Histoire maccaronique/4
esja la corpulence de Balde commençoit fort à s’accroistre,
et ses membres s’estendoyent grandement,
tellement qu’il avoit cinq brasses de haut, les espaules
larges, et la poitrine relevée, le foye du corps serré, les
jambes nerveuses, le pied petit, les reins fermes, et estoit
droit au marcher ; le pas si legier, qu’il n’eust pas esté
bien aisé d’en remarquer le vestige sur du sablon. Il
avoit l’œil vif, et tousjours prompt à regarder çà et là,
brillant comme fait le soleil quand il donne sur un miroir.
Il n’avoit encores gueres de barbe, et n’en avoit le
poil rude ; mais seulement avoit une moustache sur la
levre de dessus d’environ trente petits poils ressemblant
à de la laine, ayant ceste levre un peu plus eslevée que
celle de dessoubs, qui le denotoit devoir estre quelque
jour plus sage. Or, parce qu’il n’avoit point en cet aage
aucun maistre pour l’instruire, il n’avoit pour compagnons
que des ruffiens, des bravaches, des coureurs, des guetteurs
de chemins, et certains bons vautneans, qu’on appelloit
fendeurs de nazeaux, et machefers. Avec telles
gens Balde vivoit plus aise qu’un pourceau à l’auge, l’aage
transportant ceste jeunesse hors les bornes de raison,
comme un poulain qui n’a encore gousté en l’estable que
c’est d’un licol. Car ces poulains-cy desbauchez, pendant Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/123 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/124 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/125 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/126 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/127 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/128 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/129 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/130 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/131 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/132 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/133 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/134 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/135 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/136 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/137 Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/138 leur fierté domptée par le chartier. Tousjours seroit indompté
le poulain, s’il n’avoit un escuyer, qui le domptast.
L’espervier s’apprend à revenir sur le poing, avec un
petit poulet. Ainsi seroit de Balde, lequel est venu d’une
très-noble lignée. Mais j’en voy plusieurs de vous autres
secouer la teste, et tourner le nez de costé. Je cognois
bien maintenant les pensées, qui sont en vostre courage.
Je ne veux point jetter davantage mes paroles au vent.
Ha ! que suis marry de ce que comme à vieil bœuf le
pennon me pend si bas maintenant pour l’aage que j’ay !
Je n’ay point faute de courage, je le confesse : mais ma
force s’en est volée. Ayant mis fin ainsi à son dire, il se
retira tout furieux en sa maison, et au bout de trois jours,
estant outré de trop ennuy, rendit l’esprit. Aucuns ont
eu soupçon que, par menée de Gaioffe, il fut empoisonné
par le Médecin, qui le medicamentoit. Or reposons-nous
un peu, ma Gose, avant que ce qui s’ensuit me fasse suer.
en chemise.