Histoire des Canadiens-français, Tome VII/Chapitre 8

Wilson & Cie (VIIp. 93-108).

CHAPITRE VIII


1753-60


Résumé de la guerre de Sept Ans. — Capitulations de Québec et de Montréal.

F
rédéric de Prusse ayant voulu enlever à Marie-Thérèse d’Autriche la province de Silésie, le roi de France se prononça en faveur de l’Autriche et, durant huit huit années (1741-1748) on se massacra en Europe et en Amérique avec le plus parfait enthousiasme. Les troupes de France, échelonnées depuis les grands lacs jusqu’à Québec ne dépassaient pas mille hommes. La garnison de Louisbourg était de sept à huit cents soldats. Le gouverneur fit appel aux Canadiens, et ceux-ci prirent les armes qu’il ne devaient déposer que dix-sept ans plus tard (1744-1760). Il est vrai que par le traité d’Aix-la-Chapelle (1748) les puissances cessèrent un moment la lutte, mais de ce côté ici de l’océan, il n’y eu qu’une paix indécise, assez souvent interrompue, par des marches et des contremarches militaires. Dès 1752, nous faisions nos préparatifs pour une grande guerre, voyant que les Anglais mettaient toute leur habileté à s’emparer de l’Amérique.

La monnaie de carte était préférée aux « ordonnances » parce que, dans les réductions sur les lettres de change, les cartes n’étaient pas comprises. Ces réductions avaient lieu lorsque la dépense du roi en Canada était extraordinaire et la valeur des papiers portés au trésor plus élevée que le crédit ouvert par le ministre chez les trésoriers des colonies. Alors la valeur des cartes se payait toute entière en lettres de change et la réduction ne tombait que sur les « ordonnances. » La réduction était remboursée aux particuliers en cartes, pour lesquelles on donnait ensuite des lettres de change. Ce système d’attente et d’imprévu profitait aux usuriers. En 1753, les dépenses de la colonie ayant augmenté de beaucoup, on décida de ne plus payer en entier la monnaie de carte, dernière ressource financière des habitants. Les cartes présentées en 1754 furent payées par des lettres de change remboursables en trois ans. Les marchandises augmentèrent de quinze à vingt par cent, et la main d’œuvre à proportion. Cet expédient se continua jusqu’à la perte du pays, allant de pire en pire. Avant 1754, il y avait pour un million de francs de monnaie de carte, à part les billets, d’ordonnances.

Le baron Dieskau arriva au commencement de l’été de 1755, avec deux mille hommes de troupes, après en avoir laissé mille à Louisbourg. Le marquis de Vaudreuil, ancien gouverneur de la Louisiane, venait en même temps remplacer le marquis Duquesne à la tête des affaires du Canada. La milice était prête, placée sur la frontière et dans les garnisons, au nombre de cinq mille hommes. (La population était de cinquante-cinq mille âmes). Elle remporta, au mois de juillet, la victoire de la Monongahela. Quelques semaines plus tard, le baron Dieskau, repoussé, blessé et fait prisonnier, au lac Saint-Sacrement, apprenait, comme le malheureux Braddock, que la guerre d’Amérique ne se conduit point à la façon de l’Europe, et que nos miliciens en savaient plus long que lui sur toutes ces choses. Déjà, on voyait naître entre les troupes du pays et celles de France une jalousie trop encouragée par les officiers. L’intendant écrivait, l’automne de cette année, pour demander des secours en hommes et en argent. Ce sont, disait-il, « les Canadiens qui font la plus grande partie de l’armée, sans compter mille à douze cents occupés aux transports. Les Canadiens ainsi employés à l’armée ne travaillent point à la culture des champs et ils sont loin de défricher de nouvelles terres. Tout manque, principalement le blé. Il est mort un grand nombre de Canadiens par suite de la fatigue et des maladies. »

« Le lard salé, dit un mémoire du temps, qui valait originairement, c’est-à-dire avant 1755, quinze sous la livre, a valu dans la suite jusqu’à six francs. Un chapeau de laine, des plus communs, qui vaut quarante sous en France, s’est vendu quarante et cinquante francs, et les autres marchandises en proportion. »

L’été de 1755, trois vaisseaux français, le Lys, l’Alcide et l’Espérance, surpris par les Anglais tombèrent au pouvoir de ceux-ci. De fortes sommes d’argent destinées au Canada furent enlevées avec ces navires. Avant l’arrivée des troupes, il y avait très peu d’espèces dans la colonie ; ce qui en paraissait était répandu par les officiers des vaisseaux du roi et les navires marchands, mais les particuliers l’enlevaient aussitôt au commerce pour en faire de la vaisselle ou le renfermaient pour ne plus le montrer. La monnaie de carte se trouva dépréciée. On donnait sept francs de papier pour six francs de numéraire.

La guerre n’était pas encore déclarée officiellement. Elle soulevait en Angleterre beaucoup d’enthousiasme. La chambre des communes vota un million sterling et Pitt traita avec certains princes allemands pour obtenir des troupes. La population des colonies anglaises, qui s’élevait à douze cent mille âmes, partageait cette ardeur. En bref, la situation était celle-ci : le nombre de bras, les ressources de tous genres étaient du côté des Anglais. Notre mère-patrie se refroidissait au sujet du Canada ; l’Angleterre adoptait décidément l’idée de conquérir l’Amérique.

Des bâtiments envoyés au secours des Acadiens amenèrent un grand nombre de ces infortunés. Leur présence empira la situation. On les nourrit du peu que l’on possédait : quelques onces de pain et de la viande de cheval. Ils se dispersèrent dans les trois gouvernements du pays, où leurs descendants se retrouvent encore aujoud’hui. Plusieurs s’incorporèrent à la milice et servirent avec un parfait dévouement jusqu’à la fin de la guerre.

Vers le milieu de mai 1756, le marquis de Montcalm arriva de France avec deux bataillons réguliers et quatre cents recrues. Il apportait aussi des vivres et un million quatre cent mille francs de numéraire. Ce renfort permit à M. de Vaudreuil d’exécuter le projet qu’il avait conçu de prendre et raser Oswégo (Chouegen) et, en dépit de l’opposition de M. de Montcalm, il ordonna de marcher contre cette forteresse. L’attaque qui décida de la victoire des Français fut préparée et faite par les Canadiens sous la conduite de Rigaud de Vaudreuil, frère du gouverneur. Montcalm ne revenait pas de sa surprise en se voyant victorieux là où il avait pensé être battu ou tout au moins repoussé. Le soir de cette journée mémorable, il écrivit au ministre que les choses s’étaient passées si étrangement pour un militaire habitué au service, que si Sa Majesté voulait bien continuer à lui accorder sa confiance il promettait de ne plus rien entreprendre d’aussi complètement hors des règles du métier. Comme Braddock, Dieskau et Abercromby, il ne cachait pas son mépris pour les milices et ne pouvait se persuader qu’il y eut une autre manière de combattre que celle des Européens. Le marquis de Vaudreuil adressant des éloges aux Canadiens, agaçait les nerfs de M. de Montcalm qui le témoigne assez par ses lettres. Les troupes françaises partageaient cette jalousie de leur chef, parce qu’elles se croyaient supérieures en savoir et en bravoure aux humbles milices. La vérité est que celles-ci composaient la meilleure armée du Canada. Les troupes du roi réunies ne dépassaient point deux mille cinq cents hommes en ce moment ; elles étaient totalement ignorantes de la guerre telle que pratiquée en Amérique.

Les dépenses du Canada augmentaient et les ministres se récriaient. En 1756, la colonie devait au roi quatorze millions ; l’exercice de 1757 allait en absorber sept autres. On parlait bien de vols, de malversations — sans toutefois rechercher les coupables qui étaient connus pour être des favoris de l’entourage de Louis XV. Il fallut se résoudre à envoyer (1757) quelques vivres et des munitions. Montcalm qui, dès son débarquement, avait jugé la colonie perdue irrémédiablement, ne songeait plus qu’à opposer à l’ennemi une résistance glorieuse et sans espoir. Dans le cours de l’été, il arriva de France, par détachements, quinze cents soldats ; Vaudreuil en avait demandé cinq mille. Au mois d’août Montcalm enleva le fort de William-Henry. Les milices qui formaient la moitié des assiégeants, s’y distinguèrent sous les ordres de Rigaud de Vaudreuil.

La disette prenait des proportions alarmantes. Les troupes régulières demandaient du pain et refusaient de servir. On voyait des hommes tomber de faiblesse dans les rues par défaut de nourriture. Le gouverneur écrivait au ministre que les habitants n’avaient plus ni farine, ni lard, ayant tout donné aux troupes. À Paris, le maréchal de Belle-Isle proposait d’envoyer au Canada un corps de quatre mille hommes qu’il avait sous la main et qui voulaient servir en Amérique, puis se faire colons. Le ministre répondit que le transport de ces troupes coûterait trop cher. Qui ne connait les épouvantables gaspillages d’argent dont Louis XV et ses favoris se sont rendus coupables !

Il n’arriva que trois ou quatre cents recrues durant la saison de navigation de 1758, avec douze mille barils de farine. C’était le moment où les troupes anglaises, plus nombreuses que jamais, se rapprochaient de nos frontières sur plusieurs points et allaient tenter un effort, suprême pour écraser le Canada. La rencontre de Montcalm et d’Abercromby à Carillon (8 août 1758) procura aux Français une victoire tellement éclatante que tout le plan d’invasion se trouva arrêté. Dans cette lutte où l’ennemi s’était vu cinq fois supérieur à nous par le nombre de ses soldats, les milices canadiennes se couvrirent de gloire. Il n’y a qu’une voix chez les historiens pour rendre hommage à celles-ci. Montcalm lui-même n’y résista pas. La colonie fut littéralement sauvée — ou plutôt sa conquête retardée d’une année entière — par ce coup de fortune.

Le mémoire officiel de 1758, déjà cité, parlant du danger que courent les sommes d’argent transportées par mer, propose un arrangement au sujet du papier-monnaie plus équitable dit-il que celui alors en vigueur. Il ajoute : « l’habitant, qui sait qu’il ne pourrait faire aucun usage des cartes et des ordonnances si les Anglais s’emparaient du pays, est engagé à défendre celui-ci par son propre intérêt. » En présence de l’héroïsme et du dévouement plus que français des Canadiens, on entretenait donc encore des doutes sur leur loyauté à la couronne de France ? Cet aveuglement des autorités est d’accord avec toute notre histoire avant la conquête.

Elle eut lieu cette conquête inévitable, mais si glorieusement retardée par notre valeur. Lorsque la flotte anglaise parut devant Québec, au mois de juin 1759, la population s’ébranla en masse pour la repousser. Les vieillards, les femmes et les enfants se mirent à travailler au transport des vivres et des munitions. Les armées envahissantes possédaient autant de soldats qu’il y avait d’âmes parmi nous : soixante mille. Avec la poignée de troupes françaises qu’il commandait, Montcalm n’eut pas résisté dix jours au général Wolfe, mais les milices, qui formaient en ce moment les trois quarts de toute l’armée, ne faiblirent pas une minute. Après divers combats sans avantages, Wolfe surprit, le matin du 13 septembre, un poste mal gardé par Vergor, une créature de Bigot, et déploya ses régiments sur les plaines d’Abraham. Montcalm, qui n’avait aucune des qualités du stratégiste et qui était tout de feu, se jeta, avec un peu plus de quatre mille hommes, à la tête du général anglais et périt sans avoir appelé le camp canadien de Beauport, sans avoir prévenu Bougainville détaché à la rivière Jacques-Cartier avec deux mille hommes. Les Anglais entrèrent dans Québec. Lévis, lieutenant de Montcalm, revenant du haut Canada, apprit ce désastre à Montréal. Il accourut, rallia les débris des forces françaises et les bataillons canadiens, puis se replia vers les Trois-Rivières et Montréal après avoir construit un fort à Jacques-Cartier. L’hiver fut terrible, par suite de la disette, de la situation désespérée du pays et l’incertitude où l’on était des secours de France.

Jusque là nous avions constamment subi des pertes, car, vainqueurs ou vaincus, les défenseurs de la cause française diminuaient à chaque bataille. Les officiers français ne se souciaient plus que d’abandonner une colonie ruinée et conquise. Ont-ils songé au sort qui attendait les Canadiens ? C’est douteux. En tous cas, rien ne nous l’indique.

Ceux qui regardaient le Canada comme leur patrie, commencèrent alors à se préoccuper d’eux-mêmes. Lévis, bien que Français, était de tout cœur avec eux. Vaudreuil n’avait d’autres intérêts que les leurs. Un incroyable élan de patriotisme fit reprendre les armes aux milices de chaque paroisse. Ne nous rendons pas ainsi, sans conditions ! s’écriaient-elles. Qu’un dernier effort des braves arrache à l’ennemi le droit de dicter la capitulation ! Que la France se retire puisqu’elle le veut, mais que les Canadiens se fassent respecter même dans la défaite. La patrie n’est pas morte ! Elle existe avec nous, par nous ; qu’elle reste fière et honorable pour conquérir ses libertés politiques. Et, en effet, elle vit encore, preuve qu’on ne l’a pas étouffée.

De bonne heure au printemps de 1760, Lévis mit le siège devant Québec. À ce trait d’audace, les Anglais, inquiets, perdirent toute prudence. Ils présentèrent la bataille. Le 28 avril, à Sainte-Foye, une défaite éclatante anéantit leurs meilleurs régiments. Les Acadiens combattaient avec nous. Cette lutte suprême rendait le sort du Canada douteux. À l’apparition de la flotte de France, le drapeau britannique n’avait plus qu’à se retirer ou à se livrer. Ce fut la flotte anglaise qui arriva. Les Canadiens reculèrent pied à pied en présence des nouveaux adversaires. On mit quatre mois à se replier sur Montréal. Amherst, qui amenait une armée par le lac Champlain, se joignit alors aux autres troupes anglaises. Vaudreuil parla de capitulation. Lévis conçut l’idée d’opérer sa retraite sur le Détroit et de sortir de l’Amérique par la Louisiane. Les généraux anglais hésitaient à accepter les conditions exigées par les Canadiens, mais ceux-ci, que tant de maux n’avaient pas abattus, se redressèrent encore une fois. Nous nous battrons ! s’écria Lévis. Ce fut la dernière parole de cette longue guerre. Le 8 septembre, Amherst signait la capitulation de Montréal et de tout le pays — dictée par nous.

Les lois, les propriétés, la langue, la religion des Canadiens étaient respectées. Du sein d’un désastre inouï, nous sortions armés pour les luttes de l’avenir. Il y eut exception pour les Acadiens dont Vaudreuil invoqua la cause et que les Anglais ne voulurent pas admettre aux bénéfice de cet arrangement. Cent sept ans plus tard, nos hommes d’état, en stipulant des conditions pour la race française du Canada qui allait entrer dans le pacte fédéral, omirent aussi les Acadiens.

Voyons les articles de capitulation de Québec et de Montréal :

Québec. — « Demandé par M. de Ramsay, lieutenant pour le roi (de France) commandant les haute et basse-ville de Québec, chef de l’ordre militaire de Saint-Louis, à Son Excellence le général des troupes de Sa Majesté Britannique, —

« i. Monsieur de Ramsay demande les honneurs de la guerre pour sa garnison, et qu’elle soit envoyée à l’armée en sûreté, par le chemin le plus court, avec armes et bagages, six pièces de canon de fonte, deux mortiers ou obusiers et douze coups à tirer par pièce.[1]

« ii. Que les habitants soient conservés dans la possession de leurs maisons, biens, effets et privilèges. »[2]

« iii. Que les habitants ne pourront être recherchés pour avoir porté les armes à la défense de la ville, attendu qu’ils ont été forcés, et que les habitants des colonies, des deux couronnes, y servent également comme miliciens. »[3]

« iv. Qu’il ne sera point touché aux effets des officiers et habitants absents. »[4]

« v. Que les habitants ne seront point transférés, ni tenus de quitter leurs maisons, jusqu’à ce qu’un traité définitif entre Sa Majesté Très Chrétienne et Sa Majesté Britannique ait réglé leur état. »[5]

« vi. Que l’exercice de la religion catholique, apostolique et romaine sera conservé ; que l’on donnera des sauvegardes aux maisons ecclésiastiques, religieux et religieuses, particulièrement à monseigneur l’évêque de Québec, qui, rempli de zèle pour la religion et de charité pour les peuples de son diocèse, désire y rester constamment, exercer librement, et avec la décence que son état et les sacrés ministères de la religion romaine requerront, son autorité épiscopale dans la ville de Québec, lorsqu’il le jugera à propos, jusqu’à ce que la possession du Canada ait été décidée par un traité entre Sa Majesté Très Chrétienne, et Sa Majesté Britannique. »[6]

« vii. Que l’artillerie et munitions de guerre seront remises de bonne foi, et qu’il en sera dressé un inventaire. »[7]

« viii. Qu’il en sera usé envers les blessés, malades, commissaires, aumôniers, médecins, chirurgiens, apothicaires, et autres personnes employées au service des hôpitaux, conformément au traité d’échange du sixième février 1759, convenu entre Leurs Majestés Très Chrétienne et Britannique. »[8]

« ix. Qu’avant de livrer la porte et l’entrée de la ville aux troupes anglaises, leur général voudra bien remettre quelques soldats pour être mis en sauvegarde aux églises, couvents et principales habitations. »[9]

« x. Qu’il sera permis au lieutenant du roi, commandant dans la ville de Québec, d’envoyer informer Monsieur le marquis de Vaudreuil, gouverneur-général, de la réduction de la place, comme aussi que le général pourra l’écrire au ministre de France pour l’informer. »[10]

« xi. Que la présente capitulation sera exécutée suivant la forme et teneur, sans qu’elle puisse être sujette à inexécution sous prétexte de représailles, ou pour inexécution de quelques capitulations précédentes. »[11]

« Arrêté double, entre nous, au camp devant Québec, ce dix-huitième de septembre 1759 » (Signatures) « Charles Saunders, George Townshend, De Ramsay. »

Montréal. « Entre Son Excellence le général Amherst, commandant en chef des troupes et forces de Sa Majesté Britannique en l’Amérique Septentrionale, et Son Excellence le marquis de Vaudreuil, grand-croix de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis, gouverneur et lieutenant-général pour le roi (de France) en Canada.

i. « Vingt-quatre heures après la signature de la présente capitulation, le général anglais fera prendre par les troupes de Sa Majesté Britannique, possession des postes de la ville de Montréal, et la garnison anglaise ne pourra y entrer qu’après l’évacuation des troupes françaises. »[12]

ii « Les troupes et les milices qui seront en garnison dans la ville de Montréal en sortiront par la porte de Québec, avec tous les honneurs de la guerre, six pièces de canons et un mortier, qui seront chargés dans le vaisseau où le marquis de Vaudreuil s’embarquera avec dix coups à tirer par pièce ; il en sera usé de même pour la garnison des Trois-Rivières pour les honneurs de la guerre. »[13]

iii. « Les troupes et milices qui seront en garnison dans le fort de Jacques-Cartier et dans l’île Sainte-Hélène et autres forts, seront traitées de même et auront les mêmes honneurs ; et ces troupes se rendront à Montréal ou aux Trois-Rivières ou à Québec pour y être toutes embarquées pour le premier port de mer en France par le plus court chemin. Les troupes qui sont dans nos postes situés sur nos frontières du côté de l’Acadie, au Détroit, Michillimakinac et autres postes jouiront des mêmes honneurs et seront traitées de même. »[14]

iv. « Les milices après être sorties des villes, forts et postes ci-dessus, retourneront chez elles, sans pouvoir être inquiétées sous quelque prétexte que ce soit pour avoir porté les armes. »[15]

v. « Les troupes qui tiennent la campagne lèveront leurs camps, marcheront tambour battant, armes, bagages, et avec leur artillerie, pour se joindre à la garnison de Montréal et auront en tout le même traitement. »[16]

vi. Les sujets de Sa Majesté Britannique et de Sa Majesté Très Chrétienne, soldats, miliciens ou matelots, qui auront déserté ou laissé le service de leur souverain, et porté les armes dans l’Amérique septentrionale, seront de part et d’autres pardonnés de leurs crimes ; ils seront respectivement rendus à leur patrie, si non ils resteront chacun où ils sont, sans qu’ils puissent être recherchés ni inquiétés. »[17]

vii. «  Les magasins, l’artillerie, fusils, sabres, munitions de guerre et généralement tout ce qui appartient à Sa Majesté Très Chrétienne, tant dans les villes de Montréal et Trois-Rivières que dans les forts et postes mentionnés en l’article 3ème, seront livrés par des inventaires exacts aux commissaires qui seront préposés pour les recevoir au nom de Sa Majesté Britannique ; il sera remis au marquis de Vaudreuil des expéditions en bonne forme des dits inventaires. »[18]

viii. «  Les officiers, soldats, miliciens, matelots et même les sauvages, détenus pour cause de leurs blessures ou maladie, tant dans les hôpitaux que dans les maisons particulières, jouiront des privilèges du cartel et seront traités conséquemment, »[19]

ix. «  Le général anglais s’engagera de renvoyer chez eux les sauvages indiens et moraigans qui font nombre de ses armées, d’abord après la signature de la présente capitulation ; et cependant, pour prévenir tout désordre de la part de ceux qui ne seraient pas partis, il sera donné par ce général des sauvegardes aux personnes qui en demanderont tant en ville que dans les campagnes. »[20]

x. « Le général de Sa Majesté Britannique garantira tout désordre de la part de ses troupes, les assujettira à payer les dommages qu’elles pourraient faire tant dans les villes que dans les campagnes. »[21]

xi. «  Le général anglais ne pourra obliger le marquis de Vaudreuil de sortir de la ville de Montréal avant le — et on ne pourra loger personne dans son hôtel jusqu’à son départ. M. le chevalier de Lévis, commandant les troupes de terre, les officiers principaux et majors des troupes de terre et de la colonie, les ingénieurs, officiers d’artillerie et commissaires de guerre, resteront pareillement à Montréal jusqu’au dit jour, et y conserveront leur logement ; il en sera usé de même à l’égard de M. Bigot, intendant, des commissaires de la marine et officiers de plumes, dont mon dit sieur Bigot aura besoin ; et on ne pourra également loger personne à l’intendance avant le départ de cet intendant. »[22]

xii. « Il sera destiné pour le passage en droiture au premier port de mer en France, du marquis de Vaudreuil, le vaisseau le plus commode qui se trouvera ; il y sera pratiqué les logements nécessaires pour lui, madame la marquise de Vaudreuil, M. de Rigaud, gouverneur de Montréal et la suite de ce général. Ce vaisseau sera pourvu de subsistances convenables aux dépens de Sa Majesté Britannique ; et le marquis de Vaudreuil emportera avec lui ses papiers sans qu’ils puissent être visités, et il embarquera ses équipages, vaisselle, bagages et ceux de sa suite. »[23]

xiii. « Si avant ou après l’embarquement du marquis de Vaudreuil, la nouvelle de la paix arrivait, et que par le traité le Canada restât à Sa Majesté Très Chrétienne, le marquis de Vaudreuil reviendrait à Québec ou à Montréal ; toutes les choses resteraient dans leur premier état, sous la domination de Sa Majesté Très Chrétienne, et la présente capitulation deviendrait nulle et sans effets quelconques. »[24]

xiv. « Il sera destiné deux vaisseaux pour le passage en France de M. le chevalier de Lévis, des officiers principaux et état major général des troupes de terre, ingénieurs, officiers d’artillerie et gens qui sont à leur suite. Ces vaisseaux seront également pourvus de subsistance, et il y sera pratiqué des logements nécessaires ; ces officiers pourront emporter leurs papiers qui ne seront point visités, leur équipage et bagage… ceux des officiers qui seront mariés auront la liberté d’emmener avec eux leurs femmes et enfants et la subsistance leur sera fournie. »[25]

xv. « Il en sera de même destiné un pour le passage de M. Bigot, intendant, et de sa suite, dans lequel vaisseau il sera fait les aménagements convenables pour lui et les personnes qu’il emmènera ; il y embarquera également ses papiers, qui ne seront point visités, ses équipages, vaisselles et bagages et ceux de sa suite ; ce vaisseau sera pourvu de subsistance comme il est dit ci-devant. »[26]

xvi. « Le général anglais fera aussi fournir pour M. de Longueuil, gouverneur des Trois-Rivières, pour les états majors de la colonie et les commissaires de la marine, les vaisseaux nécessaires pour se rendre en France, et le plus commodément qu’il sera possible : ils pourront y embarquer leurs familles, domestiques, bagages et équipages ; et la subsistance leur sera fournie pendant la traversée, sur un pied convenable, aux dépens de Sa Majesté Britannique. »[27]

xvii. « Les officiers et soldats, tant des troupes de terre que de la colonie, ainsi que les officiers, marins et matelots qui se trouveront dans la colonie, seront aussi embarqués pour France dans les vaisseaux qui leur seront destinés, en nombre suffisant et le plus commodément que faire se pourra : les officiers de troupes et marins qui seront mariés, pourront emmener avec eux leurs familles ; et tous auront la liberté d’embarquer leurs domestiques et bagages. Quant aux soldats et matelots, ceux qui seront mariés pourront emmener avec eux leurs femmes et enfants, et tous embarqueront leurs havresacs et bagages ; il sera embarqué dans les vaisseaux les subsistances convenables et suffisantes, aux dépens de Sa Majesté Britannique. »[28]

xviii. « Les officiers, soldats et tous ceux qui sont à la suite des troupes, qui auront leurs bagages dans les campagnes pourront les envoyer chercher avant leur départ, sans qu’il leur soit fait aucun tort ni empêchement. »[29]

xix. « Il sera fourni par le général anglais un bâtiment d’hôpital pour ceux des officiers, soldats et matelots blessés ou malades, qui seront en état d’être transportés en France ; et la subsistance leur sera fournie également aux dépens de Sa Majesté Britannique. Il en sera usé de même à l’égard des autres officiers, soldats et matelots blessés ou malades aussitôt qu’ils seront rétablis ; les uns et les autres pourront emmener leurs femmes, enfants, domestiques et bagages : et les dits soldats et matelots ne pourront être sollicités ni forcés à prendre parti dans le service de Sa Majesté Britannique. »[30]

xx. « Il sera laissé un commissaire et un écrivain de roi pour avoir soin des hôpitaux et veiller à tout ce qui aura rapport au service de Sa Majesté Très Chrétienne. »[31]

xxi. « Le général anglais fera également fournir des vaisseaux pour le passage en France des officiers du Conseil Supérieur, de justice, police, de l’amirauté et tous autres officiers ayant commissions ou brevets de Sa Majesté Très Chrétienne, pour eux, leurs familles, domestiques et équipages, comme pour les autres officiers, et la subsistance leur sera fournie de même aux dépens de Sa Majesté Britannique ; il leur sera cependant libre de rester dans la colonie, s’ils le jugent à propos, pour y arranger leurs affaires ou de se retirer en France quand bon leur semblera. »[32]

xxii. « S’il y a des officiers militaires dont les affaires exigent leur présence dans la colonie jusqu’à l’année prochaine, ils pourront y rester, après en avoir eu la permission du marquis de Vaudreuil, et sans qu’ils puissent être réputés prisonniers de guerre. »[33]

xxiii. « Il sera permis au munitionnaire des vivres du Roi de demeurer en Canada jusqu’à l’année prochaine, pour être en état de faire face aux dettes qu’il a contractées dans la colonie, relativement à ses fournitures ; si, néanmoins, il préfère de passer en France cette année, il sera obligé de laisser jusqu’à l’année prochaine une personne pour faire ses affaires ; ce particulier conservera et pourra emporter tous les papiers sans être visités ; ses commis auront la liberté de rester dans la colonie ou de passer en France, et dans ce dernier cas, le passage et la subsistance leur seront accordés sur les vaisseaux de Sa Majesté Britannique, pour eux, leurs familles et leurs bagages. »[34]

xxiv. « Les vivres et autres approvisionnements qui se trouveront en nature dans les magasins du munitionnaire, tant dans les villes de Montréal et des Trois-Rivières que dans les campagnes, lui seront conservés ; les dits vivres lui appartenant et non au roi ; et il lui sera loisible de les vendre aux Français ou aux Anglais. »[35]

xxv. « Le passage en France sera également accordé sur les vaisseaux de Sa Majesté Britannique ainsi que la subsistance à ceux des officiers de la compagnie des Indes qui voudront y passer, et ils emmeneront leurs familles, domestiques et bagages. Sera permis à l’agent principal de la dite compagnie, supposé qu’il voulût passer en France, de laisser telle personne qu’il jugera à propos jusqu’à l’année prochaine, pour terminer les affaires de la dite compagnie et faire le recouvrement des sommes qui lui sont dues. L’agent principal conservera tous les papiers de la dite communauté, et ils ne pourront être visité… »[36]

xxvi. « Cette compagnie sera maintenue dans la propriété des écarlatines et castors qu’elle peut avoir dans la ville de Montréal ; il n’y sera point touché, sous quelque prétexte que ce soit ; et il sera donné à l’agent principal les facilités nécessaires pour faire passer cette année en France ses castors sur les vaisseaux de Sa Majesté Britannique, en payant le fret sur le pied que les Anglais le payeraient… »[37]

xxvii. « Le libre exercice de la religion Catholique, Apostolique et Romaine subsistera en son entier, en sorte que tous les états et le peuple des villes et des campagnes, lieux et postes éloignés pourront continuer de s’assembler dans les églises, et de fréquenter les sacrements comme ci-devant, sans être inquiétés en aucune manière, directement ni indirectement. Ces peuples seront obligés par le gouvernement anglais à payer aux prêtres qui en prendront soin les dîmes et tous les droits qu’ils avaient coutume de payer sous le gouvernement de Sa Majesté Très Chrétienne. »[38]

xxviii. « Le chapitre, les prêtres, curés et missionnaires continueront avec entière liberté leurs exercices et fonctions curiales dans les paroisses des villes et des campagnes. »[39]

xxix. « Les grands-vicaires, nommés par le chapitre pour administrer le diocèse pendant la vacance du siège épiscopal, pourront demeurer dans les villes ou paroisses des campagnes, suivant qu’elles le jugeront à propos ; ils pourront en tout temps visiter les différentes paroisses du diocèse avec les cérémonies ordinaires, et exercer toute la juridiction qu’ils exerçaient sous la domination française ; ils jouiront des mêmes droits en cas de mort du futur évêque dont il sera parlé à l’article suivant. »[40]

xxx. « Si, par le traité de paix, le Canada restait au pouvoir de Sa Majesté Britannique, Sa Majesté Très Chrétienne continuerait à nommer l’évêque de la colonie, qui serait toujours de la communion romaine, et sous l’autorité duquel le peuple exercerait la religion romaine. »[41]

xxxi. « Pourra le seigneur évêque établir dans le besoin de nouvelles paroisses et pourvoir au rétablissement de sa cathédrale et de son palais épiscopal ; et il aura, en attendant la liberté de demeurer dans les villes ou paroisses, comme il le jugera à propos ; il pourra visiter son diocèse avec les cérémonies ordinaires et exercer toute la jurisdiction que son prédécesseur exerçait sous la domination française, sauf à exiger de lui le serment de fidélité ou promesse de ne rien faire ni rien dire contre le service de Sa Majesté Britannique. »[42]

xxxii. « Les communautés de filles seront conservées dans leurs constitutions et privilèges ; elles continueront d’observer leurs règles ; elles seront exemptées du logement des gens de guerre ; et il sera fait défense de les troubler dans les exercices de piété qu’elles pratiquent, ni d’entrer chez elles ; on leur donnera même des sauves-gardes, si elles en demandent. »[43]

xxxiii. « Le précédent article sera pareillement exécuté à l’égard des communautés des jésuites et récollets et de la maison des prêtres de Saint-Sulpice à Montréal ; ces derniers et les jésuites conserveront le droit qu’ils ont de nommer à certaines cures et missions comme ci-devant. »[44]

xxxiv. « Toutes les communautés et tous les prêtres conserveront leurs meubles, la propriété et l’usufruit des seigneuries et autres biens que les uns et les autres possèdent dans la colonie, de quelque nature qu’ils soient ; et les dits biens seront conservés dans leurs privilèges, droits, honneurs et exemptions. »[45]

xxxv. « Si les chanoines, prêtres, missionnaires, les prêtres du séminaire des missions, étrangères et de Saint-Sulpice, ainsi que les jésuites et les récollets, veulent passer en France, le passage leur sera accordé sur les vaisseaux de Sa Majesté Britannique, et tous auront la liberté de vendre en total ou partie les biens fonds et mobiliers qu’ils possèdent dans la colonie, soit aux français ou aux anglais, sans que le gouvernement britannique puisse y mettre le moindre empêchement ni obstacle. Ils pourront emporter avec eux ou faire passer en France le produit, de quelque nature qu’il soit, des dits biens vendus, en payant le fret (comme il est dit à l’article xxvi) et ceux d’entre les prêtres qui voudront passer, cette année, seront nourris pendant la traversée aux dépens de Sa Majesté Britannique, et pourront emporter avec eux leurs bagages. »[46]

xxxvi. « Si par le traité de paix le Canada reste à Sa Majesté Britannique, tous les Français, Canadiens, Acadiens, commerçants et autres personnes qui voudront se retirer en France, en auront la permission du général anglais, qui leur procurera le passage ; et néanmoins, si d’ici à cette décision il se trouvait des commerçants Français ou Canadiens, ou autres personnes, qui voulussent passer en France, le général anglais leur en donnera également la permission : les uns et les autres emmèneront avec eux leurs familles, domestiques et bagages. »[47]

xxxvii. « Les Seigneurs de terre, les officiers militaires et de justice, les Canadiens, tant des villes que des campagnes, les Français établis ou commerçans dans toute l’étendue de la colonie de Canada, et toutes autres personnes que ce puissent être, &c. conserveront l’entière paisible propriété et possession de leurs biens seigneuriaux et roturiers, meubles et immeubles, marchandise, pelleteries et autres effets, même de leurs bâtiments de mer ; il n’y sera point touché ni fait le moindre dommage sous quelque prétexte que ce soit. Il leur sera loisible de la conserver, louer, vendre, soit aux Français ou aux Anglais, d’en emporter le produit en lettres de change, pelleteries, espèces sonnantes ou autres retours, lorsqu’ils jugeront à propos de passer en France, en payant le fret (comme à l’article XXVI.) Ils jouiront aussi des pelleteries qui sont dans les postes d’en Haut, et qui leur appartiennent, et qui peuvent même être en chemin de se rendre à Montréal ; et à cet effet il leur sera permis d’envoyer, dès cette année ou la prochaine, des canots équipés pour chercher celles de ces pelleteries qui auront resté dans les postes. »[48]

xxxviii. « Tous les peuples sortis de l’Acadie qui se trouveront en Canada, y compris les frontières du Canada du côté de l’Acadie, auront le même traitement que les Canadiens et jouiront des mêmes privilèges qu’eux. »[49]

xxxix « Aucuns Canadiens, Acadiens ni Français, de ceux qui sont présentement en Canada et sur les frontières de la colonie, du côté de l’Acadie, du Détroit, de Michillimakinac et autres lieux et postes des pays d’en Haut, ni les soldats mariés et non mariés restant en Canada, ne pourront être portés ni transmigrés dans les colonies anglaises, ni en l’ancienne Angleterre ; et ils ne pourront être recherchés pour avoir pris les armes. »[50]

xl. « Les Sauvages ou Indiens alliés de Sa Majesté Très Chrétienne seront maintenus dans les terres qu’ils habitent, s’ils veulent y rester ; ils ne pourront être inquiétés sous quelque prétexte que ce puisse être, pour avoir pris les armes et servi sous Sa Majesté Très Chrétienne. Ils auront comme les Français la liberté de religion, et conserveront leurs missionnaires ; il sera permis aux vicaires-généraux actuels et à l’évêque, lorsque le siège épiscopal sera rempli de leur envoyer de nouveaux missionnaires, lorsqu’ils le jugeront nécessaire. »[51]

xli. « Les Français, Canadiens et Acadiens, qui resteront dans la colonie, de quelqu’état et condition qu’ils soient, ne seront ni ne pourront être forcés à prendre les armes contre Sa Majesté Très Chrétienne ni ses alliés, directement ni indirectement, dans quelqu’occasion que ce soit ; le gouvernement britannique ne pourra exiger d’eux qu’une exacte neutralité. »[52]

xlii. « Les Français et Canadiens continueront d’être gouvernés suivant la coutume de Paris, et les lois et usages établis pour ce pays ; et ils ne pourront être assujettis à d’autres impôts qu’à ceux qui étaient établis sous la domination française. »[53]

xliii. « Les papiers du gouvernement resteront, sans exception, au pouvoir du marquis de Vaudreuil, et passeront en France avec lui ; ces papiers ne pourront être visités sous quelque prétexte que ce soit. »[54]

xliv. « Les papiers de l’Intendance, des bureaux du contrôle de la marine, des trésoriers, anciens et nouveaux, des magazins du roi, du bureau du roi, du bureau du domaine et des forges de Saint-Maurice, resteront au pouvoir de M. Bigot, intendant ; et ils seront embarqués pour France dans le vaisseau où il passera ; ces papiers ne seront point visités. »[55]

xlv. « Les registres et autres papiers du conseil supérieur de Québec, de la prévôté et amirauté de la même ville, ceux des jurisdictions royales des Trois-Rivières et de Montréal, ceux des jurisdictions seigneuriales de la colonie, les minutes des actes des notaires, des villes et des campagnes, et généralement les actes et autres papiers, qui peuvent servir à justifier l’état et la fortune des citoyens, resteront dans la colonie, dans les greffes des jurisdictions dont ces papiers dépendent. »[56]

xlvi. « Les habitants et négociants jouiront de tous les privilèges du commerce, aux mêmes faveurs et conditions accordées aux sujets de Sa Majesté Britannique, tant dans les pays d’en haut que dans l’intérieur de la colonie. »[57]

xlvii. « Les nègres et panis des deux sexes resteront en leur qualité d’esclaves en la possession des Français et Canadiens, à qui ils appartiennent : il leur sera libre de les garder à leur service dans la colonie ou de les vendre ; et ils pourront aussi continuer à les faire élever dans la religion romaine. »[58]

xlviii. « Il sera permis au marquis de Vaudreuil, aux officiers-généraux et supérieurs des troupes de terre, aux gouverneurs, état-major des différentes places de la colonie, aux officiers militaires et de justice, et à toutes autres personnes, qui sortiront de la colonie ou qui en sont déjà absents, de nommer et d’établir des personnes pour agir pour eux et en leur nom, dans l’administration de leurs biens, meubles et immeubles, jusqu’à ce que la paix soit faite ; et si par le traité des deux couronnes le Canada ne reste pas sous la domination française, ces officiers ou autres personnes, ou procureurs pour eux, auront l’agrément de vendre leurs seigneuries, maisons et autres biens fonds, leurs meubles et effets, etc., d’en emporter ou faire passer le produit en France, soit en lettres de change, espèces sonnantes, pelleteries ou autres retours comme il est dit à article xxxvii. »[59]

xlix. « Les habitants et autres personnes qui auront souffert quelques dommages en leurs biens, meubles ou immeubles, restés à Québec sous la loi de la capitulation de cette ville, pourront faire leurs représentations au gouvernement Britannique, qui leur rendra la justice qui leur sera due contre qui il appartiendra. »[60]

l et dernier. « La présente capitulation sera inviolablement exécutée en tous ses articles de part et d’autres, et de bonne foi, nonobstant toute infraction et tout autre prétexte par rapport aux précédentes capitulations, et sans pouvoir servir de représailles. »[61]

POST SCRIPTUM.

li. « Le général anglais s’engagera, en cas qu’il reste des sauvages après la reddition de cette ville, à empêcher qu’ils n’entrent dans les villes et qu’ils n’insultent en aucune manière les sujets de Sa Majesté Très Chrétienne. »[62]

lii. « Les troupes et autres sujets de Sa Majesté Très Chrétienne, qui doivent passer en France, seront embarqués quinze jours au plus tard après la signature de la présente capitulation. »[63]

liii. « Les troupes et autres sujets de Sa Majesté Très Chrétienne, qui devront passer en France, resteront logés et campés dans la ville de Montréal et autres postes qu’ils occupent présentement, jusqu’au moment où ils seront embarqués pour le départ ; il sera néanmoins accordé des passe-ports à ceux qui en auront besoin pour les différents lieux de la colonie, pour aller vaquer à leurs affaires. »[64]

liv. « Tous les officiers et soldats des troupes au service de France, qui sont prisonniers à la Nouvelle-Angleterre et faits en Canada, seront renvoyés le plus tôt qu’il sera possible en France, où il sera traité de leur rançon ou échange, suivant le cartel ; et si quelques-uns de ces officiers avaient des affaires en Canada, il leur sera permis d’y venir. »[65]

lv. « Quant aux officiers de milice, aux miliciens et aux Acadiens qui sont prisonniers à la Nouvelle-Angleterre, ils seront renvoyés sur leurs terres. »[66]


« Fait à Montréal, le 8 Septembre 1760.
(Signé) « VAUDREUIL. »
« Fait au camp devant Montréal, le 8 Septembre 1760.
(Signé) « JEFFERY AMHERST. »

Le traité de Paris signé le 10 février 1763, fut rendu public le 17 mai dans le gouvernement de Montréal et le 21 dans celui des Trois-Rivières. Voici un passage de l’article IV de ce document : « Sa Majesté Britannique convient d’accorder aux habitants du Canada la liberté de la religion catholique — en conséquence, elle donnera les ordres les plus précis et les plus effectifs pour que ses nouveaux sujets catholiques-romains puissent professer le culte de leur religion selon le rite de l’église romaine, en tant que le permettent les lois de la Grande-Bretagne. Sa Majesté Britannique convient, en outre, que les habitants français ou autres, qui auraient été sujets du roi Très-Chrétien en Canada, pourront se retirer, en toute sûreté et liberté, où bon leur semblera, et pourront vendre leurs biens, pourvu que ce soit à des sujets de Sa Majesté Britannique, et transporter leurs effets ainsi que leurs personnes, sans être gênés dans leur émigration, sous quelque prétexte que ce puisse être, hors celui de dette ou poursuite criminelle. Le terme limité pour cette émigration sera fixé à l’espace de dix-huit mois, à compter du jour de l’échange du traité (10 mars). »

Le duc de Choiseul ajouta à cette article le passage suivant : « Le roi de la Grande-Bretagne ayant désiré que le payement des lettres de change et billets qui ont été délivrés aux Canadiens pour les fournitures faites aux troupes françaises, fût assuré, Sa Majesté Très Chrétienne, très disposée à rendre à chacun la justice qui lui est légitimement due, déclare que ces dits billets et lettres de change seront exactement payés, après liquidation faite dans un temps convenable, selon la distance des lieux et la possibilité, en évitant néanmoins que les billets et lettres de change que les sujets français pourraient avoir au moment de cette déclaration ne soient confondus avec les billets et lettres de change qui sont dans la possession des nouveaux sujets du roi de la Grande-Bretagne. »

Résultat pratique, la France ne paya pas la huitième partie de ses dettes au Canada.


  1. « La garnison de la ville, composée des troupes de terre, de marine et matelots, sortiront de la ville avec armes et bagages, tambours battants, mèches allumées, deux pièces de canon de France, et douze coups à tirer pour chaque pièce, et sera embarquée le plus commodément qu’il sera possible, pour être mise en France au premier port. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  2. « Accordé, en mettant bas les armes. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  3. « Accordé. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  4. « Accordé. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  5. « Accordé. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  6. « Libre exercice de la religion romaine, sauvegardes à toutes personnes religieuses, ainsi qu’à Monsieur l’évêque, qui pourra venir exercer, librement et avec décence, les fonctions de son état, lorsqu’il jugera à propos, jusqu’à ce que la possession du Canada ait été décidée entre Sa Majesté Britannique et Sa Majesté Très Chrétienne. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  7. « Accordé. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  8. « Accordé. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  9. « Accordé. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  10. « Accordé. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  11. « Accordé. » (Signé) « Saunders et Townshend. »
  12. « Toute la garnison de Montréal doit mettre bas les armes et ne servir pas pendant la présente guerre ; immédiatement après la signature de la présente les troupes du roi prendront possession des postes et posteront les gardes nécessaires pour maintenir le bon ordre dans la ville. » (Signé « Amherst. » )
  13. « Référé à l’article précédent. » (Signé) « Amherst. »
  14. « Toutes ces troupes ne doivent point servir pendant la présente guerre et mettront pareillement les armes bas ; le reste est accordé. » (Signé « Amherst. » )
  15. « Accordé. » (Signé « Amherst. » )
  16. « Ces troupes doivent comme les autres mettre bas les armes. » (Signé « Amherst. »)
  17. « Refusé. » (Signé) « Amherst. »
  18. « C’est tout ce qu’on peut demander sur cet article. » (Signé) « Amherst. »
  19. « Les malades et blessés seront traités de même que nos propres gens. » (Signé) « Amherst. »
  20. « Le premier refusé ; il n’y a point eu des cruautés commises par les sauvages de notre armée, et le bon ordre sera maintenu. » (Signé) « Amherst. »
  21. « Répondu par l’article précédent. » (Signé) « Amherst. »
  22. « Le marquis de Vaudreuil et tous ces messieurs seront maîtres de leurs logements et maisons, et s’embarqueront dès que les vaisseaux du roi seront prêts à faire voile pour l’Europe, et on leur accordera toutes les commodités qu’on pourra. » (Signé) « Amherst. »
  23. « Accordé, excepté les archives qui pourront être nécessaires pour le gouvernement du pays. » (Signé) « Amherst. »
  24. « Ce que le roi pourrait avoir fait à ce sujet sera obéi. » « Amherst. »
  25. « Accordé, excepté que M. le marquis de Vaudreuil, et tous les officiers de quelque rang qu’ils puissent être, nous remettront de bonne foi toutes les cartes et plans du pays. » (Signé) « Amherst. »
  26. « Accordé avec la même réserve que par l’article précédent. » (Signé) « Amherst. »
  27. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  28. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  29. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  30. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  31. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  32. « Accordé, mais s’ils ont des papiers qui concernent le gouvernement du pays, ils doivent nous les remettre. » (Signé) « Amherst. »
  33. « Tous ceux dont les affaires particulières exigent qu’ils restent dans le pays et qui en ont la permission de M. de Vaudreuil seront permis de rester jusqu’à ce que leurs affaires soient terminées. » (Signé) « Amherst. »
  34. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  35. « Tout ce qui se trouve dans les magasins destiné à l’usage des troupes, doit être délivré au commissaire anglais pour les troupes du roi. » (Signé) « Amherst. »
  36. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  37. « Accordé pour ce qui peut appartenir à la compagnie ou aux particuliers ; mais si Sa Majesté Très Chrétienne y a aucune part, elle doit être au profit du roi. » (Signé) « Amherst. »
  38. « Accordé pour le libre exercice de leur religion ; l’obligation de payer les dîmes aux prêtres dépendra du roi. »
  39. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  40. « Accordé, excepté ce qui regarde l’article suivant. » (Signé) « Amherst. »
  41. « Refusé. » (Signé) « Amherst. »
  42. « Cet article est compris sous le précédent. » (Signé) « Amherst. »
  43. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  44. « Refusé, jusqu’à ce que le plaisir du roi soit connu. » (Signé) « Amherst. »
  45. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  46. « Ils seront les maîtres de disposer de leurs biens, et d’en passer le produit, ainsi que leurs personnes et tout ce qui leur appartiendra, en France. » (Signé) « Amherst. »
  47. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  48. « Accordé comme par l’article XXXVI. » (Signé) « Amherst. »
  49. « C’est au roi de disposer de ses anciens sujets ; en attendant ils jouiront des mêmes privilèges que les Canadiens. » (Signé) « Amherst. »
  50. « Accordé, excepté à l’égard des Acadiens. » (Signé) « Amherst. »
  51. « Accordé, à Sa réserve du dernier article qui a déjà été refusé. » (Signé) « Amherst. »
  52. « Ils deviennent sujets du roi. » (Signé) « Amherst. »
  53. « Répondu par les articles précédents, et particulièrement par le dernier. » (Signé) « Amherst. »
  54. « Accordé avec la réserve déjà faite. » (Signé) « Amherst. »
  55. « Il en est de même de cet article. » (Signé) « Amherst. »
  56. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  57. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  58. « Accordé, excepté ceux qui auront été fait prisonniers. » (Signé) « Amherst. »
  59. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  60. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  61. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  62. « On aura soin que les Sauvages n’insultent aucuns des sujets de Sa Majesté Très Chrétienne ». (Signé) « Amherst. »
  63. « Répondu par l’article précédent. » (Signé) « Amherst. »
  64. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  65. « Accordé. » (Signé) « Amherst. »
  66. « Accordé, à la réserve des Acadiens. » (Signé) « Amherst. »