Histoire des églises et chapelles de Lyon/Cénacle

H. Lardanchet (vol. IIp. 177-179).

NOTRE-DAME DE LA RETRAITE AU CÉNACLE

La congrégation dite Notre-Dame au Cénacle prit naissance dans ces montagnes du Vivarais que saint François Régis avait évangélisées au xvie siècle, et où, par ses prédications incessantes et ses héroïques pénitences, il avait converti nombre de protestants et de pécheurs. L’institut fut fondé par le père Jean-Pierre-Étienne Terme, mort en 1834 à l’âge de 43 ans. Ce prêtre, qui remplissait dans le diocèse de Viviers les fonctions de missionnaire diocésain fut secondé, dans cet établissement, par une de ses premières recrues Marie-Victoire Couderc, plus tard en religion sœur Thérèse. Le but était de procurer une retraite aux personnes qui venaient passer quelques jours près du tombeau de saint François Régis pour s’y sanctifier ; on pourrait aussi établir des maisons d’enseignement ; la maison-mère et le noviciat de La Louvesc devaient rester le noyau de la congrégation. La fondation connut, dès son début, le dénuement de Bethléem, et, en 1830, quatre ans avant la mort du fondateur, un Jésuite le P. Deslages, donnant la retraite annuelle aux religieuses, jugea la pauvreté trop absolue. Les sœurs n’avaient point de cellules et leur lit ne se composait que de deux tréteaux avec une paillasse de maïs ; on mangeait du pain de seigle, et la nourriture, des plus communes, était servie dans une faïence brune très grossière.

Chapelle des religieuses de la Retraite.

En 1838, la supérieure générale sœur Thérèse Couderc dut céder sa charge à une autre religieuse, et vécut dès lors dans l’effacement le plus complet jusqu’au seuil de l’extrême vieillesse ; retirée à trente-trois ans, elle mourut octogénaire en 1885, et ne vit que bien tardivement la société tout entière, que des mains imprudentes avaient trop longtemps dirigée, se retourner vers elle dans un mouvement de vénération unanime. Sa démission inaugura pour le Cénacle une période pleine de souffrances et de périls ; elle prit fin avec l’épiscopat de Mgr Guibert, futur archevêque de Paris, qui la sauva du schisme, de la mort peut-être, en la ramenant d’autorité à son organisation antérieure et légitime. L’ère des difficultés intérieures close, le Cénacle pacifié s’étendit, après que ses constitutions eurent reçu de l’église une première approbation canonique. Le 10 mars 1857, Mgr Guibert transférait à l’archevêque de Paris son titre et ses droits de supérieur du Cénacle ; dès lors l’institut transporta sa maison-mère et son noviciat dans la rue du Regard à Paris. À dater de cette époque on peut appliquer à la communauté ce mot prononcé à propos d’une supérieure générale : elle fut extraordinaire à force d’être ordinaire. A partir de 1877 le mouvement de propagation s’accéléra et s’étendit en Italie, en Angleterre, en Belgique, en Suisse et jusqu’en Amérique, où quelqu’un disait à l’une des religieuses nouvellement débarquées de France : « Nous autres, Américains, nous connaissons une neuvième béatitude, qui est de rendre service. » On fit mieux que le dire, on le prouva.

Disons un mot des règles de l’institut qui fut approuvé solennellement par le Saint-Siège le 17 mars 1891. Rattachées à la règle primitive de saint Augustin, les constitutions du Cénacle tiennent de près à celles de la Compagnie de Jésus ; elles ont une double lin commune : recherche de la perfection, exercice du dévouement apostolique, union à Dieu et service du prochain. Malgré le transfert de la maison mère à Paris, La Louvesc demeura le berceau de l’œuvre et le centre qui rayonnait au loin ; il est toujours le Cénacle embaumé par les vertus qui s’épanouirent à l’origine.

À côté de La Louvesc et des autres fondations de l’institut à travers le monde, Lyon figure au premier plan. L’année 1841 vit les laborieux préliminaires de cette fondation. La montée Saint-Barthélémy où le Cénacle lyonnais s’établit, ne fut d’abord qu’un poste avancé. La vie des religieuses y était une sorte d’exil ou de captivité : peu ou point d’œuvres possibles ; point d’aumônier ; il fallait aller chercher au dehors l’absolution et la sainte messe ; la journée se passait à travailler pour gagner le pain quotidien et le loyer de la maison qui était à la charge des religieuses. La Providence fit bientôt cesser cette épreuve. Une vaste maison toute voisine de la chapelle de Fourvière fut acquise grâce à mère Thérèse qui sut déjouer les menées dont l’objet était d’écarter le Cénacle de cette précieuse acquisition. De nos jours la persécution a momentanément dispersé les religieuses ; mais aucune loi humaine ne saurait prévaloir contre l’esprit de cet institut que le fondateur voulut humble et caché au point de dire à ces filles ces paroles mémorables : « Soyez si petites que tout le monde puisse marcher sur vous. »

La chapelle de la Retraite au Cénacle, est l’œuvre de M. Franchet, architecte, sous la direction de M. Bossan ; elle est aujourd’hui fermée au public. Le saint sacrifice n’y est plus célébré et les voûtes ne retentissent plus des offices et des chants liturgiques ; mais l’oratoire a conservé son cachet architectural et ses ornements.

Il est de style roman et se compose d’une abside, d’un chœur et de cinq travées. Le maître-autel est de pierre blanche, la table d’autel est supportée par trois piliers de marbre d’un gracieux effet. Au-dessous, un bas-relief représente la scène de la mort de saint Joseph, groupe d’une belle expression. Au-dessus de l’autel le retable est décoré de fleurons sculptés, et le tabernacle de pierre est incrusté d’ornements en cuivre doré. Une niche pour le Saint-Sacrement surmonte le tout. Dans le chœur, à droite et à gauche, on a placé les statues de saint Joseph et de saint François Régis. La chapelle est éclairée par cinq vitraux décorés de grisailles. Au bas de la nef, nef unique, se trouve une grande statue du Sacré-Cœur ainsi qu’une peinture sur toile, représentant le même sujet. Dans le fond de la nef s’ouvre une tribune : une seconde tribune se trouve près de l’autel majeur. Vis-à-vis du chœur, mais perpendiculairement à celui-ci est placé le chœur des religieuses, séparé de la nef par une grille de bois ouvragé. Cette partie réservée aux sœurs est éclairée par six petites fenêtres. Au dehors, la chapelle ne présente pas de caractère particulier.