Histoire générale du féminisme (Abensour)/Fronde

LA FRONDE ET LE FÉMINISME


Politiciennes et générales. — Le Stuart Mill du dix-septième siècle. — L’aurore du féminisme anglais.

La femme du dix-septième siècle ! De suite nous évoquons Mme de Sévigné, belle et rayonnant d’une grâce tranquille, ou la hautaine Mme de Montespan, ou la jolie Fontanges, promenant, devant la noble façade de Versailles et les architectures de feuillage et d’eaux, leurs pompeux atours. Celles-là sont les reines du monde et, contentes de leur brillante destinée, n’aspirent à rien au delà. Comme au siècle précédent, pourtant, parfois les femmes furent autre chose que des femmes de cour ; et parfois des écrivains des deux sexes, mais surtout, il faut le dire, du sexe fort, frappés des capacités qu’elles surent si souvent déployer, revendiquèrent pour elles un rôle plus vaste et de nouveaux droits.

Politiciennes et générales. — Si du règne du grand roi, bien différent de celui de ses successeurs et de ses devanciers, la politique féminine est bannie, il n’en est pas de même des années qui ont précédé le glorieux avènement. Marie de Médicis, Anne d’Autriche, deux régences, donc deux gouvernements féminins.

De 1610 à 1624, de 1643 à 1652, c’est bien l’influence féminine, celle de la reine, celle de ses favorites, celle de ses amies qui domine à la cour. « Tous les plus grands événements de l’histoire de France, dit un vieil écrivain, sont dus à l’influence des femmes de la cour. » Mézeray évidemment exagère… Mais, pour rester dans la note vraie, consultons un contemporain bien informé et qui eut parfois à se louer, souvent à se plaindre de l’ingérence féminine dans la politique, le cardinal Mazarin : « En France, toutes les femmes sont férues de politique plus qu’en aucun autre pays. Vos femmes, dit-il à un ambassadeur d’Espagne, ne songent qu’à plaire à leurs maris ou à leurs galants… Les nôtres, soit prudes, soit galantes, soit jeunes, sottes et habiles, veulent se mêler de toutes sortes de choses. Une femme de bien ne… « dirait pas de tendresses » à son mari, ni une coquette à son galant, s’ils ne leur avaient parlé ce jour-là d’affaires d’État. Elles veulent tout voir, tout connaître, tout savoir et, qui pis est, tout faire et tout brouiller… Nous en avons, entre autres, qui mettent plus de confusion qu’il n’y en eut jamais en Babylone. »

Que la boutade du cardinal contienne une grande part de vérité, les événements, amplement, l’ont démontré. Pendant ces années, brillantes et d’ailleurs stériles, où ressuscite avec toute sa force, toute sa vigueur l’esprit féodal, pas de grande dame, en effet, qui ne se sente l’âme d’un ambassadeur, d’un tribun du peuple, d’un ministre, d’un général en chef. Et leurs prétentions, leurs espoirs, ne sont pas toujours injustifiés. Les politiciennes de l’époque ne le cèdent de beaucoup, ni par leur activité, ni par la grandeur de leur rôle, aux politiciens. Sans doute ce sont des hommes, Condé, Retz, Mazarin, qui dirigent — et à leur profit — les événements. Mais combien de fois sans l’aide des femmes leurs plans eussent échoué !

Lorsque, au début de 1651, Mazarin a fait emprisonner Condé, c’est sa femme qui va soulever la révolte à Bordeaux, elle qui, par une éloquence sans apprêt, attire à cause les magistrats de Guyenne. Mme de Longueville, sœur du vainqueur de Rocroi, fait mieux. Elle gagne, après vingt aventures romanesques, les Pays-Bas espagnols, y signe elle-même un traité d’alliance avec le représentant de Sa Majesté catholique, et, non sans avoir, d’un seul regard bleu, gagné Turenne, entraîne sur Paris une armée. La duchesse de Chevreuse est le pivot de toutes les intrigues qui, d’un bout à l’autre de la France, se nouent et se dénouent pendant dix ans pour et contre le cardinal. Elle a suscité la cabale des Importants, permis à Mazarin l’arrestation de Condé en détachant de lui Paul de Gondi et le Parlement ; retourné la situation en raccommodant ce qu’elle avait brouillé et, en négociant l’union de la Fronde bourgeoise et de la Fronde des Princes, chassé Mazarin de Paris, contribué enfin au retour du cardinal en lui rendant son amitié et son appui. Maint caméléon politique pourrait se réclamer de la belle duchesse.

Mlle de Montpensier, dont la gravure a popularisé les attitudes guerrières, fut vraiment, pendant quelques mois au moins, un chef de parti. C’est elle qui, brave pour deux, et tandis que son père grelotte au Luxembourg d’une fièvre feinte, va secourir Orléans menacé ; la voici rentrant, par la brèche, dans la capitale de l’apanage familial, tandis que ses sémillantes officières, Mmes de Fiesque et de Frontenac, charment les bateliers de la Loire ; la voici haranguant avec éloquence la foule orléanaise et la ramenant facilement dans l’obédience de Gaston ; présidant le conseil de guerre et passant en revue les régiments frondeurs ; la voici, plus tard, vraie reine de Paris, de ce Paris dont le coup de canon historique ferme la porte aux troupes royales et l’ouvre à Condé. Sans doute, chez elle, aucune politique précise, et le seul désir de jouer aux héroïnes cornéliennes, mais une énergie, une intrépidité, un esprit de décision vraiment masculins.

Plaçons encore, à côté de ces premiers rôles, une Mlle Gerbier, cette jolie jeune fille qui fut à dix-huit ans chef d’état-major de l’armée de la princesse de Condé, cette princesse palatine qui fut pendant dix ans la cheville ouvrière de toutes les intrigues, cette maréchale de Guébriant que ses talents, et non les services exceptionnels de son mari, firent nommer ambassadeur en Pologne et qui sut, avec une vigueur et une habileté surprenantes, soutenir à Varsovie le prestige et les intérêts de la France avant de chevaucher, elle aussi, dans la guerre civile pour le compte du roi ; et remémorons-nous encore ces Précieuses qui ne furent pas toutes ridicules et qui, jalouses de ramener à Paris le brillant et la douceur de vivre du siècle des Valois, polirent à la fois la langue et les mœurs françaises, courbèrent sous la puissance d’Éros les rudes sabreurs, tracèrent la carte du Tendre et, créant, avec la psychologie amoureuse, l’esprit de conversation, marquèrent pour deux siècles notre littérature de leur puissante empreinte ; nous reconnaîtrons que les femmes, législatrices des bienséances et reines de la république des lettres, politiciennes consommées, parfois générales, ambassadrices, tribuns, et parfaitement indépendantes en fait de leurs pères ou de leurs maris, ont, en ce siècle encore, réalisé sans le chercher les principaux articles du catéchisme féministe.

Le féminisme au dix-septième siècle : Poulain de la Barre. — Quelques-unes, et c’est d’ailleurs le petit nombre, passent à la théorie. Mlle de Montpensier gémit sur la servitude où l’institution du mariage, œuvre de la tyrannie des hommes, tient le sexe féminin. Et elle rêve d’une Thébaïde où, unis par les seuls liens de l’amitié, hommes et femmes vivraient affranchis de ces dures chaînes. « Qu’il y ait, s’écrie-t-elle, un endroit au moins dans le monde où les femmes cessent d’être esclaves ! »

Mlle de Scudéry d’autre part, si ennemie qu’elle soit des femmes savantes ne peut s’empêcher de s’élever contre l’absurde éducation communément donnée aux femmes. « Elles emploient, dit-elle, dix ans de leur vie à l’art de la danse qu’elles exerceront à peine quelques années. Mais elles auraient besoin toute leur vie d’être intelligentes et vertueuses. Et qui s’occupe de leur former le cœur et l’esprit ?… »

« L’infériorité des femmes ! s’écrie le chevalier Pierre de l’Escale, champion du beau sexe et qui, en réponse aux diatribes d’un farouche misogyne, oppose à l’Alphabet de l’imperfection du sexe l’Alphabet de la perfection[1], mais elle vient de l’inégalité d’éducation. Les hommes fréquentent les collèges, les universités et, par des voyages, forment leur jeunesse… les femmes ne bougent de chez elles, non plus que tortues. Étonnons-nous donc qu’elles soient moins instruites que nous ! »

Innombrables d’ailleurs sont, au début du dix-septième siècle, en cette époque qui vit surgir tant de hautes individualités féminines, les panégyriques des femmes, innombrables les écrivains des deux sexes qui s’amusent à prouver la supériorité de la femme sur l’homme.

Et ceci ne peut être que jeu littéraire. Comment prendrait-on au sérieux de si évidents paradoxes, et quelle conclusion pratique en tirer ? Aucune, évidemment, si ce n’est que les adversaires du sexe sont des cuistres grossiers, qui d’ailleurs renvoient la balle à leurs contradicteurs.

Mais voici deux esprits très modernes, bien inégaux d’ailleurs d’envergure, et qui posent avec netteté le problème féminin : une disciple de Montaigne, un disciple de Descartes.

Fille d’alliance de notre grand et charmant sceptique, auquel elle ressemble si peu, masculine d’esprit et de manières, pédante et pétrie de vanité, mais douée d’une assez robuste intelligence, Mlle de Gournay écrit, en 1622, son traité de l’Égalité des Hommes et des Femmes, œuvre originale par sa méthode et sa forme, si l’on fait abstraction de la Cité des Dames de Christine de Pisan, que sans doute elle ignorait.

Comment va-t-elle démontrer l’égalité des sexes ? Par des exemples tirés de l’histoire sacrée et profane, par le témoignage des Écritures, des Pères de l’Église et des historiens anciens ? Sans doute, puisque telle est la mode de son temps. Mais bien plutôt elle s’appuiera sur le témoignage qu’offrent les vieilles institutions féodales et sur l’observation de la vie quotidienne.

Les pairesses qui siégèrent au Parlement et surent conduire leur fief, les régentes, sans lesquelles si souvent « l’État eût été par terre », voilà les avocats les plus éloquents, les plus persuasifs de l’égalité des sexes. Que souvent les femmes soient inférieures aux hommes, Montaigne l’a dit et Mlle de Gournay ne reniera pas son père spirituel. Mais s’il en est ainsi, c’est que les femmes sont peu ou mal instruites. Une réforme dans l’éducation ramènera la femme à sa juste place. Et cette place doit être très grande : la femme peut étudier les belles-lettres, s’adonner aux sciences, mieux enseigner lettres et sciences ; le sacerdoce même ni la politique ne lui devraient être interdits. En un mot, nulle différence de nature ni d’aptitude entre l’homme et la femme. Car Dieu a créé l’être humain, homme et femme, et l’un comme l’autre concourent également à la réalisation de ses desseins.

Nous sommes en 1622 ; Mlle de Gournay, ayant posé les principes, ne les développe qu’à demi et ne pousse pas la théorie féministe jusqu’à ses dernières conséquences. Mais arrive Descartes qui enseigne à n’accepter pour vrai que ce que la raison a démontré tel, et donc à démolir tous les préjugés. Et après avoir observé Précieuses et Frondeuses, après avoir admiré Mlle de Montpensier, — qui semble par son exemple l’inspiratrice de ses ouvrages, — un disciple de Descartes, Poulain de la Barre, fait du féminisme l’exposé le plus logique, le plus net et le plus complet qui ait jusqu’ici apparu, — et qui même doive apparaître, — dans les deux traités de l’Égalité des Sexes et de l’Éducation des Dames. Ouvrages qui, aux jours où le féminisme aura triomphé, seront des classiques au même titre que, dans une démocratie, l’Esprit des Lois et le Contrat social.

Poulain de la Barre, lui, rejette délibérément le fatras d’histoires et de légendes sur lequel les apologistes du sexe étayent leurs puériles démonstrations. Son seul guide, sa seule lumière, c’est la raison, la raison souveraine ; sa seule base, l’observation des faits.

Or, que nous démontre la raison ? Qu’une idée, pour universelle qu’elle soit, peut néanmoins être fausse et ne pas se justifier en droit.

Il en est ainsi du préjugé des sexes. Car, en réalité, l’analyse la plus exacte du cerveau ne nous fait apercevoir aucune différence entre celui de l’homme et celui de la femme. L’un et l’autre sont aptes à saisir la vérité ; donc l’un et l’autre ont droit à la vérité, droit à la science. Ce n’est pas, certes, Poulain de la Barre qui prendrait pour cible de ses plaisanteries les femmes savantes. Car il consacre tout un ouvrage à démontrer que les femmes doivent apprendre géométrie, physique, philosophie, théologie et que, tout comme les hommes, elles y doivent réussir. « Ainsi, dit Poulain de la Barre, les deux Sexes sont égaux devant les lumières. » Mais à quoi vont servir aux femmes ces lumières ? À élever leur cœur, à orner leur esprit ? Certes, et c’est là — puisque enfin l’auteur s’adresse à des femmes nobles, à de riches bourgeoises dégagées de toute préoccupation matérielle — le but essentiel. Mais qui les empêche de se servir, et de leurs éminentes aptitudes, et des connaissances acquises « pour la conduite des autres » ? Et voilà Poulain de la Barre qui, abandonnant la théorie, se lance, avec une logique rigoureuse et convaincante, sur le terrain de fort précises revendications. Les femmes ? mais elles doivent être, par leur patience, par la clarté de leur esprit, des professeurs remarquables. Que, faisant litière d’un préjugé absurde, on les revête du bonnet de docteur et qu’elles enseignent dans les collèges et les Universités… Leur douceur, leur propreté, leur vigilance font d’elles les gardes-malades idéales. Qui empêcherait qu’elles fussent médecins ? La subtilité de leur esprit, leur aptitude à saisir les vérités les plus abstruses, les raisonnements les plus délicats pourront faire d’elles des flambeaux de la théologie et, pourquoi pas ? des prêtresses. Car « la foi leur est commune avec nous, et les promesses de l’Évangile ne s’adressent pas moins à elles qu’à nous ».

Science et subtilité, voilà qualités suffisantes pour exercer « les charges de judicature » ; rien n’empêche les femmes d’être avocat et magistrat.

Enfin, « il ne faut pas plus d’application pour la conduite d’un royaume que les femmes n’en ont pour leur ménage et les religieuses pour leur couvent », donc vivent les femmes « vice-reines, secrétaires d’État, conseillers d’État, intendantes de finances, gouvernantes de province » ! Leur administration sera plus habile que celle des hommes, leur gouvernement plus doux.

Sans doute, à faire cette brève analyse, semble-t-on écrire la Perrette et le Pot au lait du féminisme ; mais Poulain de la Barre ne semble-t-il pas, dans une géniale prescience, avoir aperçu ces États d’Amérique et d’Australasie où la femme est en effet ministre, avocat, magistrat, pasteur, théologien ! En ce domaine, comme en tant d’autres, l’utopique anticipation est devenue réalité.

Sans doute, les livres de Poulain de la Barre, venus trop tôt dans un monde trop jeune, n’éveillent-ils pas de puissants échos. N’importe, les idées féministes sont déjà répandues, assez pour qu’un auteur comique les prenne pour thème d’une de ses pièces.

Au même moment où Molière satirise la prétention des femmes au beau langage et à la haute culture scientifique, Chappuzeau se moque de leurs aspirations à l’indépendance. « Vous êtes plus forts que nous, dit, dans le Cercle des Femmes, l’affriolante veuve Emilie à un barbon qui la courtise. La belle affaire ! les chameaux, il me semble, ont encore, à ce point de vue, un grand avantage sur vous. » Et réunissant, telle Lysistrata, une assemblée féminine, elle demande qu’un conseil souverain de femmes soit chargé, non seulement de légiférer sur la mode et de ramener en de justes bornes le luxe effréné des nouvelles riches, mais encore de trancher toutes les questions relatives aux intérêts et au bonheur du sexe féminin. Nous devons gagner sur les hommes les fonctions publiques, ajoute-t-elle, sauf, bien entendu, celles qui exigent l’épée.

Une comédie comme celle de Chappuzeau est une preuve que, dans la bourgeoisie même, le féminisme gagnait du terrain. Cependant, le féminisme théorique et pratique, qui au milieu du dix-septième siècle semblait prêt à rallier sous ses bannières l’élite française[2], brusquement s’éclipse. Pendant une cinquantaine d’années, on n’entendra que la voix des détracteurs du beau sexe : Boileau qui renouvelle contre les femmes la satire de Juvénal, Molière qui crible Précieuses et femmes savantes de ses traits les plus mordants, La Rochefoucauld, Saint-Évremond qui montrent la femme mue par les sens plus que par l’intelligence, par le cœur plus que par l’esprit et, comme les modernes psychologues, la voient capricieuse, inquiétante et déraisonnable. À l’épopée cornélienne, qui montre des héroïnes se haussant par la volonté, la maîtrise de soi, an niveau des politiques et des guerriers, théâtre féministe celui-ci et qui contribue à influencer bien des frondeuses, est substituée la racinienne élégie, où la femme, se laissant aller sans résistance aux impulsions de sa nature, n’est plus qu’un être illogique et passionné. Nulle femme d’ailleurs ne proteste. C’est que, quelle que soit l’idée que l’on se fasse de la nature féminine, la femme, la femme noble, la seule qui compte, est toujours la reine de la société. Pour elle, Versailles, ses bosquets harmonieusement taillés, ses cabinets de verdure et ses parterres d’eau, pour elle ces fêtes où le roi lui-même apparaît comme le jeune dieu de la danse, pour elle les chefs-d’œuvre des beaux esprits dont elle fait et défait la réputation, et qui leur portent leurs œuvres comme aux arbitres suprêmes du bon goût. Pourquoi ne se contenteraient-elles pas, quand l’homme travaille pour elles, de moissonner les plus belles fleurs, de cueillir les plus beaux fruits d’une civilisation ? et pourquoi demanderaient-elles l’égalité alors qu’elles sont souveraines… ? D’ailleurs le règne de Louis XIV, où triomphent l’ordre, la règle et dans l’État, le pouvoir d’un seul, est évidemment défavorable à toute manifestation d’indépendance féminine qui, remettant en question la puissance du mari dans la famille, la suprématie théorique des hommes dans la société, semblerait bouleverser l’ordre politique et religieux, menacer dangereusement le trône et l’autel.

Donc, pendant une cinquantaine d’années au moins, éclipse totale du mouvement féministe. Il en sera de même après les grandes espérances révolutionnaires et, pour des raisons semblables, sous Napoléon Ier.

Tandis qu’en France le féminisme s’estompe, il point en Angleterre et en Allemagne : Mary Astell écrit sa Sérieuse Proposition aux Femmes et sa Défense des Femmes, et, sans réclamer encore pour elles les droits politiques, les veut instruites comme l’homme et pourvues dans la famille d’un droit égal, dans la société d’une égale considération. Marie de Schurmann, érudite dont d’autres érudits saluèrent dans toute l’Europe le génie, donne une preuve éclatante de la possibilité pour la femme d’aborder sans faiblir les études les plus ardues. Daniel de Foë se demande si vraiment Dieu a donné à la femme une âme pour en faire « une femme de ménage, une cuisinière, une esclave » ; rompant à l’avance le dilemme proudhonien, il veut que la femme s’élève par les travaux de l’esprit et projette de former une académie féminine.

D’ailleurs les femmes auteurs foisonnent sur les rives de la Tamise. Quant aux petits États de l’Allemagne, ils laissent volontiers les femmes professer dans leurs universités. Pratique qui aidera puissamment les théories.



  1. Forme littéraire en usage au début du dix-septième siècle.

    L’un démontre que les femmes sont Avares, Bavardes, Méchantes, Querelleuses ; l’autre qu’elles sont Bonnes, Chastes, Fidèles, Prudentes.

  2. Les apologies du beau sexe étaient nombreuses ; non seulement à Paris, mais en province des hommes, des femmes, des jeunes filles en rédigeaient.