après un document de la Bibliothèque Nationale.)


Bien que nous ne fassions point ici une histoire militaire (trop d’historiens n’ont entendu dans ces années terribles du premier Empire que le bruit de la fusillade et les grondements des canons), nous ne pouvons nous dispenser d’indiquer sommairement les grandes lignes de la guerre d’Autriche.

Napoléon avait eu le temps de faire venir d’Espagne les officiers et les régiments de la garde impériale. Dès lors, il avait sous la main 300 000 hommes, et l’armée destinée à opérer sur le Danube fut divisée en trois corps principaux : le premier, sous les ordres de Davoust, devait se réunir à Ratisbonne ; le second, sous les ordres de Lannes, devait se concentrer à Augsbourg ; le troisième, commandé par Masséna, devait se réunir à Ulm.

Les réserves de cavalerie étaient placées sous le commandement de Bessières ; Augereau, Lefèvre et Bernadotte étaient à la tête des contingents fournis par la Confédération germanique.

C’est le 13 août 1809 que Napoléon quitta Paris pour prendre le commandement suprême et, le 16 au soir, il était installé en son quartier général de Donaverth, où Berthier l’avait précédé.

Le 19, l’armée autrichienne était coupée en deux, du côté de Ratisbonne, par un habile mouvement du maréchal Davoust, et le 20 s’engage la bataille d’Abensberg. après laquelle les Autrichiens, culbutés par l’élan irrésistible des troupes de Lannes, se retirèrent de l’autre côté de l’Isar.

Le même jour, la cavalerie de Bessières assure la prise de la ville de Landshut.

Telles furent les opérations préliminaires qui préparèrent la décisive bataille d’Eckmühl (22 août).

Plus de cent mille Autrichiens étaient là, en position, sous les ordres de l’archiduc Charles. Les corps de Lannes, de Davoust, de Lefèvre se précipitèrent à l’assaut avec furie, et une charge de cavalerie autrichienne fut impuissante à arrêter la débâcle. L’archiduc Charles dut s’enfuir en laissant entre nos mains plus de dix mille prisonniers, et six mille morts et blessés sur le champ de bataille.

Ce jour-là, deux mille Français payèrent de leur vie la joie de fournir à l’empereur un nouveau bulletin de victoire.

Les jours suivants, Napoléon s’empara de Ratisbonne, et, enivré par un succès si rapide, il lança à son armée une de ces proclamations orgueilleuses où se complaisait sa monstrueuse vanité :

« Soldats ! vous avez justifié mon attente ; vous avez suppléé au nombre par la bravoure ; vous avez glorieusement marqué la différence qui existe entre les soldats de César et les cohues armées de Xercès. L’ennemi, enivré par un cabinet parjure, paraissait ne plus conserver aucun souvenir de vous ; son réveil a été prompt : vous lui avez apparu plus terribles que jamais. Aujourd’hui, défait, épouvanté, il fuit en désordre ; déjà, mon avant-garde a passé l’Inn ; avant un mois, nous serons a Vienne ! »

C’était vrai : la route de Vienne était ouverte, et on oubliait, dans ce triomphe, les successifs échecs subis en Italie par le prince Eugène, les revers infligés à nos troupes, en Tyrol, par les hordes héroïques de l’aubergiste André Hofer, la défaite de Poniatowski en Pologne où Varsovie tomba aux mains de l’archiduc Ferdinand.

La plus importante bataille, avant d’arriver aux portes de la capitale, fut livrée à Ebersberg le 3 mai : trente-cinq mille Autrichiens essayèrent en vain de tenir tête à nos troupes commandées par Masséna. Toutefois, pendant quelques heures, une division, celle de Claparède, fut en grand péril ; mais, après une lutte héroïque, les nôtres triomphèrent enfin. Là encore, dix mille Autrichiens et trois mille Français arrosèrent de leur sang les lauriers impériaux.

Le 10 mai, Napoléon arriva devant Vienne et pénétra dans les faubourgs : il n’éprouva de résistance que de la part de la vieille ville, défendue par l’archiduc Maximilien qui ne capitula qu’après un terrible bombardement.

Dès lors, le vainqueur s’installa au château de Schœnbrunn et multiplia les décrets, prononçant la dissolution de la landwehr, enjoignant aux officiers de rentrer dans leurs foyers, sous peine de voir leurs maisons brûlées et leurs propriétés confisquées. Ne fallait-il pas des proies à abandonner aux grands chefs militaires déjà mis en appétit par les libéralités précédentes ? À Ratisbonne, en effet, l’empereur avait distribué des sommes énormes, créé des baronnies, réparti des terres volées aux vaincus.

Mais Napoléon avait beau agir comme s’il avait déjà conquis l’immense empire autrichien, les hostilités n’allaient pas moins reprendre plus furieusement que jamais.

L’archiduc Charles était établi sur la rive gauche du Danube ; l’empereur résolut de l’y rejoindre malgré les difficultés de l’entreprise, obligé qu’il était de faire passer les troupes sur des ponts improvisés, construits en toute hâte, avec l’île Lobau comme pilier central : la bataille d’Essling se préparait.

Le 18 mai, l’île Lobau était déjà occupée par le général Molitor qui devait protéger l’achèvement des ponts ; le 20 mai, l’empereur en personne se transporta dans l’île et fit passer sur la rive gauche les deux divisions Molitor et Boudet. Le lendemain, il passait lui-même avec Berthier, Masséna et Lannes, et occupa immédiatement les villages d’Essling et Gross-Aspern.

C’est alors que l’archiduc Charles, qu’on ne soupçonnait point si rapproché, apparut soudain avec près de cent mille hommes et commença l’attaque avec un terrible acharnement contre nos troupes en fâcheuse posture, acculées qu’elles étaient au fleuve, dans l’impossibilité de reculer, car les ponts venaient d’être rompus.

Six fois, le village de Gross-Aspern fut pris et repris, et Lannes ne se maintenait à Essling que par des prodiges de valeur.

Quand la nuit mit fin au combat, des milliers et des milliers de cadavres étaient couchés sur le champ de bataille. D’autres allaient encore s’y empiler en un affreux charnier.

Le lendemain, en effet, l’archiduc Charles recommença l’attaque au petit jour, et Masséna eut le premier à subir son rude assaut, auquel il résistait péniblement, quand Lannes survint fort à propos pour faire reculer les Autrichiens.

Mais il fallait des troupes fraîches pour gagner complètement la bataille, et Napoléon attendait avec impatience leur passage de la rive droite sur la rive gauche.

Hélas ! les ponts établis la nuit précédente se rompirent de nouveau et les troupes, exténuées par deux jours de bataille, sont de nouveau livrées à elles-mêmes, avec des munitions qui s’épuisent.

Elles luttent pourtant avec un courage inouï, et c’est en vain que l’archiduc Charles essaye de les jeter dans le Danube. Nous nous maintînmes finalement à Essling.

Mais quelle abominable tuerie ! Lannes, frappé à mort par un boulet qui lui broye les deux genoux, peut voir autour de lui seize mille Français morts ou râlants, et vingt mille Autrichiens !

Et c’est sur près de quarante mille cadavres que Napoléon se hissa d’un échelon de plus vers le sommet de la gloire !

Tout de même, la saignée avait été un peu trop profonde et l’effort épuisant : l’empereur jugea nécessaire de reprendre haleine pendant quelques semaines avant d’imposer à ses troupes de nouvelles épreuves.

Le canon n’était point pour cela silencieux : il tonnait toujours en Prusse, où un patriote, le colonel Schill, se faisait tuer à la tête de quelques troupes ; en Tyrol, où les mouvements insurrectionnels ne cessaient pas ; en Pologne, où Poniatowski reprenait l’avantage ; en Italie, où le prince Eugène et Macdonald guerroyaient avec des fortunes diverses. Les Français finirent pourtant, là aussi, par prendre un avantage décisif, non loin de Leoben, et l’armée d’Italie put effectuer sa jonction avec celle de Marmont qui opérait en Dalmatie.

Tandis que Napoléon laissait encore reposer la grande armée, il faut enregistrer une diversion tentée en Hongrie par le prince Eugène, la bataille de Raab, où les Autrichiens furent mis en déroute, le bombardement de Presbourg que Davoust ne parvint pas à faire capituler, tant fut héroïque la résistance de sa garnison.

Nous voici arrivés à la fin de juin, à la veille d’une nouvelle tentative de passage du Danube, préparée depuis la bataille d’Essling.

Mais nous ne saurions nous engager dans le récit de cette remise en marche de la grande armée sans nous rappeler l’œuvre accomplie à Schœnbrunn pendant ces quelques semaines du repos impérial. Un événement si capital se produisit qu’il faut y insister en une parenthèse assez étendue : nous voulons parler de l’enlèvement du pape et de l’annexion des États de l’Église, prononcée par décret daté de Vienne le 17 mai 1809. Et ce sera l’occasion, sans nous renfermer dans l’ordre chronologique, d’étudier les rapports de Napoléon avec la papauté et l’Église pendant la deuxième partie du règne.

  1. De Buonaparte et des Bourbons, mars 1814.
  2. Voir la Représentation des aristocraties dans les Chambres hautes, par Jules Rais. Paris, 1900.