Histoire naturelle (trad. Littré)/XVII/7

Traduction par Émile Littré.
Dubochet, Le Chevalier et Cie (p. 616-617).
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M. Varron (De re rust., i, 38) donne le premier rang à la fiente des grives de volière ; il la vante comme profitable non seulement au champ, mais encore aux bœufs et aux porcs, qui en engraissent plus promptement. Il y a lieu de bien augurer de nos mœurs, si chez nos ancêtres les volières ont été assez grandes pour fournir des engrais à la campagne. 2 Columelle (De re rust., ii, 15) met au rang suivant la fiente de pigeon, puis celle de poule. Il condamne telle des oiseaux aquatiques. Les autres auteurs s’accordent pour regarder comme le premier des engrais le résidu des repas humains. D’autres préfèrent le superflu de la boisson, dans lequel on fait macérer le poil des ateliers de corroyeurs. D’autres emploient le liquide seul, mais ils y mêlent de l’eau, et même en plus grande quantité qu’on n’en mêle au vin dans les repas ; car il y a là plus à corriger, attendu qu’au vice communiqué par le vin se joint le vice communiqué par l’homme. Tels sont les moyens que les hommes emploient à l’envi pour alimenter la terre même. On recherche ensuite les excréments des pourceaux ; Columelle est le seul qui les rejette. D’autres estiment le fumier de tout animal nourri avec le cytise. Quelques-uns préfèrent celui de pigeon. 3 Vient ensuite celui des chèvres, puis celui des moutons, puis celui des bœufs ; en dernier lieu, celui des bêtes de somme. Telles sont les différences établies par les ancien entre les fumiers, telles les règles pour s’en servir, comme je les trouve ; car ici encore il vaut mieux suivre l’antiquité. Dans quelques provinces très riches en bestiaux, on a vu le fumier, passé au crible comme de la farine, perdre par l’effet du temps l’odeur et l’aspect repoussants qu’il avait, et prendre même quelque chose d’agréable Dans ces derniers temps, on a reconnu que les oliviers aimaient surtout la cendre des fours à eaux. 4 Aux règles anciennes Varron (De re rust. i, 38) a ajouté qu’il faut engraisser les terres à blé avec le fumier de cheval, qui est le plus léger ; et les prairies avec un fumier plus lourd provenant de bêtes nourries d’orge, et propre à fournir beaucoup d’herbe. Quelques-uns même préfèrent le fumier des bêtes de somme à celui des bœufs, le fumier de mouton à celui de chèvre, et à tout celui d’âne, parce que cet animal mange le plus lentement. L’expérience prononce contre Varron et Columelle ; mais tous les auteurs s’accordent pour dire que rien n’est plus utile que de tourner avec la charrue ou avec la bêche, ou d’arracher avec la main, use récolte de lupin avant que la gousse soit formée, et de l’enfouir au pied des arbres et des vignes. On croit même, dans les lieux où il n’y a pas de bétail, pouvoir fumer le sol avec le chaume, ou, au pis aller, avec la fougère. 5 « Vous ferez du fumier, dit Caton (De re rust., xxxvii) avec la litière, le lupin, la paille, les fèves, les feuilles d’yeuse et de chêne ; arrachez de la terre à blé l’hyèble, la ciguë, et dans les saussaies l’herbe qui monte et le jonc : de cela et des feuilles qui pourrissent faites de la litière pour les moutons. Si la vigne est maigre, brûlez-en les sarments, et labourez le terrain ; et quand vous êtes sur le point (De re rust., xxx) de semer le froment dans un champ, faites y parquer les moutons. »

VII.

1 Caton dit encore (De re rust. xxxvii) : Il y a des récoltes qui engraissent le sol : les terres à blé sont fumées par le lupin, la fève, la vesce. Une action contraire est exercée par le pois chiche, à cause qu’on l’arrache et qu’il est salé, par l’orge, le fenugrec et l’ers ; ces plantes brûlent la terre à blé, ainsi que toutes celles



M. Varro principatum dat turdorum fimo ex aviariis, quod etiam pabulo boum suumque magnificat neque alio cibo celerius pinguescere adseverat. De nostris moribus bene sperare est, si tanta apud maiores fuere aviaria, ut ex his agri stercorarentur. 2 Proximum Columella e columbariis, mox gallinariis facit, natantium alitum damnato. Ceteri auctores consensu humanas dapes ad hoc in primis advocant. Alii ex his præferunt potus hominum in coriariorum officinis pilo madefacto, alii per sese aqua iterum largiusque etiam, quam cum bibitur, admixta. Quippe plus ibi mali domandum est, cum ad virus illud vini homo accesserit. Hæc sunt certamina, invicemque ad tellurem quoque alendam aluntur homines. Proxime spurcitias suum laudant, Columella solus damnat. Alii cuiuscumque quadripedis ex cytiso, aliqui columbaria præferunt. 3 Proximum deinde caprarum est, ab hoc ovium, dein boum, novissimum iumentorum. Hæ fuere apud priscos differentiæ, simulque præcepta (ut invenio) recenti utendi, quando et hic vetustas utilior ; visumque iam est apud quosdam provincialium inveteratum, abundante geniali copia pecudum, farinæ vice cribris superinici, fætore aspectuque temporis viribus in quandam etiam gratiam mutato. Nuper repertum oleas gaudere maxime cinere e calcariis fornacibus.) 4 Varro præceptis adicit equino, quod sit levissimum, segetes alendi, prata vero graviore et quod ex hordeo fiat multasque gignat herbas. Quidam etiam bubulo iumentorum præferunt ovillumque caprino, omnibus vero asininum, quoniam lentissime mandant. E contrario usus adversus utrumque pronuntiat. Inter omnes autem constat nihil esse utilius lupini segete, priusquam siliquetur, aratro vel bidentibus versa manipulisve desectæ circa radices arborum ac vitium obrutis. Et ubi non sit pecus, culmo ipso vel etiam felice stercorare arbitrantur. 5 Cato : Stercus unde facias, stramenta, lupinum, paleas, fabalia ac frondis iligneam querneam. Ex segete evellito ebulum, cicutam et circum salicta herbam altam ulvamque. Eam substernito ovibus, bubusque frondem putidam. Vinea si macra erit, sarmenta sua comburito et indidem inarato : Itemque ubi saturus eris frumentum, oves ibi delectato.

VII.

Nec non et satis quibusdam ipsis pasci terram dicit : segetem stercorant fruges : lupinum, faba, vicia ; sicut e contrario : cicer, quia vellitur et quia salsum est, hordeum, fenum Græcum, ervum, hæc omnia segetem exurunt, D LIVRE

qu’ou arrache. Ne sem : pas des noyaux dans la terre à ble. s Vlrglle (Géorg., 1, 77) pense que la terre a blé est brûlée aussi par le llu, l’avolue et le pavot.

1 VIII. On recommande de placer les tas de fumler eu plelu alr, dans un creux qui recueille les liquides, de les couvrir de pallle pour que le soleil ne les dessèche-pas, et d’y fleber un pieu en bols de rouvre, prócautlou qui empêche les serpents de s’y engendrer. Il importe beaucoup de meter le fumler à la terre pendaut que souffle le Favonlus, et par une lune sèche. La plupart comprennent mal ce préecpte, pensant que cette opératlou dolt se faire au lever du Favouius, et seule meut au mols de février ; cependant la plupart des semences demandent à être fumées eu d’autres mois. Quelle que solt l’époque ou l’ou fume, ll faut cholslr le moment ou le vent souffle du cou. cher équluoxlal, ou la lune décrolt et est sèche. Une telle précaution augmeute d’une façon merveilleuse les effets fertilisants du fumier.

IX. (x.) Ayaut traité suffisamment des conditions du clel et de la terre, uous, alloue parler de ces arbres que font ualtre les solus et l’industrie de l’homme. Et ils ne sout guère molns nombreux que ceux que produit la uature (xvi, ss), taut nous avons payé avec générosité ses blenfaltsl Ou produit ces arbres ou de gralue, ou de plaut, ou de provlns, ou de rejetons, ou de scions, ou de greffe, ou d’eute. Quaut au prétendu procédé uslté ches les Babylouleus, de semer des feuilles de palmier qui donnent naissance à l’arbre, je m’élonne que Trogue Pompée y alt cru. Quelques arbres se reproduis eut par plusieurs des opérations énumérées, quelques autres par toutes. 1 X. C’est la nature qui aenselgné la plupart, el d’abord l’al’l de semer, car ou voyalt germer la el omnia qua : velluutur : uucleos lu segetem ueludideris. Vlrgillus et llno segetem exuri, et avena, et papavere arbilratur.

1 VIII. Fimeta suhdlo concave loco, et qui humorem colligat, stramentolutecla, ne in sole arescant, pale e robore depacto fieri jubeut : Ita fere ne lunascautur his aerpeules. Fimum mlscere terne, plurimum refert Favonio llaute, ac luna sitiente. Id plerique prave lntelllguut a Favonii ortu laeiendum, ac lebruario meuse tautum : quum id pleraque sata afils postulent mensihus. Quœumque tempore lacere llbeat, curaudum ut ah occasu œqulnoctiali llanle vente flat, lunaque decresceute ac slcea. Mirum in modpm angetur uberta’s elïectusque eius observations tali.

1 IX. (x.) Abunde prœdicta ratione oleli se terrœ, uuue de his arborihus dlclmns, quœ cura bomluum atque srle provenluut. Nec pauciora prope sunt générs : tam benigue natures gratiam relulimus. Autenim semlue proveniuut, aut plautis radicls, aut pmpsglne, aut avulsion, aut suroulo, aut lusito et consecto arboris trunco. Nam felia palmarum apud Babylonlos scri, stquelta arborem pmveuire, Trogum credldisse demiror. Quledam autem pluribus générlbus seruutur, quœdam omnlbus.

XVII. — M1

grsiue tombée et reçue par la terre. Quelques arbres ne sont pas susceptlblesde venlr autrement, par exemple les chåtalgnlers, les noyers. Nous exceptons les taifils, qui repousse ut du pled. Des arbres qui peuvent aussi se rsprodulre par d’autres moyeus, la vigne, le pommier, le polrler, se reprodulseut par la graine, quolque cette gralue

solt différente : eu effet, lls ont pour gralue le noyau, et uon, comme les précédents, le fruit lulmême. Les néfliers peuveut aussi veulr de gralue. Tous ces arbres, alnsl semú, poussent lestement, dègénérent, et ll faut les régénérer par la greffe. Le cbåtalgnler même a quelquefois besoiu d’être greffé..

Xl. Au contraire, quelques arbres ont la pro- I priété de ne pas dégénérer, de quelque maulère qu’on les reproduise, le cyprès, le palmler (1), le laurier. Le laurier eu effetse reproduit de plusieurs manières. Nous eu avons ludlqué les espèces (xv, 89). Le laurler auguste, le laurler baccalis, le laurier-tlu, se semeut de la mômemanlere : les baies se cueillent au mois de jauvler, quand le veut du uord-est les a dessécbóes ; ou les expose a l’alr en les écartant les unes des autres, de peur que, en tas, elles ne s’échauffent ; puls, préparées dans du fumier pour Pensemencement, ou les humccte avec de l’urlue. D’autres foulent avec les pieds, dans une eau couraute, les baies mlsesen des paulers d’osler, jusqu’à ce que la peau s’en aille, autre meut, l’bumldile qu’elles renferment devient préjudlclable, el les empéche de lever. Ou 2 défonce le champ, el dans un trou profond d’un palme on les met par tas de vlugt euvlron, pendaut le mols de mars. Cesespèces de lauriers vienuent aussi de provlns. Le laurier triomphal (xv, 89) ne vient que de sclou. Toutes les espèces de myrte (xv, 87) vienneut eu Campanie de gralue 5 X. Ac pleraque ex his lpsa natura docult. et lu primis l semen serere, quum décidens exceptumque terra vivesceret. Sed quœdam non allter proveuiunt, ut castaneae, juglaudes : excduis dumtaxat exceptls. Ex semiue autem, quanquam dlssimili, ea quoque, qua : et aliis modls serllntur : nt vltes, et mala, alque pira. Namque lis pre semine nucleus, uen ut supra dlctis lructus lpse. Et mesplla semine uasci possunt. Omula hœc tarda preveutn, ac degeuerautia, et lusito restilueuda. Iuterdum etiam castanem. XI. Qulhusdam natura coutra omulue uou degénéraudl, I quequo mode serantur : ut cupressis, palmis, laurls : uamque et laurus pluribus modis seritur. Genere ejns dlximus. Ex hls Augusta, et baccalis, et tluus, slmill mode seruutur. Baceœ meuse ianuario, Aquilouis afllatu siccalœ leguutur, expauduuturque rarœ, ne caleliaut acerve. Postca quldam lime ad satum prœparatas, urina madefaeiunt. Alll in quale pedihus ln prolluente decu !cant, donec auferalur cutls. Alloquin uligo Iufestat, uec 2 patitur nasei. lu sulco repastinato palmialtitudiue vicenœ fere acervatim meuse martle : cadem et pro pagine seruntur ; triumphalisque talcs tantum. Myrtl généra omnia in Campanie baccis seruntur, Romœ pro pagine Tarentiua. Democrituset allo modo seri docel, grandisslmls bucca