Histoire des églises et chapelles de Lyon/Marie-Auxiliatrice

H. Lardanchet (tome Ip. 320-323).

MARIE-AUXILIATRICE

Sophie de Soubiran, future fondatrice des religieuses de Marie-Auxiliatrice, naquit du mariage de M. de Soubiran avec Noémie de Gelis de Lisle d’Alby, le 16 mai 1834 ; le 17, elle fut baptisée. À l’âge de trois ans elle est guérie de la fièvre typhoïde, grâce à l’intercession de Marie, pour laquelle elle conserva une sincère reconnaissance. Elle fit sa première communion le 29 juin 184.5, et éprouva, dès cette époque, un pressant attrait pour la vie religieuse. Plus tard, elle se dévoua à la congrégation des enfants de Marie de Castelnaudary, dont son oncle était le directeur. Elle se crut la vocation d’entrer au Carmel, mais ses directeurs l’en éloignèrent. Son oncle, le chanoine de Soubiran, la poussa à l’établissement d’un béguinage au Bon-Secours de Castelnaudary. Elle prit en religion le nom de sœur Marie-Thérèse. Mais ses compagnes et elle désiraient une vie religieuse plus sérieuse, et elles furent conduites ainsi à fonder un Institut différent du béguinage, où on suivrait la règle de saint Ignace et on jouirait de l’adoration du saint Sacrement. C’était en 1854, on appela l’Institut : Marie-Auxiliatrice. Une maison de cette congrégation fut établie à Castelnaudary, une autre à Toulouse : les principaux caractères de la communauté sont, comme il a été dit : l’adoration nocturne du saint Sacrement et les œuvres de zèle faites en esprit d’expiation. Parmi ces œuvres, les maisons de famille pour les jeunes filles ouvrières tiennent la première place. Mère Marie-Thérèse obtint de Rome un bref laudatif, le 19 décembre 1868. De retour de la capitale du monde chrétien, elle lit une fondation à Amiens, puis se rendit à Lyon, où elle loua, en juin 1869, une maison, rue François-Dauphin, et l’organisa en vue de sa nouvelle destination.

Chapelle de Marie-Auxiliatrice.

Les sœurs que l’on avait fait venir dans celle nouvelle fondation eurent, au début, à souffrir de nombreuses privations dues à l’imprévoyance d’une religieuse à qui sœur Marie-Thérèse avait laissé imprudemment les rênes du gouvernement général de l’Institut. Mais quelque temps après, tout s’améliora. Les religieuses de Lyon, devant l’affluence des ouvrières lyonnaises dans leur modeste maison, s’empressèrent de louer une autre maison sur le coteau de Fourvière, où leurs jeunes filles purent jouir du bienfait de la campagne. En 1870, privées, par l’hostilité populaire, de s’occuper des jeunes filles, les religieuses les mirent dans des maisons sûres, puis partirent pour Londres où la mère Marie-Thérèse et son assistante avaient préparé une maison.

Les sœurs d’Amiens et de Toulouse vinrent rejoindre celles de Lyon. Elles se trouvèrent ainsi réunies au nombre de cinquante, et obligées d’habiter dans une petite maison à peine suffisante pour quelques personnes. La paix revenue, en juillet 1871, la fondatrice, son assistante et plusieurs religieuses reprirent le chemin de la Finance et revinrent à Lyon et à Amiens, puis s’établirent à Bourges. Mais l’imprévoyance de la mère assistante gâta tout, et l’institut fut sur la pente de sa ruine : les fondations, en effet, étaient trop nombreuses, les ressources insuffisantes. La mère Marie-Thérèse s’humilia, et s’attribua le tort, quoiqu’elle ne fut pour rien dans le désastre. Elle démissionna, le 13 février 1874, et fut même renvoyée de l’institut. Elle rentra alors à Notre-Dame-de-Charité à Toulouse, où elle prit le nom de mère du Sacré-Cœur, et mourut le 7 juin 1889. La mère assistante, devenue supérieure générale de Marie-Auxiliatrice, ne tarda pas à être jugée par les sœurs à sa juste valeur ; les obstacles s’accumulant, elle démissionna le 13 février 1890. Son successeur fut mère Marie-Élisabeth, la fille de prédilection de la fondatrice qui fut nommée supérieure générale le 29 août 1890.

Ce fut en 1869 que les religieuses vinrent s’établir à Lyon. En 1889 elles transportèrent leur maison de famille place Saint-Clair, où elles possédaient déjà un externat d’enfants : la maison s’élevait en terrasses, et ses divers étages bien aménagés, s’ouvraient à un nombre de plus en plus considérable d’employées de commerce ou d’administration, d’institutrices, d’ouvrières, obligées de travailler en dehors des sécurités et des consolations de la famille. Celles-ci sont reçues à des conditions très modérées et on cherche non seulement à les protéger au-dehors contre les dangers auxquels elles sont exposées, mais on s’efforce encore de leur donner, autant que possible, la vie de famille dont elles sont privées. Les jeunes personnes sont reçues à la seule condition morale de vivre sous la dépendance des religieuses, de mener une vie régulière, soit au dedans, soit au dehors de la maison, et de s’employer à un travail sérieux dans leur propre intérêt.

Bientôt la maison de Saint-Clair ne suffit plus. Les religieuses de Marie-Auxiliatrice eurent recours, pour construire, à la générosité privée qui, dans notre ville, ne fait jamais défaut aux œuvres chrétiennes et sociales. Un demi-million fut couvert pour fonder une société financière par actions, qu’on nomma : « La Protectrice ». Dès 1895, un nouvel établissement s’ouvrait en hâte rue Bossuet, 11, avant même que les pavillons en fussent achevés. Il abrite maintenant plus de 260 jeunes filles de toute condition. On y voit des institutrices, des gouvernantes, des étudiantes, des employées de commerce, de banque pu d’administration, des couturières et des brodeuses. Les plus fortunées prennent une pension qui leur donne droit à une chambre, les moins favorisées se logent au dortoir commun. Mais la plus parfaite égalité règne entre les unes et les autres : elles se conseillent, se soutiennent, en s’instruisant mutuellement dans les difficultés de la vie. Des cours professionnels sont faits par des religieuses très versées en leçons de choses, et des conférences préparent aux divers emplois. Parfois, dans la morte saison, on improvise des ateliers d’ouvrages à façon accessibles à toutes les bonnes volontés.

Le régime n’est pas plus celui de l’orphelinat que celui du couvent. Les religieuses, véritables mères, ne poussent à la vie religieuse que les vocations éprouvées, et acheminent surtout leurs protégées à leur devoir normal, au mariage. L’esprit d’ordre et de propreté minutieuse, de stricte économie qui caractérise la maison, lui fait une excellente enseigne, à laquelle se sont fiés d’honnêtes jeunes gens et aboutissant à des unions loyales célébrées parfois dans la modeste chapelle. Presqu’en même temps que leur maison de famille, les Auxiliatrices fondèrent une société de secours mutuels autorisée par arrêté préfectoral du 10 février 1877. Une caisse spéciale d’épargne fort bien entendue, comprenant des primes d’encouragement, des primes exceptionnelles et des pensions de retraite, fonctionne dans cette association. La chapelle de la rue Bossuet, dédiée à Marie-Auxiliatrice, fut commencée en 1895, sur les plans de M. A. Chomel, architecte, et bénite par le cardinal Coullié, le 2 mai 1897. Elle se développe sur une longueur de 27 mètres et une largeur de 8m50. Elle n’est pas indépendante de la maison et ne présente pas, par conséquent, de caractère extérieur d’ensemble. Ce défaut est toutefois racheté par une disposition très ingénieuse de l’intérieur. Elle est de style roman avec arc surbaissé, et suffisamment vaste pour contenir les nombreuses jeunes filles, pensionnaires de la maison. L’autel fort large est décoré, sur le devant, de colonnettes de bois doré et sculpté qui, en se pressant, forment des arcs, des entrecolonnements, des galeries avec perspectives du plus gracieux effet. Au-dessus de l’autel, le tabernacle mérite attention : il s’élève fort haut en s’évasant et se termine par des clochetons de bois sculpté avec petites niches. Tout autour du tabernacle on a peint des symboles et des personnages qui rappellent, à la fois, et les douze tribus de l’Ancien Testament et les douze apôtres de la nouvelle loi. C’est un des plus élégants tabernacles des églises lyonnaises.

Le chœur est fermé par deux demi-frontons, supportés par deux colonnes de granit. Ces frontons abritent des statues de la sainte Vierge et de saint Joseph. La chapelle est meublée de bancs qui ne manquent pas de style et le long des murs on a placé un chemin de croix polychrome.